4. Les régimes préférentiels se sont développés

a) Les mesures fiscales françaises d'attraction des investissements étrangers

(1) le régime des quartiers généraux : un mode de détermination des bénéfices adapté à la spécificité des quartiers généraux

Un quartier général est un établissement stable ou une filiale d'un groupe étranger qui exerce au seul profit du groupe dont il fait partie des fonctions de direction, de gestion, de coordination ou de contrôle, en principe dans un secteur géographique déterminé.

Il résulte de cette définition que :

a) l'activité du quartier général consiste en des prestations de service qui correspondent à des fonctions de nature "administrative" (ex. fonctions de gestion, de coordination, de contrôle ou de recherche), et non susceptibles de donner lieu à une commercialisation à des tiers ;

b) le quartier général agit exclusivement pour le compte de l'ensemble des entreprises du groupe ;

c) les fonctions exercées par le quartier général se situent en amont de l'activité commerciale du groupe dont le quartier général fait partie (loin du produit) ; de ce fait, elles sont regroupées dans une structure individualisée (le quartier général), distincte du reste du groupe.

L'application des règles de droit commun aux quartiers généraux conduirait ces derniers à déterminer la valeur marchande de chaque service rendu et à la ventiler en fonction de l'intérêt que ce service présente pour chacune des entités bénéficiaires.

Afin de tenir compte de la nature des services rendus par un quartier général, un régime spécifique a été mis en place pour :

- simplifier le mode de détermination des résultats imposables ;

- garantir une sécurité juridique.

Ce régime consiste à déterminer les bénéfices du quartier général de façon forfaitaire, en fonction des deux éléments suivants :

- l'ensemble des charges d'exploitation courante ;

- une marge bénéficiaire admise par avance, pour l'ensemble des activités qui relèvent des fonctions "quartier général" calculée en appliquant un pourcentage donné au montant des charges visées ci-avant (régime de "cost plus").

La marge est déterminée par une cellule de spécialistes du ministère de l'économie et des finances.

La marge admise n'est pas intangible pour toute la durée d'existence du quartier général. Elle est susceptible d'être modifiée en fonction des changements intervenus dans les conditions d'exercice des activités. La base d'imposition ainsi déterminée reflète le bénéfice susceptible d'être réalisé dans des conditions de pleine concurrence.

Le taux d'imposition est le taux de droit commun de l'impôt sur les sociétés, soit actuellement 33,33 % (plus une majoration de 10 % de cet impôt).

En outre, les salariés expatriés des sociétés étrangères admises au régime des quartiers généraux bénéficient, pour une durée maximale de six ans, d'un traitement fiscal favorable de certains frais liés à leur expatriation.

La question de l'attractivité relative du régime fiscal français des quartiers généraux est posée.


En termes de niveau de fiscalité

Seule une analyse globale de l'évaluation comparative du poids de l'impôt dû d'un pays à l'autre, à bénéfice égal, permettrait de démontrer que le régime français apparaît compétitif.

La fiscalité des quartiers généraux implantés en France ne se comparerait favorablement avec celle qui leur est applicable dans les principaux Etats qui ont institué un régime particulier pour ce type d'entités que si par son champ d'application, le taux de l'impôt, le montant de la marge bénéficiaire forfaitaire qui est retenue et le traitement des expatriés, le poids de l'impôt dû en France était inférieur à celui dû chez nos concurrents.


En termes de sécurité juridique

Le régime français donne l'assurance aux quartiers généraux que le montant de leurs bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés ne sera pas remis en cause s'ils le déterminent en fonction de la marge bénéficiaire déterminée par l'administration fiscale.


Les mesures prises pour améliorer le régime des quartiers généraux

Le régime des quartiers généraux est désormais élargi :

- la compétence des quartiers généraux est étendue à l'ensemble des sociétés du groupe sur une base mondiale.

La compétence des quartiers généraux est, à l'heure actuelle, limitée à un secteur géographique déterminé (l'Europe occidentale par exemple).

Cette limitation n'étant plus adaptée à l'évolution du fonctionnement des groupes qui repose souvent, au niveau de la prise de décision, sur une organisation par directions sectorielles plutôt que géographiques, il sera désormais possible aux groupes de créer en France des quartiers généraux à vocation mondiale.

L'extension de la compétence géographique, qui correspond à un véritable besoin des grands groupes internationaux, ne doit bien entendu pas conduire à dénaturer la vocation du quartier général. En tant que démembrement du siège social du groupe, le quartier général ne devra pas disposer de pouvoirs complets quant à la gestion quotidienne des sociétés d'exploitation. Le quartier général devra continuer à intervenir tout au plus comme préparateur puis relais d'une décision prise à l'échelon décisionnel du groupe auquel l'actionnaire a dévolu des pouvoirs exclusifs quant à la décision.

- le régime des quartiers généraux est étendu aux groupes
français

Il convient en effet de prendre en compte la tendance marquée des groupes français à développer les créations de sociétés à l'étranger pour exercer des missions similaires à celles exercées en France par les quartiers généraux.

- le régime des quartiers généraux s'applique désormais aux centres de distribution

(2) le régime de l'entrepôt fiscal

Afin de favoriser les opérations internationales réalisées sur le territoire français, notamment dans ses zones portuaires, un régime d'entrepôt fiscal a été mis en place.

Outre l'entrepôt national d'importation, l'entrepôt national d'exportation et les régime du perfectionnement actif national, deux catégories nouvelles d'entrepôts fiscaux ont été créées. Il s'agit de l'entrepôt de matières premières cotées sur un marché à terme et de l'entrepôt abritant des productions internationales coordonnées.

Les transactions et prestations réalisées sur les biens placés sous ces entrepôts bénéficient d'un régime suspensif de TVA jusqu'à la sortie du bien de ces régimes.

Enfin, cette mesure a été l'occasion de la mise en place d'une représentation fiscale allégée pour les opérateurs étrangers qui choisissent la France comme lieu de dédouanement ou comme lieu de stockage dans les entrepôt fiscaux de marchandises destinées à quitter le territoire national.

(3) la procédure du "rescrit" fiscal

Le champ de la procédure du "rescrit" vient d'être élargi. L'obligation a été imposée à l'administration fiscale de répondre, dans un délai maximum de trois mois, à toute demande tendant au bénéfice d'un régime d'amortissement exceptionnel ou du régime des entreprises nouvelles. Sans réponse dans ce délai, l'accord de l'administration est réputé obtenu et devient opposable par l'entreprise lors de contrôles ultérieurs.

Par ailleurs, l'administration peut être consultée par un contribuable sur sa situation fiscale, et ce, dans un grand nombre de cas qui concernent la vie des entreprises. C'est le cas des procédures d'agrément, mais c'est aussi le cas de la procédure de répression des abus de droits qui ne s'applique pas lorsque le contribuable a, préalablement à la conclusion d'un contrat, consulté l'administration et recueilli son accord sur l'opération. Par ailleurs, l'administration fiscale publie régulièrement des instructions pour préciser la portée des textes fiscaux qui lui sont en effet opposables.

(4) la mise en place d'un régime spécifique aux centres de distribution

En complément au régime des quartiers généraux, un mécanisme similaire de détermination forfaitaire du bénéfice au profit des centres de distribution spécialisés dans des fonctions de logistique exercées au bénéfice exclusif des entités d'un groupe est institué.

(5) les stipulations favorables des conventions fiscales internationales

Dans les conventions fiscales internationales conclues par la France, un certain nombre de dispositifs favorisent le développement des investissements étrangers dans notre pays.

Il en va ainsi lorsque nous acceptons de transférer l'avoir-fiscal à des non résidents ou encore lorsque nous consentons à des taux de retenue à la source inférieurs à ceux recommandés par la convention-modèle de l'OCDE.

b) Des exemples étrangers peu acceptables

Certains pays sont allés plus loin que nous dans ce domaine. Ils ont développé des régimes fiscaux préférentiels qui peuvent favoriser des abus.

Quelques régimes fiscaux préférentiels


• Les sociétés holding

Les sociétés holding ont pour objet principal l'acquisition ou la détention d'actions d'autres sociétés.

Leur localisation ne suppose pas d'implantation locale lourde -ni investissement physique, ni main d'oeuvre substantielle.

Certains pays européens (Luxembourg, quelques cantons suisses) leur appliquent un régime spécial d'imposition alors que dans les autres, elles sont soumises au régime normal d'imposition des bénéfices des sociétés.

Il s'agit, sous certaines conditions, de leur accorder le bénéfice d'une exonération totale au partielle d'imposition sur les dividendes perçus par elles ou sur des plus-values en capital qu'elles réalisent en revendant les actions détenues.


Les quartiers généraux et les centres de coordination

Ils rendent, pour le compte d'un groupe auquel ils sont liés, des services variés (services administratifs, d'assistance, d'achats, de distribution...).

Tout comme les sociétés holding, ils sont par nature très mobiles. Certains pays européens -la Belgique, la Suisse- leur appliquent différents avantages fiscaux. Le risque majeur découlant d'un tel traitement préférentiel est que les sociétés qui recourent aux services du quartier général ou du centre de coordination paient un prix excessif les prestations fournies pour minorer leurs bénéfices dans les Etats d'imposition normale où elles sont implantées. Théoriquement, le contrôle des prix de transfert devrait permettre de combattre efficacement ces manoeuvres.

Mais l'utilisation de ces structures pour financer les opérations internationales d'une société peut être également attrayant lorsqu'elle permet d'échapper aux systèmes d'imputation nationaux.


Les centres financiers extra-territoriaux ou internationaux

Il s'agit de territoires accueillant des structures dont l'objet est de réaliser des opérations financières internationales importantes dont certains sont sans lien avec le pays d'accueil.

Initialement cantonnés dans les paradis fiscaux, ces territoires ont gagné les économies dynamiques d'Asie et les pays occidentaux développés.

Les avantages fiscaux qui sont offerts vont de l'exonération totale de certaines activités à l'application de taux réduits.

Leur essor traduit des phénomènes importants de concurrence fiscale entre Etats destinés à attirer les activités de services financiers.

Ils sont susceptibles de susciter des mouvements d'évasion lorsqu'ils se combinent avec des pratiques de secret bancaire ou de réticences à accepter les échanges de renseignements entre administrations fiscales.


Les sociétés et les fonds d'investissements de portefeuille

Destinés à la gestion collective de l'épargne, ils sont fréquemment transparents fiscalement, soit qu'ils soient exonérés d'impôt, soit qu'ils soient imposés aux taux zéro. Il est à noter que, dans le premier cas, les fonds ne sont en général pas couverts par les conventions fiscales internationales alors que, dans le second, ils bénéficient des régimes conventionnels et en particulier des stipulations relatives aux retenues à la source ou aux transferts des crédits d'impôt.

Comme pour les centres financiers extra-territoriaux, ces structures peuvent favoriser l'évasion fiscale lorsque les actionnaires non-résidents peuvent bénéficier d'un défaut de coopération fiscale de la part des autorités administratives de l'Etat de localisation de ces structures.

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