B. L'IMPORTANCE DECISIVE DU PARAMÉTRAGE FINANCIER

En créant un nouvel acteur du système ferroviaire, le présent projet de loi organise deux types de relations financières nouvelles :

- des transferts en capital entre la SNCF et RFN, qui ont lieu une fois pour toutes,

- des relations financières récurrentes nouvelles, entre l'Etat et la SNCF, désormais intermédiées par les régions ou par RFN.

Si dans son principe, ce nouveau système est de nature à sortir la SNCF de ses difficultés, il conviendra de veiller au bon niveau des différentes grandeurs financières pour qu'il en soit effectivement ainsi. De quelque point de vue que l'on se place, il apparaît que la viabilité du nouvel attelage nécessitera un apport de fonds nouveaux de la part de l'Etat. En effet, sans un tel apport, la charge pesant sur le diptyque SNCF-RFN sera celle qui pèse actuellement sur la seule SNCF : le couple risque de ne pas être viable.

S'agissant de la régionalisation des SRV, l'Etat a tenu compte de cette nécessité, puisque le Parlement vient de voter une augmentation de la contribution à leur fonctionnement de 800 millions de francs pour 1997. Il devra en être de même de l'aide de l'Etat à RFN.

A court terme, l'Etat ne devra donc pas ménager son effort. Mais, à moyen terme, la réussite de la réforme devrait permettre de voir cet effort se résorber progressivement, l'ensemble SNCF-RFN-Régions se révélant plus efficace et moins onéreux que le système actuel .

1. Les mouvements en capital et leurs conséquences

Le présent projet organise deux mouvements en capital symétriques :

- la propriété de l'infrastructure est transférée à RFN. Cette propriété est aujourd'hui du ressort de l'Etat, mais la SNCF en assume toutes les contraintes ,

- la SNCF se retrouve titulaire d'une créance sur RFN correspondant, grosso modo , au financement de l'infrastructure par emprunt, ou à la valeur des biens transférés à RFN.

MOUVEMENTS EN CAPITAL

Ces deux mouvements sont la clé de l'organisation du nouveau système.

La répartition des biens entre la SNCF et RFN se fera sur la base de l'annexe I du règlement CEE 2598/70 qui définit les infrastructures ferroviaires. Elle ne correspond pas à une logique pure de séparation des infrastructures et de l'exploitation, car certains éléments sont difficiles à disjoindre pour des raisons économiques. La SNCF conservera notamment les gares, qui sont les principaux points de vente du service de transport (voir le commentaire de l'article 4).

La valeur des biens transférés n'est pas fixée dans le présent projet. Son appréciation a été confiée par le Gouvernement au cabinet d'audit Coopers et Lybrand, sur la base d'une répartition prédéfinie des biens. Le cabinet évalue le transfert à 130,2 milliards de francs, l'impact pour la SNCF étant au total de 134,2 milliards de francs compte tenu de charges liées à ces biens qui ne seraient pas reprises par RFN.

La valeur des biens transférés


au 31.12.96
(Milliards de F.)
. Valeur nette comptable des installations fixes de RFN 148,7
. Subventions liées aux installations fixes de RFN -18,6
. total net (actif de RFN) 130,2
. Charges à répartir non reprises par RFN +4,0
. Impact total pour la SNCF 134,2

Il ressort des travaux de Coopers et Lybrand que le poste d'immobilisation de loin le plus important est constitué des voies ferrées : 134,4 milliards de francs. Les gares, maintenues à la SNCF, sont évaluées à 13,6 milliards de francs. Les autres postes ont une valeur modeste eu égard à ces ordres de grandeur.

Il ne faut pas exagérer l'importance de cette évaluation. Les biens ainsi estimés n'ont pas de valeur de marché pour leur quasi-totalité, et même si c'était le cas, RFN ne pourrait pas les céder. Cette estimation n'a de véritable portée que pour la rentabilité que RFN pourra en obtenir, rentabilité qui dépend du péage acquitté par la SNCF. Or, on verra que ce péage ne peut être calculé en appliquant un taux forfaitaire à la valeur de l'infrastructure en raison de la situation financière de la SNCF, dont le redressement reste l'objectif fondamental, au-delà du calcul comptable.

•  Cette estimation a également une utilité en ce qui concerne la dette envers la SNCF qui est inscrite au passif de RFN : c'est le second mouvement en capital prévu par le présent projet. Pour avoir un sens, le montant de cette dette doit être estimé par référence à une valeur économique. Si l'on considère la valeur des actifs transférés, elle doit être de 134,2 milliards de francs. Si l'on considère le montant des emprunts (et des déficits associés) ayant servi au financement de l'infrastructure, elle doit être de 125 milliards de francs au 31 décembre 1995, de 143,5 milliards de francs au 31 décembre 1996. Là encore, votre rapporteur considère que la valeur à retenir est celle qui, tout en ne déresponsabilisant pas la SNCF, entraîne pour elle un allégement de frais financiers suffisant pour lui permettre de retrouver l'équilibre à moyen terme. De ce point de vue, la rémunération que devra consentir RFN à la SNCF au titre de cette dette est un élément aussi fondamental que la valeur absolue de la dette elle-même. Il sera donc indispensable de préciser les conditions de cette dette.

Ainsi, selon le point de vue duquel on se place, la charge financière de la SNCF n'est pas allégée dans les mêmes proportions. Si l'on considère que RFN reprend le compte d'infrastructures, la SNCF économise les 11,5 milliards de francs correspondant au déficit de ce compte (en 1995) [20] . Mais tel n'est pas exactement le cas : si l'on considère la dette reprise par RFN au taux moyen actuel de l'endettement de la SNCF, l'économie est de 10,1 milliards de francs pour 134,2 milliards de francs (7,5 % de 134,2 milliards de francs) ou 9,4 milliards de francs pour 125 milliards de francs.

En tout état de cause, la situation financière de la SNCF restera fragile, puisque son déficit pour 1995 et 1996 excède sensiblement ces chiffres (-16,6 milliards de francs en 1995, au mieux - 12,5 milliards de francs en 1996).

Votre rapporteur en conclut également que la situation nette de départ de RFN n'a pas une importance considérable. Peu importe que celle-ci soit positive (dans le projet initial du Gouvernement, elle l'aurait été de 134,2-125 = 9,2 milliards de francs) s'il doit par la suite accumuler structurellement des déficits considérables. Il vaudrait mieux à cet égard que cette situation de départ soit moins favorable, mais qu'elle mette la SNCF en situation de lui payer progressivement des péages plus élevés, grâce à un trafic accru.

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