III. LA CRÉATION D'UN DOUBLE DEGRÉ DE JURIDICTION EN MATIÈRE CRIMINELLE

Selon le sondage réalisé pour le Haut Comité, 76 % des personnes interrogées sont plutôt voire tout à fait favorables à l'institution d'un double degré de juridiction en matière criminelle. Des arguments solides peuvent être invoqués à l'appui d'une telle position dont la traduction est cependant susceptible de prendre plusieurs formes.

A. LES ARGUMENTS EN FAVEUR DU DOUBLE DEGRÉ DE JURIDICTION EN MATIÈRE CRIMINELLE

1. Les engagements internationaux de la France : une obligation plus morale que juridique

Le droit international pose en principe l'exigence d'un double degré de juridiction en matière pénale. Tel est le cas :

- de l'article 2 du protocole n° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme :

" toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation. L'exercice de ce droit, y compris les motifs pour lesquels il peut être exercé, sont régis par la loi.

Ce droit peut faire l'objet d'exceptions pour les infractions mineures telles qu'elles sont définies par la loi ou lorsque l'intéressé a été jugé en première instance par la plus haute juridiction ou a été déclaré coupable et condamné à la suite d'un recours contre son acquittement ".

- de l'article 14-5 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, aux termes duquel " toute personne déclarée coupable d'une infraction a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité et la condamnation conformément à la loi ".

Certes, la France a émis une réserve d'interprétation sur ce principe en précisant que l'examen par une juridiction supérieure pouvait se limiter à un contrôle de l'application de la loi, tel que le recours en cassation.

Au demeurant, aucune décision de la Cour européenne des droits de l'Homme (pourtant saisie fréquemment d'affaires mettant en cause la procédure criminelle) n'a donné lieu à une condamnation de la France, ou d'un autre Etat ne prévoyant pas d'appel des jugements rendus en matière criminelle (Belgique, Allemagne...), sur ce fondement.

Il n'en demeure pas moins que l'esprit des engagements internationaux de la France exige d'aller au-delà de la simple faculté, pour la personne condamnée par une cour d'assises, de se pourvoir en cassation. A cet égard, l'institution d'un appel constitue une obligation morale sinon juridique, et ce d'autant plus que de nombreux Etats, y compris parmi ceux qui ont adopté le jury, offrent d'ores et déjà une " deuxième chance " à la personne condamnée pour crime. Tel est notamment le cas au Royaume-Uni, en Espagne, en Grèce, en Suède ou en Italie.

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