EXAMEN EN COMMISSION

Lors d'une réunion tenue le 19 novembre 1997, la commission des affaires culturelles a examiné le rapport pour avis de M. Jean-Pierre Camoin sur les crédits de l'enseignement supérieur inscrits au projet de budget pour 1998.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur pour avis.

M. Jacques Legendre a souhaité que le rapport de la commission consacre des développements aux conséquences de la baisse démographique pour l'enseignement supérieur et a souligné la nécessité de programmer les constructions universitaires en fonction des besoins et d'utiliser les bâtiments existants de manière satisfaisante.

M. Roger Quilliot a également estimé que l'évolution des effectifs étudiants devait être prise en compte pour évaluer les besoins en locaux universitaires et en emplois.

Il a dénoncé l'archaïsme des bibliothèques universitaires, où les étudiants n'ont pas, comme en Allemagne et aux Etats Unis, libre accès aux ouvrages, sous réserve d'un contrôle effectué à l'entrée et à la sortie des bibliothèques. A propos de l'inflation des effectifs dans les filières de sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), il s'est demandé s'il ne serait pas souhaitable d'établir un numerus clausus pour l'accès à ces filières, comme il en existe d'ailleurs dans les IUFM, et il a estimé que l'attrait des étudiants pour les filières STAPS pouvait être comparé à celui éprouvé pour la sociologie après 1968.

Se fondant sur son expérience personnelle, il a rappelé que les maîtres assistants n'avaient normalement pas vocation à se livrer à des activités de recherche et a estimé que le recrutement des professeurs agrégés dans l'enseignement supérieur ne risquait pas de conduire à une secondarisation de l'université. Il a, en revanche, déploré que certains professeurs d'université se déchargent de leurs cours sur les professeurs agrégés.

S'agissant de l'évaluation des enseignants chercheurs, il a souligné la nécessité de modifier les pratiques actuelles, de contrôler la ponctualité et la présence des enseignants, et a noté que l'évaluation ne devait pas être fondée sur la rumeur ni la renommée. A cet égard, il a estimé que le système américain de notation par les étudiants, qui " votent aussi avec leurs pieds ", pouvait présenter un intérêt.

Il a constaté que de trop nombreux locaux universitaires étaient sous utilisés et a souhaité que leur utilisation soit contrôlée par les directeurs des unités de formation et de recherche et même par les recteurs chanceliers. Il a par ailleurs dénoncé l'inflation incontrôlée des " thésards " dans de nombreuses disciplines, notamment en philosophie, qui est source d'aigreur et de déception pour les intéressés.

A propos des aides aux étudiants, il a rappelé que les aides au logement des étudiants représentaient quelque 7 milliards de francs et qu'un aménagement raisonnable du système pourrait consister à offrir aux étudiants et à leur famille, comme dans d'autres pays européens, un choix entre les aides directes et les avantages fiscaux, au lieu de cumuler les deux avantages, et à appliquer progressivement ce nouveau régime en commençant par les nouveaux étudiants, ce qui permettrait de réaliser des économies de l'ordre de 4 milliards de francs sur les dépenses d'hébergement des étudiants.

M. Franck Sérusclat a fait observer que le ministre actuel n'avait pas pu reprendre les réformes de son prédécesseur parce que celles ci n'avaient pas été chiffrées et n'étaient pas assorties des crédits nécessaires à leur mise en oeuvre, et que les moyens prévus par le projet de budget tenaient compte de l'évolution des effectifs étudiants. Il a par ailleurs contesté l'estimation faite par le rapporteur pour avis de l'importance des emplois précaires dans l'enseignement supérieur, et a estimé que la conclusion du rapport était inspirée par une position de principe.

Soulignant le rôle joué par les collectivités locales dans la réussite du plan " Université 2000 ", M. Philippe Richert a indiqué que l'effort qu'elles avaient consenti s'était aussi traduit par une détérioration de la situation fiscale de nombre d'entre elles. Il a estimé inacceptable que les collectivités territoriales soient à nouveau sollicitées pour financer le prochain plan "U3M " et a affirmé son refus d'entrer dans une logique destinée à pallier le désengagement de l'Etat. Rappelant que les contraintes qui pèsent sur le budget des collectivités locales sont au moins aussi importantes que celles qui pèsent sur le budget de l'Etat, il a refusé ce nouveau transfert de charges et indiqué qu'il se rangerait à la position proposée par le rapporteur pour avis.

M. André Maman a jugé dépassées les oppositions de principe à la sélection à l'entrée dans l'université, qui pourrait être un bon système si elle était bien faite et s'accompagnait d'une véritable politique d'orientation. Il a également estimé qu'il serait difficile d'en rester à la gratuité des études supérieures, soulignant que l'octroi de bourses pouvait permettre d'assurer l'égalité d'accès à un enseignement supérieur payant. Il a préconisé une participation des entreprises privées au financement des universités, qui devrait selon lui être sans influence sur le contenu des enseignements, en estimant anormal que les grandes entreprises profitent gratuitement des diplômés.

Il a également suggéré que les locaux universitaires soient utilisés tout le long de l'année civile en s'ouvrant notamment à des activités non universitaires. Il a enfin souhaité que le Sénat prenne l'initiative d'une réflexion générale permettant d'améliorer le fonctionnement de notre système universitaire.

Rejoignant les dernières observations de M. André Maman, M. Albert Vecten a estimé que le Sénat pouvait être l'artisan de cette réflexion et a dénoncé notamment les gaspillages résultant de la construction de nouveaux bâtiments universitaires alors que certains sont sous utilisés ou inoccupés.

Répondant à ces diverses interventions, M. Jean-Pierre Camoin, rapporteur pour avis , a notamment apporté les précisions suivantes :

- le rapport comportera des développements sur l'évolution prévisible des effectifs étudiants ;

- si la notation des enseignants par les étudiants peut être considérée comme une révolution culturelle, elle existe déjà dans des organismes comme l'Institut des hautes études de la défense nationale et il conviendrait de la développer ;

- la position exprimée par le ministre à l'égard des réformes engagées par son prédécesseur n'a pas été des plus mesurée ;

- les financements croisés nés des lois de décentralisation constituent des " pièges mortels " pour les collectivités locales et tendent à favoriser les régions riches et à " étrangler " les régions plus pauvres ; à la limite, on peut se demander si les chambres régionales des comptes n'auraient pas vocation à poursuivre des maires qui participent au financement des dépenses relevant de l'Etat ;

- la participation des collectivités locales au financement des universités décentralisées devrait, en toute logique, leur conférer des responsabilités dans la gestion de ces établissements ;

- les universités à vocation européenne devraient sans doute être sélectives et payantes pour leurs étudiants, en fonction des revenus de ces derniers.

A l'issue de ce débat, et suivant les propositions de son rapporteur pour avis, la commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur pour 1998 .

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