AVIS N° 87 Tome XIX - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - AVIATION CIVILE ET TRANSPORT AERIEN


M. Jean-François LE GRAND, Sénateur


Commission des Affaires économiques et du Plan - Avis n° 87 Tome XIX - 1997/1998

Table des matières






N° 87

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XIX

AVIATION CIVILE ET TRANSPORT AÉRIEN

Par M. Jean-François LE GRAND,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis Minetti, vice-présidents ; Georges Berchet, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Michel Barnier, Bernard Barraux, Michel Bécot, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut , Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Gérard Larcher, Edmond Lauret, Pierre Lefebvre, Jean-François Le Grand, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Jean-Baptiste Motroni, Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Bernard Piras, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, M. Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexe n° 23 ) (1997-1998).

Lois de finances.

Mesdames, Messieurs,

Le secteur de l'aviation civile et du transport aérien est en pleine effervescence. C'est ainsi qu'ont été annoncés ces derniers jours, par exemple, le prochain lancement par British Airways d'une nouvelle compagnie aérienne à prix réduits qui commencera son activité en Europe l'année prochaine, les difficultés que connaît le lancement de l'Airbus A340 allongé en raison de l'absence d'assurance de British Aerospace de recevoir des avances remboursables de la part de son Gouvernement, ainsi qu'une nouvelle dont il faut se féliciter : la nette progression du chiffre d'affaires du groupe Air France au premier semestre de son exercice 1997-1998 (+ 8,5 %).

Dans cette conjoncture en rapide évolution, se pose la question de savoir quelle place la France se donnera les moyens d'occuper dans un ciel européen désormais totalement ouvert à la concurrence.

Le problème de la répartition du trafic au sein du système aéroportuaire parisien et le dossier de l'éventuel troisième aéroport en région parisienne, à Beauvilliers, restent également en suspens.

Par ailleurs, la fusion de Boeing et de Mc Donnell Douglas ne risque-t-elle pas de menacer l'existence même d'Airbus ? Comment l'Europe pourra-t-elle contrer efficacement la stratégie d'exclusivité menée par l'avionneur américain ?

Telles sont quelques unes des questions que ce rapport pour avis a pour ambition de soulever.

C'est dans cette perspective, qu'après avoir brièvement présenté les principales évolutions des crédits budgétaires pour 1998, votre Commission des Affaires économiques s'attachera à examiner, branche par branche, la situation des principales activités concernées.

CHAPITRE IER -

LES DOTATIONS BUDGÉTAIRES

Depuis 1992, les crédits relatifs à l'aviation civile et au transport aérien sont regroupés dans deux documents budgétaires :

1. Le budget annexe de l'aviation civile (BAAC), qui recouvre le contrôle aérien, les infrastructures aéroportuaires et la gestion courante du secteur, notamment les charges de personnel de la navigation aérienne et la formation des pilotes.

2. Une section intitulée " Transports aériens " du fascicule Transport du budget du ministère de l'Equipement et des Transports, du Logement et du Tourisme. Contrairement à ce que cet intitulé " Transports aériens " pourrait laisser supposer, ce fascicule ne concerne pas les activités de transport aérien mais rassemble, pour l'essentiel, les crédits affectés à la construction aéronautique.

Votre commission pour avis entend, par ailleurs, présenter la situation du Fonds de péréquation des transports aériens, dont les crédits figurent dans un compte d'affectation spéciale, en raison de l'importance majeure que ce Fonds est appelé à jouer dans l'aménagement aérien du territoire.

I. LE BUDGET ANNEXE DE LA NAVIGATION AÉRIENNE

Rappelons qu'à l'initiative de la Commission des Finances du Sénat, le Gouvernement a remis au Parlement -en application de l'article 99 de la loi de finances pour 1996- un état récapitulatif présentant la répartition des coûts et des dépenses budgétaires , en distinguant ceux afférents aux prestations de services rendus aux usagers par la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) et ceux résultant des missions d'intérêt général public assumées par elle.

Votre commission pour avis se félicite des efforts entrepris par cette direction pour se conformer au souhait de transparence exprimé par le Parlement.

Il appartient à votre Commission des Finances d'analyser ce rapport qui, semble-t-il, confirme certaines des inquiétudes qu'elle a manifestées par le passé.

A. PRÉSENTATION D'ENSEMBLE

Le budget de l'aviation civile pour 1998 présente les caractéristiques de tout budget annexe, à savoir :

- en premier lieu, des ressources propres tirées, d'une part, du produit de taxes et de redevances affectées ainsi que d'une subvention du budget général et, d'autre part, du recours à l'emprunt ;

- en second lieu, une présentation comptable différente des budgets ordinaires, avec une section d'exploitation et une section d'investissement toutes deux équilibrées.

Tel qu'il figure dans la loi de finances pour 1998, ce projet de budget est organisé comme le précise le tableau ci-après :

PROJET DE BUDGET ANNEXE DE L'AVIATION CIVILE POUR 1998

(en millions de francs)

Recettes

Dépenses

Répartition

Montant 1997

Montant 1998

Evolution en %

Répartition

Montant 1997

Montant 1998

Evolution en %

Recettes propres

6.744,27

7.187,16

+6,56 %

Dépenses d'exploitation

5.912,83

6.231,75

+5,39 %

Subvention de l'Etat

215

215

-

Emprunt

984,28

1.042,52

+5,92 %

Dépenses en capital (CP)

2.083,73

2.231,71

+7,39 %

Autres recettes

52,81

24,86

-5,3 %

TOTAL

7.996,56

8.469,46

+5,91 %

TOTAL

7.996,56

8.469,46

+5,91 %

Au total, les fonds inscrits au budget annexe de l'aviation civile (BAAC) s'élèvent à 8,469 milliards de francs pour 1998, en hausse de 5,91 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997.

B. LES PRINCIPALES ORIENTATIONS

1. Une hausse contrastée et contestable des recettes

Connaissant une simple reconduction, à hauteur de 215 millions de francs, la subvention de l'Etat traduit un nouveau désengagement budgétaire de ce dernier.

Dans ces conditions, l'augmentation des recettes du budget annexe pèsera exclusivement sur les compagnies aériennes, par le biais des redevances et taxes qu'elles acquittent et qui représentent environ 90 % de ces recettes.

Il convient de détailler l'évolution de ces différentes recettes d'exploitations :

- la redevance de route -due par les compagnies empruntant l'espace aérien français sans atterrir en France-, devrait voir son produit augmenter de 2,3 % en francs courants par rapport à la loi de finances initiale pour 1997 et s'élever à 4,759 milliards de francs ;

- la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne (due par les compagnies dont les vols atterrissent en France, devrait quant à elle voit son produit augmenter de 3,4 %, à 1,121 milliard de francs. La hausse en francs courants est de 1,10 % (mais de 9,97 % dans les DOM-TOM).

Globalement, le produit de ces deux redevances devrait augmenter de 2,5 %, en raison d'une hausse prévisible du trafic.

Si cette hausse n'est pas sans incidence sur les comptes de nos compagnies, elle peut toutefois paraître modérée au regard de celle de la taxe de sécurité et de sûreté qui connaît une progression de 39,3 % , pour un produit estimé à 1,182 milliard de francs.

Cette évolution prend en compte deux éléments :

- d'une part, la mise en conformité avec le droit communautaire qui entraîne l'institution d'une distinction entre taux intra-communautaire et taux extra-communautaire (toutes choses égales par ailleurs, les tarifs intra-communautaire à 14 francs et extra-communautaire à 29 francs se substitueraient aux tarifs national à 14 francs et international à 21 francs) ;

- d'autre part, la majoration de 6 francs de ces nouveaux tarifs pour tenir compte des besoins de financement du budget annexe de l'aviation civile.

Sur ces nouvelles bases, à savoir 20 francs par passager embarqué à destination d'un Etat membre de l'Union européenne et 35 francs par passager embarqué vers d'autres destinations, le produit attendu de la taxe de sécurité et de sûreté pour 1998 s'élève à 1,18 milliard de francs.

Cette augmentation , qui ferait de la taxe de sécurité et de sûreté la deuxième ressource du BAAC (assurant 15,9 % des recettes, après la redevance de route) ne manquera pas de déséquilibrer les comptes des compagnies aériennes . En outre, comme le dénonce votre Commission des Finances , l'affectation de cette taxe au budget annexe pose de sérieux problèmes, dans la mesure notamment où son augmentation est destinée à équilibrer financièrement le budget annexe et finance donc bien plus que ce pour quoi elle avait été créée, à savoir la mise en place d'équipements servant à assurer la sûreté dans les aéroports .

2. Des dépenses suscitant plusieurs interrogations

Les dépenses d'investissement s'élèvent à 1.904,2 millions de francs, en hausse de 5,8 % par rapport à 1997. A 1.763,9 millions de francs, les autorisations de programme enregistrent une légère baisse de 0,76 %. Les crédits de paiement, quant à eux, augmentent sensiblement : +7,38 %, à 2.237,7 millions de francs. Leur évolution est contrastée.

Les crédits consacrés à la navigation aérienne connaissent une légère baisse de 0,38 % en autorisations de programme, avec une enveloppe de 1.300 millions de francs, et une augmentation de 2,62 % des crédits de paiement qui atteignent 1.370 millions de francs.

Ces crédits sont destinés à permettre le développement des systèmes informatiques de traitement du trafic, notamment :

- la poursuite des opérations de rénovation d'équipement et de modernisation des centres de contrôle et des bâtiments techniques sur tous les types d'aérodromes ;

- la mise en oeuvre du nouvel outil du contrôleur (ODS France) et des nouveaux simulateurs du trafic aérien ainsi que le maintien en service opérationnel de l'actuel système de contrôle du trafic aérien CAUTRA 4 ;

- les études relatives à l'amélioration des moyens techniques (télécommunications, surveillance, nouveaux moyens de contrôle et d'aides à la navigation aérienne).

On ne peut que s'étonner de l'absence d'étude préalable ayant présidé au lancement du programme ODS (anciennement Phidias).

En outre, votre commission pour avis réitère le souhait qu'elle avait formulé l'année dernière que le Gouvernement améliore la cohérence des programmes français et européen dans le domaine de la navigation aérienne.

Les crédits relatifs aux équipements et aux études et essais sur la sécurité, la réglementation et le contrôle technique sont maintenus à 3,18 millions de francs en autorisations de programme et subissent une légère baisse en crédits de paiement (2,7 millions de francs en 1998 et 3,18 millions de francs en 1997). Cette dotation est, notamment, destinée à la poursuite des études liées à la sécurité aérienne et à la lutte contre les nuisances sonores.

S'agissant de la formation aéronautique , les dotations sont divisées par deux en autorisations de programme (à 10 millions de francs) et sont reconduites en crédits de paiement (à 11 millions de francs). Comme en 1997, cette diminution résulte de la baisse d'activité et de la standardisation des types d'avions exploités.

Pour ce qui concerne les bases aériennes , leurs crédits d'équipement enregistrent une baisse de 1,18 % en autorisations de programme (à 388 millions de francs) et une forte augmentation de 18,77 % en crédits de paiement, si l'on tient compte des dotations affectées à la construction du nouveau siège de la DGAC. Si l'on exclut celles-ci, les évolutions sont respectivement de + 10,2 % et + 15,1 %.

Ces crédits sont destinés aux infrastructures aéroportuaires et aux normes de sécurité et concernent notamment, dans la perspective d'une mise en service avant l'an 2000 :

- la généralisation de la mise en sécurité de l'accès aux zones réservées sur les 34 plus grands aéroports commerciaux ;

- la modernisation du contrôle des bagages de soute pour les vols internationaux.

Les dépenses de fonctionnement s'établissent, quant à elles, à 6.231 millions de francs.

Il faut surtout souligner que 53,4 % de ces moyens sont consacrés aux charges de personnel qui enregistrent une forte progression de 6 % par rapport à 1997 (à 3.990,6 millions de francs). Si elle résulte partiellement de la création de 106 emplois, destinés à pallier les départs massifs à la retraite dans les prochaines années, cette hausse provient pour 3,8 % (sur 6 %) de la revalorisation des rémunérations individuelles.

II. LE FONDS DE PÉRÉQUATION DES TRANSPORTS AÉRIENS

Rappelons que le " troisième paquet " de libéralisation du transport aérien communautaire a mis fin au dispositif d'aménagement du territoire appliqué jusqu'au 1er janvier 1995 au transport intérieur français. Ce système était fondé, d'une part, sur l'exclusivité d'exploitation et la péréquation d'Air Inter et, d'autre part, sur l'exploitation par des transporteurs régionaux d'un certain nombre de liaisons complémentaires faisant l'objet de subventions accordées par les collectivités territoriales ou d'autres personnes publiques intéressées, dans le cadre de conventions conclues avec chaque transporteur aérien.

Le principe général étant désormais la concurrence sur toutes les liaisons aériennes internes à l'Union européenne, ce système ne pouvait perdurer et la convention d'exclusivité d'Air Inter a pris fin le 31 décembre 1995.

Afin de maintenir des dessertes aériennes économiquement non rentables mais utiles à l'aménagement équilibré du territoire, l'article 35 de la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire et l'article 46 de la loi de finances pour 1995 ont institué le Fonds de péréquation des transports aériens (FPTA).

Ce Fonds permet de subventionner certaines liaisons structurellement non économiquement rentables dans le respect des exigences fixées par le règlement (CEE) n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons intracommunautaires, qui reconnaît la notion d'obligations de service public.

A. L'ÉVOLUTION DE LA TAXE ET LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTION DU FPTA

1. L'évolution du montant de la taxe

Le Fonds de péréquation est alimenté par une taxe perçue depuis le 15 janvier 1995. Cette taxe est acquittée par les entreprises de transport public aérien pour tout passager embarquant dans les aéroports situés en France continentale, quelle que soit leur destination.

Après avoir été ramenée de 4 francs à 3 francs en 1996, la taxe qui alimente le FPTA a été ramenée à 1 franc par passager embarqué dans tout aéroport français (à l'exception de la Corse et des départements d'outre-mer) par le projet de loi de finances pour 1997. Elle est maintenue à ce niveau par le projet de loi de finances pour 1998.

2. Les perspectives d'évolution du FPTA

La taxe a été collectée pendant l'année 1995 , alors qu'aucune dépense n'était engagée. Le compte d'affectation spéciale du Fonds présentait au 31 décembre 1995 un solde positif de 120 millions de francs.

En 1996 , du fait de la mise en place de la procédure du Fonds ainsi que du temps de traitement incompressible des dossiers (notamment les délais de publication des obligations de service public et des avis d'appel d'offres au Journal officiel des Communautés européennes ainsi que les délais imposés avant la conclusion des appels d'offres), les premières conventions n'ont pu être signées avant le mois d'avril et seuls les premiers acomptes sur les compensations financières dues au titre du régime transitoire pour l'année 1995 ont pu être effectués.

Le montant total des paiements pour l'année 1996 a été de 65,5 millions de francs laissant un solde positif de 196,9 millions de francs qui a conduit à abaisser le taux de la taxe à 1 franc.

En 1997 , au vu des encaissements connus jusqu'au 15 septembre 1997, les recettes nouvelles de 1997 devraient s'élever à 64 millions de francs environ. Les dépenses pour l'année 1997 sont estimées à environ 134 millions de francs (78 millions de francs au titre du régime transitoire pour les années 1995 et 1996 et 56 millions de francs au titre du régime permanent). En 1998, le report de l'année 1997 devrait donc être d'environ 126,8 millions de francs.

D'après les renseignements fournis à votre rapporteur, les encaissements de l'année 1998 devraient être de l'ordre de 48,5 millions de francs, les ressources totales pour l'exercice 1998 s'élevant alors à 175,3 millions de francs. L'estimation des dépenses pour l'année étant de l'ordre de 77,5 millions de francs, le solde positif du compte en fin d'exercice 1998 devrait être de l'ordre de 97,8 millions de francs, dans l'hypothèse du maintien des bases réglementaires actuelles.

Au total, toutes choses étant égales par ailleurs, c'est-à-dire sur la base du maintien du taux de la taxe à un franc et des règles de fonctionnement du Fonds, ce dernier ne devrait pas connaître de difficultés de trésorerie dans les deux années à venir, le taux de la taxe devant probablement être réexaminé à partir de l'an 2000.


On peut aussi cependant s'interroger sur cette hypothèse d'un maintien des règles de fonctionnement du Fonds, notamment sur les critères d'éligibilité à ce Fonds.

B. LES CRITÈRES D'ÉLIGIBILITÉ DES LIAISONS AÉRIENNES AU FPTA

Au 15 septembre 1997, dix transporteurs exploitant 19 liaisons métropolitaines, auxquelles s'ajoute la liaison entre la Réunion, Mayotte et Nairobi, ont bénéficié des interventions du Fonds.

Il convient de rappeler que ce dispositif s'inscrit dans un cadre réglementaire communautaire qui encadre fortement les interventions financières publiques en matière d'exploitation de liaisons aériennes. Il apparaît, par conséquent, que les possibilités de création de nouvelles liaisons sont relativement faibles.

D'aucuns s'interrogent cependant sur une éventuelle modification des critères d'éligibilité. Il semble qu'il faille exclure tout assouplissement des critères au niveau communautaire. Tout laisse à penser, en effet, que nos partenaires européens n'y seraient pas favorables. En réalité, d'après les renseignements fournis à votre rapporteur, seuls l'Irlande, l'Espagne et le Portugal subventionneraient certaines lignes intérieures et la France serait seule à utiliser toutes les facilités du règlement communautaire en la matière.

En revanche, une fois le régime de croisière du dispositif pleinement atteint, votre commission pour avis serait favorable à ce qu'une réflexion soit menée sur les modalités et conditions d'application de ces critères par la France. Cette réflexion devrait permettre d'établir un bilan du dispositif, d'étudier si ce dernier satisfait aux besoins de notre pays et d'évaluer l'éventuelle existence de marges de manoeuvre dans le cadre des règles communautaires.

III. LES CRÉDITS INSCRITS AU BUDGET GÉNÉRAL SOUS L'INTITULÉ " TRANSPORTS AÉRIENS "

Les dotations " transports aériens " sont essentiellement des crédits d'avances remboursables destinés aux programmes aéronautiques. Elles enregistrent une légère progression de 0,4 % pour 1998, pour un montant de 1.664,5 millions de francs. Les évolutions sont cependant contrastées.

Les crédits de soutien à la recherche-amont souffrent d'une réduction du tiers par rapport à leur niveau de 1997, pour s'élever à 680 millions de francs en autorisations de programme et 450 millions de francs en crédits de paiement.

Votre commission pour avis demandera au ministre de justifier cette évolution très défavorable, au moment où la recherche s'avère vitale pour affronter une concurrence mondiale très vive.

De plus, préoccupée par les conditions d'application de l'accord du GATT du 17 juillet 1992 relatif aux soutiens à l'industrie aéronautique, elle rappelle qu'elle avait déjà, l'an dernier, insisté sur la nécessité d'accentuer les soutiens à la recherche-amont, afin de rapprocher notre système de soutien à l'industrie aéronautique de celui existant aux Etats-Unis.

Votre commission pour avis se félicite, en revanche, de la très sensible augmentation des crédits destinés aux avances remboursables :
+ 34,4 % , à 966,5 millions de francs.

Des dotations sont ainsi ouvertes pour les programmes ayant déjà fait l'objet d'une décision de soutien (GE90, hélicoptère EC165, Airbus A330-200, etc.), mais aussi pour les nouvelles versions de l'A340 dont Airbus a décidé la commercialisation lors du dernier salon du Bourget afin de concurrencer les nouveaux Boeing B777. En outre, une provision est prévue pour permettre le soutien de nouveaux moteurs projetés par Snecma. La poursuite du soutien accordé pour les équipements de bord, domaine qui connaît une évolution technologique importante et où les industriels français font preuve d'un grand dynamisme, est également prévue.

CHAPITRE II -

LE TRANSPORT AÉRIEN : LA NÉCESSITÉ DE S'ADAPTER À LA NOUVELLE DONNE MONDIALE ET EUROPÉENNE

Initié par les Etats-Unis en 1977, un processus de libéralisation du transport aérien international s'est développé de manière plus ou moins rapide selon les pays, tout au long de la dernière décennie.

Il s'est traduit au sein de l'Union européenne par la mise en oeuvre de trois " paquets " de mesures, dont le dernier est entré en vigueur depuis le 1er janvier 1993. La libéralisation en ce domaine y est donc désormais totale, les quelques restrictions subsistantes en matière de cabotage ayant été levées le 1er avril 1997.

La question qui se pose désormais est de savoir quelle place la France se donnera les moyens d'occuper dans un ciel désormais totalement ouvert.

I. LE CONTEXTE MONDIAL ET EUROPÉEN

La libéralisation du secteur du transport aérien se poursuit, avec les opportunités qu'elle ouvre aux compagnies, mais aussi la " guerre des prix " qui l'accompagne et les inquiétudes nées des difficultés, voire des faillites, subies par certaines compagnies ces dernières années.

A. UNE CONCURRENCE DÉSORMAIS MONDIALE DANS UN SECTEUR EN CROISSANCE

Le développement de la croissance qui caractérise le secteur du transport aérien est soutenu par la croissance du trafic, de l'ordre de 6 % en 1996 pour les passagers et de 5,5 % pour le fret.

Les premiers résultats de 1997 confirment ces évolutions. Selon l'OACI, pour l'ensemble des services aériens réguliers de transport de passagers, internationaux et intérieurs, le trafic total des compagnies aériennes devrait croître de 7 % en 1997 et de 6,6 % en 1998. Le taux moyen annuel de croissance serait de 5,5 % jusqu'en 2005. La croissance du trafic total de fret devrait être encore plus forte, avec un taux annuel de 7 % pendant la même période. Ce sont les liaisons internationales transpacifiques et celles entre l'Europe et la région Asie-Pacifique qui devraient connaître la plus forte croissance.

C'est dans ce contexte qu'est venue s'inscrire la libéralisation du ciel européen qui avait d'abord été limitée aux liaisons intercommunautaires. Désormais, depuis le 1er avril 1997, toute compagnie européenne a libre accès aux vols intérieurs de tous pays membre de l'espace économique européen (c'est-à-dire l'Union européenne, la Norvège, l'Islande). La concurrence s'y avère donc de plus en plus vive.

Dans cette conjoncture de croissance globale, pour la quatrième année consécutive, les compagnies régulières du monde ont enregistré globalement un bénéfice d'exploitation.

Après une année 1996 qui s'était soldée par des pertes globales pour l'Association des compagnies européennes, en 1997 et pour la première fois, les transporteurs européens pourraient participer à cette embellie. Ce redressement provient de la conjonction de trois facteurs :

- la " sortie du rouge " de plusieurs compagnies ayant longtemps enregistré des déficits, comme Air France, Iberia et Alitalia ;

- les bons résultats de Swissair Groupe et surtout de Lufthansa qui multiplie ses bénéfices par quatre ;

- les bénéfices toujours croissants de British Airways qui multiplie ses profits par trois.

B. LA MONDIALISATION S'ACCOMPAGNE D'UN MOUVEMENT ACCENTUÉ D'ALLIANCES ENTRE COMPAGNIES

La mondialisation de l'économie mondiale connaît une traduction très nette dans le secteur du transport aérien et s'accompagne d'une multiplication des alliances internationales.

Depuis trois ans, le mouvement de regroupement de compagnies aériennes s'est développé de façon importante. Tous types confondus, 363 alliances étaient recensées en mai 1997 contre 280 en 1994, soit une augmentation de 30 % 1( * ) , dont 72 entre mai 1996 et mai 1997. Ce sont aujourd'hui 177 compagnies qui, dans le monde, sont engagées dans ces accords.

Depuis 1994, les rapprochements de compagnies se développent notamment au travers d'alliances commerciales. Si l'élément capitalistique n'est pas toujours majeur, il est souvent présent -notamment entre compagnies européennes- et le sera probablement encore davantage à l'avenir. C'est ainsi, par exemple, qu' au cours des derniers mois, de grandes compagnies ont acquis ou consolidé leur contrôle dans le capital de compagnies susceptibles d'apporter un trafic complémentaire. C'est le cas de British Airways , qui a pris le contrôle de 67 % du capital d'Air Liberté en automne dernier et qui vient de d'assurer une participation de 65 % dans Deutsche BA en juillet 1997, contre 49 % précédemment ; c'est aussi le cas de KLM qui vient de porter sa part de capital à 100 % (contre 45 %) dans Air UK ; c'est encore le cas de Lufthansa qui, par le biais d'obligations convertibles, devrait acquérir à terme une participation de 15 % au capital d'Air Littoral.

Au niveau mondial, les grandes compagnies s'engagent dans des alliances globales, dites " stratégiques ", en révisant au besoin les alliances antérieures. La révision la plus spectaculaire est sans doute la rupture entre US Airways et British Airways et l'annonce de la nouvelle alliance entre la compagnie britannique et American Airlines. D'autres révisions s'opèrent : Virgin rompt avec Delta et s'allie avec Continental ; Varig s'engage avec United et abandonne Delta.

On peut finalement considérer que les grandes compagnies réajustent actuellement leurs alliances, abandonnant celles qui leur apparaissent infructueuses pour en conclure de nouvelles, plus prometteuses. Dans le même temps, certaines alliances déjà réalisées s'élargissent à de nouvelles compagnies pour constituer un partenariat commercial fonctionnant à l'échelle planétaire, c'est le cas de la " Star Alliance " qui comprend Lufthansa, United, SAS, Air Canada, Thaï et Varig.

L'illustration suivante permet d'appréhender l'évolution possible des cinq alliances majeures.

Camenbert à coller

Evolution possible des alliances majeures

L'objectif recherché par les grandes compagnies aériennes avec des accords commerciaux est à la fois d'étendre l'offre proposée à leur clientèle (nouvelles destinations, fréquences plus nombreuses) en accédant aux réseaux de leurs partenaires 2( * ) et de réduire les coûts d'exploitation en réalisant des coopérations plus étroites.

Lorsqu'il s'agit d'alliances conclues avec une compagnie exploitant un marché " régional " de faible dimension, le but recherché par les compagnies principales est d'assurer l'alimentation de leur(s) plate(s)-forme(s) aéroportuaire(s) en passagers en correspondance, désireux de se rendre vers des destinations plus lointaines. De ce point de vue, le contrat de franchise, forme particulière d'alliance, s'est fortement développé ces dernières années en Grande-Bretagne sous l'impulsion de British Airways (lié à neuf petites compagnies).

C. LES ÉVOLUTIONS EN COURS ENTRAÎNENT SOUVENT EN EUROPE UNE MODIFICATION DE L'ACTIONNARIAT DES COMPAGNIES

Dans de nombreux secteurs, libéralisation et mondialisation entraînent une évolution des statuts, voire de l'actionnariat, afin d'acquérir la souplesse de gestion nécessaire dans un contexte de concurrence accru et, bien souvent, de satisfaire aux exigences en matière d'alliances internationales. Le secteur aérien ne contrarie en rien cette tendance.

C'est ainsi que sur les quatorze principales compagnies européennes, sept possèdent une majorité de capital public, détenu par l'Etat ou/et par une ou des entreprises publiques (notamment par des holdings d'investissements en Italie et en Espagne), mais deux d'entre elles ont associé du capital privé dans une proportion significative (Austrian et Finnair).

Trois de ces compagnies sont, par ailleurs, cotées en bourse : il s'agit d'Austrian Airlines et de Finnair.

Six compagnies ont une majorité d'investisseurs privés dont la totalité des actions peut être diffusée dans le public, c'est le cas de British Airways , ou bien répartie entre l'Etat minoritaire, des institutions privées et le marché boursier lorsque les compagnies sont cotées en bourse. C'est le cas de KLM, Lufthansa et Swissair.

SAS, compagnie multinationale, dont la propriété est répartie selon des bases nationales (3/7 des parts du capital aux nationaux suédois et 2/7 pour chacun des nationaux danois et norvégiens) possède un capital à 50 % public, la part publique étant détenue par les Etats selon les répartitions nationales précédentes. La compagnie est également cotée en bourse.

Le mouvement de privatisation commencé avec British Airways en 1987, s'est peu à peu étendu à KLM, Sabena et Lufthansa dont l'Etat allemand doit vendre fin 1997 le reliquat de ses actions (35,7 %). La situation d'ensemble reste, néanmoins, assez diverse et marquée généralement par une mixité de capitaux publics et privés , dans des proportions qui peuvent varier fortement.

Enfin, des compagnies tierces sont parfois présentes dans le capital des compagnies concernées pour une part importante (49,5 % pour Swissair dans le capital de Sabena et 40 % pour SAS dans celui de British Midland), ou de manière diluée (10 % de Swissair, 9 % d'All Nippon et 1,5 % d'Air France dans le capital d'Austrian ou encore 4,5 % de Delta et 2,7 % de Singapore Airlines dans celui de Swissair).

Il est important de garder présent à l'esprit l'ensemble de ces éléments avant d'évoquer la situation des compagnies françaises.

II. LES AILES FRANÇAISES

Dans ce contexte, les ailes françaises, notamment le groupe Air France, n'ont-elles pas pris un retard inquiétant dans un paysage européen en pleine effervescence ?

Le groupe Air France doit conforter et pérenniser son redressement. A cet effet, ne devrait-il pas combler son retard en terme d'alliances et, pour cela, bénéficier d'une évolution de son statut ? On ne saurait, par ailleurs, négliger le nécessaire développement des autres compagnies françaises. Enfin, accompagnant l'évolution du paysage aérien français, il apparaît nécessaire de réformer le Conseil supérieur de l'Aviation marchande.

A. LE GROUPE AIR FRANCE

1. Un objectif : conforter et pérenniser le redressement

Le groupe Air France connaît une certaine amélioration de sa situation, mais ses résultats doivent être confortés.

a) Des efforts récompensés...

Alors que l'on pouvait ces dernières années formuler des craintes pour l'existence même de la compagnie, celle-ci est " sortie du rouge ". Son trafic a progressé ; ses résultats se sont améliorés.

(1) L'augmentation du trafic

L'année 1996 a été marquée par une forte croissance du trafic total de passagers, portée par les liaisons internationales (+ 12 %). Le trafic domestique s'est maintenu grâce à la mise en place des " navettes " sur les liaisons Orly-Nice, Orly-Marseille et Orly-Toulouse, qui a également permis une amélioration de la recette unitaire. Il s'agit là d'un bon résultat si on le compare à celui de 1995 : l'ouverture à la concurrence et le développement des liaisons TGV avaient alors entraîné une chute du trafic domestique de 10 %. Le trafic total de fret n'a cependant enregistré qu'une progression de 2 %.

La mise en place d'un " hub " ou plate-forme de correspondance à l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle a fortement contribué à cet essor du trafic. A l'issue d'une période de fonctionnement d'une année (d'avril 1996 à mars 1997), le bilan est très satisfaisant. 165.000 vols ont été traités, ce qui représente une augmentation de 20,7 % par rapport à l'année précédente ; 17,1 millions de passagers ont utilisé les lignes d'Air France et d'Air France Europe de et vers le " hub ", soit une hausse de 20,4 %. Près d'un passager sur deux arrivant sur un vol du groupe Air France repart sur un autre vol du groupe.

En outre, la croissance de l'activité a eu des effets positifs sur l'emploi puisqu'elle a permis d'embaucher 410 agents en avril 1997.

(2) L'amélioration des résultats

Après avoir connu une situation financière qui s'est dégradée à partir de 1989 pour devenir catastrophique en 1992-1993, le redressement qu'Air France avait amorcé au cours de l'exercice précédent s'est confirmé. Pour la deuxième année consécutive, la compagnie affiche, en effet, un résultat d'exploitation bénéficiaire. Il s'établit à 579 millions de francs sur l'exercice clos le 31 mars 1997, en augmentation de 161 millions de francs par rapport à l'exercice précédent.

Le résultat net reste déficitaire de 147 millions de francs mais enregistre une évolution favorable par rapport aux exercices antérieurs. Rappelons que le déficit était de 8 milliards de francs en 1993, avant la mise en place du plan de redressement intitulé " projet pour l'entreprise ". Pour l'exercice 1995-1996, les pertes s'étaient élevées à 2,4 milliards de francs, mais ce résultat fortement négatif intégrait une provision pour restructuration de près de 2 milliards de francs.

Compte tenu de la fusion entre les deux compagnies, il convient d'ajouter le déficit d'Air France Europe qui se creuse inexorablement puisqu'il passe de 661 millions de francs sur l'exercice 1995-1996 à 800 millions de francs.

La recapitalisation d'Air France a permis de réduire considérablement son endettement. Celui-ci est passé de 21,7 milliards de francs à 16,9 milliards de francs le 31 mars 1997. Les charges financières ont, par conséquent, largement diminué pour s'établir à 1,1 milliard de francs pour l'exercice clos le 31 mars 1997, contre 3,5 milliards de francs en 1993.

Les perspectives sont donc encourageantes et le retour aux bénéfices est prévu pour mars 1998. Celui-ci s'avère cependant conditionné par une poursuite des efforts.

b) ...mais dont la poursuite s'avère nécessaire dans le cadre de la fusion

Le groupe Air France n'a pas encore rattrapé la compétitivité des autres grandes compagnies mondiales.

Sa recette unitaire reste trop faible et le coût unitaire (par siège offert et par kilomètre) reste supérieur de 2 % à celui de Lufthansa, de 14 % à celui de British Airways, de 21 % à celui de KLM et de 40 % à celui des " géantes " américaines.

Si le groupe ne poursuivait pas ses efforts, cet écart ne pourrait que s'agrandir, compromettant à nouveau son avenir. Aussi, un second plan de redressement a-t-il été mis en place, le " pacte de croissance compétitive ", qui doit permettre au groupe d'augmenter son chiffre d'affaires et sa marge en trois ans. L'objectif fixé pour l'exercice 1999-2000 est de dégager un bénéfice de 2 milliards de francs.

Afin de satisfaire à cet objectif, il est nécessaire à la fois de minimiser les coûts et d'accroître les recettes. Les objectifs chiffrés sont de :

- réduire le coût unitaire de 5 % par an, donc de 15 % d'ici le 31 mars 2000 ;

- dégager 15 % d'excédent brut d'exploitation à la même date.

Le groupe Air France devra donc se donner les moyens de son ambition dans le cadre de la fusion des deux compagnies Air France et Air Inter, devenue définitive depuis le 12 septembre 1997.

Cette fusion vient parachever, au niveau patrimonial, l'organisation commune mise en place depuis le 1er avril 1997 sous la forme d'un contrat de location-gérance. Celui-ci a prévu la mise en commun des moyens d'exploitation et a permis de faire travailler ensemble les personnels des deux compagnies.

Les personnels d'Air France Europe ont gardé, à titre individuel, leurs contrats de travail mais se sont vu appliquer, à titre collectif, le statut d'Air France. La location-gérance a permis des échanges de flotte pour mieux adapter la taille des appareils aux besoins du marché.

Ces échanges de flotte sont cependant inscrits dans un contexte de restriction de l'outil de production imposé par Bruxelles en contrepartie de l'autorisation de procéder à la recapitalisation et n'ont pas été sans effet négatif. Cette situation a imposé la suppression d'un certain nombre de lignes. En outre, de nombreuses annulations de vols ont caractérisé la fin du printemps et une partie de l'été derniers. Inutile de préciser qu'elles n'ont pas été sans coût pour le groupe et pour son image.

En réalité, la situation de sous-capacité peut s'avérer fragilisante. Le groupe Air France se trouve aujourd'hui confronté à la nécessité de répondre à l'appel du marché.

Après avoir " réduit la voilure " , il va lui falloir aborder un nouveau cap en développant une croissance externe . Il aborde donc une phase délicate de son histoire.

A cet égard, une forte stratégie d'alliances s'avère indispensable.

2. Un impératif : une stratégie d'alliances ambitieuse

Le groupe Air France doit aujourd'hui impérativement construire un réseau d'alliances qui lui permette de rester compétitive face à la constitution d'ensembles concurrents, dont on a vu qu'ils étaient puissants.

Un réseau de cette nature ne peut que reposer sur un triple pôle : européen, américain et asiatique.

La compagnie possède certes des acquis en la matière, mais force est de constater, pour s'en inquiéter, le retard pris par rapport à ses concurrents.

a) Des acquis certains

A l'heure actuelle, Air France dessert 200 points du globe et devrait en desservir 400 en 2002.

S'agissant du pôle européen , Air France a conclu des accords de partenariat avec Alitalia (qui mène cependant en parallèle des discussions avec KLM), Eurowings et Aeroflot (ceci devrait lui permettre de développer sa desserte de la Russie, mais aussi d'autres pays de la CEI). Elle a conclu, le 19 septembre dernier, un protocole d'accord avec Finnair.

En France, la compagnie a renforcé sa coopération avec les transporteurs régionaux. Un important accord de franchise avec Britt-Air entrera en vigueur dès l'hiver 1997-1998, de même qu'un accord plus limité avec Proteus.

Ce pôle européen apparaît cependant bien faible par comparaison aux alliances européennes concurrentes évoquées précédemment.

Le pôle américain s'avère tout aussi essentiel. Il ne peut, en effet, y avoir d'alliance " globale " qui ne soit appuyée sur des partenaires américains importants. Rappelons que Lufthansa a conclu une alliance avec United Airlines et que British Airways cherche à se rapprocher de la compagnie American Airlines.

Air France, pour sa part, a conclu un accord avec Delta Airlines et Continental Airlines à l'automne 1996. La première phase de ce partenariat a été mise en oeuvre au début du programme de l'été 1997 :

- coordination des programmes et des horaires des partenaires, accompagnée du transfert des escales de Continental et de Delta d'Orly vers Roissy-CDG2 depuis le mois d'avril 1997 ;

- compatibilité des programmes de fidélisation.

La mise ne oeuvre plus complète de cet accord reste soumise à l'évolution de la négociation bilatérale entre la France et les Etats-Unis, qui devrait reprendre d'ici la fin de l'année.

Par ailleurs, outre l'accord signé en 1993 avec Aeromexico, la compagnie nationale Air France recherche des partenaires sur le continent sud-américain pour compléter son réseau à l'échelle mondiale, renforcer ses dessertes européennes et attirer sur son " hub " des apports de trafic supplémentaires.

Le troisième volet du tryptique, le pôle asiatique, doit être d'autant plus impérativement développé que la croissance du trafic aérien est plus vive dans cette partie du monde.

Outre la coopération étendue qu'il entretient avec Japan Airlines, le groupe a conclu une alliance avec Air India et Indian Airlines et s'efforce de développer ses relations avec China Eastern, basée sur le " hub " de Shangaï qui sera à terme le plus important de la Chine continentale. Air France recherche aussi un partenariat permettant d'organiser des correspondances en Asie du Sud-Est, à Singapour ou à Bangkok et entretient des relations commerciales étroites avec Vietnam Airlines.

b) Un retard à combler

Les acquis sont donc réels. Le retard l'est tout autant, à l'aune des comparaisons internationales, alors que British Airways et Lufthansa concentrent plus du tiers du trafic mondial .

Il reste, en particulier, à étoffer ses alliances en Amérique du Sud (Brésil, Chili) et en Asie (Chine, Asie du Sud-Est).

Par ailleurs, Air France pourra-t-elle rester compétitive sans trouver un partenaire européen important ?

Or, on l'a vu, l'industrie mondiale du transport aérien est entrée dans une phase de restructuration intense. Les jeux sont déjà largement faits en ce domaine et les atouts des concurrents sont nombreux. Les cartes étant déjà largement distribuées, ne peut-on craindre une raréfaction des opportunités susceptibles d'être saisies par Air France ?

En vertu des engagements souscrits auprès de la Commission européenne dans le cadre de sa recapitalisation, Air France n'a pu procéder à de nouvelles prises de participation dans des transporteurs aériens, jusqu'au 31 décembre 1996.

Depuis cette date, plus rien ne s'y oppose, si ce n'est que les compagnies étrangères rechignent à s'allier à une entreprise sous contrôle public, dans un contexte de développement de la concurrence et de libéralisation du ciel européen et au moment où, on l'a vu, les compagnies sont de plus en plus à capitaux mixtes ou privés. L'exemple récent d'Ibéria en est l'illustration, qui a préféré s'allier à KLM plutôt qu'à Air France.


De même, Delta et American Airlines souhaiteront-elles développer leur partenariat avec une entité publique ?

La survie d'Air France passe par la constitution d'un troisième bloc européen et une stratégie dynamique d'alliances internationales qui exigeront rapidement des échanges capitalistiques.

3. Une condition : la privatisation

Dans cette perspective, votre commission pour avis ne peut que déplorer la décision prise par le Gouvernement de ne pas privatiser Air France.

Le principe du maintien entre les mains de l'Etat d'une majorité du capital d'une entreprise publique peut se justifier lorsqu'il s'agit d'une entreprise de service public.

Peut-on raisonnablement considérer que le groupe Air France entre dans cette catégorie, dans la mesure où il exerce une activité marchande et concurrentielle ?

En outre, ses obligations de service public, ponctuelles ou très limitées, sont d'ores et déjà assurées concurremment par des compagnies privées.

Il convient, par ailleurs, de rappeler que la direction d'Air France a contracté des engagements à l'égard des personnels qui ont accepté des réductions de salaires en contrepartie d'actions du groupe. De nouveaux efforts de productivité pourraient, dans le futur, prendre cette forme.

Or, si l'on cumule la part du capital qui pourrait être réservée aux personnels dans ce cadre (soit environ 25 %), celle qui pourrait être consacrée à des alliances internationales (soit environ 10, voire 15 %) et que l'on adopte le principe d'un Etat actionnaire majoritaire -option retenue par le Gouvernement- ceci signifie que le grand public ne pourra se voir proposer quasiment aucune action d'Air France ou au plus 5 % du capital (l'Etat devant alors garder 60 % du capital pour rester majoritaire en 1999, date à laquelle les bons de souscription d'actions et les obligations remboursables en actions émis en 1992 arriveront à échéance).

La liquidité du titre ne sera donc pas assurée.

Dans ces conditions, les personnels du groupe seront fondés à considérer qu'ils auront été payés en véritable " monnaie de singe ". Il en sera de même pour les détenteurs de bons de souscription d'actions et d'obligations remboursables en actions.

Enfin, même si le Traité de Rome comporte un principe de neutralité en matière de propriété -publique ou privée- du capital des entreprises, la France ne se trouverait-elle pas en porte-à-faux à l'égard des institutions communautaires si le redressement de la compagnie, partiellement lié à la recapitalisation de cette dernière, n'était pas suivi de sa privatisation ?

Le contribuable lui-même ne serait-il pas d'ailleurs également fondé à la demander ?

B. L'ESSOR DES COMPAGNIES PRIVÉES

Au premier semestre 1997, 17 transporteurs régionaux exploitaient 203 liaisons régulières dont 28 au départ de Paris et 175 liaisons au départ de la province. 53 de ces liaisons étaient des liaisons internationales. 59 villes sur le territoire national sont desservies en 1997.

En 1996, ces compagnies ont transporté environ 3,9 millions de passagers en transport régulier contre 3,3 millions en 1995 sur leur propre réseau. Cette exploitation est réalisée au moyen de 201 appareils (185 en 1995) et le renouvellement des flottes s'est poursuivi en 1996.

Les transporteurs régionaux emploient environ 4.375 salariés contre 4.100 en 1995 dont 41 % de personnel navigant. Notons que certaines compagnies ont procédé à des embauches importantes : + 60 % chez Flandre Air, + 24 % chez Regional Airlines, + 13 % chez Air Jet.

Le marché du transport aérien régional est, malgré un nombre important de compagnies, assez concentré . TAT EA, Air Littoral, la CCM, Britt Air et Regional Airlines ont en effet transporté, en 1996, 95,2 % du trafic de l'ensemble des compagnies régionales sur leur propre réseau avec des parts de marché de, respectivement, 44,2 %, 12,4 %, 18,8 %, 9,4 % et 10,4 %. Elles exploitent 79 % des liaisons régulières (dont 29 % pour Régional, 17 % pour TAT EA et 17 % pour Air Littoral).

La croissance du trafic est restée très soutenue en 1996, principalement due à l'ouverture par TAT EA de liaisons à fort trafic (Orly-Nantes, Orly-Toulon et Orly-Perpignan) et au développement des liaisons régionales via des plates-formes de correspondances.

Il est à noter que cette croissance est très disparate selon les sociétés sur leur propre réseau, allant de + 300 % pour Air Jet et + 143 % pour Héli-Inter, à -14% pour Air Atlantique et - 43 % pour Proteus Air Lines.

Encore relativement protégé dans les faits, le marché régional pourrait voir de grandes compagnies européennes se positionner dès l'hiver prochain sur les liaisons les plus importantes, en concurrence avec les transporteurs spécialisés sur ce créneau.

Ce mouvement a d'ailleurs été amorcé depuis avril 1997 avec Air France (sur Lyon-Barcelone et Lyon-Madrid, en concurrence avec Reginal Airlines) et Sabena (Nantes-Bruxelles en concurrence avec Regional Airlines qui a passé un accord commercial avec la compagnie belge ; Toulouse-Bruxelles en concurrence avec Britt Air).

Anticipant les effets attendus de la libéralisation du ciel européen, les compagnies régionales ont procédé à une réorganisation de leurs activités : au niveau commercial, notamment par le biais d'alliances commerciales souvent adossées à de grands transporteurs européens ; au plan financier (à cet égard, rappelons que Regional Airlines a été la première compagnie française à introduire une partie de son capital en bourse en octobre 1997 et que cette initiative pourrait être imitée par Britt Air ou Air Littoral) ; enfin, au niveau opérationnel, la rationalisation des réseaux des systèmes d'exploitation s'étant accélérée avec la création de nouveaux " hubs " (Air Littoral Riviera à Nice depuis novembre 1996 ; Proteus Airlines à Saint-Etienne depuis juin 1997) et la spécialisation plus poussée par type d'appareils.

S'agissant des autres transporteurs , depuis 1995 -date à laquelle le marché intérieur a été ouvert par étapes à la concurrence-, les principales compagnies françaises indépendantes du groupe Air France (AOM, Air Liberté- TAT EA), à l'exception de Corsair, se sont lancées dans une stratégie de prise rapide de parts de marché sur les principales liaisons entre Orly et la province, en concurrence avec Air France Europe.

En revanche, elles ont renoncé pour l'instant à se développer sur les liaisons internationales intra-communautaires au départ de Paris.

Par ailleurs, depuis la fin de 1996, une nette reprise de l'activité de transport à la demande, liée à la hausse globale du trafic de passagers à un rythme de l'ordre de 5 à 6 %, a été enregistrée.

Enfin, la guerre tarifaire -très vive- pratiquée en 1996 entre les principales compagnies françaises, jointe aux tensions financières dues aux dépenses supplémentaires d'ouverture de lignes et à des déficits d'exploitation généralement constatés lors des deux premières années d'exploitation, aura eu pour effet d'aggraver à nouveau leur situation financière. Cette dernière s'était déjà beaucoup détériorée à l'issue de la période de crise mondiale rencontrée entre 1991 et 1994, alors qu'une amélioration globale des résultats avait été constaté en 1995.

La mise en redressement judiciaire d'Air Liberté a marqué une pause dans la concurrence tarifaire et permis au marché de se stabiliser depuis le début de 1997. A cet égard, rappelons que le Tribunal de commerce de Créteil a retenu, par un jugement du 9 janvier, le plan de continuation déposé par la compagnie britannique British Airways et par le Groupe Rivaud.

C. LA NÉCESSAIRE CLARIFICATION DES RÔLES AU SEIN DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AVIATION MARCHANDE

En 1996, votre rapporteur pour avis avait proposé au ministre des transports une réforme du Conseil supérieur de l'aviation marchande (CSAM) qu'il a l'honneur de présider.

Il s'interroge sur l'actuelle répartition des rôles entre les membres du CSAM et estime qu'une clarification de ceux-ci serait de nature à rendre ce conseil pleinement opérant.

Ainsi, est-il normal que les membres de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) cumulent la double casquette d'organe de tutelle et, indirectement, d'opérateur ? Le Parlement et les entreprises ne devraient-ils pas être davantage représentés ?

L'organisation du ciel français gagnerait à ce qu'une réflexion sur ce point soit rapidement menée.

CHAPITRE III -

LES INFRASTRUCTURES AÉROPORTUAIRES

I. LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTION

A. LES AÉROPORTS PARISIENS

1. Une évolution positive du trafic

Après une année 1995 médiocre, affectée par des facteurs conjoncturels défavorables (concurrence ferroviaire, mouvements de grève dans le transport aérien, arrêt du trafic sur l'Algérie, série d'attentats à Paris, troubles sociaux en fin d'année, ...) et marquée par un trafic aux évolutions contrastée (- 0,5 % pour les passagers et + 5,7 % pour les mouvements d'avions), la place aéroportuaire de Paris a connu, en 1996, une activité intense avec une reprise significative de la croissance du trafic.

Les deux aéroports d'Orly et de Roissy-Charles de Gaulle ont accueilli 59,1 millions de passagers (+ 7,4 % par rapport à 1995, avec + 8,4 % pour les lignes nationales et + 7,3 % pour les lignes internationales). Avec ce " rattrapage ", la croissance annuelle moyenne est de 3,4 % pour les deux années passées.

Depuis 1994, le trafic de fret et poste croît modérément : + 1,7 % en 1996 et + 2 % en 1995.

2. Des perspectives financières cependant délicates...

En 1996, le chiffre d'affaires d'Aéroports de Paris (ADP) a progressé de 3,6 %, le résultat net s'est amélioré de 18,8 % et la capacité d'autofinancement : de 4,2 %.

Pour répondre aux perspectives à moyen terme d'accroissement du trafic, ADP va poursuivre une politique active d'investissements.

Or, pour financer ce programme d'investissements, ADP ne peut compter que sur sa propre capacité d'autofinancement et recourir à l'emprunt pour le complément 3( * ) . Dans les prochaines années, l'établissement ne pourra réaliser le programme qu'il a prévu et qu'il estime indispensable que si la capacité d'autofinancement peut être maintenue, l'endettement ne devant pas dépasser certains seuils.

Il devra donc réaliser de gros efforts de productivité, eu égard à l'impact financier que ne manquera pas d'entraîner la réglementation communautaire.

3. ... liées à l'impact de la réglementation communautaire

Plusieurs textes communautaires, déjà adoptés ou en préparation, vont modifier l'exercice des activités d'ADP et influer sur ses recettes.

Le premier est une directive concernant l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports de la Communauté, le deuxième concerne les redevances aéroportuaires, le troisième : les ventes hors taxes.

a) L'accès au marché de l'assistance en escale

La directive en ce domaine devait être transposée en droit français au plus tard le 25 octobre 1997. Votre commission pour avis interrogera le ministre sur les intentions du Gouvernement en la matière . Cette directive tend à garantir des services de qualité au meilleur coût, en abolissant les monopoles.

Son application se traduira pour ADP, sauf dérogation accordée pour des contraintes d'espace ou de capacité disponible, par :

- l'ouverture de l'auto-assistance, le 1er janvier 1998 ;

- la libéralisation de l'assistance aux tiers, le 1er janvier 1999.

L'un des partenaires autorisés pour l'assistance aux tiers côté piste devra, le 1er janvier 2001, être indépendant de l'entité gestionnaire de l'aéroport et des compagnies majeures opérant sur l'aéroport. Par ailleurs, pour répondre aux exigences de transparence, ADP devra assurer une séparation stricte des comptes entre son activité d'assistant et son activité d'autorité aéroportuaire.

Ce texte va profondément modifier la situation qui prévalait jusqu'à présent sur les aéroports parisiens, en permettant l'accès sur le marché de nouveaux opérateurs dès 1999. Il ne fera qu'amplifier les nécessaires mutations déjà engagées par ADP, lui-même opérateur d'assistance aux tiers, concernant les ajustements de tarifs et des prestations offertes. La baisse prévisible des prix entraînée par l'ouverture à la concurrence devrait se traduire par une perte de chiffre d'affaires de 250 à 300 millions de francs d'ici 2001.

b) Les redevances aéroportuaires

La proposition de directive du Conseil sur les redevances aéroportuaires vise à assurer que les aéroports n'abusent pas de leur position dominante, en instaurant l'adéquation entre le niveau de redevances et le coût global des services rendus. Elle prévoit, notamment, une harmonisation des tarifs de la redevance passagers pour les vols domestiques et les autres vols intra-communautaires.

Cette harmonisation des redevances aéroportuaires devra cependant être réalisée à recettes constantes pour les aéroports, qui sont engagés dans de lourds investissements.

c) Les ventes hors taxes

Pour ce qui concerne les ventes hors taxes, la décision du Conseil du 11 décembre 1991 a prorogé jusqu'au 30 juin 1999 le régime actuel. Mais cette échéance est extrêmement préoccupante pour ADP, qui finance son développement sur ses ressources propres ou par emprunts sur les marchés. La perte de recettes est évaluée à 200 millions de francs par an, ce qui correspond à la moitié du résultat net de 1996.

B. LES PRINCIPAUX AÉROPORTS DE PROVINCE

Les aéroports de province français ont enregistré en 1996 un trafic total d'environ 41,5 millions de passagers, soit une croissance de 7,8 % par rapport à 1995. Cette évolution est légèrement supérieure à celle des plates-formes parisiennes (+ 7,4 %). Les aéroports de province ont bénéficié, d'une part, pour les plus grands d'entre eux, de la concurrence entre compagnies aériennes sur les lignes les reliant à Paris et du développement de liaisons internationales, notamment intra-européennes, et, d'autre part, du développement de l'exploitation de lignes aériennes transversales entre les métropoles de province par des compagnies régionales. Cette évolution de l'offre de transport vers un maillage plus fin du territoire est une des causes de l'augmentation soutenue du trafic passagers en 1996.

L'activité fret de ces aéroports a, quant à elle, continué globalement à progresser, de + 9,8 % par rapport à 1995.

II. LA POLITIQUE AÉROPORTUAIRE

A cet égard, deux points -ayant fait l'objet de récentes décisions du Gouvernement- méritent un développement particulier :

- l'extension du système aéroportuaire parisien ;

- la remise en cause du troisième aéroport en région parisienne.

A. L'EXTENSION DE L'AÉROPORT CHARLES DE GAULLE

1. Une décision indispensable

Les enjeux, tant nationaux que locaux, rendent indispensable la construction de deux pistes supplémentaires à l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle.

Les perspectives de croissance du trafic aéroportuaire l'exigent.

En effet, on l'a vu, le trafic aérien mondial est en forte expansion. Le nombre de mouvements d'avions prévu devrait être en augmentation de 4 % par an à moyen terme.

Dans cette perspective, l'aéroport de Roissy, qui accueille 35 millions de passagers par an, a déjà atteint un niveau critique en 1997. Or, la demande de programmation des compagnies sur l'aéroport est aujourd'hui extrêmement forte. Elle atteint jusqu'à 130 mouvements par heure, alors que la capacité de mouvement maximale est de 84 mouvements par heure.

Par ailleurs, un refus de l'extension de Roissy aurait entraîné des conséquences négatives sur l'ensemble de la filière aérienne et aéronautique française.

Le groupe Air France , dont le redressement en cours est partiellement lié au " hub " constitué à Roissy, aurait été gravement affecté par un tel refus. Or, la construction des deux nouvelles pistes doit contribuer à la pleine efficacité de ce dernier.

Il va sans dire que, si l'abandon des nouvelles pistes avait été confirmé, son impact négatif sur le groupe Air France aurait entraîné également des conséquences dommageables sur la filière aéronautique française, Aérospatiale ayant besoin d'un marché intérieur pour se développer. Ceci aurait été d'autant plus grave que cette filière, qui est à la pointe de la technologie française, représente un secteur essentiel de notre économie.

Au-delà, il faut rappeler que la qualité de la desserte aérienne est un élément essentiel de la compétitivité des entreprises françaises, du développement des activités touristiques, ainsi que de l'implantation d'entreprises internationales.

Pour toutes ces raisons, votre commission se félicite de la confirmation de la décision qu'elle avait appelée de ses voeux, de créer deux nouvelles pistes à Roissy.

Compte tenu du report de la décision lié à la " remise à plat " du dossier, voulue par le Gouvernement, la mise en service de la piste 4 initialement prévue pour la fin de l'année 1998 devrait être repoussée au printemps 1999, la piste 3 devant, quant à elle, entrer en service à la fin de l'an 2000.

Cette décision fera l'objet d'importantes mesures d'accompagnement.

2. D'importantes mesures d'accompagnement

Rappelons qu'en octobre 1995, à la suite de la mission Douffiagues -dont votre rapporteur pour avis était membre-, le précédent Gouvernement avait décidé d'adopter des mesures d'accompagnement d'envergure avec la mise en oeuvre d'un programme de réduction du bruit, le développement progressif des aéroports de province, la réservation d'un site pour une troisième plate-forme aéroportuaire dans le grand bassin parisien, le lancement d'une concertation publique relative au développement de Paris-Charles-de-Gaulle. Cette mission de concertation, confiée au préfet Carrère, a permis de retenir deux dispositions complémentaires : la mise en oeuvre d'un " contrat de maîtrise des nuisances sonores " et la création d'une institution indépendante pour la mesure et le contrôle de ces nuisances.

Le Gouvernement actuel a annoncé, le 23 septembre dernier, un plan d'accompagnement très complet prenant en compte les conditions édictées par les enquêtes publiques préalables à la réalisation des deux pistes supplémentaires qui se sont déroulées du 3 juin au 18 juillet 1996. Ce plan prévoit un effort particulier en terme de maîtrise des nuisances sonores et un partage plus équitable des retombées économiques de l'activité aéroportuaire.

a) La maîtrise des nuisances sonores

Certaines des mesures en la matière correspondent aux orientations déjà retenues dans le cadre du contrat de maîtrise des nuisances sonores, élaboré à la suite de la mission Carrère ; d'autres sont plus novatrices.

Il est prévu notamment de mettre en place une " autorité indépendante " chargée de la mesure et du contrôle des nuisances sonores. Contrairement à l' " institution indépendante " créée en mars 1997 et placée auprès du ministre chargé de l'aviation civile, cette autorité sera dotée de la personnalité juridique.

Il est prévu de lui donner à la fois un rôle d'information et d'expertise. Outre la publication de statistiques régulières sur le bruit, une liste des compagnies classées selon le bruit émis, les dérogations demandées et les sanctions subies serait également portée à la connaissance des riverains. Constituée d'experts, tout comme l'institution actuelle, la future " autorité indépendante " serait assistée d'un " comité de suivi des engagements pris " comprenant des élus, des représentants des usagers et des professions concernées aux côtés de représentants de l'administration et des gestionnaires des aéroports.

Contrairement à une idée reçue, le doublement des pistes n'entraînera pas celui des nuisances sonores. En effet, la quantité globale de bruit imputable à l'aéroport de Roissy est plafonnée au niveau atteint en 1997, y compris en période nocturne. A cette fin, plusieurs mesures concrètes et dont la mise en oeuvre ne requiert pas de délai ont été annoncées :

- l'accélération du programme de retrait des avions les plus bruyants qui représentent 13 % du trafic mais génèrent 90 % des plaintes ; rappelons que les mouvements de ces avions sont interdits entre 23 heures 30 et 6 heures, depuis le 1er avril 1996 ;

- l'interdiction, à compter du 1er janvier 1998, des essais de moteurs entre 22 heures et 6 heures, assortie de l'absence absolue de dérogation entre 23 heures et 5 heures ;

- l'obligation, pour les avions de nouvelle génération les plus bruyants encore utilisés la nuit dont les moteurs sont munis de simples silencieux, de respecter des procédures particulières de décollage et d'emprunter des routes aériennes survolant les zones urbaines les moins denses ; cette obligation sera transformée en interdiction de vol sur l'aéroport de Roissy entre 23 heures et 6 heures, à partir du 1er décembre 2000 ;

- l'interdiction, entre 23 heures et 6 heures, des avions à réaction ou à hélices de plus de 9 tonnes sur l'aéroport du Bourget, exclusivement réservé à l'aviation d'affaires.

Ces restrictions de navigation aérienne sont complétées par un renforcement des sanctions en vertu du décret n° 97-534 du 27 mai 1997, en vue d'assurer la protection de l'environnement des aérodromes.

Outre ces mesures (création d'une autorité indépendante de mesure et de contrôle, réduction du bruit à la source, renforcement des sanctions), il est prévu de réviser la procédure d'aide aux riverains pour l'insonorisation de leur logement.

Le nombre de riverains susceptibles de demander des aides à l'insonorisation devrait, par conséquent, augmenter. Il résultera cependant de cette mesure une augmentation de près de 40 % en deux ans de la taxe d'atténuation des nuisances sonores acquittée par les compagnies aériennes.

b) La répartition des retombées économiques de l'activité aéroportuaire

Le développement de l'activité aéroportuaire est un enjeu économique local d'importance. Rappelons qu'à l'heure actuelle, environ 500 entreprises sont implantées sur le site de Roissy et y emploient quelque 45.000 personnes, auxquelles il convient d'ajouter 100.000 emplois indirects. On estime habituellement que chaque million de passagers supplémentaire induit la création de près de 1.000 emplois directs et autant d'emplois indirects.

Cependant, les retombées de l'activité en matière d'emploi sont inégales, certaines communes, dont les habitants sont victimes de fortes nuisances sonores, n'abritant qu'une faible partie des salariés de la zone aéroportuaire. Dans ce contexte, on peut se féliciter de la mise en place d'un observatoire sur le bassin d'emploi et la création d'un groupement d'intérêt public associant les élus, les entreprises, les organisations syndicales et les services publics de l'emploi.

Il est, par ailleurs, prévu de mieux répartir les ressources fiscales tirées de la croissance de l'activité aéroportuaire. En effet, les recettes de la taxe professionnelle et des taxes foncières ne bénéficient actuellement qu'à quelques communes alors que les nuisances générées par l'aéroport concernent trois départements.

Une mission de réflexion a été confiée à M. Jean-Philippe Lachenaud, sénateur du Val-d'Oise, pour élaborer des propositions en ce sens, la cas échéant, par le biais d'un Fonds interdépartemental de solidarité.

B. LA RÉPARTITION DU TRAFIC AU SEIN DU SYSTÈME AÉROPORTUAIRE PARISIEN

Votre commission pour avis a déjà, l'an passé, insisté sur le problème de la dévolution des plates-formes aéroportuaires parisiennes.

On ne peut ignorer le fait que chaque pays tende à développer une politique aéroportuaire favorable à sa compagnie nationale, qu'il s'agisse de la Grande-Bretagne, de l'Allemagne ou des Pays-Bas, par exemple.

La France serait bien inspirée d'en faire autant en réservant l'aéroport d'Orly aux lignes intérieures et intra-communautaires et en concentrant les vols long courrier à Roissy, tout en respectant bien entendu le principe de non-discrimination.

Une telle répartition répond à une logique géographique. En outre, on éviterait ainsi que les compagnies étrangères (britanniques et américaines notamment) ne puisse alimenter leur trafic international par le biais d'un " hub " constitué à Roissy.

Une des conditions du redressement d'Air France est qu'elle puisse continuer à s'appuyer sur son marché intérieur et à valorizer son propre " hub ". Il faut donc l'y aider. N'oublions pas que la guerre commerciale que se livrent aujourd'hui les compagnies est en réalité une " guerre des hubs ", l'efficacité de la politique menée par une compagnie en ce domaine étant le gage de son succès.

C. LA REMISE EN CAUSE DU TROISIÈME AÉROPORT EN RÉGION PARISIENNE

Rappelons qu'à la suite du rapport Douffiagues, le Conseil des ministres du 5 juin 1996 avait décidé de réserver le site de Beauvilliers, en Eure-et-Loir, pour accueillir le moment venu, une nouvelle plate-forme aéroportuaire en région parisienne.

Toutefois, Mme Dominique Voynet, ministre chargée de l'aménagement du territoire et de l'environnement, a déclaré le 23 septembre dernier qu'elle jugeait la construction de cet aéroport tout à fait irréaliste. En outre, le ministre de l'Equipement, des Transports et du Logement, M. Jean-Claude Gayssot, a indiqué, le mardi 14 octobre dernier devant la commission des Finances de l'Assemblée nationale, qu'il était favorable à la réouverture du débat sur la construction d'un troisième aéroport en région parisienne , la discussion devant porter sur le choix entre une meilleure utilisation des ressources existantes et la construction d'une troisième plate-forme.

De telles déclarations ne peuvent manquer de susciter des interrogations. On ne peut tout d'abord que regretter le manque de concertation ayant présidé à cette décision précipitée.

En réalité, la construction du troisième aéroport proposée par le rapport Douffiagues pouvait se concevoir dans l'hypothèse où, en raison des limitations opposées au développement de Roissy, cet aéroport pourrait, à long terme, ne pas suffire à absorber la croissance du trafic aérien francilien.

Dans cette hypothèse, nous pourrions, certes, dans la ligne du rapport Douffiagues, encourager le développement du trafic des aéroports de province, ce qui s'avérerait très positif en termes d'aménagement du territoire. Mais ne nous leurrons pas : si un desserrement du trafic vers les aéroports de province peut être envisagé, il ne constitue en aucune façon une alternative entièrement satisfaisante aux aéroports parisiens pour accueillir la demande.


En effet, s'il est vrai que de grands aéroports français, tels que Lyon, Nantes, Nice ou Lille, prennent une part croissante du trafic, particulièrement en ce qui concerne les vols intracommunautaires, il faut cependant souligner que l'espace aérien est soumis à une logique d'organisation de marché, et non d'organisation étatique. On ne peut imposer aux passagers des délais d'acheminement aux aéroports trop importants, sauf à les inciter à utiliser d'autres modes de transport que le transport aérien, voire des aéroports étrangers... A cet égard, une étude récente montre que les passagers sont prêts à consacrer trente à quarante-cinq minutes dans les délais d'acheminement aux aéroports pour un vol aérien de deux heures et une heure pour un déplacement d'une durée supérieure à deux heures. Au-delà de ce délai, beaucoup sont dissuadés d'utiliser les transports aériens.

Dans ces conditions, la construction d'un aéroport sur le site de Beauvilliers présenterait un grand intérêt.

N'est-il pas frappant de constater que l'avenir de Roissy retient toutes les attentions alors que personne ne s'inquiète outre mesure de celui d'Orly ? Cet aéroport n'est-il pas cependant, plus encore que son frère du Nord de Paris, intégré dans un tissu urbain extrêmement dense et, par là même, très contraint dans son activité ?

Plus encore, s'est-on jamais posé la question de savoir ce qu'il adviendrait d'Orly en cas d'accident aérien aux alentours de ce site ?

Votre rapporteur pour avis n'hésite pas à lever le voile pudique qui cache ce qui n'est certes qu'une hypothèse -dont il espère bien sûr qu'elle ne se concrétisera jamais- mais qui ne peut être plus longtemps occultée.

Les exemples étrangers montrent d'ailleurs, s'il en était besoin, que la probabilité d'un tel accident ne constitue pas qu'une hypothèse d'école. Souvenons-nous de l'épreuve dramatique qu'a connu la ville d'Amsterdam lorsqu'un avion décollant de l'aéroport de Schipol s'est écrasé sur un immeuble d'habitations, le détruisant entièrement et ensevelissant sous ses décombres de nombreuses victimes. N'oublions pas non plus que les Allemands ont décidé de construire l'aéroport Franz Joseph Strauss après la catastrophe aérienne subie par l'ancien aéroport de Münich.

Indépendamment de telle circonstances -qui quoiqu'exceptionnelles ne doivent pas être négligées-, on ne peut manquer de s'interroger sur les conséquences, à terme, de la pression continue et croissante tant des riverains que des élus, tendant à limiter et à encadrer sévèrement l'activité de la plate-forme d'Orly.

Toutes ces considérations amènent votre commission pour avis à s'interroger sur l'opportunité de renoncer aujourd'hui à disposer des réserves foncières permettant éventuellement de construire, à terme, un aéroport sur le site de de Beauvilliers, alors que ce site risque de faire cruellement défaut demain si l'on était amené, pour une raison ou pour une autre, à renoncer totalement ou partiellement à exploiter l'aéroport d'Orly.


Dans ce cas, un report du trafic sur Roissy apparaît exclue, sauf à accepter un dépassement des seuils actuellement envisagés.

Or, dans une telle hypothèse, l'établissement d'une plate-forme aéroportuaire à Beauvilliers permettrait d'apporter une réponse satisfaisante au problème de l'absorption du trafic d'Orly.

Ayons bien conscience que, dans le domaine aéroportuaire plus que dans d'autres, les décisions d'aujourd'hui conditionnent les réponses aux défis de demain. Elles peuvent, en effet, élargir ou, à l'inverse, interdire toute capacité d'adaptation ultérieure, tant en l'absence de réserves foncières satisfaisant aux exigences d'environnement et de développement durable à proximité de l'Ile-de-France, aucune nouvelle plate-forme francilienne à vocation internationale ne pourra être construite.

Alors, prenons garde aux décisions hâtives et ménageons l'avenir.

CHAPITRE IV -

LA CONSTRUCTION AÉRONAUTIQUE

La filière aéronautique connaît une nette reprise depuis 1995. Cette évolution pourrait se traduire d'ici 2016 par un besoin global supérieur à 16.000 appareils, soit un marché total d'environ 100 milliards de dollars.

Dans ce contexte, quelques grands problèmes méritent d'être évoqués, qui concernent notamment la concentration de l'industrie aéronautique mondiale et la politique de soutien public au secteur.

I. LE REDRESSEMENT DU MARCHÉ AÉRONAUTIQUE...

Le redressement du marché aéronautique observé en 1995 s'est très nettement amplifié en 1996. Cette tendance a été notamment confirmée par les indicateurs suivants :

- les commandes nettes de jets de plus de 70 places ont progressé de 54 % ;

- pour Airbus, Boeing et Mc Donnell Douglas, le cumul des commandes nettes enregistrées en 1996 est en hausse de 77 % par rapport à 1995 (898 appareils contre 508) ;

- les commandes nettes enregistrées pour ces trois constructeurs sont plus de deux fois supérieures aux livraisons qu'ils ont effectuées auprès des compagnies.

Cette reprise s'est traduite par une amélioration de la situation des industriels du secteur aéronautique et spatial.

II. ... PROFITE AUX ENTREPRISES FRANÇAISES DU SECTEUR

A l'échelon national, le groupe Aérospatiale a réalisé un chiffre d'affaires consolidé de 50,8 milliards de francs en hausse de plus de 3 % par rapport à l'année précédente. Les prises de commandes, supérieures au chiffre d'affaires, s'établissent à 63,3 milliards de francs contre 39,3 milliards de francs en 1995. Elles permettent une reconstitution du carnet de commandes qui, à fin décembre 1996, s'élève à près de 130 milliards de francs et représente 2,6 années de chiffre d'affaires. Enfin, pour la première fois depuis 1991, le groupe a renoué avec les bénéfices en affichant un résultat net positif de 613 millions de francs.

Dans ces conditions, le groupe a prévu de recruter environ 1.200 personnes sur la période 1996-1999.

Pour le groupe Snecma , l'exercice 1996 a mis fin à cinq années de décroissance continue du chiffre d'affaires. Au 31 décembre 1996, celui-ci s'élève à 18,7 milliards de francs contre 17,9 milliards de francs en 1995. Compte tenu de la reprise soutenue de l'activité, le motoriste prévoit un chiffre d'affaires de plus de 22 milliards de francs en 1997. Sur le plan financier, Snecma est demeuré encore déficitaire en 1996, mais ses pertes ont fortement diminué, passant de 853 milliards de francs à 280 milliards de francs.

Le groupe Dassault Aviation a réalisé un chiffre d'affaires de 13 milliards de francs, en hausse de 12 % par rapport à l'exercice précédent. En outre, l'avionneur continue d'afficher une bonne santé financière avec un bénéfice de 1,15 million de francs, soit plus du double de celui constaté en 1995.

La situation de la filière aéronautique française et européenne n'est cependant pas sans fragilités face à la véritable " guerre commerciale " que mènent les Etats-Unis.

III. UNE NÉCESSAIRE ÉVOLUTION

Il convient d'accélérer le processus de concentration de la filière aéronautique face au souhait des Etats-Unis de conserver leur suprématie dans ce secteur.

A. LE SOUHAIT DES ETATS-UNIS DE CONSERVER LEUR LEADERSHIP AÉRONAUTIQUE

Engagé depuis le début de la présente décennie, le mouvement de concentration engagé par l'industrie aéronautique américaine vient de trouver son point d'orgue avec la fusion de Boeing et de Mc Donnell Douglas .

Notons que Boeing a profité pleinement de la reprise du marché aéronautique. Le constructeur américain a réalisé un chiffre d'affaires de 116 milliards de francs en 1996, soit une hausse de près de 20 %. Entre 1995 et 1996, le carnet de commandes est passé de 361 milliards de francs à 448 milliards de francs. Celui-ci équivaut à pratiquement quatre années de chiffre d'affaires. Enfin, le groupe fait état fin 1996 d'un résultat net de 5,6 milliards de francs en progression de 43 % par rapport à l'exercice précédent.

Malgré une baisse de 3,6 % de son chiffre d'affaires à 70,5 milliards de francs, imputable à son recul sur le marché civil, Mc Donnell Douglas affiche une forte rentabilité avec un résultat positif de 4 milliards de francs.

Avec 26.000 salariés et un carnet de commandes de 790 milliards de francs, ce nouveau groupe aérospatial -le plus puissant du monde- menace l'existence même de son concurrent européen.

Par le biais de cette fusion, Boeing pourra intégrer les technologies et les crédits militaires de Mc Donnell Douglas.

Outre cet accroissement très sensible de l'aide publique indirecte dont bénéficiera ainsi Boeing, il faut s'inquiéter de la stratégie d'exclusivité menée par l'avionneur américain .

Rappelons que, le 30 juillet 1997, la Commission européenne a accepté cette fusion sous réserve du respect d'un certain nombre de conditions, dont la renonciation pendant dix ans aux contrats d'exclusivité passés par Boeing avec trois compagnies américaines possédant 10 % de la flotte mondiale : Delta, American et Continental, avec tout autre transporteur.

L'avionneur semble cependant avoir trouvé une parade juridique imparable. Elle repose sur le raisonnement suivant, qui réduit à néant la principale concession accordée fin juillet : si Boeing n'a pas le droit d'imposer à une compagnie l'achat de ses avions -tel était le sens de la décision de Bruxelles-, toute compagnie est, en revanche, parfaitement libre de ne s'approvisionner qu'auprès d'un seul fabricant d'avions, si elle y trouve son compte. Ainsi, Delta vient de conclure ostensiblement l'achat de 644 Boeing sur vingt ans (dont 106 fermes et le reste en option), pour bénéficier à plein des conditions de flexibilité des livraisons et des bas prix qui sont la contrepartie des contrats exclusifs. La seule différence avec le contrat précédent est que le client peut, à tout moment, se raviser et opter pour des Airbus, sans que Boeing puisse s'en offusquer.

Quand on sait que la plupart des autres engagements peuvent être qualifiés de " comportementaux " dont, selon l'expression utilisée par Mme Edith Cresson, commissaire européen, dont " personne ne pourra jamais vérifier le respect " 4( * ) , on ne peut manquer de s'interroger sur l'impuissance de la Commission européenne ainsi mise en lumière.

En outre, votre commission pour avis souhaite que le ministre explique la ligne de conduite adoptée par le Gouvernement français sur ce dossier, dont nul ne peut affirmer que ses résultats soient satisfaisants pour notre industrie aéronautique.

B. LA NÉCESSAIRE ÉVOLUTION DE L'INDUSTRIE FRANÇAISE ET EUROPÉENNE

1. La nécessaire fusion d'Aérospatiale et de Dassault Aviation

Dans ce contexte, la France n'a plus de temps à perdre. Elle doit procéder à la fusion des sociétés Aérospatiale et Dassault Aviation.

En effet, seul un groupe unique rassemblant l'ensemble des forces françaises de l'aéronautique civile et militaire peut être à même de résister à une concurrence mondiale dont l'agressivité va croissant.

La France disposerait ainsi du premier groupe aérospatial européen, avec un effectif d'environ 50.000 personnes et un chiffre d'affaires de 60 milliards de francs.

2. Le renforcement de la coopération européenne

a) Le succès de la coopération européenne dans le secteur aéronautique

Nous pouvons nous féliciter du succès emporté par la coopération européenne dans ce secteur, à l'heure où Airbus fête ses 25 ans avec les résultats que l'on sait : n° 2 mondial avec 30 % des parts de marché et l'objectif de conquérir la moitié du marché mondial dans les années à venir.

L'organisation Airbus a aussi fait la preuve de sa solidité en permettant aux partenaires de surmonter la crise la plus grave que ce secteur ait connue dans les années 1991 à 1995, période particulièrement difficile avec la dégradation de la situation financière des compagnies aériennes, les amenant à geler ou à annuler un certain nombre de commandes, la chute du dollar et le renforcement des contraintes concurrentielles. Dans ce contexte, chaque partenaire a été amené à mettre en place un dispositif pour se donner les moyens d'une exploitation durablement profitable.

Il semble que le succès d'Airbus ait été rendu possible par quatre facteurs :

- dans le domaine des avions commerciaux de plus de 100 places, chaque partenaire a renoncé à envisager un avenir en dehors du GIE alors que cette activité était stratégiquement prioritaire, seule la coopération au plan technologique industriel et commercial permettant de se maintenir sur ce marché ;

- au sein du GIE, les maisons mères sont conjointes et solidaires. Cette contrainte s'est avérée un atout auprès de ses clients ;

- les industriels partenaires se sont spécialisés. Cette règle générale a permis de développer des pôles d'excellence technologiques et industriels et a empêché un éparpillement des efforts d'investissement : le soutien des Etats, essentiel pour financer une famille d'appareils a ainsi pu être utilisé au mieux, en limitant les duplications ;

- enfin, les modes de relations contractuelles entre le GIE Airbus et les maisons mères ont été fondés sur les notions de forfait. Ont ainsi été évités des " empilements " de prix qui auraient pu mener Airbus à sa perte, en diluant les responsabilités et en ne donnant pas suffisamment de force à la recherche de compétitivité.

Dans une moindre mesure, on peut noter également le succès du GIE franco-italien ATR qui est devenu le numéro un mondial dans le domaine des avions régionaux à turbopropulsion, avant d'être rejoint par Bae au sein d'ATR.

Dans le domaine des hélicoptères, Eurocopter , créé au début des années 90 entre Aerospatiale et Dasa, est devenu, au plan mondial, le premier hélicoptériste civil, le premier exportateur et a vocation à devenir le pôle de regroupement européen dans ce secteur.

b) La transformation du statut juridique d'Airbus Industrie

Face à l'émergence de la menace qui constitue la fusion Boeing-Mc Donnell Douglas, il apparaît plus que jamais que seule une société européenne, civile et militaire, ait une chance de survie.

C'est dans cette perspective que doit être rapidement poursuivi le processus d'intégration d'Airbus vers une société unique qui devrait être constituée au début de l'année 1999.


Rappelons que l'an dernier, les quatre partenaires -Aérospatiale et l'allemand Dasa, Daimler-Benz Aerospace (chacun 37,9 %), British Aerospace (20 %) et l'espagnol Casa (4,2 %)- s'étaient entendus pour transformer le GIE de commercialisation et d'après-vente Airbus en une véritable entreprise dotée d'actifs industriels et ce, avant le 1er janvier 2000. Mais, au sommet franco-allemand de Weimar, ils avaient avancé la date au 1er janvier 1999.

Les industriels estiment que cette création se fera " sur la base de l'intégration de toutes les activités requises pour définir, développer et produire la gamme de produits actuelle et future d'Airbus sous la responsabilité d'une direction unique " 5( * ) .

Il reste cependant à fixer les conditions précises de ce processus.

C. RÉFORMER LE DISPOSITIF DE SOUTIEN PUBLIC À LA RECHERCHE ET AU DÉVELOPPEMENT

1. Accroître les aides indirectes

Soyons clairs : la politique de recherche et de développement dans le domaine aéronautique doit être réformée . Il est plus que temps de sortir du contentieux qui nous oppose aux Etats-Unis s'agissant du dispositif de soutien public à la recherche aéronautique.

Dans cette perspective, il convient d'obtenir la révision de l'accord du 17 juillet 1992 sur les appareils de plus de 100 places dont l'application pénalise fortement l'industrie européenne, puisque les aides directes sont strictement limitées en Europe, tandis que les aides indirectes américaines restent incontrôlables.

Le budget recherche et développement de la NASA consacré à la construction aéronautique civile est évalué à plus d'un milliard de dollars, soit 8 % du budget total de l'Agence. En outre, l'industrie américaine profite du soutien financier apporté par le ministère de la Défense, ainsi que de divers avantages fiscaux.

Dans ce contexte, votre commission pour avis partage les conclusions de l'excellent rapport présenté au nom de la commission des Finances par M. Yvon Collin sur les soutiens publics à la construction aéronautique civile 6( * ) , présenté, qui juge que " la proportion des aides indirectes doit être accrue puisque les avances remboursables sont, en l'état, soumises à de stricts plafonds. Mais, cela suppose une meilleure programmation des soutiens à la recherche au niveau national et européen ".

2. Lutter contre les nuisances sonores

Par ailleurs, votre commission attache beaucoup d'importance à ce que la recherche dans le domaine aéronautique donne la priorité à la lutte contre les nuisances sonores, à l'instar des efforts développés aux Etats-Unis.

D'importants effets ont déjà été réalisés en la matière, mais il faut encore les poursuivre car il s'agit là d'une clé de l'avenir du secteur. En effet, le transport aérien se développant dans un contexte de densification du tissu urbain et d'une attention croissante -et légitime- de nos concitoyens à la pollution sonore, il est permis de penser que les constructeurs qui seront à la pointe du progrès dans ce domaine marqueront des points dans la course qui leur permettra de s'affirmer dans la compétition exacerbée actuelle et à venir.

Dans cette perspective, il convient de poursuivre les recherches dans le domaine de la motorisation. De même,il faut encore développer la qualité des matériaux phoniques utilisés dans les avions et étudier les moyens de réduire le bruit lié à l'aérodynamique, sachant que celui-ci est plus important à l'atterrissage qu'au décollage.

*

* *

Suivant la proposition de son rapporteur, la commission a donné un avis défavorable aux crédits inscrits au titre de l'aviation civile dans le projet de loi de finances pour 1998.

EXAMEN PAR LA COMMISSION

Réunie le mardi 18 novembre 1997 sous la Présidence de M. Jean François-Poncet, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-François Le Grand sur les crédits consacrés à l'aviation civile dans le projet de loi de finances pour 1998.

M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis, s'est félicité des efforts entrepris par la direction générale de l'aviation civile (DGAC) pour se conformer au souhait de transparence exprimé par le Parlement, à travers l'élaboration d'un état récapitulatif présentant la répartition des coûts et des dépenses du budget annexe de l'aviation civile (BAAC).

Après avoir indiqué que les fonds inscrits au BAAC s'élevaient à 8,469 milliards de francs pour 1998, en hausse de 5,91 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997, il en a présenté les principales orientations :

- une simple reconduction de la subvention de l'Etat ;

- une augmentation des redevances et taxes à la charge des compagnies aériennes sur lesquelles pèseront donc exclusivement les recettes du budget annexe. A cet égard, il a souligné l'augmentation de 39,3 % de la taxe de sécurité et de sûreté, qui ne manquera pas de déséquilibrer les comptes de ces compagnies.

Evoquant ensuite les dépenses du BAAC, M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis, a souhaité que le Gouvernement améliore la cohérence des programmes français et européen dans le domaine de la navigation aérienne et s'est interrogé sur l'opportunité des importantes charges de personnel (+ 6 %), dues aux hausses de salaires substantielles dont bénéficiaient les fonctionnaires du contrôle aérien.

Il a ensuite indiqué que la taxe qui alimente le fonds de péréquation des transports aériens était maintenue par le projet de loi de finances pour 1998 à un franc par passager embarqué. Il a souligné que, dans ces conditions, ce fonds ne devrait pas connaître de difficultés de trésorerie dans les deux années à venir, le taux de la taxe devant probablement être réexaminé à partir de l'an 2000.

S'il a estimé qu'il fallait sans doute exclure tout assouplissement des critères communautaires d'éligibilité des liaisons aériennes au FPTA, le rapporteur pour avis a cependant souhaité qu'une réflexion soit menée sur les modalités et conditions d'application de ces critères par la France, de façon à établir un bilan du dispositif et à identifier, dans le cadre de la réglementation communautaire, d'éventuelles marges de manoeuvre.

S'agissant enfin des dotations destinées aux programmes aéronautiques, le rapporteur pour avis a déploré la réduction d'un tiers des crédits de soutien à la recherche-amont, au moment où cette dernière s'avèrait vitale pour affronter une concurrence mondiale très vive. A cet égard, après avoir rappelé que la construction aéronautique civile américaine bénéficiait de crédits du ministère de la défense et de la NASA, il a fait part de son " regret teinté d'amertume " de constater que l'on pénalisait de nouveau les constructeurs européens après avoir tenté, ces deux dernières années, de se rapprocher de la démarche américaine en ce domaine. S'il s'est félicité de l'augmentation de 34,4 % des crédits destinés aux avances remboursables, il a cependant souligné qu'elles ne faisaient que traduire la relance des programmes aéronautiques, et non un plus grand engagement budgétaire de l'Etat.

Dans ces conditions, M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis, a proposé à la commission de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits destinés aux transports aériens dans le projet de loi de finances pour 1998.

Il a ensuite exposé l'évolution du paysage aérien mondial et européen, caractérisé à la fois par une croissance du trafic et par une concurrence acharnée ne permettant plus de raisonner en termes nationaux dans ce secteur.

Après avoir salué les efforts de rationalisation et de productivité réalisés par la direction et par le personnel du groupe Air France, il a cependant relativisé l'amélioration des résultats obtenus, Lufthansa et British Airways ayant, dans le même temps, multiplié leurs profits respectivement par trois et par quatre.

Le rapporteur pour avis a souligné que la mondialisation du secteur du transport aérien s'accompagnait d'un mouvement accentué d'alliances entre compagnies, qu'il a qualifié de véritable " jeu de monopoly ".

Evoquant les alliances majeures qui se sont nouées dans le secteur, il a relevé que ces alliances étaient désormais basées sur la pratique des " codes partagés ", qui permet d'éviter une concurrence suicidaire sur la fidélisation des passagers et fait observer que l'aspect capitalistique prendrait à l'avenir une importance croissante. Il a estimé que, dans ces conditions, le groupe Air France devait mener une stratégie d'alliances ambitieuse reposant sur trois piliers : européen, américain et asiatique, le groupe devant combler un important retard en la matière. Après avoir rappelé que la répartition du capital des compagnies aériennes européennes avait souvent évolué -six des plus grandes compagnies ayant désormais une majorité d'investisseurs privés-, il a jugé que l'absence d'engagement clair en faveur d'une privatisation d'Air France pénalisait cette dernière et nuisait à sa crédibilité dans sa recherche d'alliances. Or, a-t-il précisé, cette stratégie doit être menée rapidement, dans la mesure où le marché mondial sera totalement capté d'ici deux à trois ans.

En outre, il a fait observer qu'en l'absence de privatisation, les personnels du groupe ayant accepté des réductions de salaires en contrepartie d'actions seraient fondés à considérer qu'ils avaient été payés en " monnaie de singe ". Il a craint que ne soit, dans ce cas, freinée -voire cassée- la dynamique qui avait jusqu'ici permis des efforts de rationalisation du groupe.

Puis, après avoir souligné le développement du trafic enregistré par les transporteurs régionaux privés, M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis, a souhaité une réforme du Conseil supérieur de l'aviation marchande (CSAM), qu'il avait l'honneur de présider et dont il a estimé le fonctionnement " figé et très administratif ". Il a, en outre, dénoncé la " double casquette " de la DGAC, à la fois opérateur et régulateur.

S'agissant des infrastructures aéroportuaires, le rapporteur pour avis a souligné l'évolution positive du trafic des aéroports parisiens dont il a rappelé qu'ils étaient les seuls aéroports à vocation internationale, en Europe, à disposer d'une capacité de développement permettant de répondre à la croissance du trafic. Dans ces conditions, il s'est félicité qu'ait été confirmée la décision de construire deux pistes supplémentaires sur l'aéroport de Roissy.

Il a ensuite évoqué l'impact négatif de la réglementation communautaire sur les finances d'Aéroport de Paris (directives relatives à l'accès au marché de l'assistance en escale et aux redevances aéroportuaires et projet de suppression des ventes hors taxes).

Le rapporteur pour avis a souligné la croissance du trafic des principaux aéroports de province. Il a cependant estimé qu'il serait illusoire de considérer que le desserrement du trafic francilien vers ces aéroports pourrait offrir une alternative entièrement satisfaisante aux aéroports parisiens pour accueillir la demande. Il s'est, par ailleurs, interrogé sur ce qu'il adviendrait d'Orly en cas d'accident aérien aux alentours de ce site et a estimé que, dans ces conditions, on pouvait s'interroger sur l'opportunité de renoncer aujourd'hui à disposer des réserves foncières permettant éventuellement de construire, à terme, un aéroport sur le site de Beauvilliers, en Eure-et-Loir. Il a jugé que la commission s'honorerait en posant cette question.

M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis, a ensuite évoqué le problème de la dévolution des plates-formes aéroportuaires parisiennes, estimant que l'aéroport d'Orly devait être réservé aux lignes intérieures et intra-communautaires et les vols long courrier concentrés sur l'aéroport de Roissy.

S'agissant de la filière aéronautique, il s'est félicité des résultats positifs du groupe Aérospatiale, qui lui permettraient de recruter environ 1.200 personnes sur la période 1996-1999.

Il s'est cependant inquiété de la véritable " guerre commerciale " menée par les Etats-Unis, en particulier de la menace résultant de la fusion de Boeing et de Mac Donnell Douglas et de la stratégie d'exclusivité menée par l'avionneur américain, qui entraîne des distorsions de concurrence au détriment de l'industrie européenne. Souhaitant un renforcement de la coopération européenne dans le secteur aéronautique, le rapporteur pour avis a jugé nécessaire la poursuite du processus d'intégration d'Airbus, une société unique devant être constituée au début de l'année 1999.

Il a défendu l'idée d'une réforme du dispositif de soutien public à la recherche et au développement, au moyen notamment d'un accroissement des aides indirectes, à l'instar du dispositif américain, comme le préconisait le rapport de M. Yvon Collin sur ce sujet. Il a, par ailleurs, attaché beaucoup d'importance à ce que la recherche dans le domaine aéronautique donne la priorité à la lutte contre les nuisances sonores.

Un large échange de vues s'est ensuite instauré au sein de la commission.

Après avoir félicité le rapporteur pour avis pour la qualité de son exposé, M. Jean Huchon s'est inquiété de la concurrence exercée par Boeing et s'est interrogé sur le prix et le résultat des navettes mises en place par l'ex-Air Inter.

En réponse, M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis, a rappelé que cette compagnie -dont le passif était très lourd, et qui ne bénéficiait plus de la péréquation entre les lignes " milliardaires " et les lignes déficitaires-, était parvenue, à travers la mise en place de ces navettes, à réduire les coûts unitaires en réalisant des gains de productivité. Il a relevé que l'optimisation de la recette serait favorisée par une meilleure adaptation des avions à ce type de trafic.

Après avoir lui aussi félicité le rapporteur pour avis, M. Gérard César a déclaré partager son point de vue s'agissant du site de Beauvilliers, et souhaité que le débat dans ce domaine ne soit pas fermé.

S'interrogeant sur le bilan du fonctionnement des navettes, il a jugé " scandaleux " qu'à l'occasion des retards parfois importants dont elles étaient l'objet, aucune information ne soit délivrée aux passagers. Il a enfin demandé les raisons de la grève des pilotes du jeudi précédent.

Sur ce point, M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis, a rappelé que les pilotes de l'ex-Air Inter devaient passer sous le statut des pilotes d'Air France, ce qui leur posait certains problèmes en termes de prise en compte de l'ancienneté et d'évolution des conditions de travail. Il a indiqué que seule une minorité des membres du syndicat des pilotes avait cependant suivi cette grève.

Répondant ensuite à M. Jacques de Menou qui évoquait le projet de British Airways de développer l'activité d'une compagnie de transport européen bon marché, le rapporteur pour avis a exposé que de telles compagnies pourraient se multiplier étant donnée la demande en ce domaine. Il s'est cependant inquiété des risques de " dumping " économique et social par ces compagnies qui, pouvant être basées à Jersey, par exemple, n'hésiteraient pas à recruter des pilotes étrangers à bas salaire. Il a indiqué que le CSAM comme l'Union européenne menaient des réflexions sur la possibilité de contrer de telles pratiques qui, en outre, posaient le problème de la sécurité des avions.

A la suite d'une intervention de M. Jean Huchon, qui avait évoqué l'aéroport de Wattries, le rapporteur pour avis a indiqué que les aéroports de province connaîtraient, à terme, un développement important en raison de la croissance du transport de fret. A cet égard, il a relevé que la banalisation de ce type de transport entraînerait une baisse de ses coûts qui amènerait les compagnies à se positionner sur les aéroports de province, dont les coûts étaient inférieurs aux aéroports parisiens.

M. Kléber Malécot a souhaité que le Gouvernement adopte une position claire sur l'avenir du site de Beauvilliers.

La commission a ensuite donné un avis défavorable aux crédits inscrits au titre de l'aviation civile dans le projet de loi de finances pour 1998, les sénateurs du groupe socialiste et M. Pierre Lefebvre s'abstenant.



1 Selon l'enquête réalisée et publiée annuellement par la revue Airline Business.

2 Notamment par la pratique du " partage de codes " qui permet à une compagnie d'assurer une présence commerciale -au travers de son numéro de vol- sur le réseau de la compagnie partenaire.

3 Ainsi, en 1996, Aéroports de Paris a autofinancé 74 % de ses dépenses d'investissements.

4 Voir interview parue dans
Le Monde du 25 juillet 1997.

5 Voir l'article d'Olivier Provost paru dans
La Tribune du 15 octobre 1997.

6 Voir le rapport Sénat n° 367 (1996-1997).


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