AVIS n° 87 -Tome XXII - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - OUTRE MER


M. Rodolphe DESIRE, Sénateur


COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES ET DU PLAN - AVIS n° 87 - TOME XXII - 1997/1998

Table des matières






N° 87

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XXII

OUTRE-MER

Par M. Rodolphe DÉSIRÉ,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis Minetti, vice-présidents ; Georges Berchet, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Michel Barnier, Bernard Barraux, Michel Bécot, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut , Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Gérard Larcher, Edmond Lauret, Pierre Lefebvre, Jean-François Le Grand, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Jean-Baptiste Motroni, Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Bernard Piras, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, M. Henri Weber.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexe n° 33 ) (1997-1998).

Lois de finances.

Mesdames, Messieurs,

La présentation des crédits destinés à l'ensemble de l'Outre-Mer relève parfois d'un exercice de haute voltige. Il faut en effet faire la synthèse entre des situations politiques et économiques très diverses pour lesquelles des solutions spécifiques devraient être adoptées.

Il est très difficile de mettre ainsi sur le même plan les départements d'Outre-mer qui sont des départements ultra-périphériques français soumis au même droit constitutionnel que les autres départements français et les territoires d'Outre-mer qui ont un statut d'autonomie qui leur est propre.

Les traités instituant l'Union européenne ne s'y sont pas trompés puisqu'ils soumettent les DOM français, Madère, les Canaries et les Açores au régime de l'article 227-2 du Traité de Rome, et appliquent aux pays et territoires d'Outre-mer un régime spécial d'association.

La situation économique des départements d'outre-mer a évolué de manière contrastée selon les secteurs d'activité mais elle reste globalement très préoccupante.

L'augmentation sensible du pouvoir d'achat des bénéficiaires du SMIC, du fait de son alignement sur celui de la métropole, a déséquilibré encore un peu plus la balance des échanges extérieurs car les capacités d'offre des économies locales n'ont pas pu la satisfaire.

Les points noirs de l'activité économique restent malheureusement bien identifiés et ils auraient tendance à s'aggraver. Il s'agit :

- du poids très important des transferts publics en provenance de la métropole, puisque le solde net est évalué à 35,8 milliards de francs en 1996, ce qui représente 44 % du PIB à La Réunion, 37 % en Martinique, 32 % en Guadeloupe et 27,8 % en Guyane ;

- de la dégradation continue du marché de l'emploi, puisque le nombre de demandeurs d'emploi a progressé de 19 % entre 1993 et 1996, ce qui témoigne de l'incapacité des économies locales à absorber la progression rapide de la population active du fait de la forte proportion de jeunes.

Les taux de chômage atteignent des niveaux très élevés dans chacun des quatre départements : 40,2 % à La Réunion, 27 % à la Martinique, 26,8 % à la Guadeloupe et 22,1 % à la Guyane -ce dernier chiffre étant largement sous-évalué-.

S'agissant des territoires d'outre-mer, le constat s'établit en demi-teinte; il varie d'un territoire à l'autre et selon les activités économiques. Globalement, l'activité touristique s'est améliorée, mais sans effacer totalement les effets négatifs de la reprise des essais nucléaires pour ce qui est de la Polynésie française ou de la Nouvelle Calédonie.

Les revalorisations salariales ont souvent eu pour conséquence d'aggraver le déséquilibre de la balance des échanges et, plus généralement, l'activité économique reste très dépendante de la commande publique à travers l'exécution des contrats de plan ou des conventions de développement signés avec l'Etat.

Dans ce contexte économique qui reste fragile, le budget de l'outre-mer est en progression de 7,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997 pour s'élever à 5,22 milliards de francs

Compte-tenu d'un transfert du budget du logement de 96 millions de francs destinés à la résorption de l'habitat insalubre dans les départements d'outre-mer et de 300 millions de francs inscrits dans les crédits du Fonds pour l'emploi dans les DOM pour mettre en oeuvre la loi sur le Plan Emploi-Jeunes votée en octobre dernier, le budget de l'outre-mer n'est en définitive que reconduit à hauteur de l'an dernier.

La priorité affirmée reste la lutte pour l'emploi et l'insertion, le soutien au logement et l'exécution des contrats de plan Etat-régions.

Dans ce contexte économique et compte tenu de la progression très limitée des moyens budgétaires à destination de l'outre-mer, il paraît d'autant plus dramatique de mettre fin aussi brutalement au dispositif de défiscalisation de la loi Pons.

Ce dispositif, conçu pour compenser l'insuffisance et la cherté du crédit bancaire ainsi que le coût de la main dans l'outre-mer, constitue un véritable outil de développement économique.

En 1996, le montant total des projets agréés s'est élevé à 5,59 milliards de francs ; si le dispositif était maintenu en l'état jusqu'au 31 décembre 2001, on peut imaginer que 20 milliards de francs seraient investis, sur la période.

De plus, l'effet de levier de la défiscalisation est considérable, puisque pour un coût fiscal d'environ 2 milliards de francs par an, en 1995, l'investissement directement provoqué représentait 6 milliards de francs, soit les 3/5 de l'investissement productif outre-mer.

A titre de comparaison, les départements d'outre-mer bénéficieront au titre des fonds structurels européens de 1,7 milliards d'écus, soit environ 11 milliards de francs sur la période 1994-1999.

Ces projets d'investissement génèrent suffisamment de recettes fiscales au titre de la TVA, de l'impôt sur le revenu et des impôts locaux pour compenser la moins-value fiscale résultant pour l'État de la défiscalisation.

Le principe de défiscalisation a également pour objectif d'aligner autant que faire se peut, la fiscalité locale des DOM-TOM sur celles des États des zones Caraïbes, Océan Indien et Pacifique qui sont leurs concurrents directs, notamment en matière touristique. Le rapport de M. Alain Richard -alors rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale- en 1991 soulignait cette nécessité économique.

Il importe donc de maintenir en vigueur un dispositif de développement économique équilibré qui, pour être efficace, doit être pérenne.

PREMIÈRE PARTIE -

PANORAMA SUR LES DÉPARTEMENTS ET LES TERRITOIRES D'OUTRE-MER

Dans son rapport annuel pour 1996, l'Institut d'émission d'Outre-mer (IEDOM) dresse un constat plutôt sévère de la situation économique des départements d'outre-mer qui a évolué de manière contrastée selon les secteurs d'activité et se caractérise par un attentisme certain.

L'augmentation sensible du pouvoir d'achat des bénéficiaires du SMIC, du fait de son alignement sur celui de la métropole, et par diffusion, des bénéficiaires de certains autres salaires a favorisé une légère augmentation de la consommation des ménages qui a profité aux activités commerciales. Mais cette augmentation a plutôt entraîné une hausse des importations qu'une augmentation de la production intérieure.

Les points noirs de l'activité des départements d'outre-mer restent malheureusement bien identifiés et ils auraient tendance à s'aggraver. Il s'agit :

- du poids très importants des transferts publics en provenance de la métropole, puisque le solde net est évalué à 35,8 milliards de francs en 1996, ce qui représente 44 % du PIB à La Réunion, 37 % en Martinique, 32 % en Guadeloupe et 27,8 % en Guyane ;

- de la dégradation continue du marché de l'emploi, puisque le nombre de demandeurs d'emploi a progressé de 19 % entre 1993 et 1996, ce qui témoigne de l'incapacité des économies locales à absorber la progression rapide de la population du fait de la forte proportion de jeunes.

Les taux de chômage atteignent des niveaux très élevés dans chacun des quatre départements : 40,2 % à La Réunion, 27 % à la Martinique, 26,8 % à la Guadeloupe et 22,1 % à la Guyane -ce dernier chiffre étant largement sous-évalué-.

S'agissant des territoires d'outre-mer, le constat s'établit en demi-teinte et varie d'un territoire à l'autre et selon les activités économiques. Globalement, l'activité touristique s'est améliorée, mais sans encore effacer totalement les effets négatifs de la reprise des essais nucléaires pour ce qui est de la Polynésie française ou de la Nouvelle Calédonie.

Les revalorisations salariales ont souvent eu pour conséquence d'aggraver le déséquilibre de la balance des échanges du fait d'une production intérieure insuffisante ou inadaptée.

Plus généralement, l'activité économique et surtout le bâtiment et les travaux publics restent très dépendants de la commande publique à travers l'exécution des contrats de plan ou des conventions de développement.

Le panorama qui peut être fait, à partir des études spécifiques de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM), permet d'établir un bilan économique plus détaillé pour chacun des départements et des territoires d'outre-mer.

I. DES ÉVOLUTIONS ÉCONOMIQUES ET SOCIALES CONTRASTÉES DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER

A. LA MARTINIQUE : UNE AMÉLIORATION DE LA CONJONCTURE ÉCONOMIQUE INSUFFISANTE POUR AMÉLIORER LA SITUATION DE L'EMPLOI

L'année 1996 a été marquée par une amélioration de la conjoncture, comme le laissaient prévoir les perspectives encourageantes du dernier trimestre de 1995. La bonne tenue de la consommation des ménages, encouragée par les revalorisations salariales et la progression des concours bancaires, a contribué à soutenir l'activité des différents secteurs économiques.

1. Une amélioration de l'activité économique...

Plusieurs indicateurs témoignent de la reprise de l'activité des principaux secteurs économiques en 1996.

Les exportations de bananes ont sensiblement progressé pour la seconde année consécutive, aussi bien sur le marché national que sur les autres marchés européens (+ 17% par rapport à 1995). Cependant, comme 1995, l'année 1996 a été marquée par un nouveau repli des cours sur le marché européen, en raison d'un surapprovisionnement à partir du mois de juin. Dans ce contexte, les mesures compensatoires prises dans le cadre de l'OCM banane sont considérées comme insuffisantes par les professionnels et sont vivement contestée.

La campagne sucrière 1996 s'est déroulée dans des conditions favorables. Cependant, en raison de difficultés techniques liées à l'entretien du matériel, la production de sucre par l'usine du Galion s'est inscrite en baisse de 4 % par rapport à 1995. Les ventes ont néanmoins enregistré une progression de 32 % par rapport à l'année précédente.

Après une année 1995 difficile, la situation du secteur du bâtiment et des travaux publics s'est améliorée en 1996 : de nombreuses créations de sociétés ont été enregistrées et les ventes de ciment, qui constituent un indicateur pertinent de l'activité du secteur, ont progressé par rapport à 1995. Cette évolution peut être reliée à la situation satisfaisante des finances de la région qui a permis à cette collectivité de retrouver son rôle de moteur économique par le biais de la commande publique. Le montant des travaux engagés par la région en 1996 s'est ainsi élevé à près de 300 millions de francs contre 156 millions en 1995 et les nombreux chantiers en cours et en projet représentent un volume de financements conséquent pour l'année 1997.

Sur le plan touristique, le bilan de l'année 1996 est globalement positif pour le secteur hôtelier. La fréquentation a de nouveau sensiblement progressé et les taux d'occupation ont été particulièrement élevés durant la haute saison. En revanche, pour l'activité de croisière, les résultats ont été décevants. La clientèle a diminué de 5 % et les mesures prises par les organismes compétents ne porteront leurs fruits qu'à partir de 1997.

2. Les indicateurs témoignent de cette reprise économique

Poursuivant la tendance enregistrée à la fin de l'année 1995, l'année 1996 a été marquée par le niveau soutenu de la consommation des ménages, dans un contexte de hausse de prix modérée (+1,9 % en glissement annuel) et à la suite d'une augmentation des salaires du secteur privé consécutive aux revalorisations successives du SMIC (+ 9,4 % entre décembre 1995 et 1996), qui est depuis le 1er janvier 1996 aligné sur le montant du SMIC métropolitain.

Sur le plan industriel, l'investissement a connu un certain regain. En effet, alors qu'il avait diminué de 9 % entre 1994 et 1995 l'encours des crédits d'équipement a progressé de 2,4 % en 1996, soit 100 millions de francs supplémentaires.

3. Mais la situation de l'emploi s'est aggravée

Après une phase de plafonnement entre 1987 et 1990, due notamment aux effets de la défiscalisation sur le bâtiment, la situation de l'emploi s'est dégradée sur la période 1991-1996.

La bonne tenue de la conjoncture économique au cours de l'année 1996 ne s'est pas traduite sur la situation de l'emploi, en dépit de l'accroissement des offres d'emploi, ce qui reflète la faible capacité de l'économie martiniquaise, à absorber la progression de la population active. Le nombre de demandeurs d'emploi inscrits à l'ANPE au 31 décembre 1996 s'élevait à 44.541, en hausse de 3,2 % sur un an, et l'indicateur de chômage s'établit à 27,0 %.

Par ailleurs, le nombre des allocataires du revenu minimum d'insertion a continué de progresser : le nombre moyen mensuel de bénéficiaires s'est élevé à 22.114 en 1996 contre 18.711 en 1995. La perte de ressources, liée au chômage dans 58 % des cas, est à l'origine de la majorité des cas de surendettement examinés par la Commission de surendettement des particuliers durant l'année 1996. Cependant, en juin 1997, le nombre de demandeurs d'emploi s'est élevé à 43.132, soit en diminution de 3,3 % par rapport à juin 1996.

4. Le commerce extérieur de la Martinique reste déséquilibré.

Le commerce extérieur de la Martinique est déséquilibré en raison notamment de l'importance des revenus distribués par les administrations et les activités tertiaires. Le solde commercial s'est creusé une nouvelle fois en 1996, atteignant - 8.986 millions de francs contre - 8.604 millions en 1995 et le taux de couverture des importations par les exportations passe de 12,3 % en 1995 à 10,8 % en 1996.

BALANCE COMMERCIALE

(en millions de francs)

1993

1994

1995

1996

Variations

1996/1995

Importations CAF

8 884

9 092

9 806

10 072

+ 3 %

Exportations FAB

1 093

1 216

1 202

1 086

- 10 %

Solde commercial

- 7 791

- 7 876

- 8 604

- 8 986

- 4 %

Taux de couverture

(importations/exportations)

12,3 %

13,4 %

12,3 %

10,8 %

Source : Direction générale des douanes.

B. LA GUADELOUPE : UNE ANNÉE ÉCONOMIQUE EN DEMI-TEINTE

Les caractères fondamentaux de l'économie guadeloupéenne ont peu évolué au cours de l'année 1996. La plupart des secteurs d'activité n'ont pas connu d'amélioration de leur situation, car la demande intérieure était jugée globalement insuffisante.

L'évolution la plus notable concerne l'amélioration du pouvoir d'achat des salaires les moins élevés. L'inflation a été nulle au cours de l'année, signe d'un manque de tonicité du courant d'affaires et le SMIC a été porté à 36,98 francs le 1er janvier 1996, puis à 37,91 francs au mois de juillet, rattrapant ainsi le niveau du SMIC métropolitain. Cependant, ces hausses n'ont pas été systématiquement répercutées sur l'échelle des salaires.

1. Les secteurs économiques ont connu une activité morose en 1996

La plupart des secteurs d'activité ont connu une année 1996 plutôt morose.

En ce qui concerne les spéculations agricoles de rente, l'industrie bananière n'a pu reprendre la commercialisation de sa production qu'au mois de mai 1996, après les destructions cycloniques de 1995, et les cours n'ont cessé de se dégrader tout au long de l'année. La filière cannière a enregistré des résultats meilleurs qu'en 1995. La hausse de la production de cannes et de sucre, et l'amélioration du rendement usine sont sans doute liées à la restructuration engagée, mais demeurent insuffisantes : la récolte de 1996 est l'une des plus faibles depuis 1950. Quant à la culture du melon qui avait connu une belle expansion sur le créneau de la contre-saison, elle semble avoir atteint un palier face à la concurrence de pays producteurs traditionnels qui allongent leur période de production.

Dans le secteur de la pêche, les conflits entre les pêcheurs guadeloupéens et les autorités de l'île voisine d'Antigue ont gravement perturbé le déroulement de la campagne 1996, ce qui n'a fait qu'ajouter aux difficultés structurelles de l'activité halieutique.

Les travaux publics souffrent toujours d'une insuffisance de la commande publique en matière d'infrastructures. Plusieurs chantiers d'envergure ont en effet été achevés au cours de l'année (aérogare, prison, deuxième pont sur la Rivière Salée), et les entreprises du secteur sont confrontées à des problèmes de surcapacité de production et de tensions de trésorerie. Seuls les opérateurs du logement social ont bénéficié d'un volume d'activité soutenu.

L'industrie est essentiellement tournée vers le marché intérieur et l'import-substitution. Elle ne contribue que faiblement à la formation de la richesse et son poids dans l'économie a tendance à s'éroder, en raison de l'exiguïté du marché local et d'une concurrence accrue des produits importés qui occupent l'essentiel des linéaires des grandes surfaces.

Le tourisme a connu une année en demi-teinte. Si le nombre d'arrivées à l'aéroport s'est accru en 1996, la fréquentation hôtelière, mesurée sur un échantillon d'hôtels par l'Office du tourisme, a légèrement diminué. En revanche, la croisière et la plaisance ont terminé l'année avec un bilan très positif.

2. Une évolution du chômage préoccupante

Le nombre de demandeurs d'emplois a fortement progressé en 1996 (+6,0 % contre + 4,5% en métropole) pour atteindre 47.056 personnes au 31 décembre, soit 26,8 % de la population active . La hausse a été plus marquée au sein de la population féminine (+ 6,9 %). Le chômage des jeunes de moins de 25 ans a, à nouveau, baissé en 1996 de - 4,3%, ce qui s'explique par l'évolution démographique, l'allongement de la durée des études et les mesures visant à favoriser l'emploi des jeunes.

Le nombre de chômeurs de longue durée a diminué de 1,8 % en 1996. Avec 23.006 personnes au 31 décembre, il représente 48,9% des demandeurs d'emploi.

En juin 1997, le nombre de demandeurs d'emploi s'est élevé à 49.424, soit une progression de 10% par rapport à juin 1996.

3. Une nouvelle dégradation de la balance commerciale

En 1996, le solde commercial s'est à nouveau dégradé et il s'établit à -9,543,5 millions de francs contre - 8.797,6 millions de francs un an plus tôt. Le taux de couverture s'établit à 5,6 % , en net recul par rapport à 1995 (8,4 %) et 1994 (9,8 %).

BALANCE COMMERCIALE

(en millions de francs)

1993

1994

1995

1996

Importations

8 181

8 635

9 601

10 010

Exportations

747

847

804

557

Solde commercial

- 7 433

- 7 788

- 8 797

- 9 453

Taux de couverture (importations/exportations)

9,1 %

9,8 %

8,4 %

5,6 %

Source : Direction générale des douanes

C. LA GUYANE : UNE PHASE DE STAGNATION AVEC DE FORTES DISPARITÉS SECTORIELLES

La Guyane traverse une phase de stagnation voire de récession économique depuis maintenant quatre ans et l'année 1996 s'inscrit dans le prolongement des deux années précédentes. Le département n'a donc pas retrouvé le chemin de la croissance après la récession des années 1992-1993, alors que les tensions sociales devenaient beaucoup plus vives à partir du mois de septembre 1996.

D'une façon générale, l'activité économique a peu évolué. Ainsi, en dépit d'une hausse des prix maîtrisé (+ 1,0 % en 1996) et d'une augmentation sensible du SMIC horaire (+ 9,4 % entre décembre 1995 et décembre 1996), la consommation est restée stable. Par ailleurs, et pour la troisième année consécutive, l'investissement n'a pas repris en Guyane.

Sur le plan social, l'année 1996 s'est caractérisée par une forte détérioration du climat général, avec une augmentation très nette du nombre de conflits sociaux, une grande grève lycéenne et plusieurs journées d'émeutes à Cayenne durant le mois de novembre.

Il convient de rappeler que les transferts publics net en provenance de la métropole représentent déjà plus du quart du PIB de la Guyane.

1. Des évolutions économiques contrastées selon les secteurs d'activité

A l'image des années précédentes, les différents secteurs d'activité ont connu des évolutions assez contrastées.

L'activité spatiale, principal secteur économique de la Guyane, a réalisé le même nombre de tirs que l'année précédente. Toutefois, son programme de qualification du nouveau lanceur européen Ariane 5 a subi un retard important en raison de l'échec du premier lancement. Au total, néanmoins la régularité de l'activité spatiale depuis plusieurs mois bénéficie à l'ensemble de l'économie locale et plus particulièrement aux secteurs des services et du tourisme.

Dans l'ensemble, les filières exportatrices ont enregistré des résultats satisfaisants. En effet, la pêche crevettière réalise à nouveau des prises supérieures au total admissible de captures. De même, le secteur rizicole a connu un second cycle de production excellent et ses exportations sont en progression de 20 %. L'activité aurifère reste bien orientée, avec une intensification des travaux d'exploration.

En revanche, la filière forestière est en repli avec une baisse d'activité et la disparition d'entreprises importantes.

Pour sa part, le secteur du BTP subit toujours les conséquences négatives de la fin de la période des grands travaux. Le volume d'activité reste faible et les effectifs ont pratiquement été réduits d'un tiers en deux ans.

De plus, le développement du secteur " informel " semble s'accélérer. Ce phénomène touche maintenant non seulement le BTP, mais également les services et la restauration. Les artisans sont les premiers touchés par cette évolution.

Enfin, les événements du mois de novembre à Cayenne semblent avoir durablement affecté le secteur du tourisme et de l'hôtellerie et contrarié les efforts entrepris par les professionnels du secteur depuis plusieurs années. Néanmoins, la fréquentation touristique du département a progressé de 10% contre 8,2 % l'année précédente.

2. La progression du chômage reste liée à l'évolution démographique

La forte progression démographique que connaît la Guyane et la crise économique qui prévaut dans le département depuis 1992 pèsent largement sur la situation du marché de l'emploi. Depuis 1991, la situation de l'emploi s'est dégradée à la suite d'une baisse de la demande tant publique (rigueur budgétaire des collectivités locales) que privée. Ainsi, le taux de chômage en Guyane a plus que doublé, passant de 9,7 % en 1991 à 22,1 % en décembre 1996 . L'état de marche de l'emploi guyanais semble se rapprocher progressivement de celui des autres DOM, même si le taux de chômage reste encore largement inférieur en Guyane à celui de l'ensemble des DOM (31,7 % en décembre 1996).

En juin 1997, le nombre de demandeurs d'emploi s'est élevé à 12.314 soit une augmentation de 20 % par rapport à juin 1996.

A moyen terme, les perspectives d'évolution de la population active -lors du dernier recensement, les jeunes de moins de 15 ans représentaient un tiers de la population- imposent la mise en oeuvre d'une politique volontariste de l'emploi et la recherche de secteurs économiques créateurs d'emplois pour intégrer cette main d'oeuvre croissante.

3. Hors activité spatiale, une dégradation de la balance commerciale

Malgré la baisse des importations (hors activité spatiale), la tendance à la baisse du taux de couverture, amorcée en 1995, s'est confirmée en 1996 avec la diminution des exportations. Ainsi, en 1996, le taux de couverture représentait 19,4 % hors activité spatiale contre 20,3 % l'année précédente.

En comptabilisant les importations de marchandises liées à l'activité spatiale, la balance commerciale de la Guyane serait déficitaire de 9,66 milliards de francs. Toutefois, ce résultat ne comprend pas les exportations de services, notamment celles liées à l'activité spatiale. Or, ces dernières peuvent être évaluées à partir du chiffre d'affaires d'Arianespace (environ 7 milliards de francs). En les incluant, la balance commerciale de la Guyane serait déficitaire d'environ 2,6 milliards de francs, soit un taux de couverture approchant 75%.

D. LA RÉUNION : UNE CONJONCTURE ÉCONOMIQUE GLOBALEMENT SATISFAISANTE MALGRÉ DES DIFFICULTÉS STRUCTURELLES PERSISTANTES

Dans la continuité de 1995, l'année 1996 a été marquée à la Réunion par une bonne tenue de la demande intérieure, alimentée par l'amélioration du pouvoir d'achat des ménages et par un recours soutenu au crédit à la consommation. Cette conjoncture, dont les effets ont été les plus sensibles au cours des neuf premiers mois, a surtout bénéficié au commerce. Pour le reste, les évolutions sectorielles sont restées plus incertaines.

1. L'évolution des secteurs d'activité s'inscrit dans la continuité et les difficultés structurelles de certains perdurent

La campagne sucrière 1996-1997, dont l'un des faits majeurs a été l'application d'une nouvelle convention quinquennale Etat-planteurs-usiniers, s'est achevée sur un bilan plutôt favorable. Si la production de cannes a légèrement diminué, en liaison avec les mauvais résultats observés sur les bassins de l'Est, le recul global du tonnage a été plus que compensé par l'amélioration de la richesse en sucre. Dans ce contexte, la production sucrière se situe à un niveau correspondant à celui de la moyenne décennale. Enfin, la campagne rhumière, dont les modalités de contingentement ouvrant droit à un régime fiscal privilégié ont été profondément modifiées en 1995, a été caractérisée en 1996 par une reprise des exportations et une importante diminution des ventes sur le marché local.

La filière fruits et légumes, qui constitue la première spéculation agricole de l'île avant la canne à sucre avec près de 40 % de la valeur de la production agricole finale, poursuit son développement. La production légumière couvre aujourd'hui la quasi-totalité des besoins de la population réunionnaise, tandis que les importations continuent de satisfaire le quart de la consommation fruitière annuelle.

La situation des spéculations agricoles d'exportation traditionnelles s'avère, en revanche, préoccupante. Si la production de vanille, après avoir atteint son plus bas niveau historique en 1995, se redresse quelque peu, notamment grâce aux efforts de réorganisation de la filière entrepris par les professionnels, les résultats de la production de géranium et de vétiver sont, en revanche, de nouveau médiocres, tendant à marginaliser l'activité de fabrication d'huiles essentielles réunionnaises.

S'agissant de l'exploitation des produits de la mer, les prises de la petite pêche et de la pêche au large ont progressé alors que la grande pêche industrielle, dont les produits (poissons et crustacés) sont majoritairement destinés à l'exportation, affiche des résultats en baisse. Ceci à la suite notamment d'une certaine surexploitation des ressources halieutiques des terres australes françaises par des navires étrangers, qui interviennent dans la zone économique exclusive en toute illégalité.

Sur le plan industriel, les résultats sont également contrastés. L'investissement des entreprises s'est inscrit en légère hausse, mais cette tendance positive globale masque des situations non homogènes selon les branches.

Même si les entreprises du bâtiment et des travaux publics ont bénéficié d'un courant d'affaires en hausse dans le domaine des constructions publiques et d'une stabilité de la commande à un niveau élevé pour les travaux routiers, l'activité globale du secteur a été marquée par d'importantes difficultés en 1996. Les défaillances se sont accélérées et les effectifs du secteur se sont de nouveau contractés.

Enfin, après l'amélioration sensible observée en 1995, le secteur touristique présence en 1996 des résultats également très encourageants. L'affluence touristique a nettement progressé, tandis que le taux moyen d'occupation des hôtels s'est amélioré.

Avec plus de 1,2 million de passagers transportés en 1996, le record de 1995 est battu. Sur l'axe Nord-Sud en particulier, le nombre de voyageurs hors transit a augmenté de plus de 15 %. Dans ce contexte, la fréquentation hôtelière s'est améliorée, comme l'atteste la progression de près de 12 % du nombre de clients enregistrés par les établissements de l'île. Face à ces résultats encourageants, les investissements en matière d'équipement hôtelier et touristique se poursuivent.

2. Mais une situation de l'emploi préoccupante qui s'est dégradée en 1996

Dans un contexte pourtant caractérisé par une croissance sensible des offres d'emploi, la situation du marché du travail ne s'est pas améliorée. Avec plus de 94.000 personnes inscrites en décembre 1996, le nombre de chômeurs enregistrés en fin d'année a augmenté de 8 % en glissement annuel. L'indicateur de chômage publié par le ministère du Travail est passé de 37,3 % en 1995 à 40,2 % en 1996 , ce qui constitue le niveau le plus élevé de tous les départements français. En outre, le chômage des jeunes de moins de 25 ans a de nouveau progressé, après trois années consécutives de baisse. La stabilisation du nombre de bénéficiaires du revenu minimum d'insertion à un niveau élevé illustre, par ailleurs, la permanence du déséquilibre entre l'offre et la demande d'emploi. Cette prestation sociale concerne de façon directe ou indirecte un peu plus de 18 % de la population du département.

Le chômage de longue durée s'accroît puisqu'il touche désormais 37.864 personnes (+ 1,9 %) dont 8.709 inscrites depuis plus de trois ans. Il voit toutefois sa part dans le total passer de 42,7 % à fin décembre 1995 à 40,3 % à fin décembre 1996.

Les femmes représentent 46,6 % des demandes d'emploi en 1996 contre 47,3 % un an plus tôt et plus de 60 % des demandeurs d'emplois n'ont aucun diplôme.

En juin 1997, le nombre de demandeurs d'emploi s'est élevé à 95.356, soit une progression de 6 % par rapport à juin 1996.

3. Une nouvelle détérioration de la balance commerciale

BALANCE COMMERCIALE

(millions de francs)

1992

1993

1994

1995 (1)

1996

Importations

12 650

11 855

13 077

13 561

14 214

Exportations

1 108

996

955

1 038

1 071

Balance commerciale

- 11 .542

- 10 859

- 12 122

- 12 523

- 13 143

Taux de couverture (importations/exportations)

8,8 %

8,4 %

7,3 %

7,7 %

7,5 %

Source : Direction régionale des douanes

(1) Chiffres rectifiés


Le déficit de la balance commerciale s'est détérioré, entraînant une légère baisse du taux de couverture (- 0,2 point).

II. LES TERRITOIRES ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES D'OUTRE-MER

A. LA POLYNÉSIE FRANÇAISE : LA MARCHE VERS L'AUTONOMIE ÉCONOMIQUE

1. Un statut d'autonomie renforcé et élargi

La Polynésie française est depuis un peu plus d'un an dotée d'un statut d'autonomie élargie. La loi organique du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française et la loi du 12 avril 1996 complétant le statut du territoire ont renforcé son autonomie, élargi les compétences des autorités territoriales et modernisé le fonctionnement des institutions.

a) La loi du 5 février 1994 d'orientation pour le développement économique, social et culturel de la Polynésie française

La loi du 5 février 1994 d'orientation pour le développement économique, social et culturel de la Polynésie française a traduit dans les textes le pacte de progrès issu de la large concertation entreprise par le Gouvernement français avec les autorités élues du territoire, le conseil économique, social et culturel de la Polynésie française et les forces vives du territoire.

Cette loi prévoit pour dix ans les conditions d'aide financière de la France à la Polynésie. Le comité de suivi de l'application de cette loi s'est réuni pour la troisième fois le 12 août 1997 et a pu établir le bilan suivant :

- au 31 décembre 1996, le montant global des engagements était de 42 % des montants contractualisés du contrat de développement ce qui constitue un niveau satisfaisant après deux ans et demi d'exécution du contrat. Il en est à peu près de même pour le contrat de ville qui concerne cinq des six communes de la zone urbaine de Papeete.

En 1996, les transferts financiers de l'Etat se sont élevés à 6,81 milliards de francs, en légère diminution par rapport à 1995 (- 1,02 %). L'évolution du taux de couverture des ressources extérieures globales propres au territoire s'établit pour la même année à 33 % alors qu'il était de 32 % en 1995.

Le 12 août 1997, le représentant de l'Etat et le président du Gouvernement de la Polynésie française ont signé un quatrième avenant au contrat de développement, pour prendre en compte des redéploiements de crédits au profit d'opérations nouvelles dans les domaines suivants : agriculture, ressources de la mer (perlicutlure, pêche et aquaculture), tourisme, aides aux entreprises, insertion et formation professionnelle, infrastructures de communication, assainissement et traitement des déchets, équipements scolaires, compte-tenu des résultats du recensement général de la population réalisé en 1996.

Ce avenant précise enfin les conditions de l'étalement sur une année supplémentaire de l'exécution de la totalité des engagements pluriannuels de l'Etat décidée, comme pour les contrats de plan Etat-région, dans la loi de finances pour 1997.

b) Convention relative au renforcement de l'autonomie économique de la Polynésie française

La convention relative au renforcement de l'autonomie économique de la Polynésie française, signée le 25 juillet 1996, après l'annonce de la cessation définitive des activités du centre d'expérimentation du Pacifique, prolonge et confirme la volonté de l'Etat de maintenir son soutien pour permettre de réussir la nouvelle étape dans laquelle la Polynésie française est engagée pour son développement économique, social et culturel.

Ce texte fixe à 990 millions de francs le montant des flux financiers de référence à maintenir pendant dix ans.

Le fonds pour la reconversion de l'autonomie économique de la Polynésie française, géré conjointement par l'Etat et le territoire se met en place. Les modalités de gestion de ce fonds ont été approuvées par une convention signée le 14 juillet 1997. Les communes, les partenaires privés, les représentants des salariés, les chefs d'entreprises pourront ainsi être associés à cette démarche.

La destination de ce fonds est définie, pour l'essentiel, dans le " programme stratégique " élaboré par le Territoire. Celui-ci donne la priorité à l'amélioration du taux de couverture des importations et, plus particulièrement, à la croissance des recettes du tourisme et au développement des exportations de perles et de produits de la mer. Le premier secteur, considéré comme le principal " moteur " de la reconversion économique, doit procurer à la Polynésie, à l'horizon 2015, plus de 40 % de ses recettes extérieures, prenant la place aujourd'hui assurée par les transferts publics.

2. Une activité économique en nette progression

a) Les principaux indicateurs socio-économiques

En glissement annuel sur douze mois, l'indice général des prix a augmenté de 1996 de 1,5 % contre 1,1 % en 1995. Cette légère hausse des prix provient essentiellement de l'augmentation du prix des produits alimentaires et des services.

D'après l'enquête sur l'emploi en 1994, le taux de chômage s'établirait à 11,8 % sur l'ensemble du Territoire , soit un effectif de 9.320 personnes. Ce taux est sensiblement inférieur à celui que l'on observe dans les autres départements et territoires d'outre-mer (de 19 à 34 %), mais ce différentiel est largement imputable à l'absence d'un système d'indemnisation du chômage et d'un revenu minimum d'insertion, ainsi qu'à la place toujours importante occupée par le secteur primaire et l'économie traditionnelle, pourvoyeurs de nombreux emplois non ou peu qualifiés.

Le taux de chômage des moins de 25 ans s'établit à 29 % sur l'ensemble du Territoire. Par ailleurs, la proportion de chômeurs parmi l'ensemble des actifs est deux fois plus élevée chez les femmes (16,7 %) que chez les hommes (8,3 %).La moitié environ des personnes à la recherche d'un emploi sont au chômage depuis plus d'un an.

Après une dégradation en 1995, la balance commerciale s'est légèrement redressée en 1996, présentant un solde négatif de 71 milliards de francs CFP contre 74 milliards en 1995. Le taux de couverture des importations par les exportations s'élève à près de 25 %, peu inférieur au record établi en 1994.

Par contre, hors réexportations, le déficit commercial s'établirait à plus de 79 milliards de francs CFP et le taux de couverture ne serait que de 16,3 %, ce qui représenterait néanmoins une amélioration par rapport à l'année précédente.

BALANCE COMMERCIALE

(en millions de francs CFP)

1992

1993

1994

1995

1996

Variations 1994/1995
(en %)

Importations

86 021

86 905

87 827

91 383

94 551

+ 3, 5

Exportations

10 240

15 183

22 287

17 548

23 433

+ 33,5

dont réexportations

5 180

6 535

9 282

7 104

7 981

+ 12,3

Solde commercial

- 75 781

- 71 722

- 65 540

- 73 835

- 71 118

- 3,7

Taux de couverture (importations/exportations)

11,9 %

17,5 %

25,4 %

19,2 %

24,8 %

Source : ITSTAT

b) La situation de quelques secteurs d'activité

En ce qui concerne la fréquentation touristique, le Territoire avait été affecté par une lente érosion commencée en 1987 (142.820 touristes) et qui avait conduit à un niveau plancher en 1991 avec 120.938 touristes.

Une remontée de la fréquentation touristique a commencé en 1992 avec notamment l'ouverture de la desserte à la compagnie Corsair en 1993, qui avait permis une baisse importante des prix du transport aérien.

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1995/1996
(en %)

Nombre de touristes

135.873

139.705

132.361

120.938

123.619

147.847

166.086

178.222

163.774

- 8

En 1996, on observe néanmoins une chute de plus de 50 % du nombre des touristes japonais et de 25 % du nombre des touristes allemands, en raison des péripéties qui ont marqué la reprise, puis l'arrêt des essais nucléaires dans le Pacifique.

On devrait assister à un retour de la fréquentation touristique en Polynésie à un niveau se situant dans la tendance observée depuis 1993, si la tendance observée depuis septembre 1996 se confirme en 1997.

La production traditionnelle de la Polynésie est le coprah et elle est essentielle au maintien de ressources pour les populations rurales des îles, notamment aux Tuamotu et sur les atolls où la perliculture n'existe pas.

En 1995, la production de coprah avait augmenté de 4 % et s'élevait à près de 11.000 tonnes, mais elle a, à nouveau, baissé de 7 % en 1996.

La production de l'huilerie de Tahiti est évaluée ainsi :

(Tonnes)

PRODUCTION

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Variation 1996/1995
(en %)

Coprah trituré

10 954

9 883

10 341

9 311

11 181

10 387

- 7

Huile brute

6 743

5 707

6 036

5 380

6 620

6 260

- 5

Huile raffinée

173

284

224

356

342

187

- 45

Les exportations d'huile brute ont augmenté de 52 % en valeur (404 millions de francs CFP contre 266 millions de francs CFP en 1995) grâce à une augmentation du tonnage exporté (+ 23,5 %) et à une amélioration du prix.

La perliculture a pris son essor à partir de 1983 et s'est développée depuis, en transformant le nord de l'archipel des Tuamotu et des Gambier, dont la population a augmenté de 24 % entre 1988 et 1996 contre + 16 % pour l'ensemble de la Polynésie française.

Une trentaine d'îles et environ 2.000 personnes tirent aujourd'hui leurs revenus de cette activité.

La quantité de perles exportées n'a cessé d'augmenter depuis dix ans et la perle est devenue de loin le premier poste d'exportation en valeur du Territoire :

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Poids (kg)

833

1 157

2 187

2 902

4 387

6 122

Valeur (MF CFP)

4 424

4 251

7 772

11 967

9 611

14 448

En 1996, les exportations de perles ont progressé à la fois en quantités (+ 25 %) et en valeur (+ 50 %). Cette forte augmentation est liée, en grande partie, à une pénurie de perles japonaises dont la production a été affectée par une forte mortalité des huîtres perlières consécutive à la pollution. Une telle situation devrait perdurer pendant deux ou trois ans, ce qui -joint à l'expansion de nouveaux marchés comme les Etats-Unis ou les Nouveaux pays industrialisés de l'Asie du sud-est- augure d'une période très favorable pour la production de perles noires de la Polynésie au cours des prochaines années.

Le secteur du bâtiment et des travaux publics représente quelque 5 % du produit intérieur brut et 7 % de la valeur ajoutée des branches marchandes. Ce secteur occupe environ 6.200 personnes, soit 11,7 % des emplois déclarés.

Une amélioration sensible de l'activité des entreprises du bâtiment en 1996, particulièrement au second semestre, a pu être constatée. Des programmes privés de promotion immobilière ont été encouragés par les mesures d'incitation fiscale prises par le Territoire dès 1995. Cet effet s'amplifie en 1997, avec la mise en chantier de plusieurs projets hôteliers de grande envergure bénéficiant également de montages financiers en défiscalisation.

B. L'AVENIR DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE

1. Au plan institutionnel, la préparation du scrutin d'autodétermination de 1998

a) Une application satisfaisante de la loi référendaire du 9 novembre 1988

L'ensemble du dispositif institutionnel prévu par la loi référendaire du 9 novembre 1988 fonctionne de façon satisfaisante.

La décentralisation institutionnelle résultant de la création des trois provinces permet une meilleure répartition des responsabilités et une meilleure prise en compte des besoins de la population.

Le rééquilibrage économique, social et culturel s'opère progressivement grâce aux mesures et dispositifs prévus dans la loi référendaire. Il s'agit notamment des dispositions relatives aux budgets du territoire et des provinces et actions des établissements publics d'Etat : agence de développement rural et d'aménagement foncier, institut de formation des personnels administratifs, agence de développement de la culture canaque, institut calédonien de participation ainsi que des contrats de développement et du contrat de ville pour Nouméa.

La loi référendaire précise, dans son article 2, qu'entre le 1er mars et le 31 décembre 1998, les populations intéressées de la Nouvelle-Calédonie seront appelées à se prononcer par un scrutin d'autodétermination, conformément aux dispositions de l'article 53 de la Constitution, sur le maintien du territoire dans la République ou sur son accession à l'indépendance.

b) L'état des discussions sur l'avenir du territoire

Si de fréquents contacts se sont poursuivis entre le Gouvernement et les deux partenaires des accords de Matignon, la reprise des discussions sur l'avenir institutionnel du territoire se heurte à un préalable posé par le FLNKS. Ce préalable porte sur l'accès aux ressources minières nécessaires à l'alimentation du projet d'usine métallurgique de transformation du nickel en province nord présenté par la société minière du sud Pacifique (SMS), société d'extraction minière appartenant à la province nord, et Falconbridge (groupe canadien, deuxième producteur mondial de nickel).

Le Gouvernement a affirmé l'importance qu'il attache à la réalisation de l'usine métallurgique en province nord au titre du rééquilibrage. Il a chargé M. Philippe Essig d'une mission pour évaluer les perspectives économiques et industrielles de ce projet et faciliter l'aboutissement des discussions entre les sociétés Eramet-SLN, SMSP et Falconbridge en entendant les parties et en proposant, si nécessaire, les voies d'un accord équilibré. M. Philippe Essig, qui s'est rendu en Nouvelle-Calédonie du 23 au 30 août 1997, a remis ses premières conclusions au Premier ministre le 20 septembre dernier. Sa mission, qui a jugé crédible le projet défendu par le FLNKS, a été prolongée d'un mois pour examiner les conditions techniques et financières d'accès à la ressource.

Par ailleurs, M. Philippe Essig a été chargé de conduire une réflexion globale sur la valorisation des ressources minières du territoire. Il devra remettre ses conclusions pour la fin de l'année 1997.

2. L'activité économique est, dans l'ensemble, restée bien orientée en 1996

a) Les principaux indicateurs socio-économiques

Le nouveau recensement général de la population du territoire fait état de 196.836 habitants au 16 avril 1996. Les résultats ont été officialisés par le décret n° 96-1084 du 11 décembre 1996.

La population du territoire croît de 19,9 % depuis le recensement de 1989, ce qui représente une croissance annuelle de 2,6 %, légèrement supérieure à celle de la période précédente (2,1 % par an de 1983 à 1989).

Le rôle économique du Grand Nouméa s'affirme, puisqu'il regroupe 60,4 % de la population néo-calédonienne avec un accroissement de 21,8 % par rapport à 1989.

Le recensement permet de faire le point sur l'équilibre démographique des différentes communautés vivant sur le territoire.

1988

1989

1996

Effectifs

%

Effectifs

%

Effectifs

%

Européenne

53.974

37,1

55.085

33,6

67.151

34,1

Indonésienne

5.319

3,7

5.191

3,2

5.003

2,5

Mélanésienne

61.870

42,6

73.598

44,8

86.788

44,1

Ni Vanuatu

1.212

0,8

1.683

1

2.244

1,1

Tahitienne

5.570

3,8

4.750

2,9

5.171

2,6

Vietnamienne

2.381

1,6

2.461

1,5

2.822

1,4

Wallisienne

12.174

8,4

14.186

8,6

17.763

9

Autre et non déclarée

2.868

2

7.219

4,4

9.894

5

TOTAL

145.368

100

164.173

100

196.836

100

Sources : INSEE/ITSEE

La commune mélanésienne, la plus nombreuse (44,1 %), croît de 2,4 % en rythme annuel. Elle est peu affectée par les migrations extérieures et sa croissance vient principalement de l'excédent des naissances sur les décès. Toutefois, sa part dans la population totale a diminué en raison de la baisse de la natalité et de la hausse du flux migratoire. Cette population reste très jeune (47,2 % de la population a moins de 20  ans), même si cette jeunesse s'atténue un peu.

Le rythme d'accroissement annuel moyen de la communauté européenne s'est accéléré (+ 2,9 %). Les Européens représentent désormais 34,1 % de la population néocalédonienne contre 33,6 % en 1989. La population européenne vieillit, mais à un rythme plus lent que précédemment, la base de sa pyramide des âgées s'est, en effet, légèrement élargie. Il convient de noter que 30,8 % des Européens ont moins de 20 ans.

Le marché de l'emploi s'est maintenu dans un état stationnaire depuis trois ans :

- le nombre des emplois déclarés à la CAFAT (Caisse de compensation des prestations familiales, des accidents du travail et de prévoyance des travailleurs de Nouvelle-Calédonie) plafonne autour de 44.000 depuis trois ans, pour s'établir à 44.832 en 1996 ;

- le nombre des demandeurs d'emploi-non-satisfaits, qui avait plafonné à 5.000 en 1989 et 1990, a progressé ces dernières années pour atteindre environ 7.500 en 1996, mais en diminution de 0,5 % par rapport à 1995. Ce signe encourageant ne doit pas masquer la diminution de près de 14 % des offres d'emploi. Cette baisse traduit les difficultés de l'économie néo-calédonienne à générer de nouveaux emplois. Outre les problèmes conjoncturels, le plus préoccupant semble être l'inadéquation qualitative, quantitative et géographique entre l'offre et la demande. De plus, le nombre de demandeurs d'emploi " réel " est certainement supérieur du fait que de nombreuses personnes ne font pas appel à l'Agence pour l'emploi dans leur recherche d'emploi.

La hausse des importations associée à la légère baisse des exportations dégrade encore le solde la balance commerciale qui affiche un déficit de 42.862 millions de francs CFP pour l'exercice 1996. En conséquence, le taux de couverture des importations par les exportations diminue pour s'établir à 54 % contre 59 % précédemment.

BALANCE COMMERCIALE DES BIENS

(en millions de francs CFP)

1992

1993 (1)

1994 (1)

1995 (1)

1996

Variations
1996/1997

Importations

89 160

87 951

87 307

86 894

93 087

+ 7,1 %

Exportations

40 200

39 653

42 088

51 251

50 225

- 2,0 %

Déficit commercial

- 48 960

- 48 298

- 45 219

- 35 643

- 42 862

+ 20,3 %

Taux de couverture (importations/ exportations)

45 %

45 %

48 %

59 %

54 %

Source : ITSEE et Service des mines

(1) Chiffres rectifiés


Le déficit commercial avec la France métropolitaine reste particulièrement important (- 24,6 milliards de francs CP) : il représente 57,5 % du déficit global, soit 16 points de plus que la part de marché de la métropole en Nouvelle-Calédonie. Le territoire est aussi très nettement déficitaire vis-à-vis de ses voisins australien (- 8,4 milliards de francs CFP) et néo-zélandais (- 6,1 milliards de francs CFP). Seuls les échanges avec le Japon sont significativement excédentaires (+ 8,5 milliards de francs CFP).

b) Une activité économique globalement soutenue en 1996

Après les années de redressement entre 1987 et 1989 -marquées notamment par le retour à la paix civile, les effets de la loi référendaire et une reprise de l'ensemble des activités économiques sur le territoire (cette reprise ayant été favorisée par l'envolée des cours du nickel pendant dix-huit mois)- la Nouvelle-Calédonie a connu, de 1990 à 1994, une période de croissance ralentie marquée par une chute des cours du nickel consécutive au ralentissement économique des pays industrialisés.

Les années 1995 et 1996 ont été plutôt favorables, avec une augmentation des activités liées au nickel et un environnement politique marqué par la recherche d'une solution consensuelle pour l'échéance de 1998.

Au cours des trois dernières années, le nickel a représenté en moyenne 93,5 % des exportation du territoire. Avec 12,3 % de la production mondiale et 20 % des réserves identifiées en 1995, il constitue un atout majeur pour le développement du territoire. En contrepartie, l'économie locale est extrêmement dépendante de son exploitation qui est, elle-même, tributaire des fluctuations du marché mondial. Par rapport aux pays concurrents (Canada, Russie, Indonésie...), la Nouvelle-Calédonie est handicapée par des coûts de production (énergie, main-d'oeuvre...) relativement élevés.

EXPORTATION DE MATTES ET DE FERRONICKELS (EN MÉTAL CONTENU)

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Quantité (t)

45.841

41.289

39.991

47.771

49.538

51.894

53.768

Valeur (MF CFP)

35.677

32.781

26.117

27.830

31.193

35.271

35.059

En 1991 et 1992, le secteur du tourisme avait subi les conséquences, d'une part du conflit du Golfe qui avait affecté la venue des touristes japonais et, d'autre part, de la récession des économies australienne et néo-zélandaise.

L'année 1993 a marqué un certain retour à la croissance, mais c'est surtout l'année 1994 qui a bénéficié des effets positifs, d'une part, des projets d'extension des capacités hôtelières et, d'autre part, de l'ouverture de la desserte aérienne du territoire à la concurrence (Air Outre-Mer et Corsair).

En 1995, la hausse de fréquentation a été faible (+ 1,5 %), en raison des conséquences négatives de la reprise des essais nucléaires sur la venue de touristes en provenance d'Australie ou de Nouvelle-Zélande et malgré une progression forte de la clientèle en provenance de la France métropolitaine (+ 17 %).

L'arrêt des essais nucléaires a permis de relancer la venue des touristes (+ 54 % par rapport au 1er semestre 1996, de sorte que le chiffre record de fréquentation connu en 1984 (91.512 touristes) a toutes les chances d'être dépassé en 1997.

Le secteur du bâtiment et des travaux publics traverse une période délicate et quelques entreprises montrent d'évidents signes de faiblesse (difficultés de trésorerie, licenciements économiques et même cessation d'activité). Le secteur est notamment affecté par la contraction de la demande publique qui n'est pas relayée par les opérateurs privés. Le secteur est également confronté à des problèmes structurels provenant à la fois des conditions de concurrence et d'exercice de la profession et à sa situation financière caractérisée par une insuffisance de fonds propres.

Pour l'année 1997, le volume des travaux prévu en appels d'offres est en augmentation. Concernant le bâtiment, près de la moitié touche l'habitat social, priorité affichée par les pouvoirs publics. Les opérations concernant les travaux publics et les constructions industrielles, à quelques exceptions près, sont d'un faible montant.

Un plan de relance du bâtiment, élaboré par l'exécutif, a été mis en place dans le courant de l'année 1997. Il prévoit notamment un investissement cumulé de 12,9 milliards de francs CFP sur trois ans, dont 7,5 milliards de francs seraient à la charge du Territoire et 5,4 milliards de francs à la charge de l'Etat. Ces nouveaux investissements devraient permettre la création de 430 emplois par an, au lieu des 850 suppressions d'emplois attendus si aucune mesure n'est prise. Le texte prévoit également l'instauration d'une couverture sociale obligatoire pour les travailleurs indépendants.

C. WALLIS ET FUTUNA : UNE CONJONCTURE SANS RELIEF

1. Le niveau institutionnel et politique

Au plan institutionnel, le territoire est régi par la loi du 29 juillet 1961 modifiée et sur le plan politique, une réflexion est en cours pour favoriser une plus grande responsabilité des élus du territoire. En novembre 1996, la fidélité du territoire à la France a été réaffirmée par une délégation d'élus et de chefs coutumiers.

La priorité de l'action gouvernementale est d'assurer le développement économique et social du territoire avec la poursuite de la mise en oeuvre du contrat de plan 1994-1998 et de la convention de développement pour la période 1995-2000, qui comporte un engagement financier de l'Etat de 158 millions de francs. Cet engagement s'ajoute aux 58 millions de francs du contrat de plan 1994-1998.

2. Une certaine atonie de l'activité économique

a) Les indicateurs globaux

Le recensement de 1996 fait apparaître un très faible taux de croissance du nombre d'habitants du territoire depuis 1990, soit + 0,6 % par an contre + 4,4 % par an sur la période 1976-1983 et + 1,3 % par an entre 1983 et 1990. Cet infléchissement de la progression de la population provient pour l'essentiel d'un solde migratoire négatif en faveur de la Nouvelle-Calédonie. Cette évolution est révélatrice des difficultés locales à trouver un emploi, d'autant plus que le territoire est fort d'une population jeune, de mieux en mieux formée mais qui ne dispose pas sur place des possibilités d'embauche appropriées.

En l'absence de données sur le chômage, la situation sur le marché de l'emploi ne peut être appréhendée qu'au travers de l'évolution des effectifs salariés recensés par la Caisse locale de retraite et la Caisse de compensation des prestations familiales (CLR-CCPF).

EFFECTIFS SALARIÉS PAR SECTEUR D'ACTIVITÉ

Sept. 1993

Sept. 1994

Sept. 1995

Sept. 1996

Secteur public

814

1 072

1 118

1 012

Secteur privé

530

451

553

536

TOTAL

1 344

1 523

1 671

1 548

Les emplois dans le secteur public représentent les deux tiers des emplois salariés du territoire.

La hausse de l'indice des prix pour 1996 est de 1,4 % par rapport à 1995. Bien que modérée, elle est plus importante que les autres années et elle est due notamment à la hausse des prix des hydrocarbures qui s'est progressivement répercutée sur d'autres services (électricité, eau).

b) L'activité économique dans quelques secteurs

Le BTP a pu maintenir son activité en 1996 grâce à la commande publique, le sous-secteur de la construction de logements individuels souffrant d'une importante baisse pour cause de saturation du marché. Faute de nouveaux chantiers d'envergure et d'une véritable relance de la construction de logements, les perspectives d'avenir de ce secteur sont plutôt incertaines à Wallis. De nombreux projets devraient toutefois être réalisés à Futuna qui rattrape progressivement son retard d'équipement en infrastructures de base.

L'activité commerciale dispose toujours d'une position dominante mais n'a pas connu d'évolution marquante en 1996. Des créations d'emploi limitées et l'absence de revalorisation du SMIG en 1996 n'ont pas permis de stimuler la demande intérieure qui a surtout été soutenue par l'endettement croissant des ménages. Les concours de caractère bancaire consentis aux particuliers par l'établissement de crédit local ont, en effet, augmenté de façon marquée en 1996 (+ 25,5 % par rapport à 1995).

D. SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON : LA RECHERCHE DE SOLUTIONS ÉCONOMIQUES DIVERSIFIÉES

On peut brièvement rappeler que l'économie de Saint-Pierre-et-Miquelon, fondée auparavant sur la pêche industrielle et l'industrie de transformation du poisson, a connu un retournement brutal en 1992 avec, d'une part, la sentence du tribunal arbitral de New-York qui a réduit considérablement la zone économique exclusive de l'archipel et, d'autre part, la décision du Canada de réduire le quota de pêche, puis d'interdire toute pêche de morue pour une période de cinq à sept ans (donc jusqu'en 1997 ou 1999), en raison du risque réel d'épuisement des stocks.

Depuis de très gros efforts ont été faits pour tenter de reconvertir et de diversifier l'économie ce qui n'a été possible que grâce à des efforts très conséquents de l'Etat et de la collectivité territoriale.

1. Les principaux indicateurs

La situation de l'emploi

Paradoxalement, le marché de l'emploi ne s'est pas dégradé en 1996 : il s'est même légèrement amélioré avec une baisse de 0,7 % de la moyenne des demandeurs d'emploi en fin de mois, qui s'est élevée à 276 en 1996 contre 278 en 1995.

L'évolution des prix

Le calcul d'un indice local des prix, interrompu depuis juin 1992, sera repris en 1997 sur la base d'une publication trimestrielle.

En attendant, il a été procédé à une estimation de la hausse des prix intervenue entre juin 1992 et décembre 1996 : cette hausse serait de 10,4 % en trois ans et demi.

La balance commerciale

La diminution des exportations en valeur (21 millions de francs en 1996 contre 55 millions de francs en 1995) a contribué à la chute du taux de couverture des échanges qui est descendu à 6 % en 1996 contre 15 % en 1995.

BALANCE COMMERCIALE

(en millions de francs)

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Importations (MF)

459

404

344

414

371

371

Exportations (MF)

248

200

29

83

56

21

Solde commercial

- 211

- 204

- 315

- 331

- 315

- 350

Taux de couverture (importations/exportations)

54 %

49 %

8 %

20 %

15 %

6 %

Source : Services des douanes

2. Les efforts de reconversion de la pêche industrielle restent, pour le moment, sans effet

Les activités d'Interpêche (pêche de 10.000 à 15.000 tonnes de poissons par cinq chalutiers, puis traitement et transformation dans une usine à terre avant expédition sur la métropole et l'Amérique du nord) ont été interrompues depuis 1993.

Face à cette situation, les pouvoirs publics ont, d'abord, mis en place un dispositif d'aides à Interpêche qui, par différents biais (convention FNE à partir du 15 septembre 1992, convention de congés de conversion du 1er août 1993 au 31 août 1994, restructuration financière d'Interpêche...) ont conduit l'Etat et la collectivité territoriale à apporter un soutien financier s'élevant à 165 millions de francs de septembre 1992 à décembre 1996.

Puis les pouvoirs publics ont mené avec le Gouvernement canadien des négociations qui ont débouché sur l'accord de pêche franco-canadien du 2 décembre 1994 qui prévoit notamment que Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficierait de quotas de pêche de morue et de pétoncles qui seront fixés, non pas de manière arbitraire par les autorités canadiennes, mais par des pourcentages des TAC (Total admissible de captures) déterminés chaque année de manière conjointe et concertée.

De plus, parmi les mesures prises pour relancer les activités liées à la pêche figurent la décision d'alimenter une unité industrielle (Archipel SA) par du poisson importé russe, puis le lancement d'une activité nouvelle avec la pêche au pétoncle (acquisition du navire coquillier Avel Mad).

Actuellement, les résultats ne sont pas à la hauteur des espérances : la production d'Archipel SA est passée de 1.285 tonnes en 1995 à 516 tonnes en 1996, tandis que le coquillier Avel Mad n'a débarqué que 250 tonnes de pétoncles en 1996 sur un quota alloué de 2.275 tonnes.

Par contre, les efforts fais pour redéployer la pêche artisanale vers de nouvelles activités semblent porter des fruits avec l'exploitation des oeufs de lumpe, du requin et du crabe des neiges.

E. MAYOTTE : UNE CROISSANCE QUI SE CONFIRME, SOUTENUE PAR LA PROGRESSION DES TRANSFERTS PUBLICS

1. Une économie soutenue par les transferts publics

En raison de ses retards de développement dans de nombreux secteurs et, en particulier, en matière d'éducation et de santé, Mayotte continue de bénéficier d'un effort d'équipement sans précédent sous l'impulsion des transferts publics qui augmentent à un rythme soutenu (1.087 millions de francs en 1996, soit + 14 %).

Une part importante des concours de l'Etat en faveur du développement de Mayotte a fait l'objet d'une programmation dans le cadre, d'une part, du contrat de plan 1994-1998 -135 millions de francs engagés en 1996 sur un total d'environ un milliard pour la durée du plan- et, d'autre part, de la convention de développement économique et social 1995-1996 visant à prendre en compte des retards spécifiques de l'économie mahoraise -450 millions de francs en 1996 sur un total de deux milliards de francs pour la durée de la convention-.

Ces actions économiques s'accompagnent d'un effort équivalent d'évolution juridique avec l'extension par ordonnances à Mayotte de textes législatifs et réglementaires pour mettre en place un environnement institutionnel et juridique favorable à l'évolution de la collectivité.

Dans le même temps, on assiste à un phénomène encourageant pour l'avenir du territoire : l'investissement privé s'accélère grâce à la consolidation de la situation financière d'entreprises existantes ou en création, et ce, sur ressources extérieures à Mayotte. En effet, cette île par sa position géographique et sa sécurité institutionnelle due à son appartenance à la communauté française, constitue pour les producteurs une base de pénétration des marchés comoriens et malgaches.

Néanmoins, Mayotte est pénalisée par un grave retard de développement dans le domaine de l'emploi. Etant donné son évolution démographique exponentielle -la population de l'île a doublé entre 1978 et 1991, pour s'établir à 125.000 selon les projections en 1996-, la population jeune est nombreuse et va encore s'accroître vu l'arrivée de classes d'âge nombreuses. Mais cette population souffre de graves insuffisances de formation et de qualification et ne peut répondre aux besoins des entreprises. L'action des pouvoirs publics dans le domaine de l'éducation sera déterminante à moyen terme.

2. Une évolution économique contrastée selon les secteurs d'activité

Le secteur de la construction a enregistré des résultats satisfaisants, du fait de la poursuite du programme scolaire. De plus, grâce à la concertation qui s'est nouée entre les professionnels et les pouvoirs publics, un certain nombre d'améliorations ont été obtenues, au rang desquelles l'instauration d'une commission de qualification des entreprises, la simplification de l'accès des petites entreprises aux marchés publics et au financement bancaire de ces mêmes marchés. Le rythme de construction de logements ne s'est pas ralenti même si l'on a constaté une élévation du coût unitaire des logements qui absorbe, en partie, l'augmentation de la ligne budgétaire unique.

Dans le domaine agricole, l'événement majeur aura été la contre-performance des cultures d'exportation, ylang-ylang et vanille, victimes de la concurrence de produits de synthèse ou du développement de la production à un moindre coût de certains pays. Les productions animales, maraîchères ou fruitières connaissent des performances diverses souvant par absence d'une véritable logique d'entreprise et de circuits de commercialisation plus rationnels.

Le secteur industriel, qui s'articule autour d'un nombre croissant d'entreprises assez performantes, s'est également bien développé. Le recours au dispositif de défiscalisation des investissements a largement alimenté cet élan. Pour répondre à une demande croissante des investisseurs, d'autres surfaces aménagées ont été créées pour pallier l'engorgement de la principale zone d'activité de Mayotte à Kawéni.

En revanche, dans le domaine du tourisme, qui pourrait constituer l'un des pôles de développement de Mayotte, aucun progrès notable n'a été enregistré en 1996. La majeure partie des propositions du projet de plan touristique élaboré en 1995 n'a pas été mise en application.

DEUXIÈME PARTIE -

DES MOYENS BUDGÉTAIRES EN AUGMENTATION POUR CONCILIER SOUTIEN À LA CROISSANCE ET JUSTICE SOCIALE

Avec 5,22 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, le budget de l'outre-mer est en progression de 7,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997. Le montant des autorisations de programme a été fixé à 1,89 milliards de francs soit une légère diminution par rapport à 1997 (1,95 milliards de francs).

Pour être tout à fait exact, il convient de préciser que :

- 96 millions de francs proviennent d'un transfert du budget du logement et sont destinés à la résorption de l'habitat insalubre dans les départements d'outre-mer ;

- 300 millions de francs inscrits dans les crédits du fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer vont servir à mettre en oeuvre dans les départements d'outre-mer la loi sur le Plan Emploi Jeunes votée en octobre dernier.

Hors ces deux mouvements, le budget de l'outre-mer ne serait que reconduit.

Néanmoins, ce projet de budget entend favoriser une croissance solidaire dans l'outre-mer en intervenant sur l'emploi, le logement social et le développement régional.

I. DES MOYENS BUDGÉTAIRES ACCRUS POUR LA POLITIQUE DE L'EMPLOI OUTRE-MER

A. LA PROGRESSION DES CRÉDITS DU FONDS POUR LA POLITIQUE DE L'EMPLOI OUTRE-MER

Les crédits du Fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer (FEDOM) sont fixés à 1,7 milliards de francs pour 1998 soit en augmentation de 14,3 % par rapport à 1997.

Mais en réalité cette augmentation ne fait que traduire une mesure nouvelle à savoir l'inscription dans le budget de l'outre-mer des crédits nécessaires à la mise en oeuvre de la loi sur le Plan Emploi-jeunes outre-mer.

Hors ces crédits, qui s'établissent à 300 millions de francs, les dotations du FEDOM sont en légère diminution par rapport à 1997 (1,40 milliard de francs au lieu de 1,49 milliard de francs inscrits en loi de finances initiale pour 1997) et la répartition des crédits entre les différentes solutions d'insertion est un peu modifiée. Mais il convient de rappeler que la fongibilité de la ligne permettra les ajustements nécessaires.

En 1998, les crédits inscrits hors " Plan Emploi-jeunes " devront financer 48.500 nouvelles solutions d'insertion réparties comme suit :

(en millions de francs)

1997

1998

Ressources
(en milliers de francs)


Nombre

Ressources
(en milliers de francs)


Nombre

Contrats emplois solidarité (CES)

665

33 500

451,9

25 000

Contrats d'accès à l'emploi (CAE)

622,2

10 600

721

8 000

Contrats d'insertion pour l'activité (CIA)

169,4

15 000

180,1

15 000

Primes à l'emploi

22

500

27

500

De manière générale, il convient de souligner la diminution du nombre d'emplois d'insertion qui ont été financés sur les crédits du FEDOM depuis 1996 : 66.200 contrats aidés avaient été financés en 1996 et seulement 48.500 le seront en 1998.

Certes, le plan emploi-jeunes vient compléter ce dispositif mais on peut déplorer qu'il vienne compenser la diminution des crédits prévus sur un dispositif existant.

En ce qui concerne la mise en oeuvre du plan Emploi-Jeunes les 300 millions de francs inscrits au chapitre 44-03 (FEDOM) du budget du Secrétariat d'Etat à l'outre-mer, devraient permettre de financer en 1998, la création de 6.000 emplois pour les jeunes. Toutefois, pour tenir compte de la situation particulière des DOM, dont les taux de chômage sont selon les départements de deux à trois fois plus élevés qu'en métropole et dépassent même 50 % pour les jeunes, des dispositions particulières d'adaptation seront prises pour l'application de ce dispositif.

Le décret instituant ces adaptations et le décret permettant au FEDOM de prendre en charge la contribution de l'Etat au financement de ces nouveaux emplois, sont en cours d'élaboration et seront très prochainement soumis à l'avis des conseils généraux des DOM.

B. LE BILAN DU DISPOSITIF D'INSERTION DU RMI (REVENU MINIMUM D'INSERTION)

Il convient de rappeler que le nombre de bénéficiaires, après s'être stabilisé entre fin 1991 et avril 1993, augmente à nouveau du fait de la dégradation de la situation économique, de la fin de l'alignement des allocations familiales et de la forte baisse des entrées en CES (contrats emploi solidarité). Fin juin 1997 il y avait 109.503 allocataires, contre 106.668 en décembre 1996 soit une augmentation de 2,6 % ceci représente environ 245.000 personnes soit 16 % de la population des DOM qui sont ainsi bénéficiaires du RMI.

Le volet insertion proposé aux bénéficiaires du RMI est mis en oeuvre par les agences d'insertion (ADI) créées par la loi du 25 juillet 1994 avec les objectifs suivants :

- favoriser la reprise d'activité, notamment à travers les contrats d'insertion par l'activité (CIA) ;

- améliorer la définition d'une politique d'insertion globale couvrant aussi bien la formation professionnelle, que la santé ou la lutte contre l'illetrisme ;

- rationaliser le fonctionnement du dispositif d'insertion, chaque agence d'insertion étant ainsi chargée d'élaborer un programme départemental d'insertion (PDI) et un programme annuel de taches d'utilité sociales (PATUS).

Pour 1997, le budget des ADI s'élevait à 811,6 millions de francs et regroupait :

- la part insertion de la créance proratisation soit 184,6 millions de francs ;

- les 20 % correspondant à la part obligatoire des départements soit 449,5 millions de francs ;

- la participation du FEDOM au financement des contrats d'insertion par l'activité (CIA) soit 169,4 millions de francs ;

- la contribution des employeurs de CIA soit 8,1 millions de francs.

Les choix budgétaires pour 1998 montrent que le programme départemental d'insertion représente 328 millions de francs soit 40 % du budget global, et que le programme annuel de tâches d'utilité sociale représentait 365 millions de francs soit 45 % des dépenses.

C. LES AUTRES ACTIONS EN FAVEUR DE L'INSERTION ET DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Les crédits destinés à l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer (ANT) sont fixés à 44,52 millions de francs soit une diminution de 5 millions de francs par rapport à 1996.

Ces crédits financent des actions de mobilité et de formation professionnelle bénéficiant à des travailleurs originaires des DOM.

Malgré la diminution des crédits pour 1998, les actions de l'ANT sont appelées à se développer.

Les actions de l'ANT seront en 1998 étendues à la Nouvelle-Calédonie.

L'ANT prépare par ailleurs la signature de contrats de progrès avec les collectivités régionales des DOM qui possèdent un plan régional de développement des formations. L'activité sera de ce fait mieux orientée et plus forte dans les années à venir. La croissance des activités de l'ANT prévue pour l'exercice 1998 devrait entraîner une hausse des frais de structure de l'Agence pour assurer notamment la qualité des prestations. Cette croissance aura les mêmes conséquences sur les prestations d'accompagnement de la mobilité financées par l'ANT.

De plus, le budget d'outre-mer se voit transférer, du budget du ministère du travail, le dispositif " Formation individualisée mobilité ". Les crédits ainsi déplacés, soit 28 millions de francs, financent des formations qualifiantes de niveau V en métropole pour des jeunes originaires d'outre-mer.

Enfin, les crédits consacrés à la formation professionnelle dans les territoires d'outre-mer sont reconduits en francs constants pour 1998 et devrait permettre la poursuite des programmes entrepris, notamment :

- les crédits consacrés aux chantiers de développement local, qui sont maintenus à hauteur de 35,4 millions de francs. Il s'agit de mesures d'aide à l'emploi et à l'insertion sociale et professionnelle, par la réalisation de travaux d'intérêt général, de populations très faiblement qualifiées dont les ressources restent extrêmement faibles. Ce dispositif est en outre le seul traitement social du chômage financé par l'Etat, pour l'ensemble des TOM ;

- en Polynésie française, la convention pour le développement de l'autonomie économique, signée le 25 juillet 1996, qui prévoit que durant trois ans 55 millions de francs pourront être consacrés à la création d'emplois et d'activités ;

- ces crédits permettront également le financement du dispositif " 400 cadres pour la Nouvelle-Calédonie ", issu de la mise en oeuvre des accords de Matignon, qui organise la formation de néo-calédoniens n'ayant pas eu accès à des formations initiales de niveau supérieur ou ayant besoin de nouvelles qualifications en formation continue. Les crédits affectés à ce programme proviennent, en cours d'exercice, de transferts du chapitre 68-93 (18,750 millions de francs en 1997). Ces actions, objet d'un large consensus, s'appuient sur un suivi personnalisé des stagiaires lors de leur formation, afin de leur procurer les conditions de travail les plus satisfaisantes ;

- enfin, dans le projet de loi de finances pour 1998, 466.666 francs sont inscrits pour financer des actions de formation au titre du contrat de plan Etat-collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon.

II. L'EFFORT DES POUVOIRS PUBLICS EN FAVEUR DU LOGEMENT SOCIAL

A. LA MISE EN OEUVRE DES ASSISES DE L'ÉGALITÉ SOCIALE EN MATIÈRE DE LOGEMENT SOCIAL

Les conclusions des assises de l'égalité sociale intervenues début 1996 sur le logement social avaient été exposées dans l'avis de l'an dernier.

On ne fera que signaler ici les mesures adoptées en 1997 conformément aux grands axes de réforme adoptés en 1996.

En ce qui concerne la relance de la construction de logements intermédiaires jugés trop insuffisants dans les DOM, plusieurs mesures ont été adoptées récemment :

- la mise en place du prêt intermédiaire (PLI) en avril 1997 qui se substitue au dispositif de l'immeuble à loyer moyen (ILM) ;

- l'introduction en avril 1997 également, du dispositif de prêt à taux zéro, spécifique à l'outre-mer, qui se substitue aux prêts spéciaux du crédit foncier ;

- l'amélioration des prêts complémentaires pour l'accession dans le cadre du LES (logement évolutif social) en avril 1997.

B. DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998, L'ÉTAT CONFIRME SES ENGAGEMENTS EN MATIÈRE DE LOGEMENT SOCIAL

L'ensemble des crédits destinés au logement sont regroupés sur une ligne budgétaire unique (LBU) gérée depuis 1996 par le budget de l'outre-mer.

Cette ligne est totalement fongible, ce qui autorise des possibilités d'adaptation au niveau local en fonction des besoins spécifiques de chaque collectivité.

En 1997, en autorisation de programme, la LBU a été arrêtée à 1.150 millions de francs en loi de finances initiale, et elle sera dotée de 1.096 millions de francs en 1998.

Cette dotation budgétaire est pourvue par une fraction importante de la créance de " proratisation " du RMI, qui représentait 556 millions de francs en 1997 et devrait s'élever à 560 millions de francs en 1998.

Le niveau de crédits inscrits en autorisation de programmes pour 1998 sur la LBU résulte d'un double mouvement :

- d'une part, une réduction de 150 millions de francs pour tenir compte de la réduction du taux de TVA applicable dans les DOM au logement social (le taux passe de 9,5 % à 2,1 %), ce qui n'affectera pas le volume des opérations ;

- d'autre part, l'inscription au budget de l'outre-mer d'une dotation de 96 millions de francs destinés à la résorption de l'habitat insalubre dans les départements d'outre-mer.

Ces crédits étaient jusqu'à présent inscrits dans le budget du logement. On peut donc se demander s'il ne s'agit pas en réalité d'un transfert de crédits à niveau constant, si bien que le maintien des crédits de la LBU à hauteur de 1.096 millions de francs pour 1998 relèverait quelque peu du trompe-l'oeil.

Il convient néanmoins de noter que les crédits de paiement de la LBU sont en forte augmentation puisqu'ils s'élèvent à 568 millions de francs contre 463 millions de francs en 1997.

L'objectif affiché par le Secrétariat d'Etat à l'Outre-mer est de financer plus de 17.000 opérations en constructions neuves et réhabilitations en 1998, contre 15.400 prévus en 1997.

III. LA PARTICIPATION DE L'ÉTAT AU DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL

Le budget 1998 permettra le respect des engagements contractuels de l'Etat dans le cadre du XIème plan et des conventions signées avec les territoires d'outre-mer et Mayotte, afin d'aider au développement des infrastructures et des réseaux dans le cadre général de l'ouverture de l'outre-mer français vers leur environnement international.

L'Etat consacrera, dans le cadre des contrats du XIè plan, 5,4 milliards de francs sur la période 1994-1999, auxquels il convient d'ajouter, d'une part 1,9 milliard de francs au titre des conventions de développement avec Mayotte et Wallis et Futuna signées en 1995 pour renforcer les contrats de plan initiaux, d'autre part 1,6 milliard de francs prévus aux contrats de développement signés avec la Nouvelle-Calédonie en 1993.

Ce sont ainsi près de 9 milliards de francs qui seront consacrés au développement des collectivités d'Outre-mer.

L'enjeu est d'autant plus important que, pour les DOM, les opérations contractualisées constituent la contrepartie nationale des programmes européens 1994-1999 ; sur cette période, ces fonds structurels ont été doublés par rapport à 1989-1993 et représentent 12 milliards de francs.

On peut faire un bilan nuancé de l'exécution des contrats de plan en tenant compte de la décision prise par l'Etat en 1997 d'étaler la réalisation des contrats de plan sur une année supplémentaire, ce qui n'a pas été sans conséquence sur la programmation des réalisations.

Hors les contrats de développement de la Nouvelle-Calédonie qui obéissent à un calendrier différent (1993-1997), le taux de délégation tous ministères et collectivités confondus des contrats de plan s'élève à près de 52 % du montant contractualisé de l'Etat, alors que le taux théorique des trois premières années, avant la décision du Premier ministre d'étaler l'exécution des contrats sur une année supplémentaire, était de 60 %. On peut donc considérer qu'il y a eu une réelle mobilisation des différents ministères concernés.

Le taux d'engagement était au 31 décembre 1996 d'environ 35 %. Il était de 20 % fin 1995. Il y a donc eu une accélération de l'engagement des opérations, même si ce taux reste encore insuffisant après trois années d'exécution. L'engagement est le plus souvent freiné par la complexité et la très grande ampleur d'opérations lourdes, menées en matière d'assainissement ou d'aménagement foncier.

A. LA PROGRESSION DES CRÉDITS AFFECTÉS AU FONDS D'INVESTISSEMENTS DES DOM (FIDOM)

Les moyens de paiement du Fonds d'investissements des DOM (FIDOM) s'établissent à 232,5 millions de francs contre 218 millions de francs en 1997, soit une augmentation de 6,7 %.

Les ressources du fonds sont répartis en deux sections :

- une section générale regroupant les interventions du fonds relevant de l'action directe de l'Etat ;

- une section décentralisée regroupant les interventions relevant de la compétence des régions et des départements.

1. Le FIDOM-section générale

En ce qui concerne la répartition des crédits en 1997 au titre du FIDOM général, le bilan établi lors de la réunion du Comité restreint du 31 juillet 1997 indique que la dotation régulée du FIDOM général en autorisations de programme, soit 174,37 millions de francs a essentiellement permis de financer les contrats de plan et les conventions de développement des départements d'Outre-mer, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Compte tenu de l'annulation de 25 % de la dotation, les délégations ont été effectuées à hauteur de 75 % des tranches annuelles de ces contrats, pour un montant total de 115,35 millions de francs et 11,39 millions de francs pour la convention Etat/Mayotte.

Pour 1998, les orientations en ce qui concerne la répartition de la dotation sont récapitulées comme indiquées ci-dessous.

FIDOM GÉNÉRAL -
RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 1998

(en millions de francs)

Contrat de plan

Convention de développement Mayotte

Recherche CORDET

Plan social docker

Remboursement prêt SIDOM

Garantie de l'Etat SOFIDEG

Constructions scolaires de la Guyane

Dotation non affectée

154

15

2

0,580

0,025

32

15,00

6,40

2. Le FIDOM-section décentralisée

En ce qui concerne le FIDOM-décentralisé, il faut rappeler que sa suppression a été décidée en 1996, et qu'en contrepartie, un projet de loi sur l'aménagement du territoire dans les DOM devait être soumis au Parlement.

Le projet de loi avait pour objectif de créer pour chaque DOM, une zone périphérique ultraprioritaire et d'arrêter des dispositions complémentaires incitatives en faveur des entreprises participant au désenclavement économique de ces collectivités.

L'argument avancé par le précédent Gouvernement pour justifier de la suppression du FIDOM-décentralisé se fondait sur la faiblesse des moyens disponibles, compte tenu des amputations budgétaires successives.

Néanmoins il convient de veiller à ce que les opérations en cours puissent être menées à leur terme, et comme l'an dernier, votre commission souligne que les crédits de paiement doivent être prévus à un niveau suffisant pour permettre d'achever les opérations correspondant à des autorisations de programme engagées avant le 31 décembre 1996.

Pour 1998, les crédits de paiement inscrits sur le FIDOM-décentralisé sont fixés à 15 millions de francs, contre 33,3 millions de francs en 1997.

B. UN EFFORT SOUTENU EN FAVEUR DE LA GUYANE

Outre les opérations contractualisées avec chacun des départements d'outre-mer, inscrites sur le FIDOM général, le budget pour 1998 marque la volonté d'un engagement public plus important en Guyane :

- sur le FIDOM général, une dotation est prévue pour la mise en place de la garantie de l'Etat à la SOFIDEG, dans le cadre des suites du " plan vert " ;

- le budget 1998 permettra le financement d'une dotation supplémentaire pour les équipements scolaires de 15 millions de francs qui concernera tous les DOM, mais plus spécifiquement la Guyane ;

- les crédits sont portés à 18,47 millions de francs pour les infrastructures de Guyane, soit une augmentation de 37 % de la dotation, permettant notamment la poursuite de la réalisation de la route Régina-Saint-Georges.

Par ailleurs, des mesures exceptionnelles sont prévues :

- une dotation de 10 millions de francs est inscrite pour 1998, pour la commune de Cayenne, dans le cadre du redressement des finances communales auquel l'Etat participe par une subvention d'équilibre ;

- pour faire face à l'acuité des problèmes rencontrés dans ce département, le Secrétariat d'Etat à l'Outre-Mer a décidé de renforcer les effectifs de la Préfecture de Guyane. Quatre postes d'encadrement sont créés pour 1998 : deux attachés et deux secrétaires administratifs.

C. LA RECONDUCTION DES CRÉDITS DU FONDS D'INVESTISSEMENT POUR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE ET SOCIAL DES TERRITOIRES D'OUTRE-MER (FIDES)

Le Fonds d'investissement pour le développement économique et social des territoires d'outre-mer (FIDES) est régi par le décret n° 92-758 du 4 août 1992 modifié par le décret n° 94-273 du 30 mars 1994. Les ressources du fonds proviennent des crédits ouverts au budget qui sont répartis en deux sections :

- une section générale, regroupant les interventions du Fonds relevant de l'action directe de l'Etat ;

- et une section territoriale, regroupant les interventions du Fonds relevant des compétences des territoires.

En outre, la loi référendaire n° 88-1028 du 9 novembre 1988 a créé, au sein du FIDES, un Fonds d'équipement et de promotion de la Nouvelle-Calédonie (FEPNC) qui est alimenté par une répartition en provenance du chapitre 68-93 " actions diverses pour le développement de la Nouvelle-Calédonie ".

1. Le FIDES-section générale

En ce qui concerne la section générale du FIDES, la diminution de crédits constatée en autorisations de programme sur la gestion 1997 provient essentiellement de l'étalement sur une année supplémentaire des contrats, mesure prise par le Premier ministre lors de l'élaboration de la loi de finances 1997. Cette décision n'a toutefois pas affecté l'exécution des contrats si ce n'est un léger retard dans les engagements.

Le tableau ci-dessous récapitule les opérations financées par le fonds (section générale).

FIDES - SECTION GÉNÉRALE

TABLEAU RÉCAPITULATIF

(en francs)

TERRITOIRE

1996

1997

Polynésie française

107 435 000

70 797 000

Nouvelle-Calédonie

- hors FEPNC

18 735 000

17 500 000

- FEPNC

258 671 370

251 650 000

Wallis et Futuna

15 541 000

12 065 000

TAAF

2 000 000

1 500 000

IFOI

390 000

600 000

Opérations communes

323 596

253 188

TOTAL

403 095 966

354 365 188

Source : Secrétariat d'Etat à l'Outre-mer

L'effort a notamment porté, en ce qui concerne la Polynésie française sur la dotation " Equipements des communes ", compte tenu des problèmes importants que celles-ci connaissaient en matière d'approvisionnement en eau, d'assainissement et de premiers équipements en matériels de secours.

Pour 1998, les crédits du FIDES - section générale devraient s'élever à 135,875 millions de francs en autorisation de programme et 131,42 millions de francs en crédits de paiement soit une simple reconduction pour le montant des autorisations de programmes (137 millions de francs en 1997) et une baisse des crédits de paiement (140 millions de francs).

Ces crédits permettront de financer :

- le contrat de développement pour 83,73 millions de francs, l'équipement des communes pour 15 millions de francs en Polynésie française,

- les achats de terre par l'Agence de développement rural et d'aménagement foncier (ADRAF) pour 4,9 millions de francs et l'équipement des communes pour 15 millions de francs en Nouvelle-Calédonie,

- la convention de développement avec Wallis et Futuna pour 12,55 millions de francs,

- ainsi que l'équipement des Terres australes et antarctiques françaises pour 1,5 milliard de francs.

2. FIDES-section territoriale

Les crédits du FIDES-section des territoires inscrits dans le projet de loi de finances pour 1998 s'élèvent à 2,9 millions en autorisations de programme et à 6,45 millions de francs en crédits de paiement.

La forte progression des crédits de paiements résulte en réalité d'un redéploiement des crédits en provenance du FIDES-section générale.

ÉVOLUTION DES SUBVENTIONS AU FIDES

(millions de francs)

1996

1997

1998

AP

CP

AP

CP

AP

CP

Section générale

177,9

182,9

137

140

135,9

131,4

Section des territoires

4,9

8,5

4,9

2,9

3,0

6,4

TOTAL

182,8

191,4

141,9

142,9

138,9

137,8

D. DES ACTIONS SPÉCIFIQUES POUR LA NOUVELLE-CALÉDONIE

L'année 1998 sera décisive pour l'avenir de ce territoire. Le Secrétariat d'Etat à l'Outre-mer a donc décidé la prolongation des dotations au même niveau qu'en 1997, afin de répondre à la volonté du gouvernement d'accompagner, dans un partenariat étroit avec l'Etat, le développement économique de ce territoire, selon les modalités qu'il aura choisies.

Le chapitre intitulé " Actions diverses pour le développement de la Nouvelle-Calédonie " est donc reconduit à hauteur de 390 millions de francs en autorisations de programmes et de 378 millions de francs en crédits de paiement. Il sera réparti en cours d'exercice au profit d'autres chapitres du budget de l'outre-mer, soit plus précisément sur :

- le fonds d'équipement et de promotion de la Nouvelle-Calédonie (FEPNC) créé au sein du FIDES qui regroupe une partie des crédits consacrés à ce territoire. Il convient d'ajouter les subventions de l'ADRAF et les crédits d'équipement des communes qui figurent dans la section générale du FIDES pour avoir une vision complète de l'effort de l'Etat (251,7 millions de francs). Les ressources du fonds ont été affectées au contrat de développement et au contrat de ville ainsi qu'aux actions en tribu et à l'Institut calédonien de participation (ICAP). En outre, en 1998, sera célébrée l'inauguration du centre " Jean-Marie Tjibaou " et une dotation de 5,35 millions de francs est prévue pour ce centre en 1998 contre 4,35 millions de francs en 1997 ;

- les subventions aux budgets locaux et à divers organismes (93,5 millions de francs) ;

- l'action sociale et culturelle (40,9 millions de francs) ;

- l'équipement administratif (2 millions de francs).

E. LE RENFORCEMENT DES SUBVENTIONS AUX BUDGETS DES COLLECTIVITÉS LOCALES

Dans le projet de loi de finances pour 1998, le montant des subventions à caractère obligatoire à destination des collectivités locales des DOM est porté de 29 millions de francs à 32 millions de francs soit une progression de 9,9 %. Cette subvention a pour objet de compenser les ressources fiscales de foncier bâti manquantes aux collectivités locales et l'augmentation obtenue pour 1998 devrait permettre de combler les insuffisances chroniques constatées.

Au titre des subventions facultatives pour les collectivités territoriales des départements d'Outre-mer, et comme il a été indiqué plus haut, une subvention de 10 millions de francs a été demandé dans le cadre du plan de redressement de la situation financière de Cayenne.

En ce qui concerne les subventions accordées aux collectivités territoriales des territoires d'outre-mer on peut signaler :

- la reconduction à hauteur de 52 millions de francs pour les communes de Polynésie française pour alimenter un fonds intercommunal de péréquation ;

- dans le cadre de la convention Etat-Mayotte, une subvention est versée pour rembourser au Conseil général les frais de fonctionnement de la préfecture. La dotation est fixée pour 1998 à 7,2 millions de francs soit un doublement par rapport à 1997 afin d'honorer l'engagement pris d'un abondement de 14,4 millions de francs sur la durée de la convention.

IV. LA REMISE EN CAUSE DU RÉGIME D'AIDE FISCALE AUX INVESTISSEMENTS RÉALISÉS DANS LES DOM-TOM

A. RAPPEL DU DISPOSITIF D'AIDE FISCALE ET BILAN POUR 1996

1. Le cadre juridique

Les dispositions contenues dans l'article 22 de la loi de finances rectificative n° 86-824 du 11 juillet 1986, dite " Loi Pons ", constituent un important dispositif original d'incitation à l'investissement outre-mer, valable dans les départements, les territoires et les collectivités territoriales d'outre-mer.

Ces dispositions couvrent un champ d'application très large (industrie, bâtiment et travaux publics, agriculture, pêche, tourisme et hôtellerie, artisanat et énergies nouvelles) et concernent aussi bien les investisseurs individuels (bénéficiant d'une réduction dégressive d'impôt en cas de construction ou d'acquisition de logements neufs à usage d'habitation principale) que les entreprises qui bénéficient d'une déduction d'impôt de la totalité du montant des investissements réalisés.

Ces dispositions, inscrites dans les articles 199 undecies et 238 bis HA et HC du Code général des impôts étaient valables initialement jusqu'au 31 décembre 1996.

Le régime de défiscalisation pour les investissements réalisés outre-mer a été plusieurs fois modifié afin de remédier à ses dysfonctionnements ou mettre fin à certains excès commis dans les premières années d'utilisation du dispositif. Sur le régime actuel, on peut retenir les éléments suivants :

- droit à l'exercice de la déduction fiscale pour les secteurs industriels (défiscalisation de plein droit en dessous de 30 millions de francs) (LFR pour 1986) ;

- le régime de défiscalisation est prorogé jusqu'au 31 décembre 2001 (LF pour 1992) ;

- extension du champ d'application du dispositif aux investissements réalisés dans le cadre de concessions de service public local à caractère industriel et commercial, aux apports en capital des sociétés en difficulté dans les secteurs d'activité éligibles LFR pour 1993) ;

- avis préalable du Ministre des DOM-TOM dans la procédure d'agrément (LFR pour 1993) ;

- retour à une déduction fiscale de 100 % et délai de détention harmonisé à cinq ans pour tout investissement (LFR pour 1993) ;

- l'imputation des déficits provenant des investissements et des soucriptions en capital dans les secteurs éligibles doit faire l'objet d'un agrément du Ministre chargé du Budget, après avis du Ministre de l'Outre-Mer. Les projets qui sollicitent cette disposition sont soumis à la procédure du double agrément (LF pour 1996).

En définitive, en 1996, les projets d'investissements peuvent être soumis à un agrément préalable à un double titre :

- pour autoriser la déduction de l'investissement pour certaines catégories d'activité (§ III ter de l'article 238 bis HA) ;

- et/ou lorsque les investisseurs sont des personnes physiques ou morales soumises à l'impôt sur le revenu qui n'exercent par leur nouvelle activité à titre professionnel, l'agrément autorise l'imputation des déficits sur le revenu global (§ quater de l'article 238 bis HA).

La liste des secteurs inclut le transport audiovisuel, la navigation de plaisance, la construction d'hôtels et de résidences de tourisme et les concessions de service public.

En règle générale, pour les projets d'investissement, c'est le système de l'agrément au premier franc qui s'applique.

Désormais, les projets d'investissements non soumis à agrément :

- concernent les secteurs de l'industrie, de la pêche, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, de l'artisanat et de l'hôtellerie par des personnes qui exercent l'activité correspondante à titre professionnel ;

- portent sur moins de 1 million de francs, dans les secteurs de l'hôtellerie, des transports, de la navigation de plaisance, de la production et de la diffusion audiovisuelle et sont réalisés par une entreprise qui justifie d'une exploitation effective à titre professionnel, depuis au moins deux ans outre-mer dans l'un de ces secteurs.

2. Le bilan du régime de défiscalisation dans les DOM-TOM en 1996

Ce bilan est établi à partir du rapport déposé devant le Parlement en application du III de l'article 120 de la loi de finances pour 1992, sur les conditions de mise en oeuvre de l'agrément prévu en faveur des investissements réalisés dans certaines secteurs économiques des DOM-TOM en 1996.

1.085 dossiers ont été traités au cours de 1996 pour un montant d'investissements de 9,96 milliards de francs.

Sur ces 1.085 dossiers, 819 ont obtenu un agrément, 217 ont reçu une réponse défavorable et 49 ont fait l'objet d'un désistement ou d'un classement sans suite. Le montant total des projets agréés s'élève à 5,59 milliards de francs.

Le montant des investissements soumis au double agrément s'élève à 4,508 milliards de francs.

La création d'emplois directs liée à ces investissements est estimée à 1.848, mais n'englobe pas les emplois maintenus ni ceux indirectement induits par la réalisation des investissements.

Le montant des investissements agréés en 1996 a augmenté de 1,6 milliard de francs par rapport à 1995. Cette croissance découle pour un milliard de francs du nouvel agrément III quater, et pour 600 millions de francs des investissements agréés au titre du III ter qui ont ainsi progressé de 15 % par rapport à 1995.

Pour les secteurs soumis à l'agrément III ter, après une baisse importante depuis deux ans, le secteur de l'hôtellerie a fortement progressé en 1996 : le montant des investissements agréés a plus que doublé (+ 132 %) et s'élève à 968 millions de francs.

Dans le secteur du tourisme et de la plaisance, le montant des investissements agréés a diminué par rapport à 1995 en raison de l'agrément d'un navire de croisières important en 1995 (773 millions de francs). Hors ce projet, le secteur tourisme/plaisance croît de 17 % en 1996.

Le secteur des transports a fortement augmenté avec un nombre de dossiers multiplié par deux et un montant d'investissements qui a crû de 142 %. Trois bateaux de transport de marchandises ont été agréés pour 443 millions de francs.

Dans le secteur de l'audiovisuel, le nombre de dossiers agréés a doublé. Le montant des investissements agréés croît de 73 % mais un seul dossier représente 110 millions de francs sur un total de 172 millions de francs. Sans ce projet, le montant agréé connaît un fléchissement par rapport à 1994 et 1995.

Le secteur des énergies nouvelles a un nombre de dossiers stable mais le montant des projets agréés est encore en progression par rapport à 1995.

Quatre entreprises concessionnaires de SPIC et une entreprise en difficulté ont bénéficié d'un agrément pour un montant d'investissements agréés sensiblement équivalent à celui des années précédentes dans le secteur des concessions de SPIC et en diminution du tiers pour le secteur des entreprises en difficulté.

RÉPARTITION SECTORIELLE DES INVESTISSEMENTS SOUMIS AU DOUBLE AGRÉMENT

(millions de francs)

1995

1996

1996/1995 en %

Hôtellerie

Tourisme/Plaisance

Transport

Audiovisuel

Industrie

Pêche

Energies nouvelles

Agriculture

Concession SPIC*

Entreprise en difficulté*

Logement

Bâtiment

416,97

1 534,21

702,11

99,33

299,12

0

745,95

0

19,68

32

64,87

0

968,34

889,95

1 704,99

172,39

30,97

40,35

379,55

0

22,51

20,18

136,09

143

+ 132

- 41

+ 142

+ 73

- 89

-

- 49

0

+ 14

- 36

+ 109

-

TOTAL

3 914,2

4 508,36

+ 15

* Ces deux secteurs ont été instaurés à compter du 1er juillet 1993.

Pour les secteurs d'activité soumis au seul agrément III quater depuis le 1er janvier 1996, la mise en place de cet agrément fait apparaître quatre secteurs qui n'avaient jusqu'ici pas obtenu d'agrément : le bâtiment avec un montant de projets agréés de 340 millions de francs, la pêche à hauteur de 141 millions de francs agréés, l'agriculture (135 millions de francs) et dans une moindre mesure, l'artisanat avec 2,6 millions de francs agréés.

On constate qu'en 1996, c'est le secteur de l'industrie qui a bénéficié du montant des projets agréés le plus élevé (environ 530 millions de francs).

Enfin, le secteur de l'habitat locatif connaît une très forte croissance puisque le montant d'investissements agréés est multiplié par deux, à 136 millions de francs : il s'agit pour l'essentiel de projets agréés au titre du logement intermédiaire.

En ce qui concerne la répartition géographique des investissements :

- en 1996, la Martinique, dont le nombre de projets agréés a augmenté de 46 % par rapport à 1995, a dépassé la Guadeloupe, dont le nombre de dossiers reste stable. En revanche, le montant agréé reste plus élevé en Guadeloupe, mais les deux départements connaissent cependant une baisse significative en montant par rapport à 1995.

- le nombre de projets agréés en Guyane a peu augmenté mais le montant des investissements agréés est en forte croissance, notamment avec des projets importants dans les secteurs des transports, de l'audiovisuel et des énergies nouvelles.

- La Réunion a vu presque doubler le nombre des projets agréés par rapport à 1995 pour un coût d'investissements en hausse de 17 %. Après un recul en 1995, le secteur des transports augmente fortement.

Dans chaque département d'outre-mer, la nouvelle procédure d'agrément III quater a presque doublé le nombre d'agréments délivrés. Le montant des projets agréés varie de 173 à 277 millions de francs, selon le département avec une mention particulière pour le secteur industriel réunionnais qui recueille 226 millions de francs.

- la Polynésie est le principal bénéficiaire de la défiscalisation avec 1.272 milliards de francs d'investissements agréés. Certes, ce montant reste stable par rapport à 1995 mais un projet exceptionnel d'environ 800 millions de francs avait été agréé au titre de cette dernière année.

- le niveau des investissements en Nouvelle-Calédonie a été multiplié par trois en 1996. Cette croissance est due notamment aux secteurs du bâtiment, des travaux publics et de l'hôtellerie.

- enfin, Saint-Pierre-et-Miquelon a bénéficié en 1996 de deux projets exceptionnels dans les secteurs de la plaisance et des transports.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES INVESTISSEMENTS SOUMIS AU DOUBLE AGRÉMENT

(millions de francs)

1995

1996

1996/1995 en %

Guadeloupe

Guyane

Martinique

Réunion

Polynésie

Nouvelle Calédonie

Autres*

1 372,66

69,69

759,74

433,82

1 138,68

137,91

1,75

781,65

394,45

608,56

509,27

1 145,13

387,74

681,54

- 43

+ 465

- 19

+ 17

-

+ 181

+ 38 800

TOTAL

3 914,27

4 508,36

+ 15

* dont Saint Pierre et Miquelon

B. LA REMISE EN CAUSE DU DISPOSITIF DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998

1. Les modifications résultant de l'article 14 du projet de loi de finances pour 1998

Affichant son souhait de " moraliser " le dispositif de défiscalisation des investissements réalisés outre-mer et de le rendre plus équitable alors même que les multiples modifications du régime de la loi Pons ont permis d'aboutir à un dispositif cohérent et transparent, le Gouvernement apporte des correctifs importants à travers l'article 14 du projet de loi de finances pour 1998.

Les modifications proposées reposent sur une approche qui se veut équilibrée, associant recherche de l'équité fiscale et maintien de l'efficacité du dispositif et elles précisent que :

- l'octroi de l'agrément devra prendre en compte le nombre d'emplois créés ou maintenus grâce au projet d'investissement ;

- le déficit de défiscalisation des investissements est applicable de façon identique à l'ensemble de l'outre-mer puisque sont supprimées les dispositions particulières applicables à la Nouvelle-Calédonie et à Saint-Pierre-et-Miquelon ;

- les investissements défiscalisés ne peuvent plus être déduits du revenu global pour le calcul du plafonnement de l'ISF ;

- sont désormais exclus de l'assiette défiscalisable les subventions publiques perçues et la TVA, qui est récupérable par les entreprises.

2. La remise en cause du dispositif résultant des modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Avec la volonté de traquer une niche fiscale qui ne profiterait qu'aux très gros contribuables, l'Assemblée nationale a considérablement réduit la portée du dispositif de défiscalisation au point de lui faire perdre tout intérêt pour les particuliers, à l'exception des seuls professionnels appartenant au secteur dans lequel l'investissement est programmé.

Sans avoir procédé à aucune étude d'impact, ce vote risque de faire disparaître un dispositif dont le bilan rappelé ci-dessus a pu montrer le dynamisme et l'intérêt qu'il représentait pour toute une série de secteurs d'activité dont le développement est primordial pour l'avenir des DOM-TOM.

L'amendement adopté en séance publique supprime la possibilité d'imputer sur le revenu global les déficits de la catégorie BIC (bénéfices industriels et commerciaux). Il s'agit de la même restriction que celle adoptée en 1996 pour les investissements réalisés en métropole dans le secteur de l'hôtellerie. Ce type d'investissements a d'ailleurs quasiment disparu, mettant fin à une situation totalement anormale, puisque dans un marché de l'hôtellerie en surcapacité, cet avantage fiscal favorisait les investissements dans les hôtels de chaîne.

Or, dans les DOM-TOM, nul ne peut prétendre que les secteurs où sont réalisés les investissements sont en surcapacité. L'alignement du dispositif fiscal relatif à l'investissement dans l'outre-mer sur celui des BIC hôteliers va très certainement entraîner sa disparition alors même que les besoins de développement sont importants et que les handicaps de l'outre-mer pèsent lourdement sur son économie.

De plus, ce dispositif semble ignorer que certaines activités productives de l'outre-mer demeurent insuffisamment rentables, même lorsque l'investissement initial est défiscalisé.

Il s'agit notamment de la pêche à La Réunion, des énergies renouvelables aux Caraïbes, et de presque tous les investissements en Polynésie et Nouvelle-Calédonie. Pour ce type de projets, il faut maintenir également la défiscalisation des pertes d'exploitation, afin d'assurer la réalisation de l'opération et le maintien des emplois.

TROISIÈME PARTIE -

L'OUTRE-MER ET L'EUROPE

I. LES AIDES COMMUNAUTAIRES POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'OUTRE-MER

A. LA POLITIQUE DES FONDS STRUCTURELS POUR LES DOM

La réforme des fonds structurels intervenue en 1993 visant le cadre communautaire d'appui de la période 1994-1999 se caractérise, pour les DOM, par une continuité certaine par rapport à la réforme de 1989, mais avec des évolutions significatives, notamment en matière financière.

L'intervention communautaire dans les DOM reste concentrée sur cinq objectifs, et principalement sur l'objectif 1, qui vise à promouvoir " le développement et l'ajustement structurel des régions en retard de développement ".

Le principe du partenariat pour l'élaboration, le financement et le suivi des actions communautaires entre Commission, Etat-membre et autorités locales a été confirmé et étendu aux partenaires économiques et sociaux ce qui correspond à la pratique en vigueur dans les DOM.

Les grands principes qui fondent l'action structurelle communautaire demeurent : celle-ci ne peut qu'accompagner, sous forme complémentaire, des actions nationales. Mais au-delà, une évaluation plus stricte de l'intervention communautaire est assurée par une " appréciation ex-ante " de l'impact du cadre communautaire d'appui, par rapport aux projets de développement économique local.

Les innovations marquantes dans les fonds concernent essentiellement le FSE et le FEOGA-Orientation, pour assouplir les critères d'éligibilité des actions ce qui permet une meilleure prise en compte des problèmes spécifiques des DOM par les fonds structurels.

Le 29 juillet 1994, la Commission a avalisé, par une décision unique pour chaque DOM, un document unique valant Plan de développement régional (1ère partie) et demande de concours (2e partie).

Au total, les départements d'outre-mer bénéficieront d'une intervention communautaire au titre des fonds structurels de 1,762 milliards d'écus pour la période 1994-1999, soit un quasi doublement de l'intervention communautaire par rapport à la période précédente. Pour le Cadre Communautaire d'appui (CCA) 1989-1993, la participation de la Commission aux mesures des programmes opérationnels était de 48 %, pour le CCA 1994-1999, il est de 56 %.

A titre de comparaison, le Cadre communautaire des Canaries a été approuvé pour un montant de 616 millions d'écus, celui de Madère pour 369 millions d'écus.

B. LES INTERVENTIONS COMMUNAUTAIRES DANS LES PAYS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER (PTOM) AU TRAVERS DU FONDS EUROPÉEN DU DÉVELOPPEMENT (FED) ET DE LA BANQUE EUROPÉENNE D'INVESTISSEMENT (BEI)

Sur le plan financier, les interventions communautaires dans les PTOM s'effectuent au travers du Fonds européen du Développement (FED) et de la Banque européenne d'investissement (BEI).

Pour la période 1990-1995 correspondant au VIIe FED, les PTOM (français, néerlandais, britanniques) se sont vus attribuer une enveloppe de 140 millions d'écus auxquels s'ajoutent 25 millions d'écus de ressources de la BEI. Cette enveloppe est répartie entre une part programmable (97,5 millions d'écus) qui subventionne des projets et programmes et une part non programmable qui concerne des interventions comme les capitaux à risques, le STABEX, le SYSMIN, les aides d'urgence.

Sur la part programmable du VIIème FED, les PTOM français ont bénéficié de 46,8 % de l'enveloppe, soit environ 40 millions d'écus. Le taux d'engagement de ces crédits est très contrasté : la moyenne est d'environ 65 %, ce qui révèle des situations différentes d'un PTOM à l'autre. Si la plupart d'entre eux ont engagé leur programme pour un taux compris entre 75 % et 100 %, celui de la Polynésie (13,1 millions d'écus) reste faible (35,6 %) : ceci s'explique par les difficultés, résolues depuis peu, rencontrées dans le montage du projet d'assainissement d'Outumaoro, qui représente à lui seul 73 % de l'enveloppe VIIè FED de la Polynésie.

Le Conseil européen de Cannes (juin 1995) a décidé du montant du VIIIe FED. Pour les PTOM, celui-ci sera de 165 millions d'écus, auxquels s'ajouteront 35 millions d'écus de ressources de la BEI.

L'enveloppe à proprement parler du FED (165 millions d'écus) affiche un taux de progression en écus courants de 17,8 %.

La Commission a présenté au Conseil une proposition de répartition de cette enveloppe entre la France, les Pays Bas et la Grande Bretagne, mais les négociations sur le VIIIè FED sont bloquées du fait de l'opposition des Antilles néerlandaises à toute modification des règles d'origine et du régime commercial de l'actuelle décision d'association, qui fait l'objet d'une révision à mi-parcours. Il semble toutefois qu'on s'achemine vers une solution de compromis

proposée au Conseil Affaires générales du 6 octobre dernier. Les enveloppes nationales seront ensuite réparties, sur proposition des Etats membres, entre les différents PTOM. Sur cette base, interviendra la programmation des crédits.

II. L'ÉVOLUTION DU CADRE JURIDIQUE EUROPÉEN POUR L'OUTRE-MER

Le Traité d'Amsterdam signé le 2 octobre 1997, et non encore ratifié, révise un certain nombre de dispositions des traités communautaires.

En ce qui concerne l'outre-mer, la France a plaidé d'une part pour que la spécificité des départements d'outre-mer soit reconnue par le traité et d'autre part pour que le régime spécial d'association des pays et territoires d'outre-mer soit réexaminé.

Des avancées certaines ont été obtenues sur l'un et l'autre point, mais la lisibilité des dispositions du Traité en ce qui concerne les DOM-TOM n'est pas toujours claire.

A. L'ARTICLE 227-2 RÉVISÉ SUR LA SPÉCIFICITÉ DES DOM

1. Les éléments positifs de l'article 227-2

La nécessité de mesures spécifiques à l'outre-mer se trouve désormais inscrite dans le Traité de Rome, lui-même, puisque l'article 227-2 reprend le contenu d'une déclaration n° 26 qui n'était qu'annexée au traité sur l'Union européenne.

Le deuxième alinéa de l'article 227-2 autorise ainsi le Conseil à adopter des mesures spécifiques pour l'application du Traité de l'Union européenne aux DOM français, à Madère, aux Canaries et aux Açores pour prendre en compte les situations économiques structurelles de ces régions aggravées par leur éloignement, l'insularité, leur faible superficie.

La procédure de décision pour la mise en oeuvre de ces mesures est plus souple puisque seule la majorité qualifiée est requise au Conseil au lieu de l'unanimité.

2. Les zones d'ombre de l'article 227-2

La rédaction de cet article apparaît à bien des égards ambigüe, puisqu'après avoir affirmé la nécessité d'adopter des mesures spécifiques pour la mise en oeuvre du traité dans les DOM, l'alinéa suivant stipule que ces mesures ne sauraient en aucun cas " nuire à l'intégrité et à la cohérence de l'ordre juridique communautaire " y compris le marché intérieur et les politiques communes.

Cet alinéa apparaît en totale contradiction avec le précédent ou plutôt il laisse de faibles marges de manoeuvres pour la définition de mesures spécifiques.

Une fois de plus, il faudra s'en remettre au pouvoir d'interprétation de la Cour de justice, qui devra déterminer au cas par cas si telle mesure spécifique porte ou non atteinte à " la cohérence de l'ordre juridique communautaire ". A priori, il ne semble pas que la jurisprudence de la Cour soit très favorable, au nom du principe d'égalité et de libre accès, à la mise en oeuvre de politiques spécifiques. Il ne semble donc pas que la rédaction de l'article 227-2 constitue une réelle avancée pour les DOM.

B. L'AVENIR DU RÉGIME D'ASSOCIATION DES PTOM

1. Rappel du cadre juridique

Les territoires d'outre-mer ne font pas partie intégrante de l'Union européenne, mais appartiennent à la catégorie des " pays et territoires d'outre-mer " (PTOM) et bénéficient à ce titre depuis 1957 d'un régime d'association spécifique figurant aux articles 131 à 136 du Traité de Rome. La Communauté européenne a en outre adopté tous les cinq ans des décisions précisant les conditions de cette association, en parallèle avec les conventions de Yaoundé et de Lomé applicables aux Etats Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP).

La dernière décision, qui date du 25 juillet 1991 et dont la durée d'application est de dix ans, reprend de nombreux points de la convention de Lomé IV, tout en comportant quelques dispositions spécifiques aux PTOM : ainsi, les produits originaires des PTOM, à l'exception du rhum, bénéficient d'un libre accès au marché européen, sans droit de douane ni contingentements et le libre accès des produits ayant fait l'objet d'une transformation suffisante est également facilité.

La décision d'association contient également des dispositions protectrices concernant aussi bien les produits que les prestations de service : les PTOM conservent ainsi la possibilité de maintenir des droits de douane ou des restrictions quantitatives sur les produits communautaires ou importés d'autres PTOM et peuvent, en accord avec la Commission européenne, limiter certaines prestations de service dans des secteurs sensibles pour l'économie locale. Ces mesures de protection doivent s'appliquer indistinctement à tous les ressortissants communautaires, y compris aux ressortissants de l'Etat membre avec lequel le PTOM a des relations privilégiées. Or, la Constitution française, en application des principes d'égalité et d'indivisibilité de la République, interdit aux territoires d'outre-mer d'opérer une distinction entre les Français de métropole et les Français d'outre-mer.

2. Les avancées juridiques en faveur des PTOM, à l'occasion de la révision du Traité d'Amsterdam

Début 1996, la Commission a rendu publiques ses propositions visant à modifier la décision d'association afin de renforcer les dispositions spécifiques aux PTOM. Sont ainsi prévus, tout en maintenant le régime commercial de total libre accès, une limitation de cumul entre les produits ACP et les produits PTOM, un renforcement du partenariat Commission-Etat-membre-PTOM, la reconnaissance des diplômes obtenus dans ces pays et territoires, l'éligibilité des ressortissants des PTOM à vingt-deux programmes communautaires internes, tels Socrates, Leonardo, Tid, Media, et l'augmentation substantielle des ressources du Fonds européen de développement (FED) pour les programmes de développement territoriaux. Ces propositions ont fait l'objet de longues discussions, notamment sur la question du régime commercial.

Le Gouvernement français a par ailleurs déposé au début de l'année 1997 auprès de la Commission européenne un mémorandum développant ses propositions. Ce mémorandum demande notamment l'élaboration d'un programme de développement économique et social des PTOM par Etat-membre concerné, afin de fixer les orientations et les secteurs d'intervention de l'Union en faveur de leur développement économique et social en tenant compte du mode de relation qu'entretiennent les trois Etats membres avec leurs PTOM. Il propose également la création d'un fonds particulier pour les PTOM, différent du FED, pour que leur soient appliquées des règles plus souples et pour permettre une éventuelle réévaluation des crédits qui leur sont destinés.

Enfin, à l'initiative de la France, les chefs d'Etat et de gouvernement ont adopté à Amsterdam, le 17 juin dernier, la déclaration n° 36 annexée au traité, dont le contenu devrait permettre, dans de bonnes conditions, le réexamen en 2001 du régime d'association.

" La conférence reconnaît que le régime spécial d'association des pays et territoires d'outre-mer (PTOM), résultant de la quatrième partie du traité instituant la Communauté européenne, a été conçu pour des pays et territoires nombreux, de vaste superficie et à la population importante. Ce régime n'a que peu évolué depuis 1957.

" La conférence observe qu'aujourd'hui, les PTOM subissent pour la plupart un retard structurel important, lié à des contraintes géographiques et économiques particulièrement handicapantes. Dans ces conditions, le régime spécial d'association tel qu'il a été conçu en 1957 ne peut plus répondre efficacement aux enjeux de développement des PTOM ".


Après cette observation préliminaire, le texte de la déclaration engage le Conseil de l'Union à réformer en profondeur d'ici à 1999 le régime d'association des PTOM.

Les propositions de réforme devront être élaborées par la Commission européenne et avoir pour objectif :

- une promotion plus efficace du développement économique et sociale des PTOM ;

- un approfondissement des relations économiques entre les PTOM et l'Union européenne ;

- une meilleure prise en compte de la diversité et de la spécificité de chaque PTOM, y compris la liberté d'établissement.

Enfin, la déclaration précise que le Conseil devra améliorer l'efficacité de l'instrument financier aidant au développement économique et social des PTOM.

Cette déclaration devrait permettre ainsi de remédier aux dysfonctionnements ressentis dans la mise en oeuvre du FED, afin de donner une plus grande efficacité aux moyens financiers communautaires.

*

* *

Compte tenu de ces observations, qui avaient conduit votre rapporteur pour avis à proposer de s'en remettre à la sagesse du Sénat, votre commission a décidé de donner un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'outre-mer pour 1998.

AUDITION DE MM. HERVÉ LEHERISSEL (CABINET ARTHUR ANDERSEN INTERNATIONAL), AUTEUR D'UN AUDIT SUR " L'IMPACT DE LA DÉFISCALISATION POUR L'ÉCONOMIE DES DOM ET LES FINANCES PUBLIQUES " EN OCTOBRE 1996, ET CLAUDE NEUSCHWANDER (MCN CONSEILS), AUTEUR DU RAPPORT SUR " LES CHANTIERS MAJEURS DU DÉVELOPPEMENT DES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER " RENDU EN SEPTEMBRE 1997

Présentant les conclusions de l'audit, M. Hervé Leherissel a rappelé que le régime dit " de défiscalisation " avait pour objet d'accorder une aide fiscale aux investissements réalisés dans des secteurs jugés prioritaires pour le développement économique de l'outre-mer. Il a indiqué qu'il fallait y ajouter un mécanisme de réduction d'impôt pour le logement et les souscriptions au capital de sociétés.

Il a précisé qu'il existait, schématiquement, deux catégories d'opérations pouvant bénéficier de la défiscalisation, à savoir les opérations dites locatives, dans lesquelles les investisseurs achètent un bien pour le louer à une entreprise utilisatrice implantée dans les DOM, avec des pertes d'exploitation modérées, et les opérations où l'investisseur, exploitant direct, était exposé aux risques d'exploitation avec, dans ces cas là, des pertes importantes.

Répondant à M. Jean François-Poncet, président, sur la définition de la " tunnélisation ", M. Hervé Leherissel a indiqué que depuis fin 1995 les déficits industriels et commerciaux n'étaient imputables sur le revenu global que s'ils résultaient de l'activité principale du contribuable. Sinon, ils sont qualifiés de revenus non professionnels et ne peuvent être imputés que sur des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) non professionnels, alors même que cette catégorie est inexistante puisque les placements non professionnels produisent généralement des revenus mobiliers ou autres et non des BIC.

En 1995, la mesure avait été prise très officiellement pour mettre fin aux investissements immobiliers réalisés dans l'hôtellerie, en métropole, dans un contexte de surcapacité hôtelière. L'exception consentie en faveur des DOM allait quasiment de soi, puisque les pouvoirs publics se souciaient en l'occurrence d'encourager les investissements des particuliers dans ces départements.

Cependant, l'Assemblée nationale est revenue lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1998 sur cette exception en faveur des DOM ; la déduction pour l'investissement initial subsiste, mais les pertes d'exploitation ne peuvent plus être imputées fiscalement.

S'agissant de l'incidence de la défiscalisation sur l'économie des DOM, M. Hervé Leherissel a rappelé que toutes les études, y compris le rapport de M. Alain Richard publié en 1991, avaient conclu à l'impact très positif du dispositif. Il a évoqué le rattrapage important, par rapport à la métropole réalisé depuis 1986-1988 en ce qui concerne la production par habitant, le spectaculaire décollage de l'investissement productif -puisque la formation brute de capital fixe dans les quatre DOM a augmenté de 114 % entre 1986 et 1992 alors qu'elle n'augmentait que de 44 % au plan national-, ainsi que la croissance tirée par l'investissement industriel. S'agissant des effets sur l'emploi, plus complexes à mesurer, il a souligné que la population active employée avait crû de 27 à 40 % selon les DOM de 1982 à 1993, alors qu'elle stagnait au plan national (+ 0,5 %). Cela avait permis une stabilisation, voire un recul, du chômage même s'il demeurait très élevé. Ainsi aux Antilles françaises, le taux de chômage était passé de 32 % en 1990 à 26 % en 1995 alors qu'il augmentait fortement en métropole. Toutes proportions gardées, a-t-il ajouté, un tel dynamisme des économies locales équivaudrait à la création de plusieurs centaines de milliers d'emplois en métropole.

Enfin, il a jugé que la défiscalisation avait eu des effets structurants majeurs pour l'économie domienne en favorisant une modernisation radicale de l'industrie et l'émergence d'une véritable capacité touristique, qui avaient permis des taux de croissance importants dans le secteur du tourisme (+ 19 % par an en Guadeloupe et + 12 % par an en Martinique contre + 8,4 % par an pour l'ensemble du continent américain).

Il a fait remarquer, à ce propos, que le dispositif de " tunnélisation " voté par l'Assemblée nationale pénaliserait directement le secteur hôtelier, dans lequel on ne pouvait pas faire d'opérations locatives en raison de durées d'amortissement trop longues et de résultats insuffisants dans les premières années d'exploitation.

Evoquant l'incidence du dispositif sur les ressources fiscales publiques, M. Hervé Leherissel a indiqué qu'en 1995 le coût de la défiscalisation des investissements s'élevait à 1,5 milliard de francs -dont 1,2 milliard de francs pour les DOM- et qu'il s'élevait à 2,4 milliards de francs en 1996, à comparer aux dépenses fiscales en faveur des DOM, évaluées à 9,5 milliards de francs, et au total des dépenses fiscales et budgétaires pour l'outre-mer, estimé à 37 milliards de francs en 1995.

En tenant compte des recettes fiscales induites au titre des seuls impôts directs -qui ont connu une très forte croissance entre 1985 et 1995-, et en les rapportant à la part dans la valeur ajoutée des seuls secteurs éligibles à la défiscalisation, M. Hervé Leherissel a jugé que le coût fiscal représentait à peine 500 millions de francs en 1995. Il a considéré qu'en tenant compte de l'accroissement des recettes fiscales locales, notamment le produit de la taxe professionnelle, les finances publiques tiraient un bénéfice net significatif de la défiscalisation, évalué à plus d'un milliard de francs en 1995.

En ce qui concerne la question des abus, il a relevé la confusion entretenue entre :

- les abus ou excès factuels, commis tout au début de la mise en application de la défiscalisation, en raison de l'inexpérience des entreprises implantées outre-mer et d'une méconnaissance des réalités locales et des marchés de la part d'opérateurs métropolitains ;

- certaines réticences de principe qui peuvent être exprimées à l'encontre d'un outil fiscal favorisant les investissements, et donc les détenteurs de revenus importants, susceptibles d'investir. Il a souligné que ces dernières critiques valaient pour toute mesure fiscale d'incitation à l'investissement et n'avaient rien à voir avec la notion d'abus.

Il a estimé que les corrections successives apportées au dispositif avaient donné les moyens à l'administration de remédier aux abus et de contrôler strictement le contenu des projets à travers la procédure d'agrément.

Pour conclure, M. Hervé Leherissel a replacé le dispositif de la défiscalisation dans le contexte global des économies des DOM caractérisées par le déséquilibre emplois/ressources, la dégradation du taux de couverture des importations par les exportations, et par l'envolée très forte des transferts publics métropolitains.

Il a rappelé que les entreprises implantées dans les départements d'outre-mer avaient subi déjà deux " séismes " : la baisse du coût du fret lié à la mondialisation, qui avait favorisé les produits importés et la politique d'égalité sociale, qui avait mis le coût de la main d'oeuvre locale à un niveau, pour la première fois, supérieur à celui du monde industrialisé dans son ensemble, compte tenu du décalage de productivité.

Il a jugé qu'il fallait soutenir le développement économique afin d'enrayer l'ampleur exponentielle de l'engagement public, en substituant autant que faire se pouvait des revenus d'activité aux transferts sociaux passifs.

Il a considéré que, pour y parvenir, la défiscalisation était le meilleur outil possible, et qu'il était vain de plaider pour son remplacement immédiat par des subventions budgétaires, dont l'efficacité serait d'ailleurs bien inférieure.

M. Claude Neuschwander est ensuite intervenu pour présenter son rapport établi en septembre 1997 à la demande de la Fédération des entreprises des départements d'outre-mer (FEDOM). Il a considéré, à titre incident, que le ratio de couverture des importations par les exportations n'était pas très pertinent car il ne tenait pas compte du tourisme et des services invisibles.

Il a jugé que depuis dix ans, la loi de défiscalisation, associée à la loi Perben, avait eu des effets spectaculaires aux Antilles, même si la croissance de la démographie restait et resterait très forte pour les trente ans à venir du fait de l'arrivée de classes d'âge jeunes et nombreuses, et en dépit de l'alignement actuellement constaté des taux de fécondité sur ceux de la métropole.

Il a fait remarquer, également, que les flux migratoires s'étaient, depuis dix ans, inversés et qu'à la Réunion on enregistrait mille retours par an. Il a souligné également que le chômage était important chez les jeunes alors même que ceux-ci étaient formés et qualifiés, ce qui lui faisait redouter des risques d'implosion sociale si la situation économique se dégradait encore.

Il a considéré que l'effort d'équipement aidé par la défiscalisation des investissements devait être maintenu pour permettre la création de 3.000 emplois en Martinique et de 4.500 emplois à la Réunion, principalement dans le secteur du tourisme. Il a souligné que ce mécanisme fiscal permettait d'atténuer les surcoûts de fabrication et d'exploitation dûs aux coûts salariaux et qu'il était ainsi possible de rentabiliser des investissements hôteliers créant des emplois locaux.

Evoquant l'éventuelle suppression du dispositif de défiscalisation, il a jugé à tout le moins indispensable de mettre en place des solutions économiques de substitution à effet immédiat, et attiré fortement l'attention sur les risques de voir dégénérer une situation sociale déjà très explosive.

Répondant à MM. Edmond Lauret et Michel Souplet sur le nombre d'emplois créés par la défiscalisation, M. Hervé Leherissel a indiqué qu'entre 1982 et 1992, sur les 113.000 emplois créés, les deux-tiers étaient à porter au crédit de la défiscalisation, ce qui avait permis de stabiliser la progression des taux de chômage.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis des crédits de l'outre-mer, est intervenu pour souligner les profondes transformations des économies des DOM qui, caractérisées initialement par des monocultures à fort taux de main d'oeuvre, avaient évolué vers des activités de services très diversifiées, et sur la nécessité de maintenir des outils adaptés pour le développement économique.

M. Claude Neuschwander a également souligné le chemin parcouru depuis trente ans par les quatre départements d'outre-mer pour parvenir à une nécessaire ouverture à la mondialisation. Il a fait valoir que si la production de canne à sucre et de bananes s'était rationalisée en supprimant de la main d'oeuvre, d'autres activités à très fort taux d'emplois s'étaient également développées.

Il a considéré que l'on arrivait au terme des conséquences économiques résultant du choix de la départementalisation, puisqu'il avait fallu quarante ans pour parvenir à l'égalité sociale, et que, désormais, il n'y avait plus de progrès à espérer en matière de transferts sociaux. Il a constaté que, parfois, cette égalité sociale s'était faite au détriment du développement économique et que pour l'avenir les économies concernées n'avaient pas d'autre solution que leur ouverture sur les grandes régions économiques auxquelles elles appartenaient. M. Claude Neuschwander s'est déclaré favorable à la mise en place de zones de libre échange dans l'ensemble indien, dans l'ensemble Caraïbes ou Amérique du sud. Il a considéré que la seule réponse globale était à trouver dans une évolution des modes d'intervention publique tendant à favoriser des investissements qui génèrent effectivement des ressources afin de diminuer progressivement la dépendance insulaire et maîtriser la progression des transferts sociaux à fonds perdus. A cet égard, il a fait valoir que la loi de défiscalisation constituait un élément clef de cette mutation.

M. Michel Souplet s'est interrogé sur la façon de valoriser l'image des départements d'outre-mer, dont l'apport est trop souvent sous-estimé en métropole.

M. Jean François-Poncet, président, a remercié les deux interlocuteurs pour la richesse de leurs propos et les éclaircissements qu'ils avaient apportés à la commission sur le dispositif de défiscalisation.

EXAMEN PAR LA COMMISSION

Réunie le mercredi 12 novembre 1997 sous la présidence de M. Jean François-Poncet, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Rodolphe Désiré sur les crédits du secrétariat d'Etat à l'outre-mer consacrés à l'outre-mer dans le projet de loi de finances pour 1998.

Après avoir relevé qu'il était très difficile de mettre sur le même plan les départements d'outre-mer, soumis au même régime constitutionnel que les autres départements français, et les territoires d'outre-mer qui ont un statut d'autonomie qui leur est propre, le rapporteur pour avis a évoqué la situation économique des départements d'outre-mer qui a évolué de manière contrastée selon les secteurs d'activité, mais qui reste globalement très préoccupante.

Il a relevé que l'augmentation sensible du pouvoir d'achat des bénéficiaires du SMIC, du fait de son alignement sur celui de la métropole, avait déséquilibré encore un peu plus la balance des échanges extérieurs, du fait de la difficulté des économies des DOM à répondre à l'augmentation de la consommation des ménages.

Il a souligné que les points noirs de l'activité économique restaient malheureusement bien identifiés, qu'il s'agisse du poids très important des transferts publics en provenance de la métropole -puisque le solde net est évalué à 35,8 milliards de francs en 1996, soit 44 % du PIB à la Réunion, 37 % en Martinique, 32 % en Guadeloupe et 27,8 % en Guyane- ou de la dégradation continue du marché de l'emploi, puisque le nombre de demandeurs d'emploi a progressé de 19 % entre 1993 et 1996.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a relevé que les taux de chômage atteignaient des niveaux très élevés dans chacun des quatre départements : 40,2 % à la Réunion, 27 % à la Martinique, 26,8 % à la Guadeloupe et 22,1 % à la Guyane -ce dernier chiffre étant largement sous-évalué-.

S'agissant des territoires d'outre-mer, il a considéré que le constat s'établissait en demi-teinte et variait selon les activités économiques. Si, globalement, l'activité touristique s'était améliorée en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie sans effacer totalement les effets négatifs de la reprise des essais nucléaires, les revalorisations salariales avaient souvent eu pour effet d'aggraver le déséquilibre de la balance des échanges. Le rapporteur pour avis a souligné que l'activité économique y restait très dépendante de la commande publique à travers l'exécution des contrats de plan ou des conventions de développement.

Présentant le budget de l'outre-mer, il a souligné qu'il était en progression de 7,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997 et que lemontant des crédits de paiement ouverts au titre des dépenses ordinaires s'élevait à 5,22 milliards de francs.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a néanmoins fait valoir que 96 millions de francs provenaient d'un transfert du budget du logement pour la résorption de l'habitat insalubre dans les départements d'outre-mer et que 300 millions de francs inscrits dans les crédits du Fonds pour l'emploi dans les DOM allaient servir à mettre en oeuvre la loi sur les " emplois-jeunes " votée en octobre dernier.

Il a considéré que, hors ces deux mouvements, le budget de l'outre-mer était reconduit à hauteur de l'an dernier.

Le rapporteur pour avis a souligné que la lutte pour l'emploi et l'insertion restait une priorité mais que l'augmentation de 14,3 % des crédits du Fonds pour l'emploi dans les DOM ne faisait que traduire l'inscription dans le budget de l'outre-mer des crédits nécessaires à la mise en oeuvre de la loi sur le plan " emplois-jeunes ".

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a déploré, en conséquence, que le plan " emplois-jeunes ", qui devrait permettre la création de 6.000 emplois en 1998, vienne compenser en réalité la diminution des crédits prévus pour un dispositif existant, si bien que seulement 48.500 nouvelles solutions d'insertion pourront être financées, contre 66.200 contrats aidés en 1996.

S'agissant du logement social, le rapporteur pour avis a indiqué que la réduction de 150 millions de francs tenait compte de la réduction du taux de TVA applicable dans les DOM au logement social, ce qui n'affecterait pas le volume des opérations, mais il a considéré que l'inscription au budget de l'outre-mer d'une dotation de 96 millions de francs destinés à la résorption de l'habitat insalubre, ne constituait qu'un simple transfert et non une augmentation de crédits.

Il s'est félicité de la forte augmentation des crédits de paiement de la ligne budgétaire unique (LBU) qui allait permettre de financer plus de 17.000 opérations en constructions neuves et réhabilitations en 1998.

A propos de l'exécution des contrats de plan, et en tenant compte de la décision prise par l'Etat en 1997 d'étaler leur réalisation sur une année supplémentaire -ce qui n'avait pas été sans conséquence sur la programmation des réalisations- le rapporteur pour avis a souligné que le taux d'engagement était au 31 décembre 1996 d'environ 35 %, en amélioration par rapport à 1995, mais qu'il restait encore insuffisant. Il a relevé que l'engagement était le plus souvent freiné par la complexité et la très grande ampleur des opérations lourdes menées en matière d'assainissement ou d'aménagement foncier.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a indiqué par ailleurs que les moyens de paiement du Fonds d'investissements des DOM (FIDOM) s'établissaient à 232,5 millions de francs contre 218 millions de francs en 1997, soit une augmentation de 6,7 %, mais il a déploré qu'aucun projet de loi sur l'aménagement du territoire n'ait été en définitive déposé contrairement aux promesses faites quand la suppression du FIDES-décentralisé avait été décidée. Le rapporteur pour avis a souligné que, nonobstant cette suppression, les crédits de paiement devaient être prévus à un niveau suffisant pour permettre d'achever les opérations correspondant à des autorisations de programme engagées avant le 31 décembre 1996.

Il a fait également état de l'effort public important consenti envers la Guyane à travers la mise en place de la garantie de l'Etat à la SOFIDEG, la dotation supplémentaire pour les équipements scolaires de 15 millions de francs qui concernera plus spécifiquement ce département, et l'augmentation des crédits pour les infrastructures de Guyane.

A propos des territoires d'outre-mer, le rapporteur pour avis a noté que les crédits du fonds d'investissement pour le développement économique et social des territoires d'outre-mer (FIDES) étaient reconduits mais qu'il avait été décidé de redéployer les crédits de paiement du FIDES-section générale vers le FIDES-section territoriale.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a souligné également que les dotations pour la Nouvelle-Calédonie avaient été reconduites au même niveau qu'en 1997, à hauteur de 390 millions de francs en autorisations de programmes et de 378 millions de francs en crédits de paiement, étant donné les échéances importantes à venir pour ce territoire.

Prenant acte de la progression, en définitive très limitée, des moyens budgétaires à destination de l'outre-mer, le rapporteur pour avis s'est déclaré très hostile à la remise en cause brutale du dispositif de défiscalisation de la loi Pons.

Il a fait valoir que ce dispositif, conçu pour compenser l'insuffisance et la cherté du crédit bancaire ainsi que le coût de la main d'oeuvre dans les DOM, était un véritable outil de développement économique.

Il a souligné que l'investissement outre-mer était assuré par trois sources de financement, à savoir les fonds structurels européens pour environ 11 milliards de francs sur la période 1994-1999, l'exécution des contrats de plan Etat-régions pour un montant total de 11,4 milliards de francs contractualisé sur la même période et, enfin, les investissements bénéficiant du régime de défiscalisation ; il a considéré qu'à régime juridique inchangé, ces derniers pourraient s'élever à 20 milliards de francs entre 1996 et 2001, date d'échéance du dispositif de défiscalisation.

Le rapporteur pour avis a fait valoir que le mécanisme de défiscalisation permettait d'aligner, autant que faire se peut, la fiscalité locale des DOM-TOM sur celles des états des zones Caraïbes, Océan indien et pacifique qui sont des concurrents directs, notamment en matière touristique et que le rapport rédigé par M. Alain Richard -alors rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale- en 1991 en avait déjà souligné la nécessité économique.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a cité les investissements réalisés à Cuba où le nombre de chambres d'hôtels est passé de 8.000 à 38.000 dans un environnement très largement défiscalisé.

En conclusion, le rapporteur pour avis a fait valoir que, si le texte voté à l'Assemblée nationale en matière de défiscalisation était maintenu en l'état, le développement économique, et en particulier touristique, s'en trouverait gravement handicapé.

Il a souhaité le maintien de la défiscalisation prévue par la loi Pons jusqu'à son terme, jugeant que, pour être efficace, un dispositif de développement économique devait être pérenne. Il a demandé également que les pouvoirs publics réfléchissent de toute urgence au nouveau dispositif qui devra prendre place à partir de l'an 2002 pour permettre aux DOM-TOM de poursuivre leur développement, notamment en matière touristique.

M. Rodolphe Désiré, rapporteur pour avis, a ajouté, à titre d'exemple, que le développement du secteur de la navigation de plaisance avait connu un essor significatif et que les constructeurs français y étaient très présents, ce qui n'était pas le cas de la navigation de croisière, très largement dominée par les Etats-Unis et la Norvège. Il a souligné, de plus, que le secteur de la plaisance était beaucoup plus intéressant en termes d'emplois locaux créés et de consommation intérieure.

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, il a proposé à la commission de s'en remettre à la sagesse du Sénat en ce qui concerne l'adoption des crédits de l'outre-mer.

M. Jean François-Poncet, président, est intervenu pour souligner que le vote intervenant sur un budget devait tenir compte des orientations générales et des décisions adoptées sur le secteur. Il a considéré, à propos du budget de l'outre-mer, que le contexte politique était particulièrement défavorable du fait de la remise en cause du principe de défiscalisation des investissements réalisés outre-mer.

M. Edmond Lauret est intervenu pour souligner les artifices comptables ayant permis d'afficher une augmentation des crédits consacrés à l'outre-mer alors qu'en réalité il ne s'agissait que d'une reconduction.

En ce qui concerne le financement des emplois-jeunes, il a jugé que les 300 millions de francs prévus à ce titre ne permettraient pas de créer 6.000 emplois, mais seulement 3.500 à répartir dans tous les départements d'outre-mer, et qu'en tout état de cause le dispositif n'était pas adapté, puisque les collectivités locales n'avaient pas les moyens financiers d'assurer le complément de rémunération.

Il a déploré que les crédits de la ligne budgétaire unique, hors transferts provenant du budget du logement, stagnent alors même que le taux de chômage dans le secteur du bâtiment était important et que les besoins en logements, notamment intermédiaires, n'étaient pas satisfaits.

Enfin, s'agissant de la loi de défiscalisation, M. Edmond Lauret a souligné que l'adoption définitive de la " tunnélisation " ajouté par l'Assemblée nationale, contre l'avis du Premier ministre, interdirait tout investissement dans le secteur de l'hôtellerie, des transports ou de la navigation de plaisance, ce qui aurait des effets catastrophiques sur l'emploi. Il s'est associé aux propos du rapporteur pour avis pour dénoncer le risque à très court terme d'une déstabilisation grave de la société outre-mer.

Compte tenu de ces éléments, il s'est alors déclaré contre l'adoption des crédits de l'outre-mer.

Après une intervention de M. Jean Huchon sur les possibilités d'une exploitation plus rationnelle de la forêt guyanaise, la commission a fait sienne la demande du rapporteur pour avis concernant l'adoption d'un plan de développement pour l'outre-mer, mettant à plat les problèmes spécifiques des départements et territoires d'outre-mer et proposant un dispositif d'aide au développement défini sur au moins vingt ans.

Puis, la commission, contre la proposition du rapporteur pour avis qui préconisait de s'en remettre à la sagesse du Sénat, a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, consacrés à l'outre-mer.


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