AVIS N° 89 TOME 6 - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998, ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE - ANCIENS COMBATTANTS


Marcel LESBROS, Sénateur


COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES - AVIS N° 89 TOME 6 - 1997/1998

Table des matières






N° 89

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME VI

ANCIENS COMBATTANTS

Par M. Marcel LESBROS,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean-Pierre Fourcade, président ; Jacques Bimbenet, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Claude Huriet, Bernard Seillier, Louis Souvet, vice-présidents ; Jean Chérioux, Charles Descours, Roland Huguet, Jacques Machet, secrétaires ; François Autain, Henri Belcour, Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Nicole Borvo, MM. Louis Boyer, Jean-Pierre Cantegrit, Francis Cavalier-Benezet, Gilbert Chabroux, Philippe Darniche, Mme Dinah Derycke, M. Jacques Dominati, Mme Joëlle Dusseau, MM. Alfred Foy, Serge Franchis, Alain Gournac, André Jourdain, Jean-Pierre Lafond, Pierre Lagourgue, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jean-Louis Lorrain , Simon Loueckhote, Jean Madelain, Michel Manet, René Marquès, Serge Mathieu, Georges Mazars, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Sosefo Makapé Papilio, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexe n° 6 ) (1997-1998).

Lois de finances.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

Le mardi 14 octobre 1997 , sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président , la commission a procédé à l'audition de M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, sur les crédits de son département ministériel pour 1998 .

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants , a rappelé que le montant des crédits alloués à son ministère pour 1998 s'établirait à près de 26 milliards de francs, soit une diminution de 3,5 % par rapport aux crédits pour 1997. Il a tenu à replacer ces chiffres dans leur contexte pour leur donner toute leur signification. Pour cela, il a rappelé que le nombre des anciens combattants continuait de baisser, réduisant à concurrence le montant des pensions à verser ; le ministre a également souligné que le Gouvernement avait fait de l'emploi des jeunes sa priorité, limitant les mesures nouvelles dans les autres ministères.

M. Jean-Pierre Masseret a considéré que les missions essentielles de son administration étaient assurées. Concernant le droit à réparation, il a rappelé que tous les droits existants seraient honorés. Evoquant le nécessaire effort de solidarité, il est revenu sur l'allocation différentielle et l'allocation de préparation à la retraite en précisant qu'une condition de ressources serait établie qui devrait concerner les foyers qui disposent d'un revenu supérieur à 25.000 francs. Le ministre a également insisté sur le coût que représentaient les remboursements de cotisations de sécurité sociale et de réductions de tarifs de transport.

Evoquant la politique de la mémoire, il a considéré que la baisse des crédits de trois millions de francs devait être appréciée au regard du fait que le coût de la commémoration du 80ème anniversaire du 11 novembre 1918 ne serait pas imputé sur les crédits du ministère.

Abordant la question du fonctionnement des structures du secrétariat d'Etat, il a fait observer que la suppression de 87 emplois ne devrait pas porter atteinte à l'organisation des services.

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a précisé qu'au titre des mesures nouvelles, les étrangers déportés depuis la France entre 1940 et 1945 et ayant acquis depuis la nationalité française seraient indemnisés.

Il a également annoncé l'alignement sur le droit commun des dates de remboursement par l'Etat de la majoration des rentes constituées par les anciens combattants en soulignant que cette mesure n'affecterait pas les intéressés.

M. Jean-Pierre Masseret a conclu son propos liminaire en considérant que la baisse des crédits de son secrétariat d'Etat ne menaçait pas le droit à réparation et les mesures de solidarité.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a considéré que le budget était l'élément essentiel de la politique en faveur des anciens combattants et a souhaité, à cet égard, évoquer quelques mesures nouvelles répondant à leurs préoccupations.

Le rapporteur pour avis s'est ainsi interrogé sur la possibilité d'accorder une retraite anticipée aux anciens combattants d'Afrique du Nord chômeurs en fin de droit ayant cotisé plus de 40 ans. Il a souhaité que toute forclusion soit levée concernant les demandes des membres de la Résistance pour obtenir le titre de combattant volontaire de la Résistance.

Il a demandé à ce que le secrétaire d'Etat intervienne pour que les représentants de l'Etat cessent de faire quasi systématiquement appel des décisions favorables aux requérants devant les tribunaux des pensions.

Le rapporteur pour avis a souligné les difficultés que pouvait poser le passage obligé par l'allocation différentielle pour l'accès à l'allocation de préparation à la retraite et a fait remarquer que ce mécanisme qui maintenait certains anciens combattants dans une situation de pauvreté pourrait être réexaminé.

Il a souhaité enfin une relance de la politique de la mémoire à travers, notamment, des actions spécifiques à l'attention des jeunes.

En réponse aux différentes questions de M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis , M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a rappelé que les droits existants des anciens combattants seraient honorés.

Le ministre a considéré, en revanche, que le coût de la retraite anticipée pour les anciens combattants d'Afrique du Nord était hors de portée des crédits de son ministère, mais il a déclaré qu'une avancée pour les chômeurs bénéficiant du Fonds de solidarité était possible.

En réponse à une question de M. Jean-Pierre Fourcade, président, le ministre a chiffré le coût de cette dernière disposition à 35 millions de francs pour une retraite de base en rappelant qu'elle ne figurait pas encore au nombre des dispositions nouvelles prévues dans le budget pour 1998.

Le ministre a estimé le coût d'une extension de deux ans de la période de référence pour l'obtention du titre de Reconnaissance de la Nation pour les anciens combattants d'Algérie à 200 millions de francs en considérant les droits attachés relatifs à la rente mutualiste.

Concernant le passage préalable par l'allocation différentielle pour pouvoir bénéficier de l'allocation de préparation à la retraite, le ministre a déclaré avoir demandé à son inspection générale d'étudier les moyens de sa suppression. Il a rappelé que l'ensemble du dispositif allocation différentielle et allocation de préparation à la retraite concernait 33.500 personnes pour un total de 1,5 milliard de francs.

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants , a déclaré qu'il examinerait attentivement la question des appels des décisions des tribunaux des pensions.

Concernant la forclusion, le ministre a rappelé qu'elle avait été juridiquement levée, mais qu'il subsistait des conditions strictes. Il a souhaité que les préfets procèdent à des enquêtes complémentaires chaque fois que cela serait nécessaire sans exclure une modification à terme du décret correspondant.

Le ministre a souhaité préciser ses prochaines priorités concernant les demandes des anciens combattants. Il a cité des mesures en faveur des chômeurs de longue durée, une prise en compte de la notion de risque pour l'attribution de la carte du combattant aux anciens combattants d'Afrique du Nord ainsi qu'une modification du mécanisme de la rente mutualiste.

En réponse à une question de M. Guy Fischer qui considérait le projet de budget comme inacceptable en l'état, M. Jean-Pierre Masseret a répondu que des mesures complémentaires étaient envisagées, notamment dans le domaine de la solidarité. Il a également annoncé la mise en place d'un nouveau groupe de travail sur le rapport constant, la participation des veuves aux instances de direction de l' Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), ainsi qu'une réflexion sur l'octroi de la carte du combattant.

Evoquant ce qu'il a appelé la " guerre d'Algérie ", le ministre a tenu à souligner que tout homme appelé ou engagé méritait respect et reconnaissance.

En réponse à une question de Mme Gisèle Printz sur les harkis, le ministre a rappelé qu'il existait une délégation générale aux rapatriés ne dépendant pas de son ministère. Evoquant plus particulièrement les problèmes rencontrés par les harkis et les actions revendicatives en cours, il a rappelé que l'ONAC avait participé à la formation de 300 jeunes harkis en 1997. Il a également souligné, plus généralement, que les harkis avaient des droits qui leur avaient été reconnus notamment dans le cadre du code des pensions.

Toujours en réponse à Mme Gisèle Printz , M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a déclaré avoir bien noté que le changement de la couleur de la carte du combattant pouvait poser un problème du fait d'une circulation non satisfaisante de l'information entre les administrations.

En réponse à une question de M. Louis Boyer , le ministre a confirmé que l'indemnisation dont bénéficieraient les étrangers déportés pendant la seconde guerre mondiale ne recouvrait pas le service du travail obligatoire (STO). Il a déclaré que cette mesure nouvelle concernerait une centaine de personnes pour un coût estimé à 10 millions de francs.

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, a également déclaré qu'il réfléchissait à l'évolution des structures du ministère en rappelant qu'il n'était pas question de remettre en cause le principe de son existence. Il a annoncé une réflexion sur la question des tarifs de titres de transport de la société nationale des chemins de fer (SNCF) ainsi que sur la " décristallisation " de certaines pensions. Il a fait part également de son souci de développer la politique en faveur de la mémoire.

En réponse à M. Jean-Pierre Fourcade, président , le ministre a fait observer que l'octroi de la carte du combattant aux 200.000 titulaires du titre de Reconnaissance de la Nation coûterait 400 millions de francs. Il a considéré que cette mesure n'était pas pour l'instant envisageable.

II. EXAMEN DE L'AVIS

Le mardi 28 octobre 1997 , sous la présidence de M. Jean-Pierre Fourcade, président , la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Marcel Lesbros sur le projet de loi de finances pour 1998 ( anciens combattants ).

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a déclaré que le projet de budget s'inscrivait dans un contexte économique difficile marqué par des économies budgétaires et par la poursuite d'une baisse structurelle du nombre des anciens combattants qui diminuait d'autant le montant des prestations servies.

Le rapporteur pour avis a rappelé que l'objectif du budget général était de limiter les déficits publics à 3 % du produit intérieur brut (PIB) et qu'à cette fin, les dépenses du budget général n'augmenteraient que de 1,36 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997, soit un rythme comparable à l'évolution prévisionnelle des prix.

Le rapporteur pour avis a rappelé que les crédits affectés au secrétariat d'Etat aux anciens combattants et victimes de guerre s'élevaient à 25,952 milliards de francs, ce qui représentait une baisse de 3,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997.

Il a considéré que cette baisse signifiait que les crédits rendus disponibles par une réduction du nombre des pensionnés n'étaient pas réaffectés pour l'essentiel au sein du ministère, mais au profit des priorités du nouveau Gouvernement.

Le rapporteur pour avis a fait observer que ce budget se caractérisait par une absence de mesures nouvelles importantes accompagnée, pour l'essentiel, du maintien des droits et des structures.

Concernant les mesures nouvelles adoptées par le Gouvernement, le rapporteur a distingué les dispositions inscrites dans le projet de loi de finances déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale des dispositions qui ont été adoptées à l'Assemblée avec l'accord du Gouvernement, que ce soit en commission ou en séance publique.

Il a rappelé que le projet de loi de finances, déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, comprenait trois dispositions nouvelles : l'article 62 qui permet l'indemnisation des étrangers déportés depuis la France et ayant acquis depuis lors la nationalité française, l'alignement sur le droit commun des dates de remboursement par l'Etat de la majoration des rentes constituées par les anciens combattants et la prise en compte pour l'attribution de l'allocation différentielle du Fonds de solidarité des revenus du foyer qui devrait exclure les ménages qui perçoivent un revenu imposable mensuel supérieur à 18.255 francs.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis , a considéré que ces trois mesures étaient de nature différente : la première devant concerner environ 150 déportés et leurs ayants cause pour 11,6 millions de francs, la deuxième ne devant pas toucher les anciens combattants et la troisième supprimant le bénéfice de l'allocation différentielle pour 310 personnes, soit 1% des effectifs actuels, pour une économie de 9 millions de francs.

Le rapporteur pour avis a souligné que les députés de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale avaient considéré que ce budget était " inacceptable en l'état " et qu'ils avaient réclamé de nombreuses mesures que la commission des affaires sociales du Sénat défendait également ; il a cité la suppression de l'obligation de passage par l'allocation différentielle pour entrer en allocation de préparation à la retraite (APR), la prise en compte pour l'attribution du titre de reconnaissance de la Nation des périodes passées en Algérie après 1962, la relance de la politique de la mémoire, un effort sur les conditions d'attribution de la carte du combattant et des mesures concernant la retraite anticipée pour les anciens d'Algérie.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis , a déclaré que, pour tenir compte des réserves exprimées par les députés, le secrétaire d'Etat avait obtenu du Gouvernement l'inscription de 40 millions de francs de crédits supplémentaires en faveur des anciens combattants lors de la discussion de la première partie de la loi de finances. Il a fait remarquer que cette augmentation n'était en rien considérable puisqu'elle ne représentait qu'une hausse de 0,15 % des crédits du département ministériel. Il a fait observer que ces crédits étaient destinés à l'origine à financer quatre dispositions : la fixation du plafond de la retraite mutualiste en points d'indice de pension militaire d'invalidité, à hauteur de 95 points, soit un montant de 7.488 francs pour le plafond majorable en 1988 contre 7.091 francs en 1997 ; la remise à niveau des crédits de mémoire ; l'élargissement des conditions d'attribution de la carte du combattant en Afrique du Nord avec la prise en compte du critère de la durée de séjour d'au moins dix-huit mois ; et l'amélioration de l'action sociale de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) au profit des anciens d'Afrique du Nord dans l'attente d'une possible avancée en matière de retraite anticipée.

Le rapporteur pour avis a déclaré qu'il considérait, comme les députés de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, que ces mesures étaient insuffisantes dans leur montant par rapport aux 745 millions de francs économisés du fait de la diminution du nombre de pensionnés et, dans leur objet, au regard de l'attente de l'ensemble des parlementaires quant à l'annonce d'une mesure de véritable retraite professionnelle pour les anciens d'Afrique du Nord.

Il a rappelé que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale avait décidé de donner un avis favorable au projet de budget sous réserve de l'adoption de trois amendements au projet de loi de finances : le premier fixant à 95 points d'indice le montant du plafond majorable de la retraite mutualiste et prévoyant la revalorisation de ce plafond en fonction de la valeur du point d'indice ; le deuxième ouvrant droit à la retraite anticipée pour les anciens combattants en Afrique du Nord chômeurs en fin de droits pouvant justifier d'une durée de cotisation de quarante annuités à l'assurance vieillesse diminuée du temps passé en Afrique du Nord ; le troisième ouvrant l'attribution de la carte de combattant aux anciens d'Afrique du Nord justifiant d'une durée de service d'au moins douze mois en Afrique du Nord.

Le rapporteur pour avis a rappelé que le Gouvernement, lors du débat en séance publique, avait estimé avoir tenu compte des amendements adoptés par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale en modifiant la ventilation des 40 millions de francs supplémentaires inscrits à l'issue de la discussion de la première partie du budget ; il a souligné que la prise en compte des voeux de la commission avait eu pour conséquence la suppression des crédits supplémentaires qui devaient être attribués à la politique de la mémoire et à l'action sociale de l'ONAC.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a déclaré que le Gouvernement avait repris le premier amendement de la commission et que pour le deuxième, il avait adopté le principe de l'équivalence entre une opération de feu et une condition de présence égale à dix-huit mois dans les conditions d'obtention de la carte du combattant.

Le rapporteur pour avis a annoncé, concernant la retraite anticipée des anciens combattants d'Afrique du Nord, que M. Jean-Pierre Masseret avait présenté une mesure visant à assurer la garantie d'un revenu équivalent à une retraite anticipée, soit 5.600 francs par mois pour les chômeurs qui pouvaient justifier de 160 trimestres de cotisations à l'assurance vieillesse, y compris le temps passé en Afrique du Nord. Il a précisé que cette disposition prendrait la forme d'un relèvement de l'allocation différentielle à due concurrence à partir du 1 er janvier 1998 pour les anciens combattants concernés, et que 12 à 15.000 personnes pouvaient être intéressées.

Le rapporteur pour avis a considéré qu'il s'agissait d'un pas en avant qui ne réglait toutefois pas la question puisque la disposition s'apparentait plus à une mesure d'assistance que de réparation.

Pour conclure sur cet ensemble de mesures nouvelles, le rapporteur pour avis a fait observer que 25 millions de francs iraient au chapitre 46-10 afin de porter à 5.600 francs l'allocation différentielle, que 10 millions de francs iraient au chapitre 46-21 pour tenir compte de l'augmentation du nombre de titulaires de la carte du combattant et que 5 millions de francs seraient destinés au chapitre 47-22 pour financer le relèvement du plafond ouvrant droit à majoration des rentes mutualistes. M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a tenu à préciser que la réserve parlementaire avait été sollicitée à hauteur de 25 millions de francs pour augmenter la disposition relative au relèvement de l'allocation différentielle sans que ce financement complémentaire puisse garantir tout à fait le bouclage de la mesure que le ministère ne pouvait chiffrer tout à fait. Le rapporteur pour avis a considéré que le recours à la réserve parlementaire ne devait pas servir à financer des mesures structurelles en appoint ou en remplacement du budget général.

Le rapporteur pour avis s'est alors interrogé sur la façon d'apprécier ce budget et sur les mesures complémentaires adoptées par l'Assemblée nationale, au regard notamment des revendications du monde combattant, telles qu'elles sont exprimées par le Front uni.

Il a considéré que la revalorisation de la retraite mutualiste du combattant ne pouvait constituer que l'amorce d'un rattrapage qui devrait être confirmé à l'avenir. Le critère des 18 mois de présence en Afrique du Nord pour l'obtention de la carte du combattant lui est apparu comme une avancée positive notamment vers la notion de risque, bien qu'il ait considéré qu'elle ne réglait pas la question, nombre d'anciens combattants étant restés légèrement moins de 18 mois.

La disposition en faveur des chômeurs ayant cotisé 160 trimestres lui a semblé être un premier pas mais, là aussi , il a considéré qu'elle était insuffisante au regard de l'enjeu.

Le rapporteur pour avis a déclaré qu'il ne pouvait se satisfaire du fait que la hausse des crédits affectés à la politique de la mémoire ait été purement et simplement annulée. De même, il a fait observer que les crédits relatifs à l'action sociale de l'ONAC ne seraient pas abondés, comme cela avait été prévu dans la première ventilation des 40 millions de francs de crédits supplémentaires, et que les conseils généraux devraient à nouveau aider les offices départementaux des anciens combattants et victimes de guerre (ODAC).

Le rapporteur pour avis a considéré, dans ces conditions, que le projet de budget qui était présenté apparaissait comme une étape bien plus que comme un règlement du contentieux qui oppose le monde combattant au Gouvernement.

Il a déclaré qu'il serait très vigilant à ce que des progrès substantiels soient réalisés au cours de l'année, au regard notamment des 40 engagements pour 1998 que le secrétaire d'Etat venait de prendre. Il a considéré qu'une multitude de petites progrès lui semblaient possibles, notamment à l'intention des Alsaciens et Mosellans enrôlés de force dans les troupes allemandes, des résistants qui n'avaient toujours pas obtenu reconnaissance, des recours devant les tribunaux de pension exercés par les représentants de l'Etat ou de la situation des veuves qui demandait à être réexaminée.

Il a fait observer qu'il restait à poursuivre l'évolution des structures, des coopérations avec le ministère de la défense, auquel le secrétariat d'Etat était désormais rattaché, lui ont semblé possibles et souhaitables, notamment en matière de mémoire. Il a insisté pour que l'Institut national des invalides soit pérennisé dans ses moyens humains, qu'il a considéré comme menacés par la disparition du service national, et pour que les structures de l'ONAC soient adaptées pour satisfaire au mieux les anciens combattants.

Le rapporteur pour avis a fait observer que ce budget permettait donc quelques améliorations de la situation des anciens combattants qui n'étaient toutefois pas exemptes de toute ambiguïté, l'avancée sur la retraite anticipée lui semblant tenir plus d'une mesure d'assistance que de reconnaissance.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, a considéré qu'à titre personnel, il s'était interrogé sur la possibilité de donner un avis favorable à ce budget, assorti toutefois de sévères critiques, mais qu'il préconisait la sagesse et en appelait à l'opinion de ses collègues pour déterminer la position de la commission.

M. André Jourdain s'est alors interrogé sur les progrès qui avaient été réalisés dans les budgets pour 1996 et 1997. Le rapporteur pour avis lui a répondu qu'un effort important avait été réalisé concernant la solidarité.

M. Jean Madelain a considéré que le rapporteur pour avis avait bien mis en avant le caractère limité des avancées qui avait été obtenu par l'Assemblée nationale et qu'il n'était pas possible de s'en satisfaire. Il a souhaité que la commission se range derrière les critiques formulées par son rapporteur et prononce un avis défavorable.

M. Guy Fischer a rappelé que son groupe avait souhaité des mesures marquantes et que la baisse des crédits du ministère était contradictoire avec cet objectif. Il a annoncé que son groupe s'abstiendrait.

Mme Gisèle Printz a souhaité qu'un effort soit fait concernant le taux de réversion des pensions aux veuves.

M. Jean-Pierre Fourcade, président, s'est prononcé pour l'adoption d'un avis défavorable.

M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis, rappelant les critiques qu'il avait lui-même formulées à l'encontre du projet de budget, a indiqué qu'il se ralliait à l'avis négatif qui semblait se dégager des interventions de ses collègues.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé d'émettre un avis défavorable à l'adoption du projet de budget pour 1998 du secrétariat d'Etat aux anciens combattants .

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants est paradoxal à trois égards. Alors que la conjoncture économique s'améliore nettement et que des marges de manoeuvre budgétaires semblent se dégager, il voit ses crédits baisser fortement. Alors que la structure démographique du monde combattant ouvre des possibilités de réaffectations de crédits, le Gouvernement se limite à quelques mesures symboliques. Alors que la nouvelle majorité s'était engagée sur des dispositions précises, comme une véritable retraite anticipée pour les combattants d'Afrique du Nord, l'examen du budget à l'Assemblée nationale a mis en évidence un constat de désaccord des différentes composantes de la majorité, escamoté par des concessions de portée limitée de dernière minute.

Pourtant, après ce constat, riche en désillusions pour les associations représentant le monde combattant, il faut observer que le secrétaire d'Etat, M. Jean-Pierre Masseret, a souhaité prendre date à l'occasion de l'examen de ce premier budget en faisant part de ses quarante engagements pour 1998 (voir annexe 3). Certains de ces engagements constituent de simples déclarations d'intention notamment sur des points importants comme la retraite anticipée pour les anciens combattants d'Afrique du Nord, mais cette liste constituera sans nul doute un outil fort utile pour apprécier, à l'avenir, les résultats de la politique en faveur des anciens combattants que mène le Gouvernement.

Dans le projet de budget pour 1998, les dépenses du budget général augmentent de 1,36 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997, soit un rythme comparable à l'évolution prévisionnelle des prix. Dans ce contexte, les crédits affectés au secrétariat d'Etat aux anciens combattants qui s'élèvent à 25,952 milliards de francs, enregistrent une baisse de 3,5 % par rapport au budget de 1997 .

Cette baisse signifie que les crédits rendus disponibles par une réduction du nombre des pensionnés ne sont pas réaffectés, même de manière partielle, au sein du ministère. En effet, une baisse des effectifs pensionnés proche des 3,5 % laisse penser que les moyens d'actions du ministère sont globalement préservés.

La philosophie générale de ce budget est donc la suivante : une absence de mesures nouvelles importantes qui doit être appréciée au regard du maintien des droits et des structures.

Lorsque l'on analyse sommairement l'évolution du budget depuis dix ans, on observe que la quasi stabilité du budget en francs courants masque une forte croissance des dépenses qui ne sont pas liées directement à la réparation de l'invalidité, en particulier au nom de la solidarité et de la reconnaissance due aux anciens combattants. C'est ainsi que les dépenses liées à la réparation de l'invalidité qui s'élevaient à 81 % des crédits du ministère en 1989 représentent 75 % de ces mêmes crédits en 1998. Les dépenses de fonctionnement quant à elles sont restées globalement stables sur cette période puisqu'elles représenteront 5 % des crédits en 1998 contre 4 % en 1989. Ce sont les dépenses affectées à la mémoire, à la reconnaissance et à la solidarité qui bénéficient de cette évolution puisqu'elles représentent dorénavant 20 % des crédits contre 15 % en 1989.

Lorsque l'on examine l'évolution des différentes dotations budgétaires du ministère entre 1997 et 1998 (voir annexe n° 1), on constate que les dépenses de personnel sont en hausse (+ 0,70 %) comme les investissements réalisés par l'Etat. Il apparaît également que les crédits affectés à l'ONAC sont en baisse (- 2,55 %), ainsi que ceux affectés à l'INI (- 3,37 %). Les crédits de la dette viagère sont en baisse (- 2,58 %) de même que ceux du Fonds de solidarité pour les anciens combattants d'AFN (- 0,75 %).

Les crédits affectés à la mémoire et à l'action sociale sont également fragilisés dans ce projet de budget. On constate, contrairement à un premier projet du Gouvernement, qu'aucun crédit supplémentaire n'a été accordé à ces deux actions prioritaires dans le cadre des 40 millions de francs de crédits supplémentaires adoptés lors du débat à l'Assemblée nationale.

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Budget 1998 des anciens combattants et victimes de guerre

Avec près de 26 milliards de francs, le budget des anciens combattants est le 11 ème budget de l'Etat.

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Dans ces conditions, la commission des Affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits relatifs aux anciens combattants dans le projet de budget pour 1998 ainsi que sur les articles rattachés 62, 62 bis, 62 ter et 62 quater.

I. LE PROJET DE BUDGET POUR 1998 PRÉSERVE GLOBALEMENT LES MOYENS D'ACTION POUR ASSURER LE RESPECT DES DROITS ÉLÉMENTAIRES DES ANCIENS COMBATTANTS

A. LA DIMINUTION DES EFFECTIFS DE LA POPULATION COMBATTANTE DÉGAGE DES MARGES DE MANOEUVRE BUDGÉTAIRES

1. Les crédits affectés aux dépenses de réparation sont en baisse

Les crédits affectés au Secrétariat d'Etat aux anciens combattants sont en diminution de 941 millions de francs par rapport au budget voté en 1997, soit une baisse de 3,5 %. On observe que cette diminution s'explique de manière importante par des économies mécaniques sur la dette viagère et par une mesure de trésorerie.

La dette viagère, regroupant la retraite du combattant (chapitre 46-21) et les pensions d'invalidité et allocations diverses (chapitre 46-22), diminue de 525 millions de francs. Ce solde est lui-même la résultante de la diminution des parties prenantes (- 745 millions de francs), et de l'application du rapport constant (+ 220 millions de francs) liée en particulier à la hausse de la valeur du point Fonction publique en 1997. De même, la diminution des crédits des soins médicaux gratuits (- 5 %), d'appareillage (- 2 %), des remboursements SNCF (- 3 %) correspond à des économies de constatation qui constituent autant d'ajustements aux besoins prévisibles dans le cadre de la réglementation existante.

On peut noter que l'application stricte du " rapport constant " pour calculer la revalorisation des pensions militaires d'invalidité en fonction de l'évolution des traitements de la fonction publique, constitue un minimum aux yeux des associations représentatives du monde combattant. Celles-ci contestent son mode de calcul, elles le considèrent complexe, peu transparent et incomplet.

Il n'est pas inutile de rappeler que le mode de calcul actuel a été établi par l'article L. 8 bis du code des pensions, issu de l'article 123 de la loi de finances pour 1990.

Cet article a prévu que le rapport constant évolue :

- en cours d'année, en fonction des mesures générales applicables aux traitements bruts des fonctionnaires ;

- au 1er janvier de chaque année en fonction de l'évolution de l'indice majeur annuel d'ensemble des traitements bruts calculés par l'INSEE.

Les calculs qui ont été effectués tendent à montrer que le nouveau système a été plus favorable aux pensionnés que l'ancien de 1993 à 1997 comme l'illustre le tableau ci-dessous.

Evolution en niveau du point PMI
(appréciée au 1er janvier de chaque année)

Date d'effet

Système actuel

Ancien système

Différence par rapport à l'ancien système

1/01/90

67,59 (a)

67,28
(235 brut - 238 majoré)

+ 0,31

1/01/91

68,77

68,96

- 0,19

1/01/92

70,49 (a)

70,58
(235 brut -240 majoré)

- 0,09

1/01/93

72,59 (a)

72,46

+ 0,13

1/01/94

74,55 (a)

74,44

+ 0,11

1/01/95

76,00 (a)

75,41

+ 0,59

1/01/96

78,04 (a)

77,39

+ 0,65

1/03/97

78,43 (c)

77,77

+ 0,66

Le précédent ministre, M. Pierre Pasquini, avait initié un travail de réflexion sur le sujet en confiant le soin de proposer une simplification du mode de calcul à une commission spécifique. Il appartient maintenant à son successeur, M. Jean-Pierre Masseret, de faire aboutir ce travail comme il semble s'y être engagé pour 1998.

Les crédits de la dette viagère en 1996 et 1997

Crédits

Différence

Chapitres budgétaires

Budget 1996 voté

(I)

consommés

(II)

(I) - (II)

Indice des crédits consommés
100 x (II)
(I)

Budget 1997 voté

46-21

2.366.826.000

2.294.423.000

+ 72.403.000

96,94

2.175.645.100

46-22

19.012.835.000

19.150.833.000

- 137.998.000

100,73

18.484.427.932

46-25

347.921.000

338.674.000

+ 9.247.000

97,34

344.750.996

46-26

164.728.000

131.789.000

+ 32.939.000

80,00

129.439.408

TOTAL

21.892.310.000

21.915.719.000

- 23.409.000

100,11

21.189.457.387

Il convient d'ajouter qu'une mesure de trésorerie réduit à zéro en 1998 le chapitre 47-22 relatif à la retraite mutualiste. Les versements par l'Etat des sommes dues aux organismes attribuant la rente mutualiste au titre de la majoration spécifique anciens combattants seront décalés de quelques mois, ils auront lieu au début de l'exercice suivant et non plus à l'automne de l'exercice précédent.

L'économie générale du système de la majoration des rentes mutualistes ne devrait pas en être trop affectée malgré la trésorerie supplémentaire de quelques mois mise à la charge des organismes correspondants.

Le budget 1999 devrait retrouver la dotation habituelle du chapitre (360 millions de francs en 1997, majorés de 30 millions de francs en prévision 1998).

2. La répartition des dépenses de réparation

La première mission de l'administration des anciens combattants, fondatrice de son action, est d'assurer la réparation des invalidités entraînées par les conflits ou le service dans les forces armées. En 1998, cette action représente 75 % des crédits totaux soit environ 19,5 milliards de francs. Aux pensions militaires d'invalidité stricto sensu, il convient en effet d'ajouter diverses allocations complémentaires, les soins médicaux gratuits pour les affections pensionnées et les crédits consacrés à l'appareillage des invalides.

Le caractère très protecteur de ce dispositif ressort du montant important (environ 40 %) consacré aux ayants cause des invalides, et en particulier aujourd'hui aux veuves nombreuses des pensionnés suite à la deuxième guerre mondiale.

Depuis dix ans, une diminution globale des crédits moins rapide que celle des effectifs pensionnés a permis d'assurer une augmentation régulière du montant moyen des pensions jusqu'à dépasser 33.000 francs par an.

Cet effort a bénéficié d'abord aux plus grands invalides que le Code des pensions militaires a choisi d'indemniser plus largement, afin de pouvoir en particulier garantir un véritable revenu de substitution à ceux qui ne peuvent travailler.

Répartition estimée des dépenses en 1998

Les dépenses de répartition de l'invalidité sont consacrées pour près de 40 % aux ayants cause (veuves, ascendants et orphelins).

Les dépenses de pensions par conflit

Répartition estimée au 1 er janvier 1997

Malgré une croissance régulière de la part relative des dernières générations du feu (" AFN et divers "), le poids de la seconde guerre mondiale reste prépondérant en particulier par suite du nombre important de veuves. Il reste que cette répartition est amenée à évoluer significativement dans les prochaines années, notamment du fait du départ à la retraite de nombreux travailleurs anciens combattants d'Afrique du Nord.

B. LE FINANCEMENT DES STRUCTURES ADMINISTRATIVES EST CALCULÉ AU PLUS JUSTE

Les effectifs

Année 1998

La faible part de l'administration centrale traduit la priorité donnée au contact avec les anciens combattants et victimes de guerre.

L'administration au service du monde combattant repose sur les services de l'administration centrale et les services déconcentrés du secrétariat d'Etat ainsi que sur deux établissements publics : l'ONAC et l'INI.

1. Les moyens de l'administration

Après les fortes baisses opérées en 1992 et 1993, l'évolution des effectifs a eu tendance à se stabiliser. Le nombre des fonctionnaires a continué à baisser en administration centrale et dans les services déconcentrés, mais cette tendance a été amortie par une augmentation des effectifs de l'ONAC. L'année 1998 verra la baisse se poursuivre dans les services du ministère avec la suppresion de 88 emplois, 2 emplois en administration centrale et 86 emplois dans les services déconcentrés.

L'administration des anciens combattants poursuit sa restructuration comme en témoigne l'achèvement en 1997 de la délocalisation à Caen de la Direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale qui aura concerné 110 agents.

En 1998, les dépenses de personnel du secrétariat d'Etat devraient se monter à 874,2 millions de francs et celles de matériel et de fonctionnement à 87,8 millions de francs. Les dépenses de personnel sont en augmentation du fait de la hausse des dépenses de pensions et d'allocations pour le personnel en retraite.

2. L'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC)

Les crédits inscrits dans le projet de budget pour 1998 pour l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre au titre de la contribution de l'Etat à ses dépenses de fonctionnement (chapitre 36-51) sont en baisse de 2,55 % par rapport à 1997. Ils atteindront 221,9 millions de francs contre 227,7 millions de francs l'année dernière. Par ailleurs, il convient de noter que la contribution de l'Etat à l'action sociale de l'ONAC (chapitre 46-51) enregistre une baisse importante de 5 millions de francs, soit 10,70 % pour atteindre 41,71 millions de francs.

On ne peut que rester perplexe devant cette diminution des crédits affectés à l'ONAC et s'interroger sur la capacité de l'Office à poursuivre ses missions dans ces circonstances. On rappellera que l'ONAC a pour mission d'offrir un service de proximité aux anciens combattants et que ce service, par-delà les structures, ne peut être remis en cause. L'état numérique des ressortissants de l'Office illustre bien le rôle d'interface que joue cet organisme entre le monde combattant et l'administration.

On peut regretter que le Gouvernement ait renoncé à augmenter les crédits de l'action sociale par voie d'amendement lors du débat en séance publique. Ce geste aurait eu le mérite de lever quelque peu les incertitudes qui entourent le financement à terme de l'Office.

Etat numérique des ressortissants de l'office national des anciens combattants et victimes de guerre au 1er janvier 1998

Conflit

Ressortissants pensionnés

Ressortissants non pensionnés

Total général

Guerre 1914/1918 et TOE

12.477

725

13.202

Guerre 1939/1945

312.678

1.197.830

1.381.620 (1)

Indochine - Corée

(2)

144.252

144.252

AFN (3)

234.876

1.360.361 (4)

1.592.720

TRN (loi du 4/01/93)

120.000

120.000

Pupilles de la Nation (5)

146.500

146.500

Totaux

560.031

2.969.668

3.398.294

Veuves non pensionnées

1.000.000

1.000.000

3.969.668

4.398.294

(1) Compte tenu des abattements suivants pratiqués :

100 % sur CVR, automatiquement titulaire de la carte du combattant

10 % sur personnes contraintes au travail en pays ennemi

15 % sur réfractaires

7,5 % sur déportés et internés résistants et politiques

(2) Nombre inclus dans la guerre 1939/1945.

(3) Evénements AFN et toutes opérations visées par la loi du 6 août 1955.

(4) Correspond au nombre de TRN délivrés au 31 décembre 1994, augmenté du nombre de cartes du combattant délivrées en 1994, au titre de l'AFN.

(5) Effectif des pupilles de la Nation de moins de 60 ans.

Taux de mortalité appliqués pour cette étude:

1914/1918 : 310 pour 1.000 par an (groupe d'âge au-delà de 95 ans)

1939/1945 : 49 pour 1.0000 par an (groupe d'âge de 70 à 79 ans)

Indochine : 19 pour 1.000 par an (groupe d'âge de 63 à 68 ans)

AFN : 13 pour 1.000 par an (groupe d'âge de 55 à 65 ans)

Les actions de l'ONAC

3. L'Institution nationale des invalides (INI)

L'INI, érigée en établissement public administratif depuis le 1 er janvier 1992, a trois missions :

- accueillir dans un centre des pensionnaires, à titre permanent ou temporaire, les invalides bénéficiaires du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- dispenser dans un centre médico-chirurgical des soins en hospitalisation ou en consultation aux malades et blessés en vue de leur réadaptation fonctionnelle, professionnelle ou sociale ; les personnes accueillies sont par priorité les pensionnaires de l'établissement ainsi que les autres bénéficiaires des dispositions du code cité ; en outre, dans la limite des places disponibles d'autres catégories de personnes sont admises sous réserve de garanties de prise en charge ;

- participer aux études et à la recherche sur l'appareillage des handicapés.

Le projet de budget pour 1998 prévoit que la contribution de l'Etat aux frais de fonctionnement de l'INI s'élèvera à 42,9 millions de francs, soit une hausse de 3,37 % par rapport à l'année dernière. Cette augmentation s'explique par la revalorisation des rémunérations pour tenir compte de la hausse du point de la fonction publique et par la nécessité de pourvoir du remplacement des appelés du contingent affectés à l'INI. La réforme du service national pose un problème de personnel à l'INI qui bénéficiait de militaires mis à disposition, des créations de postes semblent inévitables pour assurer la transition dans de bonnes conditions.

C. LES CRÉDITS RELATIFS À LA MÉMOIRE HISTORIQUE DIMINUENT

1. L'information historique est particulièrement touchée

Les crédits alloués à la politique de la mémoire accusent une baisse importante de 30 % et se montent à 18,45 millions de francs en 1998. Deux postes sont particulièrement touchés ; il s'agit des interventions en faveur de l'information historique (chapitre 43-02) qui voient leurs crédits diminuer de près de 43 % et des moyens alloués à la remise en état des nécropoles nationales (chapitre 57-91, article 20) qui baissent de 60 %.

En 1998, les dépenses nécessaires aux célébrations de la victoire de 1918 seront financées par des crédits interministériels.

Il reste que cette réduction importante des moyens affectés à la politique de la mémoire est en contradiction avec les déclarations du ministre qui tendaient à en faire une priorité de son action. Une politique vigoureuse de la mémoire est d'autant plus nécessaire aujourd'hui qu'on assiste à une recrudescence du débat sur l'histoire des conflits en France.

La commission des Affaires sociales réitère sa volonté que soit développée une politique de la mémoire active qui associe étroitement le monde combattant en particulier dans sa composante résistante. Le rapport du sénateur Jacques Baudot contient à cet égard nombre de propositions intéressantes.



Année

Actions culturelles Mémoire

Actions restauration Patrimoine

Opérations exceptionnelles


Total

1991

7.419.930

58.841.688

66.261.618

1992

9.404.998

54.143.533

63.548.531

1993

8.364.076

55.602.570

63.966.646

1994

10.582.183

43.053.632

100.000.000

153.635.815

1995

10.689.340

42.789.336

50.000.000

103.478.676

1996

11.771.940

46.285.569

2.638.000

60.695.509

1997

11.465.715

49.897.086

61.362.801

1998

12.500.000

48.500.000

61.000.000

2. Les 16 propositions du rapport de M. Jacques Baudot sur " le défi de la mémoire "

A l'initiative de son Président, M. Christian Poncelet, la commission des finances a demandé à M. Jacques Baudot, sénateur, en sa qualité de rapporteur spécial des crédits du ministère des anciens combattants, d'effectuer un contrôle, sur pièces et sur place, de l'utilisation des crédits affectés à la Délégation à la Mémoire et à l'Information Historique (DMIH).

Depuis plusieurs années, le Parlement est systématiquement sollicité, lors de l'examen du budget, pour aborder de façon exceptionnelle et non reconductible les crédits de la DMIH. Ce contrôle devait donc permettre de vérifier si cette administration disposait des crédits nécessaires pour accomplir ses missions. Dans cette perspective, le rapporteur a été conduit à évaluer la politique de la mémoire menée par le ministère, c'est-à-dire à en apprécier le coût, à travers une étude quantitative, mais également le sens et les objectifs 1( * ) .

La commission des Affaires sociales partage les analyses de notre excellent collègue, le sénateur Jacques Baudot lorsqu'il estime que la mémoire collective constitue un ciment puissant pour chaque société puisqu'elle véhicule son histoire et transmet ses valeurs d'une génération à l'autre qu'il faut savoir à la fois protéger, entretenir et partager, surtout avec les jeunes.

L'analyse de la politique de la mémoire menée par la DMIH conduit selon ce rapport à un bilan mitigé : si le ministère des anciens combattants semble en mesure, notamment grâce au dévouement de ses fonctionnaires, d'entretenir correctement les nécropoles nationales et les lieux de mémoire, les actions de célébration et de promotion de la mémoire pêchent par un manque de vision globale à long terme.

Or, comme le souligne Jacques Baudot, la prise de conscience de cette dérive constitue un enjeu essentiel pour la légitimité et, en conséquence, la survie de ce ministère. En effet, la mortalité naturelle qui affecte les anciens combattants et la diminution du nombre des conflits font perdre de l'importance aux fonctions traditionnelles, comme le versement des pensions d'invalidité et des retraites des combattants. En revanche, la défense de la mémoire apparaît d'autant plus nécessaire que les dates des conflits reculent, que les survivants se font rares et que le souvenir s'efface.

En définitive, c'est à une véritable réflexion sur les missions et le rôle du ministère des anciens combattants qu'invitent les conclusions de ce rapport.

Pour nourrir cette réflexion, le rapporteur a établi 16 propositions qui portent soit sur des améliorations ponctuelles, soit sur des réformes structurelles.

Les 16 propositions du rapport Baudot

Proposition n° 1 : respecter le programme de travaux pour les sépultures de guerre 1996-2000 lancé par le ministère des anciens combattants en accordant bien les 50 millions prévus pour leur financement.

Proposition n° 2 : construire les bases prévues dans le plan de modernisation de l'entretien des nécropoles nationales mis en place en 1992.

Proposition n° 3 : consacrer la compétence exclusive de la Délégation à la Mémoire et à l'Information historique pour toutes les questions relatives à l'entretien et à la rénovation des sépultures de guerre.

Proposition n° 4 : clarifier les relations de l'Etat avec le " Souvenir Français " en mettant fin à la participation financière de cette association à la rénovation des nécropoles nationales, propriété exclusive de l'Etat.

Proposition n° 5 : revaloriser l'indemnité forfaitaire versée par l'Etat aux communes et bloquée à 8 francs par tombe depuis 1981 afin de l'adapter au coût réel de l'entretien des tombes dans les carrés communaux évalué à 36 francs par tombe.

Proposition n° 6 : rendre les cimetières militaires français plus accueillants en installant des bancs, en construisant des panneaux précisant le contexte historique des nécropoles nationales (résumé des opérations militaires avec une carte comme support, nombre de nationalité des participants ...), en mettant à la disposition des visiteurs un plan des tombes, la liste des noms des Morts pour la France et un livre d'or.

Proposition n° 7 : mieux signaler l'emplacement des cimetières militaires par l'instauration systématique de panneaux de signalisation.

Proposition n° 8 : mettre à la disposition du public, dans les mairies et les conseils généraux, des fiches précisant les coordonnées de la direction interdépartementale des anciens combattants de la région pour toute demande de renseignements concernant une personne morte lors d'une guerre.

Proposition n° 9 : systématiser l'information sur les aides du ministère des anciens combattants à la disposition des établissements scolaires en distribuant, dans chaque collège et lycée, une brochure récapitulant les différentes subventions gérées par la Délégation à la mémoire et à l'information historique et les possibilités de prêts de documents ou de prêts d'expositions.

Proposition n° 10 : donner à la politique de la mémoire vis-à-vis des jeunes une vision globale et à long terme par l'établissement de relations permanentes avec les collèges et les lycées et l'organisation, chaque année, d'une manifestation sur un thème lié à la mémoire des conflits (exposition, documentaire, témoignage, conférence...).

Proposition n° 11 : développer, en imitant le modèle allemand, les camps d'été qui permettent, à travers l'exécution de petits travaux d'entretien par les jeunes sur les nécropoles nationales, de les sensibiliser à l'histoire de leur pays.

Proposition n° 12 : informatiser l'ensemble des fichiers gérés par le ministère des anciens combattants.

Proposition n° 13 : rendre les hauts lieux de mémoire plus attractifs en les dotant de moyens techniques modernes (salle de projection, guide vocal...) et en traduisant les commentaires des panneaux d'information en anglais.

Proposition n° 14 : mettre fin à la polémique suscitée par l'existence d'une carte comptabilisant dans le Mémorial des Martyrs de la Déportation.

Proposition n° 15 : créer un grand Mémorial de la Déportation à Compiègne qui évoquerait, d'une manière à la fois historique et pédagogique, la déportation dans sa réalité.

Proposition n° 16 : établir un programme pluriannuel fixant les objectifs et les priorités de la politique de la mémoire, prévoyant les moyens à mettre en oeuvre et instaurant une évaluation des actions entreprises.

II. L'ABSENCE DE MESURES NOUVELLES SIGNIFICATIVES CONFIRME QUE LA SATISFACTION DES DEMANDES DU MONDE COMBATTANT NE CONSTITUE PAS UNE VÉRITABLE PRIORITÉ

A. LE GOUVERNEMENT A PROPOSÉ DES MESURES NOUVELLES QUI N'ONT PAS CONVAINCU L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Les mesures nouvelles adoptées par le Gouvernement sont d'une ampleur limitée ; on peut distinguer les dispositions inscrites dans le projet de loi de finances déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale des dispositions qui ont été adoptées à l'Assemblée avec l'accord du Gouvernement, que ce soit en commission ou en séance publique.

1. Les dispositions nouvelles du projet de loi de finances tel qu'il a été déposé à l'Assemblée nationale (dont l'article 62)

Le projet de loi de finances, déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, comprenait trois dispositions nouvelles :

- l'article 62 qui permet l'indemnisation des étrangers déportés depuis la France et ayant acquis depuis lors la nationalité française (voir encadré p. 34),

- l'alignement sur le droit commun des dates de remboursement par l'Etat de la majoration des rentes constituées par les anciens combattants,

- et la prise en compte pour l'attribution de l'allocation différentielle du Fonds de solidarité des revenus du foyer qui devrait exclure les ménages qui perçoivent un revenu imposable mensuel supérieur à 18.255 francs.

Ces trois mesures sont de nature différente. La première devrait concerner environ 150 déportés et leurs ayants cause pour 11,6 millions de francs, la deuxième ne devrait pas toucher les anciens combattants alors que la troisième supprime le bénéfice de l'allocation différentielle pour 310 personnes, soit 1 % des effectifs actuels et représente une économie de 9 millions de francs.

Cette dernière disposition explique la baisse de 0,76 % de la dotation du Fonds de solidarité pour les anciens combattants d'Indochine et d'Afrique du nord.

Nos collègues de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, réunis le mercredi 8 octobre, ont considéré que ce budget était " inacceptable en l'état ". Ils ont réclamé de nombreuses mesures que votre commission défend également, comme la suppression de l'obligation de passage par l'allocation différentielle pour entrer en APR, la prise en compte pour l'attribution du titre de reconnaissance de la Nation des périodes passées en Algérie après 1962, la relance de la politique de la mémoire, un effort sur les conditions d'attribution de la carte du combattant et des mesures concernant la retraite anticipée pour les anciens d'Algérie.

Un débat a eu lieu à la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales qui a opposé les partisans d'un rejet du budget et ceux d'un report de l'examen dans l'attente de mesures complémentaires. La commission a décidé finalement de reporter l'examen de l'avis.

2. Les dispositions complémentaires proposées par le gouvernement lors de l'examen en commission

Pour tenir compte des réserves exprimées par les députés, le secrétaire d'Etat a obtenu du Gouvernement l'inscription de 40 millions de francs de crédits supplémentaires en faveur des anciens combattants lors de la discussion de la première partie de la loi de finances. On peut remarquer que cette hausse n'est en rien considérable puisqu'elle représente une augmentation de 0,15 % des crédits du département ministériel. Elle devait permettre toutefois le développement de quatre mesures nouvelles :

- la fixation du plafond de la retraite mutualiste en points d'indice de pension militaire d'invalidité, à hauteur de 95 points, soit un montant de 7.488 francs pour le plafond majorable en 1998 contre 7.091 francs en 1997 ;

- la remise à niveau des crédits de mémoire ;

- l'élargissement des conditions d'attribution de la carte du combattant en Afrique du Nord avec la prise en compte du critère de la durée de séjour d'au moins 18 mois ;

- l'amélioration de l'action sociale de l'ONAC au profit des anciens d'Afrique du Nord dans l'attente d'une possible avancée en matière de retraite anticipée.

Cette répartition des 40 millions de francs de crédits supplémentaires n'a pas reçu l'approbation de l'Assemblée nationale.

B. L'ASSEMBLÉE NATIONALE N'A PU OBTENIR QU'UN RÉAMÉNAGEMENT DES CRÉDITS COMPLÉMENTAIRES ACCORDÉS PAR LE GOUVERNEMENT

1. Les dispositions nouvelles effectivement votées par l'Assemblée nationale (art. 62 bis, art. 62 ter, art. 62 quater)

La commission des Affaires culturelles de l'Assemblée nationale a considéré que ces mesures étaient insuffisantes dans leur montant par rapport aux 745 millions de francs économisés du fait de la diminution du nombre de pensionnés et, dans leur objet, au regard de l'attente de l'ensemble des parlementaires quant à l'annonce d'une mesure de véritable retraite professionnelle pour les anciens d'Afrique du Nord.

Elle a décidé, dans ces conditions, de donner un avis favorable au projet de budget sous réserve de l'adoption de trois amendements au projet de loi de finances :

- le premier fixant à 95 points d'indice le montant du plafond majorable de la retraite mutualiste et prévoyant la revalorisation de ce plafond en fonction de la valeur du point d'indice ;

- le deuxième ouvrant droit à la retraite anticipée pour les anciens combattants en Afrique du Nord en situation de chômeurs en fin de droits pouvant justifier d'une durée de cotisation de 40 annuités à l'assurance vieillesse diminuée du temps passé en Afrique du Nord ;

- le troisième ouvrant l'attribution de la carte de combattant aux anciens d'Afrique du Nord justifiant d'une durée de service d'au moins douze mois en Afrique du Nord.

Le premier amendement relatif à la retraite mutualiste était proche de la position du Gouvernement. Le deuxième et le troisième étaient, cependant, assez éloignés des déclarations du secrétaire d'Etat.

Le Gouvernement, lors du débat en séance publique qui s'est tenu le vendredi 24 octobre 1997, a tenu compte des amendements adoptés par la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, qui avaient été déclarés contraires à l'article 40 de la Constitution, en modifiant la ventilation des 40 millions de francs supplémentaires inscrits dans la première partie du budget à l'occasion de sa discussion. C'est ainsi que le secrétaire d'Etat est revenu sur les crédits supplémentaires qui devaient être attribués à la politique de la mémoire et à l'action sociale de l'ONAC. Il a pu, de ce fait, reprendre à son compte les trois préoccupations de la commission, sans toutefois garder leur rédaction initiale (voir encadré).

Le Gouvernement a accepté le premier amendement de la commission qui fixe à 95 points d'indice le montant du plafond majorable de la retraite mutualiste et qui prévoit la revalorisation de ce plafond en fonction du point d'indice.

Concernant la carte du combattant, le secrétaire d'Etat a souhaité avancer en proposant que la nécessité d'une opération de feu soit remplacée par une condition de présence égale à 18 mois.

Enfin, sur la question la plus complexe, la retraite anticipée des anciens combattants d'Afrique du Nord, M. Jean-Pierre Masseret a annoncé une mesure qui permettrait la garantie d'un revenu équivalent à une retraite anticipée, soit 5.600 francs par mois pour les chômeurs qui justifient de 160 trimestres d'assurance vieillesse, y compris le temps passé en Afrique du Nord. Cette disposition prendrait la forme d'un relèvement de l'allocation différentielle à due concurrence à partir du 1er janvier 1998 pour les anciens combattants concernés. Le secrétaire d'Etat a estimé que 12 à 15.000 personnes seraient concernées par cette mesure. Il s'agit là d'un pas en avant qui doit être souligné à sa juste valeur, même s'il ne règle pas complètement la question.

Ainsi, 25 millions de francs abonderont le chapitre 46-10 afin de porter à 5.600 francs l'allocation différentielle, 10 millions de francs iront au chapitre 46-21 pour tenir compte de l'augmentation du nombre de titulaires de la carte du combattant et 5 millions de francs seront destinés au chapitre 47-22 pour tenir compte du relèvement du plafond ouvrant droit à majoration des rentes mutualistes. En conséquence, ont été adoptés les amendements correspondant à ces mesures nouvelles et le budget a été voté. Votre rapporteur tient à préciser que la réserve parlementaire a été sollicitée à hauteur de 25 millions de francs pour abonder la disposition relative au relèvement de l'allocation différentielle sans que ce financement complémentaire puisse garantir tout à fait le bouclage de la mesure que le ministère peine encore à chiffrer aujourd'hui.

Les articles rattachés adoptés par l'Assemblée nationale

Article 62

Au titre VII du livre II du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre est inséré un article L. 252-5 ainsi rédigé :

" Art. L. 252-5. - Bénéficient des dispositions du chapitre Ier du titre III du présent livre, dans les conditions prévues au paragraphe 2 de la section 1 et à la section 2 dudit chapitre, les étrangers arrêtés en France et déportés, s'ils ont acquis la nationalité française depuis lors et obtenu le titre de déporté politique ; il en est de même de leurs ayants cause de nationalité française. "

Article 62 bis (nouveau)

Le dernier alinéa de l'article L. 321-9 du code de la mutualité est ainsi rédigé :

" Le montant maximal donnant lieu à majoration par l'Etat de la rente qui peut être constituée au profit des bénéficiaires visés par les dispositions du présent article est calculé par référence à l'indice 95 des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. Il est exprimé en francs au 1er janvier de chaque année en fonction de la valeur du point des pensions militaires d'invalidité à cette date. "

Article 62 ter (nouveau)

L'article L. 253 bis du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre est complété par un alinéa ainsi rédigé :

" Une durée des services en Algérie d'au moins dix-huit mois est reconnue équivalente à la participation aux actions de feu et de combat exigée au deuxième alinéa ci-dessus ".

Article 62 quater (nouveau)

Le septième alinéa de l'article 125 de la loi de finances pour 1992 (n° 91-1332 du 30 décembre 1991) est complété par une phrase ainsi rédigée :

" Afin de leur permettre de bénéficier d'un revenu équivalent à une retraite anticipée de 5.600 F net par mois et par dérogation aux dispositions précédentes, le montant de l'allocation différentielle est augmenté à due concurrence au 1er janvier 1998 pour les chômeurs qui justifient d'une durée d'assurance vieillesse de 160 trimestres, y compris les périodes équivalentes et notamment le temps passé en Afrique du Nord. "

2. Les mesures supplémentaires ne sont pas à la hauteur des enjeux

Comment peut-on apprécier ce budget et les mesures supplémentaires adoptées par l'Assemblée nationale, au regard notamment des demandes du monde combattant, telles qu'elles sont exprimées par le Front Uni ?

La revalorisation de la retraite mutualiste du combattant ne peut constituer que l'amorce d'un rattrapage qui devra être confirmé à l'avenir. Le critère des 18 mois de présence en Afrique du Nord pour l'obtention de la carte du combattant représente une avancée positive notamment vers la notion de risque, mais ne règle pas la question, nombre d'anciens combattants étant restés légèrement moins de 18 mois.

La disposition en faveur des chômeurs ayant cotisé 160 trimestres est également la bienvenue, mais, là aussi, elle reste insuffisante au regard de l'enjeu. On espère de plus qu'un effort sera fait concernant la politique de la mémoire, même si la commémoration de l'Armistice de 1918 est prise en charge par des crédits interministériels. On ne peut, à cet égard, se satisfaire du fait que la hausse des crédits affectés à la politique de la mémoire ait été purement et simplement annulée. De même, les crédits relatifs à l'action sociale de l'ONAC ne seront pas abondés, comme cela avait prévu dans la première ventilation des 40 millions de francs de crédits supplémentaires.

Dans ces conditions, le projet de budget qui nous est présenté apparaît comme une étape bien plus que comme un règlement du contentieux qui oppose le monde combattant au Gouvernement.

C. LES DEMANDES DU MONDE COMBATTANT RESTENT LARGEMENT EN SUSPENS

Les demandes du monde combattant n'ont donc pas été véritablement entendues. La commission des Affaires sociales souhaite que le Gouvernement apporte une solution aux dossiers prioritaires parmi lesquels on peut citer notamment :

1. La politique de la mémoire

2. La retraite anticipée des anciens combattants d'Afrique du Nord

3. Les veuves de guerre

4. Les conditions d'attribution de la carte du combattant et du TRN

5. Les mesures en faveur des harkis

6. La situation des incorporés de force dans l'armée allemande pendant la seconde guerre mondiale.

Ces dossiers, comme beaucoup d'autres, appellent une réponse urgente notamment au regard de l'âge des intéressés. Il est nécessaire que des avancées significatives puissent être constatées sur tous ces points si l'on souhaite effectivement accorder une véritable reconnaissance aux anciens combattants. Ces avancées, qui ne se traduiraient pas toutes par des dépenses supplémentaires, sont d'autant plus accessibles que la situation économique actuelle n'a jamais été aussi favorable depuis cinq ans.

*

* *

En conséquence, la commission des Affaires sociales a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits des anciens combattants dans le projet de loi de finances pour 1998 ainsi que sur les articles 62, 62 bis, 62 ter et 62 quater rattachés.

ANNEXE N° 1

Evolution des grandes masses

(en millions de francs)

Crédits votés pour 1997

Crédits demandés pour 1998

Evolution en %

Titre III - moyens des services

1.197,9

1.199,8

- 0,16 %

Personnel

843,2

847,2

+ 0,70 %

Matériel et fonctionnement des services

85,5

87,8

+ 0,60 %

Subventions de fonctionnement :

. à l'ONAC

227,7

221,9

- 2,55 %

. à l'INI

41,5

42,9

+ 3,37 %

Titre IV - Interventions publiques

25.681,5

24.736,2

- 3,68 %

. dont dette viagère

21.189,5

20.641,8

- 2,58 %

. dont Fonds de solidarité pour les anciens combattants d'AFN

1.535,4

1.523,8

- 0,75 %

Titre V - Investissements exécutés par l'Etat

. crédits de paiement

13,7

16,2

+ 18,25 %

Total général (dépenses ordinaires + crédits de paiement)

26.893,2

25.952,2

- 3,50 %

La structure du budget du ministère des anciens combattants est caractéristique d'un budget d'intervention : en 1998 seuls 4,62 % des crédits sont consacrés aux moyens des services, tandis que 95,38 % le sont aux dépenses d'intervention, dont l'essentiel est constitué par la dette viagère qui représente à elle seule plus des trois quarts (79,5 %) de l'ensemble des crédits.

ANNEXE N° 2
Evolution des principales dotations du budget des anciens combattants pour 1998

(en millions de francs)

DROIT À RÉPARATION

LFI 1997

PLF 1998

Différence entre
LFI 1997 et PLF 1998

Evolution
en %

Chapitre 46-21
Retraite du combattant

2.230,84

2.175,65

- 55,19

- 2,47 %

Chapitre 46-22 (46-20 en 1998)
Pensions d'invalidité

18.484,43

18.038,70

- 445,73

- 2,41 %

Chapitre 46-25 et 46-26 (46-20 en 1998)
Indemnités et allocations

747,19

427,46

- 46,73

- 9,86 %

Dépenses indexées
Total

21.189,46

20.641,80

- 547,66

- 2,58 %

(en millions de francs)

SOINS

LFI 1997

PLF 1998

Différence entre
LFI 1997 et PLF 1998

Evolution
en %

Chapitre 46-24
Prestations assurées par l'Etat au titre du régime de sécurité sociale des pensionnées de guerre

1.416,65

1.453,61

36,96

2,61 %

Chapitre 46-27
Soins médicaux gratuits

996,39

945,00

- 51,39

- 5,16 %

Chapitre 46-28
Appareillage des mutilés

62,29

61,00

- 1,29

- 2,07 %

Santé
Total

2.475,33

2.459,61

- 15,72

- 0,64 %

(en millions de francs)

ACTION SOCIALE

LFI 1997

PLF 1998

Différence entre
LFI 1997 et PLF 1998

Evolution
en %

Chapitre 46-03
Remboursements à diverses compagnies de transport

62,93

60,93

- 2,00

- 3,18 %

Chapitre 46-04
Subventions, secours et allocations

2,16

2,12

- 0,04

- 1,62 %

Chapitre 46-10
Fonds de solidarité pour les anciens d'AFN

1.535,40

1.523,80

- 11,60

- 0,76 %

Chapitre 46-31
Indemnités et pécules

0,38

0,30

- 0,08

- 21,05 %

Chapitre 46-51
Dépenses sociales de l'ONAC

46,71

41,71

- 5,00

- 10,70 %

Total

1.647,57

1.628,86

- 18,71

- 1,14 %

(en millions de francs)

MÉMOIRE

LFI 1997

PLF 1998

Différence entre
LFI 1997 et PLF 1998

Evolution
en %

Chapitre 34-96 (art. 30) ; 34-98 (en 1998)
Délégation à la mémoire et à l'information historique

0,28

0,28

0,00

0,00 %

Chapitre 31-96 (art. 30)
Personnels recrutés à l'étranger pour l'entretien des sépultures françaises

3,57

3,57

0,00

0,00 %

Chapitre 37-61 art. 10 (pro parte)
Entretien des nécropoles nationales

5,20

5,20

0,00

0,00 %

Chapitre 41-91
Fêtes nationales et cérémonies publiques

2,35

2,25

- 0,10

- 4,43 %

Chapitre 43-02
Interventions en faveur de l'information historique

6,82

3,90

- 2,92

- 42,85 %

Chapitre 57-91 (art. 20)
Remise en état des nécropoles nationales (crédits de paiement)

8,13

3,25

- 4,88

- 60,02 %

Total

26,35

18,45

- 7,91

- 30,01 %

ANNEXE N° 3

LES QUARANTE ENGAGEMENTS POUR 1998 DU SECRÉTAIRE d'ETAT AUX ANCIENS COMBATTANTS

Poursuivre la concertation sur les grandes revendications du monde ancien combattant.

1.   Etablir une plus grande lisibilité des mécanismes du rapport constant

2.   Améliorer les critères d'attribution de la carte du combattant d'Afrique du Nord/AFN

3.   Mieux prendre en compte la situation des anciens combattants d'AFN au regard de l'âge de la retraite

4.   Réformer les mécanismes d'évolution du plafond majorable de la retraite mutualiste des anciens combattants

5.   Faire le bilan de l'exercice de droit à réparation dans les départements des régions annexées d'Alsace-Moselle

Assurer une juste place aux représentants de toutes les catégories de ressortissants

6.   Donner une voix délibérative aux veuves d'anciens combattants au Conseil d'Administration de l'ONAC

7.   Renforcer la présence des anciens d'AFN dans les commissions départementales de la carte du combattant et d'aide sociale.

Développer le devoir de reconnaissance et d'hommage

8.   Reconnaître officiellement l'état de guerre pour le conflit algérien

9.   Lever les obstacles administratifs à l'attribution de la carte CVR

10.  Attribuer une décoration liée au TRN pour toutes les générations du feu

11.  Mettre en place une commission pour la création d'un mémorial de la guerre d'Algérie

12.  Impulser la création d'un mémorial de l'annexion de fait en Alsace-Moselle

13.  Impulser la création d'un mémorial du camp de Tambow

14.  Redéfinir la politique générale en faveur des anciens combattants des armées françaises ressortissant de pays devenus indépendants

15.  Accroître la participation du département ministériel dans la politique en faveur des harkis

16.  Impulser l'érection d'une stèle aux victimes d'attentats.

Impulser une politique de mémoire ambitieuse et moderne

17.  Coordonner les célébrations du 80 ème anniversaire de 1918 dans un cadre international

18.  Participer aux journées d'appel de préparation à la Défense

19.  Oeuvrer à l'inscription de Verdun parmi les sites mondiaux de l'UNESCO

20.  Ouvrir largement aux chercheurs les archives du SEAC et celles d'Arolsen

21.  Elargir le champ d'action du département ministériel dans le domaine des nécropoles

22.  Inscrire le patrimoine des guerres et conflits contemporains dans la politique économique et touristique

23.  Ouvrir au grand public l'accès aux fichiers des Morts pour la France

24.  Créer un Comité d'Histoire du Ministère des Anciens Combattants

25.  Refonder la commission nationale consultative du camp de Natzweiler-Struthof

26.  Concevoir un musée-mémorial du camp de concentration de Natzweiler-Struthof

27.  Accroître et diversifier l'aide apportée par le secrétariat d'Etat aux anciens combattants aux structures associatives

28.  Définir une politique d'ensemble de la mémoire des camps d'internement

29.  Créer une commission de travail sur la vie commémorative

Mettre en place des moyens renforcés et plus efficaces

30.  Créer un véritable bureau des décorations doté de l'outil informatique

31.  Achever la mise en place d'une cellule de communication et de ses moyens (bulletin mensuel...)

32.  Ouvrir un site Internet du secrétariat d'Etat aux anciens combattants

33.  Achever la réforme de la DSPRS sur le site de Caen

34.  Rendre à la Délégation à la mémoire le dynamisme d'une administration de mission

35.  Assurer la refondation des commissions départementales d'information historique (CDIHP)

36.  Renforcer avec des emplois jeunes les moyens de l'ONAC (services départementaux, écoles de rééducation professionnelle et maisons de santé) et de l'INI

37.  Assure la place de l'INI au regard du dispositif national de financement des dépenses de santé

38.  Renouveler la gestion du Bleuet de France

39.  Moderniser les soins médicaux gratuits

40.  Mener à son terme une réflexion prospective approfondie sur les voies et moyens d'une adaptation des services du département et des établissements publics sous tutelle aux défis de la démographie et de la professionnalisation des armées



1 Cf. " Le Défi de la mémoire " - Rapport d'information n° 6 (1997-1998) de M. Jacques Baudot, sénateur, sur la politique de la mémoire menée par le ministère des Anciens combattants et victimes de Guerre.

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