C. UNE COOPÉRATION BILATÉRALE À ENCOURAGER

Les articles 10 à 18 du présent traité concernent les différents secteurs de la coopération bilatérale que la France et l'Azerbaïdjan envisagent de développer.

1. Coopération militaire

L'article 10 vise le développement et l'approfondissement des contacts bilatéraux dans le domaine militaire, encore quasiment inexistants.

Les besoins de l'Azerbaïdjan sont, dans ce secteur, très importants, du fait de la désorganisation liée à la disparition de l'URSS, et sont apparus très clairement du fait des difficultés rencontrées par les troupes azerbaïdjanaises dans le cadre du conflit du Nagorny-Karabakh.

En 1991, dans les premiers jours de l'indépendance, une armée nationale, subordonnée au chef de l'Etat, a été créée à partir de la nationalisation des équipements de la 4e armée soviétique stationnée en Azerbaïdjan, et du rappel des 140 000 conscrits servant en URSS (l'ensemble équivalant à deux bataillons). En août 1992, l'aggravation de la situation au Karabakh a justifié un appel à l'assistance de la Turquie, ainsi qu'aux officiers en retraite volontaires. En novembre 1993, la réorganisation des forces, décidée par le président Aliev, s'est appuyée sur un nouvel appel à l'assistance turque et à 10 000 anciens d'Afghanistan, ainsi que sur la formation d'unités de volontaires. En 1992, un accord avec la Turquie avait permis le partage de la flottille de la Caspienne, 25 % de la flotte et de l'équipement revenant à l'Azerbaïdjan.

Les difficultés auxquelles se heurte l'armée azerbaïdjanaise tiennent principalement à un faible taux de réponse à l'appel et à une désertion importante, l'un et l'autre imputables à la guerre. Le manque d'entraînement et l'insuffisance des effectifs d'officiers constituent également des lacunes majeures 5( * ) .

2. Coopération dans le domaine économique

Les articles 11 et 12 encouragent le développement de la coopération économique franco-azerbaïdjanaise.

. L'article 11 rappelle la priorité que constituent, pour l'économie de l'Azerbaïdjan, les secteurs de l' agriculture , dont la modernisation est un problème urgent, et de l' énergie civile- en dépit de l'importance de son potentiel pétrolier, l'Azerbaïdjan est confronté à l'insuffisance de ses ressources en électricité, face à la demande croissante de l'industrie. L'article 10 mentionne également les domaines de la recherche et de l' espace .

. L'article 12 pose le principe de la contribution française à la formation des acteurs de la vie économique et sociale en Azerbaïdjan et, notamment, à la formation des cadres azerbaïdjanais, en vue de favoriser le développement d'une économie de marché. Notons que la France participe assez régulièrement à des actions de formation dans le domaine de l'économie et de la gestion, qui intéressent la transition post-communiste dans certains pays de l'ex-URSS (cf, entre autres exemples, le remarquable précédent que constitue le "mastère franco-russe de management international, créé dans le cadre de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris au sein de l'Académie du commerce extérieur de Russie, et qui forme chaque année aux techniques de gestion françaises une quarantaine d'étudiants russes francophones, destinés à devenir les futurs cadres des entreprises françaises présentes sur le marché russe). De telles initiatives méritent que la France y consacre des moyens substantiels, car elles contribuent tant à enrichir les échanges commerciaux entre la France et les pays de l'ancien espace soviétique, qu'à promouvoir l'influence linguistique et culturelle de la France.

. L'article 12 vise également à "améliorer les conditions de l'activité des entreprises de chaque partie sur le territoire de l'autre partie", et, dans cette perspective, à encourager les investissements entre la France et l'Azerbaïdjan. Un accord relatif à l'encouragement et à la protection réciproques des investissements devrait être prochainement signé par les deux pays.

Les ressources pétrolières de l'Azerbaïdjan constituent, bien évidemment, un enjeu favorable au développement de nos investissements dans ce pays. Nos entreprises pétrolières, absentes du premier contrat de 1994, tentent aujourd'hui de rattraper un retard regrettable. Elf a ainsi acquis une participation de 10 % dans le troisième contrat pétrolier, pour participer au consortium créé pour l'exploration du gisement de "Chahdeniz", et 5 %, ainsi que la qualité d'opérateur principal, dans le cinquième contrat (Lenkoran), auquel Total participe à hauteur de 10 %. Ce dernier contrat est le plus important signé à ce jour par une compagnie française en vue de l'exploitation du pétrole de la Caspienne. Il pourrait, si la phase d'exploration donne des résultats favorables, représenter un investissement de 1,5 milliard de dollars.

D'autres entreprises françaises souhaitent participer à des secteurs déterminants du développement de l'Azerbaïdjan : rénovation du système d'alimentation en eau de Bakou (candidature Degremont-Lyonnaise des Eaux), infrastructures (construction de l'aéroport du Nakhitchevan : offre Dumez-GTM ; modernisation de l'aéroport de Bakou-Poti), transports aériens (vente d'Airbus) ; développement de l'industrie du ciment (offre Lafarge), et de l'énergie électrique (projet Entrepose de construction de huit mini-centrales en cinq ans).

Le projet Lafarge constituerait le premier investissement français important en dehors du pétrole. Enfin, entre autres secteurs économiques susceptibles d'être "dopés" par la manne pétrolière, mentionnons le commerce de luxe. L'ouverture d'un magasin Pierre Cardin et de parfumeries à Bakou pourrait donc profiter de l'émergence d'une clientèle à hauts revenus.

D'autres projets concernent la construction d'une sucrerie, la réhabilitation de brasseries, et, à un stade moins avancé des négociations, la construction d'une fabrique de pâte à papier à partir du coton, ainsi que d'une unité de pétrochimie.

. La coopération dans le domaine de l' environnement , visée par l'article 15, s'inscrit également dans la coopération économique entre la France et l'Azerbaïdjan. Rappelons que les principaux enjeux de la protection de l'environnement dans ce pays sont, d'une part, la rénovation de l'industrie chimique, dont le délabrement constitue un risque sanitaire majeur pour les populations proches du complexe de Soumgaït, et, d'autre part, la modernisation des méthodes de culture du coton, un usage excessif de pesticides à l'époque soviétique ayant eu des conséquences graves sur l'état des sols. Mentionnons aussi le défi que constituent la pollution de la Caspienne et le fait que l'eau courante des principales villes soit impropre à la consommation.

3. Coopération culturelle

L'article 14 vise le renforcement de la coopération bilatérale dans les domaines de l'enseignement, de la culture, de la science et de la technique. Il mentionne non seulement les échanges artistiques classiques, mais aussi la coopération dans les domaines des médias, du sport et du tourisme.

Notons que, si l'Azerbaïdjan ne se caractérise pas par une francophonie active, contrairement à la Moldavie ou à l'Arménie, le français est la troisième langue étrangère, après le russe et l'anglais. 66 000 élèves environ, répartis entre 399 écoles, et 2 895 étudiants de l'enseignement supérieur, étudient notre langue. On compte en Azerbaïdjan près de 1 000 professeurs de français. Un Bureau de la Coopération linguistique et éducative a été constitué auprès de l'Ambassade de France en avril 1995. Depuis l'été 1997, RFI est diffusé en permanence sur modulation de fréquence à Bakou. C'est, d'après les informations transmises à votre rapporteurs, l'une des radios les plus écoutées en Azerbaïdjan.

Le budget consacré par la France à la coopération culturelle avec l'Azerbaïdjan reste faible (2,7 millions de francs en 1998), mais augmente régulièrement, puisqu'il représentait 1,9 million de francs en 1996. Les actions financées sur ce budget concernent essentiellement l'aide à la formation des professeurs de français , ainsi que l'attribution de bourses et l'organisation de séminaires de formation . Notons, entre autres actions, les programmes de coopération conduits entre l'Université d'Etat et celles de Nice et de Grenoble, et entre les Instituts d'études politiques de Grenoble et Bordeaux et l'Institut de politologie de Bakou. Certains projets concernent également les échanges artistiques classiques (organisation d'une exposition de peinture contemporaine azerbaïdjanaise à Paris, au printemps 1998, projection de films azerbaïdjanais au Festival cinématographique des trois continents de Nantes ...).

La coopération scientifique et technique dispose d'un budget de 1,24 million de francs, consacré à des actions de formation d'ingénieurs du pétrole, de recyclage des diplomates et de formation des architectes.

4. Coopération institutionnelle

De manière classique, le présent traité vise à renforcer :

- la coopération judiciaire entre la France et l'Azerbaïdjan (cet aspect de la coopération bilatérale fait l'objet d'une demande appuyée de la part de l'Azerbaïdjan) ;

- la coopération en matière de police (lutte contre le terrorisme international, trafic de stupéfiants, contrebande, trafic illégal d'oeuvres d'art) ;

- les jumelages (l'accord de jumelage signé en 1979 entre Bakou et Bordeaux n'a pas permis, à ce jour, d'amorcer une véritable coopération entre ces deux villes) ;

- la coopération entre organisations politiques, sociales et syndicales ;

- la coopération interparlementaire.

Notons, sur ce dernier point, qu'un groupe d'amitié France-Azerbaïdjan a été constitué à l'Assemblée Nationale, et que le dynamisme du groupe sénatorial, qui couvre les relations interparlementaires avec la Géorgie et l'Azerbaïdjan, mérite d'être souligné.

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