B. LES PROJETS DE RÉFORME

Les dispositions relatives à la justice du projet de réforme constitutionnelle élaboré par la " bicamerale " (dites " système des garanties ") prévoient notamment une réforme du Conseil supérieur de la magistrature.

1. Une proposition contestée de division du Conseil supérieur de la magistrature en deux formations

Allant à l'inverse de l'évolution aujourd'hui envisagée en France, le texte adopté par la " bicamerale " tend tout d'abord à la création de deux sections distinctes au sein du Conseil supérieur de la magistrature pour l'exercice de ses fonctions administratives, l'une compétente à l'égard des magistrats du siège et l'autre compétente à l'égard des magistrats du ministère public, des compétences spécifiques étant par ailleurs attribuées à la formation plénière réunissant les deux sections 17( * ) .

A la suite de discussions longues et délicates qui ont abouti à un éclatement de la majorité parlementaire sur ce point, cette disposition a été adoptée avec le soutien d'une partie de l'opposition.

C'est la disposition la plus controversée du projet de réforme constitutionnelle. Elle suscite de très vives contestations de la part des magistrats.

D'après les informations recueillies auprès des différents interlocuteurs rencontrés par la mission, il semble aujourd'hui probable qu'elle ne sera finalement pas retenue par les assemblées plénières du Parlement qui pourraient lui préférer la fixation d'une proportion de représentants du Parquet au sein d'une formation unique. Le nombre de représentants du Parquet serait déterminé en fonction de leur nombre au sein de l'ensemble des magistrats italiens ; selon M. Ayala, sous-secrétaire d'Etat à la justice, il pourrait ainsi être fixé à 5 sur un total de 20 magistrats élus.

2. Une augmentation de la proportion des membres " laïques " (non magistrats)

Le texte adopté par la " bicamerale " prévoit par ailleurs d'accroître légèrement la proportion des membres " laïques " qui seraient désormais désignés par le seul Sénat, mais toujours parmi les professeurs de droit et les avocats ayant plus de 15 ans de Barreau.

Cependant, les membres magistrats resteraient largement majoritaires au sein du Conseil supérieur de la magistrature. Ils constitueraient en effet les trois cinquièmes de la composition de chaque section, la proportion des membres " laïques " étant portée à deux cinquièmes contre un tiers actuellement (soit 40 % au lieu de 33 %).

L'idée de prévoir une majorité en faveur des membres laïques a été évoquée au cours des débats de la " bicamerale " mais a été abandonnée devant les fortes résistances des magistrats et d'une partie de la classe politique.

3. Une séparation des fonctions administratives et disciplinaires

En ce qui concerne les fonctions disciplinaires, le texte adopté par la " bicamerale " prévoit la création d'un organe distinct du Conseil supérieur de la magistrature : la Cour de justice de la magistrature, composée de neuf membres issus pour six d'entre eux du Conseil supérieur de la magistrature (dont quatre magistrats et deux " laïques ") et pour trois d'entre eux du Conseil supérieur de la magistrature administrative (dont deux magistrats et un " laïque ").

Cette nouvelle Cour de justice de la magistrature serait chargée de statuer sur les sanctions disciplinaires à l'égard des magistrats et se substituerait donc à l'actuelle section disciplinaire du CSM.

Les fonctions administratives et juridictionnelles seraient totalement séparées, les membres de la Cour de justice de la magistrature ne participant pas aux activités du CSM.

Un Procureur général, désigné par le Sénat, serait le seul titulaire de l'action disciplinaire à l'encontre des magistrats ; il pourrait engager une enquête disciplinaire de sa propre initiative, ou à la demande du ministre de la justice, du procureur général près la Cour de cassation ou du CSM.

4. Une limitation des autres pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature

La " bicamerale " a souhaité réagir contre le développement du pouvoir paranormatif du Conseil supérieur de la magistrature, qui lui est apparu constituer un empiétement sur la compétence du pouvoir législatif.

Elle a donc prévu dans le texte du projet de révision constitutionnelle que les membres du Conseil supérieur de la magistrature ne pourraient émettre d'avis sur les projets de loi, avant leur présentation au Parlement, que sur la demande du ministre de la justice, et qu'il leur serait interdit d'adopter des actes ayant une orientation politique.

*

La " bicamerale " a par ailleurs souhaité inscrire dans la Constitution un certain nombre de grands principes relatifs à la justice, s'inspirant notamment des fondements de la nouvelle procédure pénale accusatoire mise en place depuis 1989 :

- principe du procès équitable ;

- principe du contradictoire ;

- principe de l'égalité des parties devant un juge " tiers " ;

- " principi dell'oralità, della concentrazione e dell'immediatezza " (c'est-à-dire, selon le rapport de M. Boato, le caractère principalement oral du procès, son déroulement dans le cadre d'une audience unique ou de quelques audiences rapprochées, et avec une relation directe entre le juge et la personne dont le juge doit évaluer les déclarations).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page