III. L'ÉQUILIBRE FINANCIER DU RÉGIME GÉNÉRAL : UNE FORTE AGGRAVATION DES PRÉLÈVEMENTS, UNE ÉVOLUTION DES DÉPENSES SIMPLEMENT CONSTATÉE

La présente partie est consacrée au régime général. Il est apparu, en effet, inévitable d'y consacrer une étude spécifique :

- d'une part, avant même le débat parlementaire, l'attention de l'opinion publique a été appelée sur l'objectif de réduction du déficit pour 1998 à 12 milliards. Or, celui-ci vise le seul régime général ;

- d'autre part, il apparaît que l'essentiel des mesures proposées dans le cadre du présent projet de loi concerne l'équilibre financier du régime général et que les autres régimes sont mis à contribution à cet effet .

A. LES ÉVOLUTIONS TENDANCIELLES : UN DÉSÉQUILIBRE ENCORE PRÉOCCUPANT

Les documents transmis au Parlement font apparaître, avant mesures, une progression importante des ressources du régime général, en 1998, observation qui rejoint l'analyse précédente sur l'évolution des recettes globales des régimes obligatoires de base.

On rappellera, au préalable, que le régime général représente (chiffres 1997) par rapport à l'ensemble des régimes de sécurité sociale :

- 65 % des ressources de sécurité sociale,

- 67 % de ses dépenses.

Parmi ces dernières, le régime général constitue :

- 82 % des dépenses de la branche maladie-maternité-invalidité-décès,

- 73 % des dépenses de la branche accidents du travail,

- 45 % des dépenses de la branche vieillesse,

- plus de 99 % des dépenses de la branche famille.

1. Une progression significative des recettes

Bien qu'il ne présente pas une analyse détaillée de l'évolution tendancielle des recettes pour 1998, le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale comporte un certain nombre d'observations.

· Une progression des cotisations inférieure à celle de la masse salariale

Avant mesures proposées par le projet de loi, le montant des cotisations perçues par le régime général, pour 1998, s'élèverait à 987 milliards de francs, soit une augmentation de 3,4 % par rapport à 1997, alors que la progression de la masse salariale est évaluée à 4 %. Ceci confirme la plus faible croissance, depuis quelques années, des cotisations par rapport à celle de la masse salariale. Les spécialistes parlent de " perte d'élasticité ".

Le montant des exonérations de cotisations sociales est évalué à plus de 78 milliards de francs en 1997 dont 62,5 milliards de francs sont compensés par l'Etat. Le montant des exonérations non compensées s'établit à environ 5,8 milliards de francs.

Pour le seul régime général , le montant des exonérations de cotisations sociales s'élève en 1997 à plus de 74 milliards de francs dont 58,5 milliards de francs compensés par l'Etat. Pour 1998, ce montant devrait avoisiner 77 milliards de francs dont 60,9 milliards de francs seront compensés.

On notera, enfin, la situation particulière des cotisations fictives. En vertu de l'article 6 de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994, la Cour des Comptes a compétence pour contrôler l'application de la législation de sécurité sociale par les administrations centrales et les services déconcentrés de l'Etat, pour les contributions et cotisations dont ils sont redevables envers le régime général.

Aussi, votre commission des Affaires sociales demande à la Cour des Comptes d'utiliser pleinement ses compétences pour faire toute la lumière sur la situation de l'Etat-employeur au regard de ses obligations de sécurité sociale, et en particulier sur l'évaluation des cotisations fictives qu'il verse au titre de ses agents publics.

· Une forte hétérogénéité dans le taux de recouvrement

Fin 1996, le total des restes à recouvrer (y compris les majorations et pénalités de retard) enregistrés par les organismes de recouvrement de la France métropolitaine, s'élevait à 86,8 milliards de francs. Le taux moyen des restes à recouvrer régionaux s'établit à 1,92 %, ce qui donne un taux de recouvrement de plus de 98 %.

A titre d'information, les taux des restes à recouvrer par région, fin décembre 1995 et 1996, étaient les suivants :

Taux de restes à recouvrer

Exercices

1995

1996

Ile-de-France

2,50

2,74

Alsace

1,31

1,38

Aquitaine

1,65

1,63

Auvergne

1,06

1,28

Basse Normandie

1,13

1,12

Bourgogne

1,42

1,28

Bretagne

1,11

1,03

Centre

0,98

1,18

Champagne Ardennes

1,32

1,57

Corse

12,45

14,89

Franche-Comté

1,14

1,19

Haute-Normandie

1,24

1,32

Languedoc-Roussillon

1,92

2,20

Limousin

1,24

1,18

Lorraine

1,39

1,65

Midi-Pyrénées

1,43

1,76

Nord Pas de Calais

0,95

0,87

Pays de la Loire

0,93

1,06

Picardie

1,53

1,59

Poitou Charente

1,42

1,67

Provence Côte d'Azur

3,22

3,06

Rhône Alpes

1,59

1,54

Départements d'outre-mer

13,62

13,74

Source : ACOSS

Ce tableau, comme les observations formulées dans le dernier rapport de la Cour des Comptes, montre que des améliorations sont encore possibles en matière de recouvrement. Votre commission souhaite, à cet effet, en 1998, un renforcement des moyens et des contrôles des URSSAF.

· La part croissante des ressources publiques

Le poste impôts et taxes affectés enregistre, depuis le début des années 90, une forte progression.

En 1998 et, avant mesures, il devrait représenter plus de 9 % de l'ensemble des recettes du régime général contre 5 % en 1995, soit un doublement de son montant en trois ans.

Les impôts et taxes affectés au régime général de 1995 à 1998

(millions de francs)

IMPÔTS ET TAXES AFFECTÉS

1995

1996

1997

1998
tendanciel

RÉGIME GÉNÉRAL

54.579

59.077

101.930

110.173

CNAMTS

8.795

11.249

50.142

56.289

Contribution sociale généralisée

34.832

40.042

Taxe sur les assurances automobiles

4.770

4.869

4.873

5.011

Taxe sur les alcools

2.325

2.255

5.994

6.726

Taxe sur le tabac

2.800

2.800

Taxe sur la publicité pharmaceutique

975

875

841

900

Taxe sur les grossistes répartiteurs

725

750

802

800

Contribution de l'industrie pharmaceutique

2.500

0

0

CNAVTS

2.640

2.722

2.779

2.891

Impôt de 0,4 % sur l'ensemble des revenus

49

16

0

Impôt de 1 % sur les revenus de capitaux

2.591

2.706

2.779

2.891

CNAF

43.144

45.106

49.008

50.993

Impôt de 1 % sur les valeurs mobilières

697

763

784

816

Contribution sociale généralisée

42.447

44.343

48.224

50.177

Source : Direction de la sécurité sociale (DEES)

Toutefois, pour avoir une vision exhaustive de l'évolution des ressources publiques, il est nécessaire de prendre en compte les contributions publiques (qui correspondent pour l'essentiel au remboursement de prestations). Ainsi, le total pour 1996 et 1997 s'élève respectivement à 85,4 et 135,8 milliards de francs. Entre 1996 et 1997, le total des ressources publiques par rapport aux recettes du régime général est donc passé de 7,4 % à 11,2 %.

Part du financement public dans les recettes du régime général

en milliards de francs

1996

1997

Impôts et taxes affectés

59,077

101,930

Contributions publiques

26,325

33,847

Sous-total (1)

85,402

135,777

Total des ressources (2)

1.157,735

1.213,288

(1) / (2)

7,4 %

11,2 %

Au total, votre commission relève, du point de vue des recettes, que les observations de la Commission des comptes de la sécurité sociale recoupent largement les évolutions constatées au niveau de l'ensemble des régimes, rappelées précédemment, et qui témoignent de la fiscalisation croissante des ressources du régime général.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page