N° 222

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 16 février 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la proposition de résolution présentée en application de l'article 73 bis du Règlement sur :

- la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l'établissement de nouvelles perspectives financières pour la période 2000-2006 (E 1049),

- le
document de travail de la Commission : accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l' amélioration de la procédure budgétaire (E 1128),

Par M. Denis BADRÉ,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir le numéro :

Sénat : 164 (1998-1999).

Union européenne.

PRÉAMBULE

Les propositions d'acte communautaire E1049 et E1128 portent sur deux piliers de l'avenir du budget européen et, au-delà, de l'avenir de l'Europe.

La seconde de ces propositions (E1128) constitue un document de travail de la Commission portant nouvel accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire.

Il s'agit des propositions de la Commission pour renouveler et réformer l'accord conclu le 29 octobre 1993 entre le Conseil, le Parlement et la Commission.

Cet accord interinstitutionnel qui avait enrichi un précédent accord de 1988 contient toutes les dispositions majeures de l'encadrement de la procédure budgétaire européenne.

Parmi celles-ci, le coeur de l'accord interinstitutionnel réside dans les perspectives financières. Elles figurent en annexe de l'accord interinstitutionnel et leur présentation est détaillée, trop parcimonieusement du reste, dans le premier des documents cités plus haut (E1049).

La définition des perspectives financières 2000-2006 est un acte décisif compte tenu de sa nature même. Il ne s'agit pas moins que de programmer l'évolution des finances publiques européennes pour chacune des sept années à venir. Le total de la programmation concerne pas moins de 4.781,4 milliards de francs.

La portée de cette programmation est, en outre, considérable. Politiquement d'abord, elle dessine les orientations de l'intervention financière à venir de l'Union Européenne et manifeste l'expression solennelle de l'accord des Etats membres sur la façon de construire l'Europe à travers son budget. Institutionnellement ensuite, l'on peut estimer que, malgré certaines souplesses, la programmation financière encadre les budgets communautaires tout au long de la période qu'elle est appelée à couvrir.

Les perspectives financières en cours de négociation marqueront donc très fortement l'Europe des sept années à venir.

Dans ces conditions, il est heureux que, contrairement à la situation observée il y a six ans les propositions d'acte communautaire portant sur l'accord interinstitutionnel et les perspectives financières aient été transmises au Parlement dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution.

Rappel sur la procédure de transmission des actes
portant perspectives financières

L'accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire du 29 octobre 1993 n'avait en effet pas été transmis au Parlement français au titre de l'article 88-4 de la Constitution.

Le Conseil d'Etat avait en effet estimé que les accords interinstitutinnels, non prévus par le traité de Rome, n'appartenaient pas à la catégorie des actes communautaires stricto sensu de l'article 88-4 de la Constitution.

Cette position n'aurait pu être considérée comme recevable que si de tels actes n'avaient qu'une valeur déclaratoire dépourvue de toute portée juridique. Mais il était plus qu'hasardeux de raisonner ainsi dès lors que la Cour de justice s'était plusieurs fois appuyée sur de tels accords pour rendre des décisions dès l'instant où ces accords peuvent, " si les obligations qui en découlent sont suffisamment précises et inconditionnelles, être élevés au rang d'actes destinés à appliquer le traité et rendre susceptible d'annulation les dispositions dérivées qui leur sont contraires " , selon les conclusions d'un avocat général dans une affaire où était évoquée une déclaration commune des trois institutions communautaires.

C'est ainsi qu'on pouvait à bon droit considérer que ces actes établissaient des normes s'imposant aux institutions communautaires et correspondant, dans l'esprit des institutions européennes, aux lois de programme françaises.

Un revirement s'est heureusement produit à l'occasion d'une proposition de révision des perspectives financières élaborée par la Commission en 1996. Le Conseil d'Etat a alors estimé que ladite proposition devait être regardée comme étant une proposition d'acte communautaire au sens de l'article 88-4 de la Constitution.

A la différence de ce qui s'était passé en 1993, le Conseil d'Etat, cette fois-ci avait estimé qu'il y avait lieu de saisir le Parlement français.

Son avis fut le suivant :

" En tant que proposition de décision conjointe du Conseil de l'Union européenne et du Parlement Européen prise selon la procédure de l'article 189 B du Traité de l'Union européenne, la proposition de révision des perspectives financières doit être regardée comme étant une proposition d'acte communautaire au sens de l'article 88-4 de la Constitution.

Dès lors que les montants pluriannuels prévus par le programme-cadre arrêtés selon la procédure de codécision de l'article 189 B du traité de l'Union européenne par application des dispositions de l'article 130 I du même traité doivent, pour être révisés, suivre la même procédure en application des § 11 et 12 de l'accord interinstitutionnel du 29 octobre 1993, et être inscrits dans l'avant-projet de budget que la commission est chargée d'établir en application de l'article 203 du Traité, lesdites révisions des perspectives financières dont les montants sont définis, sont de nature législative : elles peuvent être assimilées en droit interne à une loi de programme dont les autorisations de programme sont, en vertu de l'article 33 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, en principe inscrits dans la partie " services votés " du projet de loi de finances.


L'on trouvera dans l'encadré qui suit quelques rappels historiques sur les perspectives financières.

Quelques rappels historiques

Les perspectives financières constituent une vraie programmation à moyen terme des dépenses européennes.

Le budget des Communautés européennes s'inscrit, depuis 1989, dans le cadre d'une programmation pluriannuelle des dépenses décidée à la suite de l'accord institutionnel du 27 mai 1988.

La genèse de cet accord conclu entre le Conseil, le Parlement et la Commission peut être trouvée dans la crise budgétaire de 1987. Celle-ci avait opposé le Conseil au Parlement et à la Commission au sujet du plafond de ressources propres de la Communauté.

La programmation financière des dépenses communautaires, vulgarisée sous la dénomination de " paquet Delors I ", était censée permettre de trouver une porte de sortie à l'impasse budgétaire d'alors. Elle constituait un compromis au terme duquel :

- la montée en charge programmée des dépenses communautaires devait s'accompagner d'un plafonnement et d'une meilleure prédictibilité des contributions des Etats-membres ;

- la classification des différentes dépenses par rubrique permettait de préserver l'évolution nécessaire des dépenses obligatoires et les perspectives de renforcement des actions correspondant à des dépenses non obligatoires.

Le Conseil européen d'Edimbourg du mois de décembre 1992 devait adopter de nouvelles perspectives financières à horizon 1999, le " paquet Delors II ", consacrées par l'accord interinstitutionnel du 29 octobre 1993.

Le caractère programmatique des perspectives financières résulte de ce qu'elles regroupent en six grandes rubriques l'ensemble des interventions budgétaires de l'Union Européenne pour l'avenir. Cette caractéristique essentielle doit être préservée contre les tentatives d'amodiation de la Commission.

Chaque rubrique des perspectives financières est assortie d'un montant de crédits qui constitue le plafond des dépenses budgétaires ouvrables chaque année dans le cadre du budget européen.

Ces plafonds ne sont pas totalement intangibles. Ils peuvent être modifiés dans le cadre de deux procédures distinctes qui permettent de faire évoluer la programmation à moyen terme des crédits d'engagements du budget communautaire.

Les procédures permettant l'évolution de la programmation financière

L'adaptation annuelle des perspectives financières regroupe :

- Les ajustements techniques opérés en amont de la procédure budgétaire afin de tenir compte de la croissance du PNB et des prix.

Ils supposent, d'une part, de calculer la ligne agricole qui constitue le plafond de la rubrique 1 "Politique agricole commune". Celle-ci est indexée sur les prix et 74 % du taux de croissance réelle.

Ils supposent, d'autre part, de réévaluer les plafonds des autres rubriques en tenant compte de la croissance du PIB de l'année à venir et de la dérive des prix telle qu'elle est prévue.

Ces ajustements sont effectués par la Commission et communiqués aux deux branches de l'autorité budgétaire.

- Les adaptations liées aux conditions d'exécution consistent à adapter le montant total des crédits de paiement en fonction du rythme de consommation des crédits d'engagement.

Les attributions de la Commission dans ce domaine varient selon la nature des dotations concernées. Généralement, ces propositions doivent recueillir l'agrément du Conseil et du Parlement qui statuent à la majorité qualifiée pour l'un et, pour l'autre, à la majorité des membres qui le composent et des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Cependant, s'agissant des crédits relatifs aux fonds structurels et aux fonds de cohésion, la Commission est forte de l'engagement consenti par le Conseil et le Parlement à l'occasion de l'accord interinstitutionnel du 29 octobre 1993 d'autoriser le transfert sur les années ultérieures des dotations non utilisées au cours de l'exercice précédent, même si ce transfert a pour effet d'augmenter les plafonds correspondants des dépenses.

La révision des perspectives financières

Elle vise à " faire face à la nécessité d'engager des actions non prévues à l'origine dans le respect du plafond des ressources propres ".

L'accord interinstitutionnel précise qu' " en règle générale, une telle proposition de révision doit être adoptée avant le début de la procédure budgétaire pour l'exercice ou le premier des exercices concernés par cette révision " .

Les règles de majorité sont celles indiquées plus haut à l'occasion de la présentation de la procédure d' " adaptations liées aux conditions d'exécution " .

Une règle impérative est posée. Comme on l'a vu, les révisions doivent respecter le plafond des ressources propres .

En revanche, et l'hypothèse n'est pas purement théorique compte tenu du fait que les plafonds des crédits d'engagement sont inférieurs au plafond des ressources propres, les révisions financières peuvent conduire à une augmentation des plafonds des crédits d'engagement supérieure à ce qu'autorisent les ajustement techniques examinés plus haut.

L'accord interinstitutionnel de 1993 édicte quelques principes devant guider l'exercice de révision.

Il fait d'abord deux recommandations qui sont les suivantes :

- il s'agit d'abord de rechercher, si au sein d'une même rubrique, il existe des possibilités de réaffectation des dépenses entre les programmes qu'elle regroupe sur la base en particulier des sous-exécutions de crédits escomptables ;

- il s'agit, d'autre part, de rechercher les possibilités de compenser le relèvement du plafond d'une rubrique par la réduction du plafond d'une autre rubrique.

Il pose ensuite deux règles :


aucune révision au titre des dépenses obligatoires ne peut entraîner une réduction du montant disponible pour les dépenses non obligatoires ;


toute révision doit assurer le maintien d'une relation ordonnée entre engagements et paiements
.

Si le cadrage financier de l'Union Européenne est donc susceptible de connaître des modifications en cours de période, force est d'observer qu'au-delà des simples corrections techniques, les révisions des perspectives financières sont soumises à des conditions strictes qui en ont rendu l'utilisation rare dans le passé.

A l'occasion du nouvel accord interinstitutionnel, la Commission recherche donc à introduire davantage de flexibilité.

Cette recherche passe d'abord par l'introduction de clauses de flexibilité autorisant des transferts entre rubriques et d'une année sur l'autre.

Une flexibilité est organisée entre la rubrique 3 et la rubrique 4. Ainsi, l'autorité budgétaire pourrait, au cours de la procédure budgétaire, voter des crédits en dépassement du plafond de la rubrique 3 ou 4 des perspectives financières pour un montant maximal de 100 millions d'euros, sans révision des perspectives financières, à condition de laisser sous la rubrique qui n'est pas concernée par le dépassement une marge supérieure d'au moins 100 millions d'euros. Ce dépassement ne pourrait être effectué, pour les mêmes besoins, au titre de deux exercices consécutifs.

La flexibilité d'un exercice sur l'autre consisterait à permettre l'inscription dans le budget de crédits d'engagement en dépassement des plafonds des perspectives financières pour un montant maximum de 500 millions d'euros , pour couvrir des besoins précisément identifiés et d'importance politique significative, à condition qu'une inexécution correspondante des crédits d'engagement soit constatée au titre de l'exercice précédent et que le solde d'exécution budgétaire et le solde global de l'exercice précédent soient au moins équivalents.

Ces clauses qui sont la réponse de la Commission à l'échec rencontré par elle lors de sa proposition de révision de 1996 apparaissent inopportunes. Elles entrent en contradiction avec l'article 8 de l'accord interinstitutionnel qui, au nom d'une bonne gestion financière, demande aux institutions européennes de dégager des marges sous les plafonds des différentes rubriques pour pouvoir financer des crédits supplémentaires en cas de besoin.

Tant parce qu'elles affaiblissent la portée de l'accord politique qui fonde la programmation financière de l'Union européenne que parce qu'elles ouvrent la voie à un certain laxisme financier, ces clauses doivent entre dénoncées.

Cette exigence s'impose d'autant plus que le nouvel accord interinstitutionnel contient, de surcroît, en germe une réorientation des perspectives financières en cours de programmation.

Cela résulte de la combinaison de deux clauses.

La première, nouvelle, consiste à prévoir que la Commission présentera aux deux branches de l'autorité budgétaire, au plus tard le 1er juillet 2004, un rapport sur la mise en oeuvre de la ligne directrice agricole, accompagné, le cas échéant, de propositions appropriées pour une révision de son mode de calcul à partir de 2005.

La seconde, désormais classique, réserve un sort particulier et privilègié aux actions structurelles. En effet, le Parlement européen et le Conseil s'engagent à respecter les dotations en crédits d'engagement prévues dans les perspectives financières pour les actions structurelles. Ainsi, pour les actions structurelles, les plafonds des crédits d'engagement continueraient d'être considérés, moins comme une contrainte que comme des objectifs de dépenses. Sans doute, le projet d'accord interinstitutionnel ne reprend-il pas l'obligation pour l'autorité budgétaire de transférer sur les années ultérieures les dotations prévues pour les actions structurelles non utilisées au cours de l'exercice précédent. Mais, il prévoit une exception pour les dotations non utilisées au cours de la première année couverte par les perspectives financières afin de remédier à un éventuel retard en début de période : " A l'occasion de l'exercice d'adaptation réalisé en 2001 et en cas de retard dans l'adoption des programmes relatifs aux actions structurelles, les deux branches de l'autorité budgétaire s'engagent à autoriser, sur proposition de la Commission, le transfert sur les années ultérieures, en augmentation des plafonds correspondants de dépenses, des dotations correspondantes non utilisées au cours de l'exercice 2000 ".

Les propositions de la Commission pour plus de flexibilité apparaissent ainsi singulièrement sélectives, le maintien d'un statut privilégié accordé aux crédits d'actions structurelles figeant de fait leur programmation financière.

Si ces projets d'aménagement doivent être dénoncés, il est en revanche, loisible de se féliciter que le projet d'accord interinstitutionnel rappelle que les interventions budgétaires de l'Union sont dépendantes de l'existence d'une base légale. La Commission a toutefois présenté une proposition permettant d'inscrire des crédits susceptibles d'être exécutés sans acte de base. Il s'agirait :

- des crédits relatifs à des projets pilotes de nature expérimentale visant à tester la faisabilité d'une action et son utilité. Les crédits d'engagement y afférents ne pourraient être inscrits au budget que pour deux exercices budgétaires et leur montant total ne pourrait excéder 32 millions d'euros ;

- des crédits relatifs à des actions destinées à préparer des propositions en vue de l'adoption de futures actions communautaires. Les crédits d'engagement y afférents ne pourraient être inscrits au budget que pour trois exercices budgétaires au maximum. Le montant total des lignes nouvelles concernées ne pourrait dépasser 30 millions d'euros par exercice et le montant total des crédits effectivement engagés au titre des actions préparatoires ne pourrait excéder 75 millions d'euros.

Cette proposition a fait l'objet d'un accord de principe de la part du Conseil et du Parlement européen. Le niveau des crédits concernés demeure assez élevé mais, dans l'ensemble, la proposition de la Commission peut être considérée comme plus satisfaisante que la pratique observée jusqu'alors.

Une programmation réalisée sur le fil du rasoir :

La programmation financière 2000-2006 proposée par la Commission se caractérise par quelques grands traits.

Elle est réalisée dans le cadre d'un maintien du système actuel des "ressources propres" avec, en particulier, un plafond inchangé par rapport à la programmation en cours de 1,27 % du PIB communautaire.

Elle concerne l'Europe des 15 et ne prend qu'indirectement en compte l'élargissement à de nouveaux Etats membres conformément aux recommandations du Conseil.

Pour autant, la programmation présentée par la Commission est profondément marquée par la perspective de l'élargissement. Les crédits consacrés par les 15 à la préparation des candidats à l'adhésion à l'Union Européenne sont isolés au sein de trois des grandes rubriques du budget, les rubriques agricole, d'actions structurelles et d'aide extérieure :

21,8 milliards d'euros seraient consacrés à cette préparation soit 3% de l'ensemble des crédits disponibles.

Surtout, l'exercice de la Commission est sous-tendu par la volonté de démontrer sur la base d'une estimation de la charge budgétaire résultant de l'élargissement, que les crédits nécessaires aux 15 Etats membres laisseraient une marge suffisante pour financer l'adhésion des nouveaux membres sans dépasser le plafond inchangé des ressources propres.

Cette démonstration suppose remplies un grand nombre de conditions parmi lesquelles l'acceptation des réformes proposées par la Commission. Même si elles sont empreintes d'une grande continuité, voire d'un certain immobilisme, les perspectives financières ici examinées ne sont en effet pas établies sur la base d'une prolongation, sans changements, du cadre des actions communautaires.

Les principales modifications apportées à ce cadre concernent la politique agricole commune, les " actions structurelles " et, sans que la Commission le démontre vraiment, les politiques internes.

L'appréciation des nouvelles perspectives financières est donc indissociable de celle des réformes envisagées tout comme celle de leur capacité à répondre au défi de l'élargissement suppose d'accorder quelque crédit à l'évaluation de l'impact financier de ce dernier. Mais, elle est également dépendante de la réalisation du scénario macro-économique qui leur est sous-jacent dont il faut apprécier l'importance avant d'entrer dans le vif du sujet.

La Commission table sur une croissance en volume de 2,5 % l'an en moyenne, assortie d'une inflation de 2 % soit une croissance nominale pour les 15 de 4,5 % par an.

Données économiques de base

Milliards d'euros-prix 1999

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

PNB Quinze

7.804,3

7.999,4

8.199,4

8.404,4

8.614,5

8.829,8

9.050,6

9.276,9

PNB nouveaux Etats-membres

 
 
 

291,9

303,6

315,7

328,4

341,5

PNB TOTAL

 
 
 

8.696,3

8.918,1

9.145,6

9.378,9

9.618,3

Prévisions de croissance

2000-2001

2002-2006

PNB Quinze

2,5 %

2,5 %

PNB nouveaux Etats-membres

4,0 %

4,0 %

PNB Communauté élargie

 

2,6 %

 

2,0 %

2,0 %

Source : Document 1049

Ces perspectives ne sont pas irréalistes. Mais, elles tranchent avec le tempo de l'évolution économique en Europe au cours de la présente décennie marquée par une croissance moyenne de 1,5 % l'an entre 1991 et 1996.

Il n'est donc pas sans intérêt d'apprécier les propositions financières au regard d'une variante économique où le taux de croissance serait inférieur de un point au taux retenu par la Commission.

Dans une telle hypothèse, les plafonds des crédits de paiement exprimés en % du PIB prendraient les valeurs suivantes.


2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

1,28

1,29

1,28

1,25

1,23

1,22

1,21

La marge disponible sous les ressources propres évoluerait alors comme indiqué ci-après en point de PIB :


2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

- 0,01

- 0,02

+ 0,01

+ 0,02

+ 0,04

+ 0,05

+ 0,06

Des réaménagements de crédits devraient alors intervenir en début de période afin de respecter le plafond des ressources propres. Si la situation financière des 15 s'améliorerait par la suite, le financement de l'élargissement deviendrait très tendu. En effet, celui-ci suppose d'abord l'existence d'une marge confortable sous la ligne directrice agricole.

Or, une baisse du rythme de croissance du PIB à 1,5 % réduirait l'augmentation de la ligne directrice agricole indexée rappelons-le sur 74 % de la croissance en volume du PIB.

L'équilibre des dépenses agricoles serait le suivant :

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Ligne directrice agricole

45.702

46.204

46.713

47.997

47.716

48.272

48.802

Dépenses agricoles

41.813

43.952

44.825

45.407

44.773

43.991

43.298

dont PAC réformée

36.545

38.730

39.655

40.287

39.700

38.946

38.307

A Marge

3.889

2.252

1.888

1.820

2.973

4.281

5.504

B Marge des perspectives de la Commission

4.237

2.968

2.995

3.323

4.897

6.639

8.312

Ecart (A-B)

- 348

- 716

- 1.107

- 1.503

- 1.924

- 2.358

- 2.808

Mobilisation de la marge du fait de l'élargissement

-

-

1.600

2.030

2.450

2.930

3.400

La marge disponible sous la ligne directrice agricole en serait réduite et les besoins résultant de l'élargissement tendraient à assécher le disponible pour les 15.

Les disponibilités financières réservées au financement de l'élargissement évolueraient quant à elles comme suit :


2002

2003

2004

2005

2006

816

1.656

3.363

4.267

5.199

contre l'équilibre suivant prévu par la Commission :


2002

2003

2004

2005

2006

1.280

3.300

5.680

8.060

10.470

En cumulé, l'écart serait de 13.490 millions d'euros. Le total des financements disponibles serait alors juste équivalent au total des crédits nécessaires à l'élargissement. Toutes les marges seraient consommées.

*

* *

La programmation 2000-2006 apparaît ainsi insuffisamment inspirée du principe de précaution.

C'est d'autant plus regrettable qu'à bien des égards elle traduit un certain immobilisme des options européennes, repoussant à plus tard une révision pourtant nécessaire compte tenu des évolutions du contexte de la construction européenne.

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