C. Opérations à caractère définitif des comptes d'affectation spéciale

ARTICLE 44

Suppression de comptes d'affectation spéciale

ARTICLE 44 bis (nouveau)

Modification du compte d'affectation spéciale n° 902-17
" Fonds national pour le développement du sport "


ARTICLE 45

Comptes d'affectation spéciale. Opérations définitives. Services votés

ARTICLE 46

Comptes d'affectation spéciale. Opérations définitives. Mesures nouvelles

II - OPÉRATIONS À CARACTÈRE TEMPORAIRE

ARTICLE 47

Modification du compte de commerce n° 904-06
" Opérations commerciales des domaines "


ARTICLE 48

Comptes spéciaux du Trésor. Opérations à caractère temporaire.
Services votés


ARTICLE 49

Comptes de prêts. Mesures nouvelles

ARTICLE 50

Comptes de commerce. Mesures nouvelles

Articles rattachés aux Comptes spéciaux du Trésor (rapport spécial de M. Paul Loridant, annexe n° 45 au présent rapport).

III - DISPOSITIONS DIVERSES

ARTICLE 51

Autorisation de perception des taxes parafiscales

Commentaire : le présent article a pour objet d'autoriser la perception des taxes parafiscales en 2000.

La liste des taxes parafiscales figure à l'état E joint au projet de loi de finances. Les lignes 39 et 40 font l'objet d'un examen dans le rapport spécial de M. Claude Belot (annexe n° 9 au présent rapport).

Cinq taxes parafiscales sont supprimées pour 2000, c'est-à-dire ne figurent plus à l'état E :

- la taxe sur les expéditions de fruits et de préparations à base de fruits perçue dans les départements d'outre-mer au bénéfice du centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) ;

- quatre taxes affectées à des centres techniques industriels :

- la taxe allouée au Centre technique des industries de la fonderie ;

- la taxe sur les pâtes, papiers, cartons et celluloses ;

- la taxe sur les industries du textile et de la maille ;

- la taxe bénéficiant à l'institut des corps gras.

Outre ces suppressions, deux taxes verraient leur taux significativement réduit :

- la taxe au profit du comité de développement des industries françaises de l'ameublement : le produit de cette taxe, de 68,5 millions de francs en 1998-1999, devrait être réduit à 51 millions de francs en 1999-2000 ;

- la taxe sur les industries de l'habillement, versée au comité de développement et de promotion du textile et de l'habillement : le produit pour 1999-2000 devrait s'élever à 62 millions de francs contre 85 millions de francs pour la campagne 1998-1999 1( * ) .

Pour 1999, le rendement de la taxe affectée au CIRAD est évalué à 6,2 millions de francs, celui des 4 taxes supprimées dans le secteur industriel à 197,7 millions de francs. La diminution des deux taxes parafiscales pour 2000 est évaluée à 40,5 millions de francs. Au total, le manque à gagner résultant de la suppression ou de la réduction de taxes parafiscales peut donc être évalué à un peu moins de 240 millions de francs pour 2000.

Les pertes de recettes pour les organismes concernés sont compensées par les crédits budgétaires suivants :

- 247 millions de francs au chapitre 44-05 " centres techniques et organismes assimilés " (nouveau) du budget de l'économie, des finances et de l'industrie ;

- 7 millions de francs au chapitre 68-43 " centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) " du budget de la recherche et de la technologie.

Ces sommes semblent correspondre aux besoins des organismes auparavant alimentés par taxes parafiscales.

Suite à la suppression de 5 taxes, pour un montant de près de 240 millions de francs, il reste tout de même 43 taxes, avec un produit global évalué à 4,3 milliards de francs en 2000.

Ces taxes concernent essentiellement :

- l'agriculture et la pêche (29 taxes) ;

- l'industrie (8 taxes) ;

- la formation professionnelle (3 taxes).

Décision de la commission : sous le bénéfice des observations de son rapporteur spécial, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 52

Crédits évaluatifs

Commentaire : le présent article a pour objet de fixer la liste des chapitres sur lesquels s'imputent les crédits évaluatifs autres que ceux limitativement énumérés à l'article 9 de l'ordonnance de 1959.

Ordonnance du 2 janvier 1959

Article 9

Les crédits évaluatifs servent à acquitter les dettes de l'Etat résultant de dispositions législatives spéciales ou de conventions permanentes approuvées par la loi. Ils s'appliquent à la dette publique, à la dette viagère, aux frais de justice et aux réparations civiles, aux remboursements, aux dégrèvements et aux restitutions, ainsi qu'aux dépenses imputables sur les chapitres dont l'énumération figure à un état spécial annexé à la loi de finances.

Les dépenses auxquelles s'appliquent les crédits évaluatifs s'imputent, au besoin, au-delà de la dotation inscrite aux chapitres qui les concernent.

La liste des crédits évaluatifs, autres que les crédits évaluatifs par nature énumérés à l'article 9 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, figure à l'état F. Le montant de ces autres crédits s'établit à 102,3 milliards de francs (105,8 milliards de francs en 1999).

S'agissant du budget général, les chapitres 33-90 " Cotisations sociales, part de l'Etat " et 33-91 " Prestations sociales versées par l'Etat " de tous les services font l'objet de crédits évaluatifs pour un montant total s'établissant respectivement à 13,6 milliards de francs et 10,5 milliards de francs. A ceux-ci s'ajoutent les 53,2 milliards de francs de crédits inscrits sur le chapitre 33-91 du budget des charges communes. Par ailleurs, 10 autres chapitres de différents ministères sont inscrits à l'état F pour un montant de 24,9 milliards de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 53

Crédits provisionnels

Commentaire : le présent article fixe pour 2000, conformément à l'état G annexé au projet de loi de finances, la liste des chapitres dont les dotations ont un caractère provisionnel.


Ordonnance du 2 janvier 1959

Article 10

Les crédits provisionnels s'appliquent aux dépenses dont le montant ne peut correspondre exactement à la dotation inscrite dans la loi de finances parce que les dépenses afférentes à ces crédits sont engagées en vertu d'une loi ou d'un règlement contresigné par le ministre des finances. La liste des chapitres dont les dotations ont un caractère provisionnel est donnée chaque année par la loi de finances.

Les dépenses sur crédits provisionnels ne peuvent être ordonnancées que dans la limite des crédits ouverts. S'il est constaté en cours d'année que ces crédits sont insuffisants, ils peuvent être complétés, par arrêté du ministre des finances, par prélèvement sur le crédit global pour dépenses éventuelles. En cas d'urgence, si ces prélèvements sont eux-mêmes insuffisants, des crédits supplémentaires peuvent être ouverts par décret d'avance pris sur le rapport du ministre des finances et dont la ratification est demandée au Parlement dans la plus prochaine loi de finances.

Les crédits provisionnels énumérés à l'état G sont ceux qui, en cas d'insuffisance, peuvent être complétés en cours d'année par prélèvement sur un chapitre réservoir du budget des charges communes : le chapitre 37-94 " dépenses éventuelles " initialement doté de 300 millions de francs pour 2000 (contre 600 millions de francs dans le projet de loi de finances initial pour 1999).

Au-delà de cette somme, les crédits devraient être ouverts par décret d'avance. Pris sans avis préalable du Conseil d'Etat, ces décrets peuvent dégrader l'équilibre de la loi de finances.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 54

Reports de crédits

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter la liste des chapitres dont les crédits peuvent être reportés par arrêté, sans limitation de montant. L'énumération de ces chapitres figure à l'état H annexé au projet de loi de finances.

Le principe de l'annualité est l'un des principes fondamentaux du droit budgétaire français.

En vertu de ce principe, les crédits qui n'ont pas été consommés au cours d'un exercice devraient être purement et simplement annulés, à l'exception des autorisations de programme, qui demeurent valables sans limitation de durée.

Toutefois, l'application du principe d'annualité souffre une exception, prévue par l'article 17 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances, qui dispose :

" Sous réserve des dispositions concernant les autorisations de programme, les crédits ouverts au titre d'un budget ne créent aucun droit au titre du budget suivant.

Toutefois, les crédits de paiement disponibles sur opérations en capital sont reportés par arrêté du ministre des finances ouvrant une dotation de même montant en sus des dotations de l'année suivante. Avant l'intervention du report, les ministres peuvent, dans la limite des deux tiers des crédits disponibles, engager et ordonnancer des dépenses se rapportant à la continuation des opérations en voie d'exécution au 1 er janvier de l'année en cours.

Peuvent également donner lieu à report, par arrêté du ministre des finances, les crédits disponibles figurant à des chapitres dont la liste est donnée par la loi de finances ainsi que, dans la limite du dixième de la dotation du chapitre intéressé, les crédits correspondant aux dépenses effectivement engagées mais non encore ordonnancées ".


Concrètement, le présent article vise à approuver la liste des chapitres sur lesquels s'imputent les crédits pouvant donner lieu à report, cette liste étant établie à l'état H annexé au projet de loi de finances pour 2000.

Le comité interministériel de la réforme de l'Etat du 13 juillet 1999 a décidé d'inscrire tous les chapitres de fonctionnement du budget général à l'état H, c'est-à-dire tous les chapitres des parties 34, 35 et 37, à l'exception des chapitres 37-94 (Dépenses éventuelles) et 37-95 (Dépenses accidentelles) du budget des charges communes, 37-02 (Comité national d'évaluation de la recherche) du budget de la recherche et technologie, 37-82 (Dépenses déconcentrées de modernisation et d'animation de la politique de la ville) du budget de la ville et 37-94 (Commission nationale de l'informatique et des libertés. Dépenses de personnel) du budget de la justice, et des chapitres évaluatifs dont les crédits n'ont pas à être reportés.

Le gouvernement développe deux arguments pour motiver cette décision :

- inciter les services gestionnaires à une meilleure programmation et à une meilleure utilisation de leurs crédits de fonctionnement ;

- instaurer des règles claires entre les administrations centrales et les services déconcentrés, les administrations centrales pouvant ainsi garantir aux services déconcentrés le bénéfice du report des crédits inutilisés l'année précédente pour qu'ils puissent programmer leurs dépenses de fonctionnement dans la continuité.

Au total, 197 chapitres des budgets civils sont ainsi inscrits à l'état H annexé (90 l'année dernière) : 146 chapitres de dépenses de fonctionnement, auxquels s'ajoutent les 51 chapitres énumérés par l'état H annexé.

Il est également proposé d'y inscrire un chapitre du budget de la défense, 10 chapitres au titre de budgets annexes, ainsi que 20 comptes spéciaux du Trésor (16 comptes d'affectation spéciale et 4 comptes de prêts).

Pour 1999, les reports se sont établis à 63,52 milliards de francs, soit une progression de 16,5 % par rapport au montant des crédits de 1997 reportés sur 1998.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 55

Approbation de la répartition du produit de la redevance et approbation du produit attendu des recettes publicitaires des organismes du secteur public de la communication audiovisuelle

ARTICLE 55 bis (nouveau)

Dépôt d'un rapport du Gouvernement sur la redevance des appareils récepteurs de télévision

Articles rattachés aux crédits de la communication audiovisuelle (rapport spécial de M. Claude Belot, annexe n° 9 au présent rapport).

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES


A. Mesures fiscales


ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 56

" Conjugalisation " de la décote

Commentaire : le présent article additionnel vise à doubler le montant de la décote pour les couples mariés, qui passerait ainsi à 6.700 francs.

Notre collègue Yves Fréville avait, lors de l'examen de la première partie du présent projet de loi de finances, défendu de façon très argumentée, un amendement tendant à la " conjugalisation " de la décote.

Il est en effet paradoxal que ce mécanisme, censé retarder l'entrée dans le barème des contribuables célibataires modestes, aboutisse à pénaliser les couples mariés soumis à imposition commune.

Effectivement, il n'est pas normal que les mêmes personnes qui bénéficient deux fois de la décote, lorsqu'ils sont imposés séparément, n'en bénéficient plus qu'une seule fois, quand ils se marient avec, au bout du compte, un surcroît d'impôt considérable, eu égard à la faiblesse de leurs revenus.

On note qu'il défavorise surtout les couples " biactifs " de condition modeste, c'est-à-dire dont le revenu imposable est inférieur à 10.000 francs de revenus salariaux par mois pour un couple. Peut-on faire payer, dans l'exemple alors choisi par notre collègue, un supplément d'impôt de 2.700 francs à des ménages d'un niveau de revenus pareil ?

Le coût de la mesure serait de 3,6 milliards de francs. Il a donc paru préférable à votre commission de ne présenter cette mesure, simple, favorable aux familles et tout particulièrement aux jeunes couples qui travaillent, qu'en seconde partie pour ne l'appliquer qu'aux revenus perçus en l'an 2000.

Il s'agit ainsi de montrer la voie au gouvernement en lui donnant des repères de nature à guider ses réflexions sur la réforme annoncée de l'impôt sur le revenu, en lui faisant passer un message simple : il faut cesser de pénaliser fiscalement le mariage.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 56

Durée des vérifications applicable à certaines entreprises

Commentaire : la vérification fiscale de comptabilité est limitée à trois mois pour les petites entreprises. Le présent article tend à exclure les holdings importantes du bénéfice de cette durée en cas de vérification de leur comptabilité.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL


Les vérifications de comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ne sont pas limitées dans le temps.

Toutefois, l'article L. 52 du livre des procédures fiscales limite à trois mois la vérification sur place des livres ou documents comptables des petites entreprises soumises au régime simplifié d'imposition. Il s'agit :

- des entreprises industrielles et commerciales dont le chiffre d'affaires est inférieur à 5 millions de francs et dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir un logement ;

- des autres entreprises industrielles et commerciales ou des contribuables qui se livrent à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel de recettes brutes est inférieur à 1,5 million de francs ;

- des contribuables se livrant à une activité agricole, lorsque le montant annuel des recettes brutes n'excède pas 1,8 million de francs.

Or, le critère retenu, à savoir le montant du chiffre d'affaires, pour la limitation à trois mois de la vérification de comptabilité, apparaît peu pertinent lorsqu'il s'agit de holdings.

En effet, ces sociétés se caractérisent par un chiffre d'affaires nul puisqu'elles exercent des activités financières à travers le contrôle et la gestion de parts d'autres sociétés.

Or, l'utilisation de holdings par les sociétés peut entraîner des montages financiers très complexes. Le délai de trois mois incombant à l'administration fiscale pour effectuer la vérification de comptabilité apparaît alors insuffisant.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose d'exclure du champ d'application de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales les personnes morales, quelle que soit leur forme juridique, à l'actif desquelles sont inscrits des titres de placement ou de participation dont le montant total est égal ou supérieur à 50 millions de francs.

Le champ d'application de cet article est donc très large puisque sont visées toutes les personnes morales. De même, la référence aux titres de placement ou de participation permet de couvrir l'ensemble des titres détenus par une société holding. Les services fiscaux ne sont toutefois pas en mesure de chiffrer le nombre de sociétés concernées dans la mesure où elles ne font pas l'objet d'un suivi statistique particulier.

Les sociétés holdings seraient exclues du champ d'application de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales à compter des contrôles pour lesquels la première intervention aurait lieu le 1 er janvier 2000.

En conséquence, l'administration ne serait pas limitée dans le temps pour procéder aux vérifications de comptabilité qu'elle estime nécessaires.

L'Assemblée nationale a modifié le texte initial du présent article.

D'une part, elle a supprimé la précision selon laquelle toutes les personnes morales sont visées, quelle que soit leur forme juridique, en jugeant cette dernière mention superfétatoire.

En revanche, elle a étendu le champ d'application du présent article aux sociétés en participation mentionnées à l'article 238 bis M du code général des impôts dans la mesure où ces sociétés, selon l'article 1871 du code civil, ne sont pas des personnes morales.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 57

Modification des règles d'opposabilité du secret professionnel à l'administration fiscale

Commentaire : le présent article vise à aligner les obligations comptables de tous les titulaires de bénéfices non commerciaux soumis au secret professionnel. Il vise par ailleurs à autoriser l'administration fiscale à accéder aux informations et aux documents relatifs à l'identité des clients, à la date et à la forme du versement afférent aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel dans le cadre d'une vérification de comptabilité.

I. L'ALIGNEMENT DES OBLIGATIONS COMPTABLES

A. LE DISPOSITIF ACTUEL

1. Les obligations légales communes à toutes les professions libérales


L'article 99 du code général des impôts dispose que les contribuables soumis obligatoirement au régime de la déclaration contrôlée ou qui désirent être imposables d'après ce régime sont tenus d'avoir un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles.

L'article 102 ter du code général des impôts prévoit que les contribuables qui sont soumis au régime déclaratif spécial 2( * ) portent directement sur leur déclaration le montant des recettes annuelles et des plus ou moins values réalisées ou subies au cours de cette même année.

Toutefois, les éléments que doivent contenir les documents comptables varient en fonction de l'appartenance des contribuables à une association de gestion agréée.

2. Les obligations comptables particulières des membres d'une association de gestion agréée

L'article 1649 quater G dispose que les documents tenus par les adhérents des associations de gestion agréées doivent être établis conformément à l'un des plans comptables professionnels agréés par le ministre de l'économie et des finances.

En outre, ces documents comptables comportent, quelle que soit la profession exercée par l'adhérent, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires.

Lors de la discussion de ce texte proposé dans la loi de finances pour 1983, des voix s'étaient élevées contre les risques de violation du secret professionnel 3( * ) . Toutefois, l'utilisation pratique de cette disposition n'a pas soulevé de difficulté particulière. En effet, la documentation de base a introduit certaines souplesses dans l'application de cette mesure afin de ne pas porter atteinte au secret professionnel.

Ainsi, le paragraphe 7 dispose :

" Selon l'alinéa 2 de l'article 1649 quater G du code général des impôts, les documents comptables comportent, quelle que soit la profession exercée par l'adhérent, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires.

L'application stricte de ce texte conduirait à exiger que les adhérents soumis au secret professionnel indiquent l'identité de leurs clients dans le livre-journal.

Aussi, en pratique, à l'égard des adhérents soumis au secret professionnel dans les conditions définies par l'article 378 du code pénal (membres du corps médical, experts-comptables, avocats...), il convient d'admettre que le livre-journal ne comporte qu'une référence à un document annexe permettant de retrouver l'identité du client, à la condition que l'administration ait accès à ce document. Néanmoins, cette information ne doit être recueillie, et a fortiori, utilisée que lorsque les circonstances de fait l'imposent de manière impérative pour mener à bien des opérations de contrôle .

Afin de faciliter les obligations comptables de ces adhérents, il a paru également possible de les autoriser à ne porter dans leur livre-journal que le nom du client dans la mesure où son identité complète (nom, prénom usuel et adresse) figure dans un fichier couvert par le secret professionnel.

Dans ce cas, le caractère régulier et sincère de la comptabilité ne sera pas remis en cause du seul fait que le document comportant l'identité complète des clients ne sera pas présenté au vérificateur à la condition expresse que le praticien lui fournisse ces informations sur simple demande
".

Le paragraphe 8 sur les simplifications comptables précise que les contribuables peuvent comptabiliser globalement en fin de journée leurs recettes d'un montant unitaire inférieur à 500 francs à condition qu'elles aient fait l'objet d'un paiement en espèces et au comptant. Dans ce cas, il n'y a pas lieu de porter au regard de l'écriture globale l'identité des différents clients. Celle-ci ne doit figurer que sur les pièces justificatives.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose d'étendre les obligations comptables auxquelles sont soumis les adhérents des associations de gestion agréées à tous les titulaires de bénéfices non commerciaux soumis au secret professionnel.

Désormais, quelle que soit la profession exercée par le contribuable, il devrait indiquer l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires . Jusqu'à présent, seuls les contribuables membres d'une association de gestion agréée étaient soumis à cette obligation.

Le I du présent article propose d'insérer un deuxième alinéa à l'article 99 du code général des impôts afin que les contribuables soumis au régime de la déclaration contrôlée tiennent compte de cette obligation dans la tenue du livre-journal.

Le II du présent article étend également cette obligation aux contribuables soumis au régime déclaratif spécial. Désormais, ils devraient tenir un document donnant non seulement le détail journalier de leurs recettes professionnelles, mais également l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires.

Le III du présent article supprime par coordination le deuxième alinéa de l'article 1649 quater G du code général des impôts devenu inutile puisqu'il limitait une telle obligation aux seuls membres d'associations de gestion agréées.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission n'est pas opposée à l'extension des obligations comptables actuellement applicables aux adhérents d'associations de gestion agréées à tous les membres des professions libérales soumis à la règle du secret professionnel.

Les obligations comptables déjà prévues à l'article 1649 quater G, à savoir l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires visent à rendre plus fiable la connaissance des revenus des adhérents d'associations de gestion agréées. Cette disposition a su établir un équilibre acceptable entre l'amélioration des moyens de contrôle de l'administration fiscale et le nécessaire respect du secret professionnel.

Dans un souci de plus grande transparence fiscale, il peut apparaître opportun d'étendre ces obligations aux membres de professions libérales qui ne sont pas adhérents des associations de gestion agréées.

Selon une étude réalisée en août dernier par la direction générale des impôts, il apparaît que 67,5 % des titulaires de bénéfices non commerciaux sont adhérents d'une association de gestion agréée.

Le tableau suivant montre que le taux d'adhésion est variable selon les secteurs d'activité.


Secteur d'activité

Santé

Etude - Conseil

Assistance

Education - Art

Activités diverses

Taux d'adhésion

75 %

68 %

40 %

II. LA REMISE EN CAUSE DES RÈGLES D'OPPOSABILITÉ DU SECRET PROFESSIONNEL À L'ADMINISTRATION FISCALE

A. LE DISPOSITIF ACTUEL : L'ENCADREMENT LÉGISLATIF DU SECRET PROFESSIONNEL ET LE CONTRÔLE DU JUGE

1. Le droit de communication


Le droit de communication permet aux agents de l'administration fiscale, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle de l'impôt, d'avoir connaissance d'un nombre limité de documents et de renseignements dans des conditions strictement prévues par le livre des procédures fiscales.

Ainsi, les personnes ou institutions envers lesquelles l'administration fiscale peut exercer un droit de communication sont expressément énumérées.

a) Le droit de communication envers certaines professions libérales

L'article L. 86 du livre des procédures fiscales dresse la liste des membres de professions non commerciales qui sont assujettis au droit de communication. Il s'agit :

- des professions dont l'exercice autorise l'intervention dans des transactions, la prestation de services à caractère juridique, financier ou comptable ou la détention de biens ou de fonds pour le compte de tiers. L'instruction du 31 décembre 1980 en dresse la liste exhaustive 4( * )

- des professions consistant à titre principal en la prestation de services à caractère décoratif ou architectural ou en la création et la vente de biens ayant le même caractère 5( * ) .

L'article L. 86 prévoit que le droit de communication envers ses professions ne porte que sur l'identité du client, le montant, la date et la forme de versement ainsi que les pièces annexes de ce versement.

L'instruction précitée précise que le droit de communication prévu à l'article 77 de la loi de finances pour 1980 ne peut être exercé à l'égard de personnes qui exercent une profession non commerciale non visée par le texte de loi, notamment les professions médicales et paramédicales.

b) Les garanties supplémentaires en faveur des adhérents d'associations de gestion agréées

L'article L. 86 A du livre des procédures fiscales est encore plus restrictif puisqu'il prévoit que la nature des prestations fournies par l'adhérent d'une association agréée ne peut faire l'objet de demandes de renseignements de la part de l'administration fiscale lorsque cet adhérent est membre d'une profession non commerciale soumis au secret professionnel.

2. Le contrôle du juge

Le juge a pour mission de contrôler l'équilibre existant entre le renforcement des moyens de contrôle de l'administration fiscale et le respect du secret professionnel.

L'article 226-13 du code pénal dispose que la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état, soit par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 100.000 francs d'amende.

L'article 226-14 prévoit cependant que l'article précité n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n'est pas applicable :

- à celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu'il s'agit d'atteintes sexuelles dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur de quinze ans ou à une personne qui n'est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son état physique ou psychologique ;

- au médecin qui, avec l'accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République les sévices qu'il a constatés dans l'exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences sexuelles de toute nature ont été commises.

Face à ces dispositions, les juges administratif et judiciaire ont estimé que le secret médical était général et absolu.

En revanche, leur attitude est plus nuancée en ce qui concerne la nature du secret médical.

a) La jurisprudence de la Cour de cassation

La Cour de cassation a longtemps admis que la simple mention du nom des patients ne saurait systématiquement être couverte par le secret médical.

Ainsi, dans une décision du 8 juin 1966, elle a estimé que, pour établir que le gérant d'une clinique dentaire s'était soustrait à l'impôt, l'administration fiscale, lors de la vérification de comptabilité, pouvait se fonder sur les fiches administratives tenues par les services de la clinique et portant sous le nom du malade des renseignements d'ordre comptable sans qu'un secret d'ordre médical ou que des faits confidentiels dont le gérant aurait été dépositaire ne soient divulgués, soit par la saisie des fiches, soit par leur communication.

Dans une décision du 18 mars 1997, cependant, la Cour de cassation a posé le principe selon lequel " les dispositions relatives au secret professionnel font obstacle à ce que l'identité d'un malade soit divulguée sans son consentement ".

b) La position du Conseil d'Etat

Le Conseil d'Etat défend fermement le principe selon lequel le secret professionnel opposable à l'administration fiscale couvre le nom des patients 6( * ) .

Ainsi, dans un arrêt du 20 novembre 1959, il a estimé que les dispositions du code pénal qui sanctionnent le délit de violation du secret médical opposable à l'administration fiscale couvrent le nom des patients en lui-même, c'est-à-dire même si le nom du patient n'est pas rapproché de la nature des affections traitées ou des soins prodigués.

Cette jurisprudence a été récemment rappelée le 7 juin 1998 (" ministre du budget contre Chung "). Le Conseil d'Etat a jugé que les dispositions du code pénal " font obstacle à ce que les membres des professions auxquelles elles s'appliquent fassent connaître à des tiers les noms des personnes qui ont recours à leurs services ou à leurs soins ; que, bien que les agents des services fiscaux soient eux-mêmes tenus au secret professionnel, il ne saurait dérogé en leur faveur, sauf disposition législative expresse, à la règle édictée par l'article 378 précité, y compris dans le cas où ils entendent faire usage, pour les besoins des contrôles qu'ils doivent effectuer, de renseignements contenus dans des documents obtenus auprès de l'autorité judiciaire, à laquelle l'article L. 101 du livre des procédures fiscales fait obligation de " communiquer à l'administration des impôts toute indication de nature à faire présumer une fraude en matière fiscale " qu'elle a pu recueillir à l'occasion, notamment, " d'une information criminelle ou correctionnelle, même terminée par un non-lieu ". " 7( * ) .

Depuis 1983, l'article 1649 quater G du code général des impôts oblige les praticiens adhérents des associations de gestion agréées à tenir des documents comptables comportant l'identité du client. Il en résulte que, lorsqu'un agent de l'administration fiscale vérifie les bénéfices non commerciaux d'un médecin membre d'une telle association, il a, sans pour autant que le secret médical soit violé, la faculté de consulter des documents comptables où apparaissent tant l'identité des patients que le mode de règlement des prestations.

Le Conseil d'Etat a cependant estimé que le nom des patients n'échappe au secret médical que dans la stricte mesure où l'article 1649 quater G du code général des impôts l'impose . Ainsi, dans un arrêt du 20 janvier 1999, il a confirmé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Nantes 8( * ) qui avait estimé que les articles 1649 quater G du code général des impôts, L. 86 A, L 97 et A. 97-2 du livre des procédures fiscales " n'ont pas et ne peuvent légalement avoir pour effet de permettre à l'administration des impôts d'avoir connaissance par l'intermédiaire d'organismes de sécurité sociale de faits couverts par le secret médical, au nombre desquels figure le nom des patients ".

La Cour administrative d'appel avait alors jugé que la consultation par le vérificateur de feuilles de maladie communiquées par une caisse primaire d'assurance maladie et comportant le nom des patients étant établie, le vérificateur a ainsi eu connaissance d'informations couvertes par le secret médical. La procédure de contrôle a alors été déclarée irrégulière.

B. LA DISPOSITIF PROPOSÉ : LE BOULEVERSEMENT DES RÈGLES D'OPPOSABILITÉ DU SECRET PROFESSIONNEL À L'ADMINISTRATION FISCALE

1. Le dispositif proposé par le gouvernement


Le Conseil d'Etat interprète très strictement les atteintes légales portées au secret couvrant le nom des patients. L'administration fiscale doit donc être particulièrement attentive à la procédure suivi en cas de contrôle.

Or, ce fragile équilibre entre le souci d'efficacité dans la lutte contre la fraude d'une part et la nécessaire préservation du secret professionnel d'autre part, est remis en cause par le présent article qui propose d'autoriser l'accès de l'administration fiscale à toutes informations et tous documents relatifs à l'identité des clients.

Ainsi, le IV du présent article crée un nouvel article L. 13-O A au sein du livre des procédures fiscales qui autorise l'administration à demander toutes informations ou documents relatifs à l'identité des clients ainsi qu'au montant, à la date et la forme du versement afférent aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel.

Le champ d'application de cette disposition est très large puisqu'elle concerne toutes les personnes soumises à l'obligation du secret professionnel, qu'elles soient titulaires de bénéfice non commerciaux ou au contraire soumises à l'impôt sur les sociétés.

Sont visées les professions libérales qui exercent de manière individuelle ou en société, mais également les banques ou les compagnies d'assurance.

Il convient cependant de remarquer que pour ces deux dernières catégories, l'opposabilité du secret professionnel en cas de vérification de la comptabilité ne pose pas problème dans la mesure où leur comptabilité ne comporte pas habituellement le nom des clients.

Selon les informations obtenues auprès de l'administration fiscale par votre rapporteur général, cette disposition a pour but d'autoriser les agents chargés du contrôle fiscal à utiliser les carnets de rendez-vous des professions libérales afin de vérifier la cohérence interne des déclarations en confrontant par exemple le nombre des rendez-vous et le montant des recettes déclarés.

De même, afin de contrôler le bien-fondé de provisions sur comptes clients effectuées, par exemple, par des sociétés d'avocats ou des cliniques, l'administration pourrait avoir accès à la lettre envoyée au client et prouvant qu'il y a eu relance.

En conséquence, il ne serait pas question de vérifier si le nom inscrit sur ces documents correspond réellement à celui du client.

En outre, le second alinéa du IV de cet article précise que la présentation spontanée par les personnes soumises à une vérification de comptabilité de documents comportant d'autres informations n'affecterait pas les procédures d'imposition mises en oeuvre par l'administration.

Cette disposition viserait à éviter les annulations de procédures liées à la transmission de documents comportant des indications confidentielles à l'administration sans qu'elle les ait demandés.

Cette disposition ne s'appliquerait cependant qu'aux opérations de vérification engagées à compter du 1 er janvier 2000. Les procédures en cours ne sont donc pas concernées.

2. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a apporté trois modifications au texte initial.

D'abord, elle a supprimé la possibilité pour l'administration fiscale de demander des documents relatifs à l'identité des clients . Celle-ci ne peut en plus demander que des informations. En effet, certaines voix s'étaient élevées, non sans raison, pour constater que cette obligation conduirait les membres des professions libérales à exiger de leurs clients ou patients un justificatif de leur identité.

En outre, la demande de documents au cours d'une vérification de comptabilité apparaît superflue puisqu'il s'agit seulement pour l'administration fiscale de s'assurer de la régularité et du caractère probant des écritures comptables.

Ensuite, l'Assemblée nationale a précisé que les agents de l'administration fiscale ne pouvaient demander de renseignements sur la nature des prestations fournies par ces personnes.

Cette disposition peut apparaître inutile ou redondante en raison du principe selon lequel l'administration fiscale ne peut faire que ce que prescrit expressément le livre des procédures fiscales. En conséquence, puisque le nouvel article L. 13-0 A créé par le présent article ne prévoyait pas la possibilité pour l'administration de demander de renseignements sur la nature des prestations fournies, cela signifie que l'accès à ce genre d'informations lui est donc interdit. En réalité, cette mesure visait essentiellement à apaiser les craintes des parlementaires quant à la remise en cause du secret professionnel par cet article.

L'Assemblée nationale a enfin adopté un amendement qui étend aux contribuables soumis au secret professionnel le bénéfice de l'article L.86 du livre des procédures fiscales selon lequel la nature des prestations fournies ne peut faire l'objet de demandes de renseignements de la part de l'administration fiscale.

Cet amendement a été présenté comme une garantie supplémentaire accordée au contribuable dans la mesure où elle dispose que la nature des prestations fournies ne peut faire l'objet de demandes de renseignements de la part de l'administration des impôts lorsque le contribuable est membre d'une profession non commerciale soumis au secret professionnel.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission ne peut accepter l'extension des prérogatives de l'administration fiscale telle qu'elle est proposée par le IV du présent article.

Certes, l'Assemblée nationale consciente de ces risques a supprimé la possibilité pour l'administration fiscale de demander tous documents relatifs à l'identité des clients ainsi qu'au montant, à la date et à la forme du versement. Toutefois, l'administration reste autorisée à exiger du contribuable toutes informations relatives à l'identité des clients , ainsi qu'au montant, à la date et la forme du versement afférent aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel.

De telles informations dont la nature et le contenu ne sont pas définis de façon précise portent manifestement atteinte au secret professionnel. En outre, le terme très général d'informations ne permet en aucun cas de circonscrire les demandes de l'administration fiscale. Cette disposition tend donc à lui donner des pouvoirs de contrôle très puissants qui remettent en cause le fragile équilibre établi en 1982 et auquel le législateur avait été, en son temps, extrêmement vigilant.

En effet, conformément à l'article 1649 quater G du code général des impôts, l'administration fiscale a déjà accès, en ce qui concerne les membres des associations de gestion agréées, à des documents comptables comportant l'identité du client, le montant, la date et la forme du versement des honoraires. Par ailleurs, le présent article étend ces obligations comptables à tous les membres des professions libérales. Les vérifications de comptabilité effectuées par les agents du contrôle fiscal seront donc facilitées puisque le livre-journal auquel ils auront accès sera plus complet.

Il apparaît donc inutile de donner de nouvelles prérogatives à l'administration sauf à vouloir remettre en cause le secret professionnel auquel sont soumises de très nombreuses professions libérales.

En outre, votre commission s'oppose à la disposition selon laquelle la présentation spontanée par les contribuables faisant l'objet d'un contrôle de documents comportant d'autres informations que celles relatives à l'identité, au montant, à la date et à la forme du versement n'affecterait pas les procédures d'imposition mises en oeuvre par l'administration.

On peut en effet légitimement s'interroger sur le caractère réellement " spontané " de la présentation de tels documents dans le cadre d'une procédure de vérification fiscale, eu égard à sa nature et au contexte dans lequel elle s'effectue.

Par ailleurs, concrètement, ces documents risquent d'affecter la régularité des procédures dans le cas où ils contiennent des informations couvertes par le secret professionnel. Cette disposition pourrait donc conduire à la situation paradoxale dans laquelle la violation du secret professionnel serait fiscalement tolérée, tandis que le contribuable continuerait d'être pénalement responsable de son acte et cela sans que l'intéressé en ait été informé.

Par ailleurs, il convient de rappeler que l'exploitation desdits documents relève de la seule décision de l'administration fiscale. En conséquence, si elle reçoit des documents soumis au secret professionnel et choisit de ne pas les exploiter, aucun vice de procédure ne pourra être constaté.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

ARTICLE 58

Reconduction de mesures fiscales en faveur de l'aménagement du territoire

Commentaire : le présent article a pour objet de reconduire jusqu'au 31 décembre 2004 le dispositif d'exonération puis d'allégement d'impôt sur les bénéfices dont bénéficient les entreprises créées dans certaines zones du territoire, pendant leurs cinq premières années d'activité. Il vise également à plafonner le montant du bénéfice susceptible d'être exonéré et à mieux définir la notion d' " extension d'activité préexistante " qui suscite un abondant contentieux. Il tend enfin à proroger jusqu'au 31 décembre 2004 également, le régime d'amortissement exceptionnel des immeubles construits par des PME dans certaines zones d'aménagement du territoire.

On notera qu'en contrepartie d'un assouplissement de la doctrine actuelle de l'administration sur la notion d'extension d'activité préexistante, le présent article procède à deux resserrements de la législation :

- d'un côté, il consacre la position pragmatique du juge administratif selon laquelle une entreprise créée dans le cadre d'une extension d'activités préexistantes doit être admise au bénéfice de l'exonération lorsqu'elle dispose d'une autonomie réelle à l'égard de l'entreprise déjà existante et quand bien même les deux entreprises seraient liées par contrat ; cette position contredit la doctrine administrative ;

- de l'autre, il infirme une décision récente du Conseil d'Etat qui avait jugé à l'inverse de l'administration, que la plus-value résultant d'une réévaluation libre des immobilisations faisait partie des bénéfices réalisés par l'entreprise, et était susceptible à ce titre d'être exonérée d'impôt ;

- enfin, il plafonne le montant des bénéfices pouvant bénéficier de l'exonération à 75.000 euros par an , plafond porté par les députés à 225.000 euros par période de trois ans.

I. LE DROIT EN VIGUEUR

L'article 44 sexies du code général des impôts résulte de l'article 14 de la loi de finances pour 1989 qui avait pour objet d'encourager la création d'entreprises en allégeant la charge fiscale des entreprises industrielles, commerciales ou artisanales pendant leurs cinq premières années d'activité. Ce dispositif est entré en vigueur à compter du 1 er octobre 1988.

Il a subi trois aménagements importants depuis sa création à l'occasion de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995.

Initialement d'application générale, ce dispositif a été réservé à la création d'entreprises nouvelles à l'intérieur de certaines zones géographiques du territoire. Il a toutefois été étendu aux activités non commerciales exploitées sous forme de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés.

Enfin, le régime de l'article 44 sexies qui avait été conçu à l'origine comme un dispositif d'application permanente a été transformé en dispositif temporaire, son application devant prendre fin au 31 décembre 1999.

A. RAPPEL DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 44 SEXIES

1. Un avantage fiscal dégressif


L'article 44 sexies du CGI prévoit un régime d'exonération puis d'abattement des bénéfices des entreprises créées depuis le 1 er octobre 1988.

Les bénéfices des entreprises nouvelles sont totalement exonérés au titre des deux premières périodes de douze mois qui suivent la création de l'entreprise, puis à hauteur de 75 %, 50 % et 25 % pour chacune des périodes de douze mois qui suit. La référence aux " périodes de douze mois " plutôt qu'aux années s'explique par le fait qu'un exercice fiscal peut ne pas coïncider avec l'année civile, par exemple si l'entreprise a été créée en cours d'année.

Les entreprises sont également exonérées, dans les mêmes proportions, de l'imposition forfaitaire annuelle (IFA).

Pour pouvoir bénéficier de ces avantages, les entreprises doivent exercer une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 du CGI, sous réserve de certaines activités expressément exclues (activités bancaires, financières, d'assurances, de gestion, ou de location d'immeubles).

En conséquence, sont exclues par défaut du nouveau dispositif :


• les activités mentionnées à l'article 35 du code général des impôts : il s'agit notamment des activités de marchands de biens et de construction-vente d'immeubles, des intermédiaires pour le négoce de biens et des lotisseurs ;


• les activités qui ne sont pas de nature industrielle, commerciale ou artisanale : il en est ainsi des activités non commerciales agricoles ou des activités civiles (gestion immobilière, gestion de portefeuille-titres par exemple).

En outre, l'exonération et les abattements sont subordonnés à la condition que l'entreprise soit soumise à un régime réel d'imposition . Il s'agit du régime réel normal ou du régime simplifié, l'entreprise y étant assujettie de plein droit ou sur option.

Les entreprises, dont le chiffre d'affaires n'excède pas les limites du forfait, doivent donc opter pour le régime simplifié si elles désirent bénéficier de l'exonération. L'entreprise doit être soumise au régime simplifié pendant toute la période d'application du régime prévu à l'article 44 sexies .

2. Un dispositif réservé aux entreprises " réellement nouvelles " et indépendantes

a) Un dispositif réservé aux entreprises " réellement nouvelles "

Le dispositif de l'article 44 sexies est réservé aux créations d'entreprises qui exercent une activité réellement nouvelle. En d'autres termes, l'entreprise nouvelle ne doit pas être la " réincarnation " totale ou partielle d'une activité préexistante. L'entreprise nouvelle doit traduire une création originale et indépendante.

L'article 44 sexies résume cette condition a contrario en précisant que les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime .

Simple dans son énoncé, le principe ainsi posé soulève en réalité de redoutables difficultés d'appréciation au plan pratique.

Opérations de concentration et de restructuration

Il ne saurait être question de considérer comme des entreprises nouvelles les activités qui sont en réalité exercées dans un cadre juridique différent. L'administration illustre cet aspect en évoquant le cas des sociétés constituées à l'occasion de fusions, scissions ou apports partiels d'actif.

Extension d'activités préexistantes

Le régime des entreprises nouvelles ne peut s'appliquer aux entreprises dont l'activité ne constitue que la simple extension d'une activité préexistante.

L'extension d'une activité préexistante se caractérise, selon la doctrine administrative 9( * ) , par la réunion de deux conditions :

- il existe une communauté d'intérêts entre l'entreprise créée et une entreprise préexistante. Cette communauté d'intérêts peut résulter de liens personnels (identité d'exploitant en droit ou en fait), ou de liens financiers ou commerciaux caractérisant une dépendance ;

- l'activité de l'entreprise créée prolonge celle de l'entreprise préexistante .

Extraits de l'instruction fiscale 4 A-5-89 du 25 avril 1989

L'extension peut être fonctionnelle lorsqu'une fonction qui avait vocation à être exercée par l'entreprise préexistante est exercée par l'entreprise nouvelle. Tel est le cas, par exemple d'un boulanger qui crée une société exerçant une activité de pâtissier.

Il en est de même en cas de prise en charge par une société nouvelle d'un service exercé antérieurement au sein d'une entreprise.

A cet égard, il est précisé que les groupements d'intérêt économique sont constitués pour mettre en commun tous les moyens propres à développer, à améliorer, ou accroître l'activité économique de leurs membres. Ils ne peuvent donc être considérés comme des entreprises nouvelles.

L'extension peut également être géographique lorsqu'une entreprise préexistante crée une nouvelle implantation. Il en est ainsi par exemple lorsqu'un commerçant crée un deuxième magasin, lorsqu'une personne crée une entreprise qui conclut un contrat de franchise (franchisé), une concession de licence de marque ou lorsqu'une entreprise étrangère crée un établissement stable en France.

Entreprises qui reprennent une activité préexistante

Le régime des entreprises nouvelles ne peut davantage s'appliquer aux entreprises qui ne font que reprendre une activité sans véritable création originale.

Ces entreprises sont exclues du dispositif quelles que soient les modalités de cette reprise (acquisition, location-gérance ou simple transfert) ou les modifications qui peuvent intervenir dans l'activité initiale (changement de mode d'exploitation ou de l'organisation, transfert géographique ou accroissement du potentiel productif).

b) Un dispositif réservé aux entreprises indépendantes

Le paragraphe II de l'article 44 sexies prévoit que lorsque l'entreprise nouvelle est constituée sous forme de société, son capital ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés.

La détention est indirecte lorsque l'une au moins des conditions suivantes est remplie :


• un associé exerce en droit ou en fait la fonction de gérant ou de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une autre société ;


• un associé détient avec les membres de son foyer fiscal, 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise. La détention des droits sociaux s'entend de la détention des droits à dividendes ou des droits de vote ;


• un associé exerce des fonctions dans une entreprise dont l'activité est similaire ou complémentaire à celle de l'entreprise nouvelle.

3. Un champ d'application géographiquement restreint depuis 1995 mais étendu aux activités non commerciales

La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire n° 95-115 du 4 février 1995 a réservé le bénéfice des dispositions de l'article 44 sexies aux entreprises qui disposent de leur siège social et de l'ensemble de leurs moyens d'exploitation dans trois catégories de zones du territoire :

- les zones d'aménagement du territoire éligibles à la prime d'aménagement du territoire et classées pour les projets industriels ;

- les territoires ruraux de développement prioritaire définis au premier alinéa de l'article 1465 du CGI ;

- les zones de redynamisation urbaine définies au I bis et au I ter de l'article 1466 A du CGI.

En outre, depuis le 1 er janvier 1995, les entreprises situées dans l'un des zones mentionnées ci-dessus qui exercent des activités non commerciales (professions libérales, charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants...) peuvent bénéficier de l'avantage fiscal dès lors qu'elles remplissent les conditions suivantes :

- elles sont soumises à l'impôt sur les sociétés ;

- leur effectif de salariés est égal ou supérieur à trois à la clôture du premier exercice et au cours de chaque exercice de la période d'application des dispositions. Les salariés pris en compte sont ceux qui bénéficient d'un contrat à durée indéterminée ou d'une durée supérieure ou égale à six mois. Si l'effectif varie en cours d'exercice, il est tenu compte de la durée de présence des salariés en cause pendant l'exercice.

Restent toutefois exclues du dispositif les entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles.

Il en est de même des entreprises qui exercent une activité de pêche maritime dans la mesure où l'article 44 nonies prévoit en leur faveur un abattement de 50 % sur les bénéfices réalisés au cours des cinq premières années d'activité.

On notera que la pratique anglo-saxonne du " ruling " (ou rescrit fiscal) qui permet aux entreprises de s'assurer à l'avance de leur régime fiscal, a été transposée dans la législation française par la loi n° 96-314 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du 12 avril 1996. En application de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales modifié par l'article 12 de la loi précitée, les entreprises peuvent désormais interroger l'administration pour savoir si elles sont éligibles au dispositif de l'article 44 sexies . L'absence de réponse de l'administration dans un délai de trois mois vaut accord tacite.

L'application de ce dispositif suppose néanmoins que le contribuable soit de bonne foi et qu'il ait procédé, préalablement à la réalisation de l'opération, à une présentation écrite, précise et complète de la situation de fait.

B. QUELQUES ÉLÉMENTS DE BILAN

Le tableau ci-après retrace la dépense fiscale liée au régime des entreprises nouvelles depuis 1990, date à laquelle il a atteint son plein régime (la dépense fiscale n'était que de 30 millions de francs en 1989) :



On constate que la dépense fiscale a constamment décru depuis 1995, date à laquelle le champ géographique de l'article 44 sexies a été restreint à certaines zones d'aménagement du territoire.

Le tableau ci-après, construit à partir des éléments statistiques de la direction générale des impôts, retrace la répartition des entreprises bénéficiaires de l'article 44 sexies par année de création, jusqu'à l'année 1997 :



On constate que 75.877 entreprises ont bénéficié des dispositions de l'article 44 sexies du CGI en 1997. Elles ont déclaré un bénéfice exonéré de 6.534 millions de francs. Enfin, 78 % d'entre elles étaient soumises à l'impôt sur le revenu et 22 % à l'impôt sur les sociétés.

- 73.000 entreprises (96,18 %) avaient un chiffre d'affaires inférieur à 5 millions de francs et 73.100 (96,3 %) avaient un bénéfice fiscal inférieur à 500.000 francs ; elles déclaraient 83 % du bénéfice exonéré ;

- 39.700 entreprises (52 %) avaient un chiffre d'affaires inférieur à 500.000 francs ; elles déclaraient 30 % du bénéfice exonéré ;

- 33.300 entreprises (44 %) avaient un chiffre d'affaires compris entre 500.000 francs et 5 millions de francs ; elles déclaraient 53 % du bénéfice exonéré.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article propose, d'une part, de reconduire et d'aménager le dispositif d'allégement fiscal en faveur des entreprises nouvelles de l'article 44 sexies qui arrive à échéance le 31 décembre 1999, et, d'autre part, de proroger de cinq ans le dispositif d'amortissement exceptionnel des immeubles à usage industriel ou commercial construits dans les zones de revitalisation rurale ou de redynamisation urbaine, et de supprimer la formalité de l'agrément pour certains secteurs d'activité.

L'Assemblée nationale a en outre élargi le champ des activités éligibles au régime des entreprises nouvelles dans les zones de revitalisation rurale.

A. LA RECONDUCTION ET L'AMÉNAGEMENT DU DISPOSITIF DE L'ARTICLE 44 SEXIES

Outre sa prorogation jusqu'au 31 décembre 2004, le présent article apporte quatre modifications importantes au dispositif de l'article 44 sexies.

1. La restriction des bénéfices pris en compte

a) La doctrine administrative actuelle

L'exonération d'impôt sur les bénéfices prévue par l'article 44 sexies du CGI porte sur les bénéfices réalisés jusqu'au terme du 23 ème mois suivant celui de la création de l'entreprise nouvelle et déclarés par elle.

S'appuyant sur le terme " réalisés ", l'administration a cru pouvoir soutenir 10( * ) à partir de la distinction entre bénéfice réalisés et bénéfices constatés que le régime de l'article 44 sexies ne s'appliquait pas aux plus-values constatées à l'occasion d'une réévaluation libre des biens.

Une réévaluation libre consiste en un simple ajustement entre la valeur comptable des biens d'une entreprise et leur valeur réelle au moment de la réévaluation. La plus-value correspond au bénéfice net constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt, diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées.

Toutefois, l'administration considère que les plus-values réalisées sur éléments d'actif immobilisé peuvent, au contraire, bénéficier des allégements prévus à l'article 44 sexies .

b) La position de la jurisprudence

Cette interprétation a été contredite par un jugement de la Cour administrative d'appel de Nantes du 2 octobre 1998 ( SA RMC Découpage ) qui a considéré que, dès lors que la plus-value résultant de la réévaluation libre d'immobilisations est assujettie à l'impôt en application des dispositions de l'article 38-2 du CGI, dans la mesure où elle accroît la valeur de l'actif immobilisé, elle fait partie, en l'absence de toute intention contraire du législateur, des bénéfices réalisés par l'entreprise au sens de l'article 44 quater du CGI et est donc susceptible d'être exonérée en application de cet article.

La Cour a en effet considéré que la rédaction de l'article 44 quater 11( * ) ne permettait pas d'opposer en l'espèce les notions de bénéfices réalisés et de bénéfices constatés. Dès lors que l'intention du législateur était d'alléger les charges fiscales des entreprises nouvelles du secteur industriel ou commercial, il lui a semblé que rien ne permettait d'exclure de l'exonération une partie des bénéfices déclarés par l'entreprise.

Dans la mesure où la Cour administrative d'appel de Nantes s'est prononcée sur la base des dispositions de l'article 44 quater du CGI dont les dispositions ont inspiré celles de l'article 44 sexies , on peut considérer que son interprétation s'applique à l'article 44 sexies .

c) Les dispositions du présent article

Le a du 1° du A du présent article propose d'exclure explicitement des bénéfices susceptibles d'être exonérés en vertu de l'article 44 sexies les plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif.

En votant cette disposition, le Parlement validerait donc la doctrine actuelle de l'administration.

2. L'assouplissement de la condition de détention indirecte

On rappelle qu'en vertu du paragraphe II de l'article 44 sexies , les entreprises nouvelles constituées sous forme de société dont le capital est détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés ne sont pas éligibles au bénéfice de l'exonération puis de l'allégement d'impôt.

Sont considérées comme détenues indirectement les sociétés dont :


• un associé exerce en droit ou en fait la fonction de gérant ou de président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une autre société ;


• un associé détient avec les membres de son foyer fiscal, 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise ;


• un associé exerce des fonctions dans une entreprise dont l'activité est similaire ou complémentaire à celle de l'entreprise nouvelle.

Le présent article propose une nouvelle rédaction du II de l'article 44 sexies . En premier lieu, il substitue à la notion de " société nouvelle " dont on a vu qu'elle était source d'un contentieux très fourni celle de " société nouvellement créée " sans que cette nouvelle dénomination modifie pour autant le champ d'application de l'article 44 sexies .

En second lieu, la première et la dernière condition mentionnées ci-dessus sont réunies dans une seule : désormais, c'est l'exercice par un associé de fonctions de direction ou d'encadrement dans une entreprise dont l'activité est similaire ou complémentaire à celle de l'entreprise nouvelle qui rendra celle-ci inéligible au bénéfice de l'article 44 sexies .

L'exercice d'activités subalternes dans une autre entreprise aux activités similaires ne sera plus un facteur disqualifiant, de même que l'exercice de fonctions de direction dans une entreprise située dans une autre sphère d'activité.

Le même croisement de critères est proposé pour la deuxième condition : la société n'est inéligible au régime de l'article 44 sexies que si un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des droits sociaux dans une entreprise dont l'activité est similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire .

Un tel assouplissement est bienvenu. En effet, le fait que la détention par l'un des associés d'une participation de 25 % dans une autre entreprise disqualifie la société au regard du régime des entreprises nouvelles pouvait sembler excessivement rigoureux car interdisant tout investissement de nature patrimoniale dans une entreprise dans un secteur d'activité différent.

L'instruction 4 A-5-89 précitée ne considère pas les membres du conseil de surveillance et du conseil d'administration comme exerçant des fonctions, sous réserve, bien entendu, des administrateurs titulaires d'un contrat de travail. Dès lors, les droits de vote d'une entreprise nouvelle appartenant à une personne qui a la qualité d'administrateur d'une autre société, sans exercer en droit ou en fait de fonctions dans celle-ci, ne doivent pas être considérés comme indirectement détenus par cette autre société.

Le caractère similaire ou complémentaire de deux activités est une question de fait.

La similitude des activités s'apprécie en fonction de la nature des opérations effectuées et des produits fabriqués, même s'ils le sont sous des marques différentes, avec des réseaux commerciaux différents ou selon des modalités différentes.

Les activités sont complémentaires lorsqu'elles participent à une même chaîne d'activités quel que soit le lieu d'intervention de l'entreprise nouvelle dans cette chaîne (avant ou après l'intervention de l'entreprise dont l'activité est complémentaire).

Il en est ainsi par exemple de la fabrication de produits distribués par une autre entreprise ou de la fabrication de pièces simples qui s'intègrent dans un produit élaboré.

3. La définition de la notion d' " extension d'activité préexistante "

a) La doctrine administrative

Comme il a été vu plus haut, l'article 44 sexies exclut du bénéfice de l'avantage fiscal les entreprises créées dans le cadre de l'extension d'une activité préexistante. Dès l'entrée en vigueur de ce texte, l'administration a entendu interpréter de la manière la plus large la notion d'extension d'activités qui n'était pas visée par les dispositifs législatifs antérieurs.

Dans l'instruction 4 A-5-89 du 25 avril 1989 précitée qui commentait les dispositions instituant l'article 44 sexies , l'administration fiscale a ainsi précisé que l'extension d'une activité préexistante se caractérisait par la réunion de deux conditions :

- l'existence d'une communauté d'intérêts entre l'entreprise créée et une entreprise préexistante. Cette communauté d'intérêts peut résulter de liens personnels (identité d'exploitant en droit ou en fait), ou de liens financiers ou commerciaux caractérisant une dépendance ;

- l'activité de l'entreprise créée prolonge celle de l'entreprise préexistante.

On a vu plus haut (voir encadré supra) que l'instruction 4 A-5-89 évoquait un certain nombre d'exemples permettant d'illustrer l'existence de liens personnels, financiers ou commerciaux impliquant une communauté d'intérêts.

Dans une seconde instruction (4 A-7-92) parue le 21 février 1992, l'administration a complété son interprétation de la façon suivante :

" L'extension d'activités ne dépend pas de la qualification juridique du contrat mais de la situation de fait qui lie les parties à ce contrat (...).

Il est donc considéré que l'extension d'activités est caractérisée non seulement pour les contrats de franchise ou de concession de licence de marque mais également pour d'autres contrats, quelle que soit leur dénomination dès lors que les deux conditions mentionnées ci-dessus sont satisfaites.

Il en est ainsi par exemple des contrats de coopération, de distribution exclusive ou d'affiliation à des réseaux qui fournissent soit une enseigne, soit un accès à certains fournisseurs ou à un réseau informatique, soit certaines prestations comme l'agencement de magasins, la formation ou une publicité.

Il en est de même de certains contrats dits de partenariats ou de correspondants qui permettent, généralement dans une zone d'activité déterminée, de faire bénéficier le nouveau partenaire de l'expérience, du savoir faire ainsi que des moyens informatiques, techniques et promotionnels d'une entreprise préexistante ".


La position de l'administration a suscité un abondant contentieux, compte tenu, notamment, du développement des créations d'entreprises réalisées dans le cadre de contrats de partenariat ou de distribution.

b) La position de la jurisprudence

Deux arrêts récents (8 septembre 1999) du Conseil d'Etat sont venus clarifier la portée de la notion d'extension d'activité préexistante.

Invité à se prononcer sur la légalité des instructions administratives précitées, le Conseil d'Etat a considéré dans l'arrêt Pelfrene (n° 196426) qu' " en excluant du champ d'application de l'exonération instituée par l'article 44 sexies du code général des impôts, les entreprises créées dans le cadre d'une extension d'activités préexistantes, le législateur n'a entendu refuser le bénéfice de cet avantage fiscal qu'aux entreprises qui, eu égard à la similarité ou à la complémentarité de leur objet par rapport à celui d'entreprises antérieurement créées et aux liens de dépendance qui les unissent à ces dernières, sont privées de toute autonomie réelle et constituent de simples émanations de ces entreprises préexistantes ".

Le Conseil d'Etat a jugé que l'instruction 4 A-5-89 du 25 avril 1989 se bornait, sans énoncer de règles prescriptives, à envisager des solutions susceptibles de présenter le caractère d'une extension d'activité préexistante.

En revanche, le Conseil d'Etat a estimé qu'en posant le principe d'une exclusion générale du bénéfice de l'exonération des entreprises nouvelles qui ont conclu un contrat de distribution, notamment de franchise ou de concession, ou plus largement un contrat de partenariat, nommé ou innommé, les 5 ème , 6 ème et 7 ème alinéas de l'instruction 4 A-7-92 du 21 février 1992 " ne se bornaient pas à interpréter la loi mais y ajoutaient des conditions n'entrant pas dans ses prévisions , que les auteurs de l'instruction n'étaient donc pas compétents pour édicter ".

Dans un second arrêt ( Société Auriane , n° 170978), le Conseil d'Etat a admis au bénéfice de l'exonération une boulangerie-pâtisserie nouvellement créée dans le cadre d'un contrat de partenariat alors même que celle-ci était placée dans une situation de dépendance à l'égard de son partenaire qui intervenait notamment dans la fixation de ses prix, l'agencement de sa boutique, la formation de son personnel et l'assistance technique et commerciale. Il a en effet considéré :

- qu'en dépit des relations d'intérêt étroites qui unissent les deux sociétés, l'entreprise exerce une activité distincte de celle du fournisseur dont elle ne constitue pas un simple point de vente ;

- qu'elle ne s'approvisionne pas exclusivement auprès de ce fournisseur ;

- enfin, qu'elle élabore elle-même la totalité des produits vendus, dont une partie adaptée aux goûts et coutumes de la clientèle locale, dépend de son seul savoir-faire.

Il ressort de ces deux arrêts que pour pouvoir déterminer si une entreprise nouvelle constitue ou non l'extension d'un activité préexistante, il convient d'apprécier l'autonomie réelle dont dispose l'entreprise nouvellement créée par rapport à une entreprise existante, quand bien même les deux entreprises seraient liées par contrat .

Le Conseil d'Etat a ainsi confirmé la solution déjà retenue par les juges du fond à propos de contrats de franchise, d'affiliation ou de parrainage. Les tribunaux administratifs et cours administratives d'appel se prononcent généralement sur l'existence d'une extension d'activités préexistantes en appréciant le degré d'autonomie du franchisé à l'égard du franchiseur. A cet effet, ils procèdent à un examen circonstancié des stipulations du contrat et analysent in concreto les conditions d'exercice de l'activité du franchisé.

La Cour d'appel de Nantes a ainsi qualifié d'extension d'activité l'entreprise créée par le franchisé dont le contrat révèle, notamment en raison d'une clause d'approvisionnement exclusif auprès du franchiseur et de la définition par celui-ci de la politique de prix et de publicité, une situation de dépendance étroite (CAA Nantes 27 mai 1997, n° 94-800, SA Rosaro ).

De même, le tribunal administratif de Rennes a estimé que l'étendue des liens entretenus entre un supermarché et une centrale d'achats caractérisait une communauté d'intérêts et une situation de dépendance étroite résultant des obligations d'approvisionnement mais aussi du respect d'une politique promotionnelle et d'objectifs commerciaux et financiers (TA Rennes 19 mars 1999, n° 97-1020).

Le même tribunal a, au contraire, qualifié d'entreprise nouvelle le franchisé qui a développé sa propre clientèle par ses propres moyens, malgré l'existence de liens avec la société dont il utilise l'enseigne (TA Rennes 23 avril 1998, n° 96-117).

De même, la Cour administrative d'appel de Bordeaux a conclu au caractère nouveau d'une entreprise qui, bien qu'affiliée à un réseau de supermarchés lui fournissant l'enseigne et certaines prestations techniques et publicitaires, n'avait repris aucun fonds de commerce existant et avait au contraire constitué par elle-même une clientèle (CAA Bordeaux 4 mars 1997, n° 95-562).

c) La consécration de la jurisprudence

Pour tenir compte des évolutions récentes de la jurisprudence, le 3° du A du I du présent article vise à compléter le texte de l'article 44 sexies par l'alinéa suivant :

" L'existence d'un contrat, quelle qu'en soit la dénomination, ayant pour objet d'organiser un partenariat, caractérise l'extension d'une activité préexistante lorsque l'entreprise nouvellement créée bénéficie de l'assistance de ce partenaire, notamment en matière d'utilisation d'une enseigne, d'un nom commercial, d'une marque ou d'un savoir-faire, de conditions d'approvisionnement, de modalités de gestion administrative, contentieuse, commerciale ou technique, dans des conditions telles que cette entreprise est placée dans une situation de dépendance ".

En vertu de ce nouvel alinéa, une entreprise nouvelle ne peut être considérée comme la prolongation d'une entreprise déjà existante que lorsque le contrat qui les unit prévoit des clauses telles que l'entreprise nouvelle est placée dans une situation de dépendance à l'égard de l'entreprise existante.

Il convient toutefois de noter que l'existence d'un contrat unissant l'entreprise nouvelle à une entreprise préexistante sera désormais nécessaire pour déterminer l'existence d'une extension d'activité. Une telle disposition restreint donc la portée de la doctrine administrative exprimée dans l'instruction du 25 avril 1989 précitée, validée on l'a vu par le juge administratif, selon laquelle la communauté d'intérêt entre l'entreprise créée et l'entreprise préexistante peut résulter, non seulement de liens personnels entre les exploitants, mais également de liens financiers ou commerciaux caractérisant une dépendance.

4. Le plafonnement des bénéfices susceptibles d'être exonérés

Afin de conformer le dispositif de l'article 44 sexies avec la réglementation communautaire, le présent article propose de plafonner à 75.000 euros par période de douze mois (soit 491.967 francs par an) le bénéfice susceptible d'être exonéré en vertu de l'article 44 sexies . Cette disposition prendrait effet pour les entreprises créées à compter du 1 er janvier 2000. Le plafond s'appliquerait au bénéfice effectivement exonéré, soit la totalité pendant les deux premières périodes de douze mois qui suivent la création, puis 75 %, 50 % puis 25 % du bénéfice réalisé au cours des trois années suivantes.

Jusqu'à présent, aucun plafonnement n'intervenait à la différence de l'article 44 octies qui, pour les entreprises installées ou créées dans les zones franches urbaines issues de la loi portant pacte de relance pour la ville du 14 novembre 1996, plafonne le bénéfice susceptible d'être exonéré à 400.000 francs par période de douze mois.

On rappelle qu'en vertu d'une communication relative aux aides de minimis n° 96/C 68/06 du 12 janvier 1996, la commission européenne considère que dans une limite de 100.000 écus sur une période de trois ans, les États membres peuvent octroyer des aides sans avoir à les notifier préalablement à la Commission et sans tomber sous le coup de l'article 92 paragraphe 1 du Traité. La Commission considère en effet que compte tenu de leur montant limité, ces aides ne risquent pas de fausser la concurrence et les échanges ente les États membres de façon perceptible.

Le présent article propose ainsi de plafonner le bénéfice susceptible d'être exonéré à 75.000 euros par période de douze mois, soit 225.000 euros sur une période de trois ans, ce qui correspond à un peu plus de 82.000 euros d'impôt évité (225.000 x 36,66 % = 82.350). Ce montant est inférieur aux 100.000 euros autorisés afin de tenir compte des exonérations de fiscalité locale susceptibles d'être accordées par les collectivités locales en complément de l'allégement d'impôt sur les bénéfices, ainsi que des éventuelles subventions comme la prime à l'aménagement du territoire.

Par un courrier du 14 octobre 1999, la Commission européenne a pris acte de la reconduction du régime d'exonération des entreprises nouvelles, dans le respect des conditions de minimis .

Comme on l'a vu plus haut, ce plafonnement aurait un impact limité puisque plus de 96 % des entreprises ont un bénéfice fiscal avant exonération inférieur à 500.000 francs (76.220 euros).

L'Assemblée nationale a modifié le présent article afin de prévoir un plafonnement de 225.000 euros sur trois ans plutôt qu'un plafonnement de 75.000 euros par période de douze mois. Un tel assouplissement permet de prendre en compte le fait que le montant des bénéfices réalisés va croissant avec l'âge des entreprises.

B. LA RECONDUCTION DU RÉGIME D'AMORTISSEMENT EXCEPTIONNEL DES IMMEUBLES

En vertu de l'article 39 quinquies D du CGI, issu de l'article 56 de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire précitée, les entreprises qui construisent ou font construire des immeubles à usage industriel ou commercial pour les besoins de leur exploitation dans les zones de revitalisation rurale (ZRR) ou dans les zones de redynamisation urbaine (ZRU), peuvent pratiquer à l'achèvement des constructions un amortissement exceptionnel égal à 25 % du prix de revient, la valeur résiduelle étant amortissable sur la durée normale d'utilisation.

L'amortissement exceptionnel est réservé aux PME qui, à la date d'achèvement de l'immeuble :

- emploient moins de 250 salariés ;

- réalisent, hors produits exceptionnels, un chiffre d'affaires hors taxes de moins de 140 millions de francs ou dont le total du bilan est inférieur à 70 millions de francs (critères non cumulatifs) ;

- ne sont pas détenues à plus de 25 % par des entreprises ne répondant pas à ces conditions (exception faite des SDR, des sociétés de capital-risque et des sociétés financières d'innovation).

Un agrément préalable du ministre chargé du budget est exigé pour les entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles. Sont présumées telles les entreprises qui retirent de ce type d'activités au moins 50 % de leur chiffre d'affaires au titre du dernier exercice clos à la date d'achèvement de l'immeuble.

Le coût de cette mesure de trésorerie n'est pas chiffré par l'Etat.

Le présent article propose, d'une part, de prolonger ce dispositif pour les immeubles construits avant le 1 er janvier 2005 et, d'autre part, de supprimer la formalité de l'agrément pour les entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles.

C. LES APPORTS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Sur proposition de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à rendre éligible au régime de l'article 44 sexies les personnes situées dans une zone de revitalisation rurale (ZRR) qui donnent en location un établissement commercial ou industriel muni du mobilier nécessaire à son exploitation, que la location comprenne ou non tout ou partie des éléments incorporels du fonds de commerce ou d'industrie.

Les députés ont en effet souhaité aligner le champ des activités qui, situées dans les ZRR, sont éligibles aux dispositions de l'article 44 sexies, sur celui prévu par l'article 44 octies s'agissant des activités implantées dans les zones franches urbaines.

Toutefois, afin de prévenir toute évasion fiscale, les contribuables qui exercent des activités de location d'immeubles ne seraient exonérés qu'à raison des bénéfices provenant des seuls immeubles situés dans une zone de revitalisation rurale.

La commission des finances, qui souhaitait par ailleurs, admettre au bénéfice de l'exonération d'impôt prévue par l'article 44 sexies les titulaires de bénéfices non commerciaux situés dans les zones de revitalisation rurale, sans condition d'effectifs et quel que soit leur régime fiscal, a retiré son amendement à la demande du Gouvernement et malgré l'unanimité qu'avait recueilli cet amendement en son sein. Cette disposition si elle avait été adoptée aurait aligné le champ des activités éligibles à l'avantage fiscal prévu par l'article 44 sexies au profit des entreprises nouvelles situées dans les ZRR sur celui prévu par l'article 44 octies pour les activités implantées dans les zones franches urbaines.

Enfin, comme on l'a vu, l'Assemblée nationale a substitué au plafonnement de 75.000 euros par période de douze mois un plafonnement de 225.000 euros sur trois ans.

III. APPRÉCIATION DE VOTRE COMMISSION

A. UN MANQUE DE COHÉRENCE AVEC LES AUTRES INSTRUMENTS DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE


Votre commission ne peut qu'approuver la reconduction du régime d'exonération des bénéfices des entreprises nouvelles et du dispositif d'amortissement exceptionnel des immeubles construits dans les ZRR et dans les ZRU jusqu'au 31 décembre 2004. Il lui semble en effet naturel d'accompagner les jeunes entreprises dans les premières années de leur vie, période au cours de laquelle la moitié d'entre elles court le risque de disparaître. Quant à la mesure d'amortissement exceptionnel, elle ne constitue qu'un avantage de trésorerie.

Toutefois, par cohérence avec l'échéance de la programmation européenne des fonds structurels et des contrats de plan Etat-Régions et dans le prolongement des propositions formulées par la commission spéciale du Sénat sur le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire devenu la loi n° 99-533 du 25 juin 1999, elle vous proposera de proroger ces dispositifs jusqu'au 31 décembre 2006 .

On notera au passage qu'à l'époque où M. Gérard Larcher avait, au nom de la commission spéciale précitée, proposé de proroger le dispositif de l'article 44 sexies du CGI jusqu'au 31 décembre 2006, le ministre de l'aménagement et du développement du territoire lui avait répondu :

" Je crois indispensable de mettre à profit l'année 1999 pour faire (...) le bilan de l'application de ce dispositif dans chaque type de zone, pour réfléchir aux aménagements nécessaires, plutôt que de proroger dans la précipitation un dispositif qui doit être repensé dans sa globalité ".

Le Sénat a-t-il donc eu le tort, une fois de plus, d'avoir raison trop tôt ?

B. UNE RESTRICTION INOPPORTUNE DES BÉNÉFICES EXONÉRÉS

Le présent article règle quelques unes des difficultés d'application de l'article 44 sexies révélées par plus de dix années de pratique. Toutefois, si votre commission approuve les assouplissements proposés ainsi que le plafonnement du bénéfice susceptible d'être exonéré, elle ne peut valider la doctrine administrative s'agissant des plus-values de réévaluation libre d'actifs .

Comme l'a rappelé la Cour administrative de Nantes dans l'arrêt RMC Découpage précité, une telle doctrine n'est pas conforme à la volonté initiale du législateur. En outre, elle oblige les entreprises désirant bénéficier du régime de l'article 44 sexies à distinguer au sein de leurs résultats, les bénéfices réalisés et les bénéfices constatés lors de la réévaluation de leurs actifs.

Par souci de simplification et pour encourager les entreprises à présenter un bilan le plus proche de la réalité, votre commission vous proposera donc de supprimer la disposition tendant à exclure des bénéfices susceptibles d'être exonérés les plus-values de réévaluation libre d'actifs.

C. UN CHAMP D'APPLICATION DU RÉGIME DES ENTREPRISES NOUVELLES ENCORE TROP ÉTROIT

Sont exclues du champ d'application de l'article 44 sexies les entreprises qui exercent des activités bancaires, financières, d'assurance ou de location d'immeubles, à l'exception pour ce dernier secteur d'activité en vertu d'un amendement de l'Assemblée nationale, des entreprises situées en zone de revitalisation rurale.

Rien ne justifie une telle exclusion dès lors que les entreprises en question sont réellement nouvelles et créent des emplois.

On notera au demeurant que le gouvernement propose, par l'article 10 du présent projet de loi, d'étendre la possibilité d'émettre des bons de souscription de parts de créateurs d'entreprise (BSPCE) à toutes les sociétés de moins de quinze ans, quel que soit leur secteur d'activité. Les sociétés qui exercent des activités bancaires, financières, d'assurance ou de location d'immeubles pourraient donc, si l'article 10 était adopté, attribuer des BSPCE aux membres de leur personnel salarié ainsi qu'à leurs dirigeants.

On ne voit pas pourquoi la volonté d'encourager la création d'entreprises qui présidait à l'article 10 ne s'appliquerait pas dans le cas de l'article 44 sexies .

En outre, l'inclusion des activités bancaires, financières ou de location d'immeubles dans le champ des activités éligibles permettrait de mettre fin à un certain nombre de problèmes d'application de l'article 44 sexies s'agissant du caractère exclusif de l'activité nouvelle .

En effet, en vertu de la doctrine administrative, l'entreprise nouvelle ne doit exercer aucune des activités qui sont exclues du champ d'application du dispositif, même si ces activités sont exercées à titre accessoire ou si elles sont taxées dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en application de l'article 155 du code général des impôts.

En pratique, trois situations peuvent, le cas échéant, poser problème : la location d'immeubles, les bénéfices industriels et commerciaux par attraction, et enfin, la perception de produits financiers.

La location d'immeubles, même accessoire à une activité industrielle et commerciale principale, ne peut permettre de bénéficier des dispositions de l'article 44 sexies . Les entreprises susceptibles de bénéficier de l'exonération ne peuvent donc pas détenir ni, par suite, inscrire à leur bilan des biens qui ne sont pas nécessaires à l'exercice de l'activité éligible (immeuble à usage locatif ou agricole par exemple).

Mais les problèmes posés par la perception par une entreprise nouvelle de produits financiers sont de loin les plus complexes à gérer en pratique. En effet, la perception de produits financiers ou de produits de participation est considérée par l'administration comme l'exercice d'une activité financière non éligible sauf si le montant des produits financiers acquis par l'entreprise n'excède pas la gestion de la trésorerie nécessaire à l'exercice de son activité. A titre de règle pratique cette condition est présumée satisfaite lorsque le montant de ces produits n'excède pas le montant des frais financiers au cours du même exercice.

L'amendement proposé par votre commission contribuerait donc à une meilleure lisibilité du dispositif en supprimant ces problèmes d'interprétation et réduirait de façon très conséquente le montant des contentieux en cours entre l'administration et les contribuables.

Enfin, son coût serait limité au regard de l'économie engendrée par la restriction du champ géographique de l'article 44 sexies depuis 1995.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 58

Remboursement immédiat de la créance née de la possibilité d'imputer le déficit d'un exercice sur les bénéfices des trois années précédentes

Commentaire : le présent article additionnel vise à permettre le remboursement des créances nées du report en arrière des déficits (carry-back) l'année qui suit la clôture de l'exercice au cours duquel l'option pour une telle faculté a été exercée.

Lorsque les résultats d'un exercice sont déficitaires, alors que ceux des exercices antérieurs ont été bénéficiaires, les sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés ont, depuis 1985, la possibilité d'imputer le déficit sur les bénéfices des trois exercices précédents (article 220 quinquies du code général des impôts). Ce système étant facultatif, les entreprises qui n'y ont pas recours peuvent, bien entendu, reporter leurs déficits sur leurs exercices ultérieurs, selon les règles de droit commun.

Cette rétro-imputation est la transposition en France du système du carry-back que pratiquent déjà un certain nombre de grands Etats industriels.

A l'étranger, le Trésor rembourse aussitôt l'impôt antérieurement payé, ce qui constitue un " ballon d'oxygène " apprécié à un moment où l'entreprise connaît des difficultés financières. Le régime français est moins favorable puisqu'il aboutit seulement à la constatation d'une créance fiscale sur le Trésor correspondant à l'excédent d'impôt antérieurement versé et remboursable au terme d'un délai de cinq ans si elle n'est pas utilisée dans l'intervalle au paiement de l'impôt. Cette créance peut théoriquement être cédée à titre de garantie à un établissement de crédit selon la procédure de la " loi Dailly ", mais en pratique, cette mobilisation n'est quasiment jamais opérée.

Le présent article additionnel vise à permettre aux entreprises de se voir rembourser la créance née du report en arrière du déficit l'année qui suit l'exercice au cours duquel elle a opté pour le régime de l'article 220 quinquies du CGI.

Elle permettrait de préserver la situation des entreprises qui ont d'importants besoins de trésorerie parce que leur conjoncture s'est brutalement retournée et qu'apparaissent des restructurations ou redéploiements à financer durant cette période difficile.

Le stock actuel de créances est évalué à environ 150 millions de francs .

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 58

Assouplissement des conditions donnant droit au régime fiscal des plus-values latentes sur parts ou actions d'OPCVM détenues par les sociétés

Commentaire : le présent article additionnel vise à assouplir une des conditions qui déterminent la nature des OPCVM-actions au sens de l'article 209-0 A du code général des impôts. Un tel assouplissement permettrait de faire bénéficier les sociétés qui détiennent des titres d'OPCVM dont l'actif est constitué d'actions de sociétés situées dans des Etats membres de l'Union européenne qui ne disposent pas d'un crédit d'impôt similaire à l'avoir fiscal, de l'exonération d'impôt sur les plus-values latentes prévue par l'article 209-0 A précité.

Par principe, les gains financiers issus des placements en titres d'organismes de placements collectifs en valeurs mobilières (OPCVM) ne sont imposables que lors de la cession des titres.

Toutefois, depuis la loi de finances pour 1993, et en vertu de l'article 209-0 A du code général des impôts, les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés sont imposables chaque année au titre des plus-values latentes constatées en fin d'exercice sur les titres d'OPCVM qu'elles détiennent en France ou à l'étranger.

Toutefois, afin ne pas remettre en cause les efforts visant à renforcer les fonds propres des entreprises, ces dispositions ne sont pas applicables aux entreprises qui détiennent des titres logés dans des OPCVM-actions, c'est-à-dire dans des OPCVM dont l'actif est essentiellement composé d'actions. Ces OPCVM doivent alors remplir simultanément les deux conditions suivantes :

- leur actif est composé pour 90 % au moins d'actions, de certificats d'investissement ou de certificats coopératifs d'investissement émis par des sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun (ou à un impôt comparable) et ayant leur siège dans l'Union européenne ;

- les titres dont la valeur est retenue pour la proportion de 90 % mentionnée ci-dessus sont rémunérés par des dividendes qui ouvrent droit à un avoir fiscal.

Ces deux conditions visent à exclure les montages qui reviendraient à transformer des produits d'actions en revenus de taux. La condition qui impose que les dividendes des actions figurant dans l'actif des OPCVM exonérés ouvrent droit à l'avoir fiscal vise ainsi à éviter que les actions logées dans l'OPCVM recouvrent en réalité d'autres sociétés de capitalisation ayant un actif composé de produits de taux.

Toutefois, cette condition apparaît démesurément restrictive puisqu'elle prive du bénéfice de l'exemption d'impôt les OPCVM dont l'actif est constitué d'actions de sociétés situées dans des Etats membres de l'Union européenne qui n'ont pas institué un crédit d'impôt équivalent à l'avoir fiscal ce qui est le cas de la plupart des pays européens. Une telle restriction est donc susceptible de fausser la concurrence au sein de l'Union.

Il apparaît donc opportun de la supprimer. C'est ce que propose le présent article additionnel.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 58

Assouplissement du régime des reports d'imposition des plus-values issues de l'apport d'éléments d'actif amortissables

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet d'assouplir les sanctions pénalisant les contribuables qui ont omis de joindre à leur déclaration un état des plus-values en report d'imposition.

Pour favoriser la mise en société des exploitations individuelles de toute nature, l'article 151 octies du code général des impôts autorise le report d'imposition des plus-values dégagées par l'apport à une société des éléments d'actifs non amortissables , si le bénéficiaire s'engage à acquitter l'impôt correspondant au moment où il cédera ses droits sociaux.

Il en est de même, sous certaines conditions, pour les plus-values résultant de l'échange de titres à la suite d'une offre publique d'échange (article 38-7 du code précité), d'une fusion (article 210 A), d'un apport partiel d'actifs ou d'une scission (article 210 B) ou d'un apport à une société relevant de l'impôt sur les sociétés (article 210 D).

Toutefois, en vertu de l'article 54 septies du code précité, le régime de faveur est subordonné à l'obligation pour le contribuable de joindre à sa déclaration un état de suivi des plus-values dont l'imposition est ainsi reportée et de tenir un registre des profits en sursis d'imposition.

Si le contribuable omet de joindre à sa déclaration l'état de suivi des plus-values, les plus-values en report sont immédiatement taxées , ce qui est manifestement disproportionné pour une omission qui traduit plus une négligence qu'une volonté de fraude.

Le présent article additionnel vise à atténuer la rigueur de la sanction en prévoyant que le report d'imposition n'est remis en cause que si l'état manquant ou les renseignements transmis ne sont pas produits dans les trente jours d'une mise en demeure.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 59

Suppression de la production d'un certificat pour bénéficier de la réduction d'impôt pour frais de scolarité

Commentaire : le présent article tend à supprimer l'obligation de production d'un certificat de scolarité jusqu'alors requise pour bénéficier de la réduction d'impôt pour frais de scolarité.

I. L'ÉTAT DU DROIT


L'article 199 quater F du code général des impôts prévoit un dispositif de réduction d'impôt en faveur des contribuables qui ont un ou plusieurs enfants à charge poursuivant des études secondaires ou supérieures.

L'octroi de cette réduction d'impôt est subordonné à un certain nombre de conditions de fond (niveau de l'enseignement suivi par l'enfant, appartenance de ce dernier au foyer fiscal des parents, etc.) qu'en aucun cas le présent article ne vise à modifier .

En dehors de ces conditions de fond, les contribuables sont soumis à un certain nombre d'obligations déclaratives au nombre desquelles on trouve la production d'un certificat de scolarité attestant que l'enfant fréquente un lycée ou un établissement d'enseignement supérieur.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article vise à supprimer l'obligation de production d'un certificat de scolarité.

Cette obligation serait remplacée par l'obligation de mentionner précisément sur la déclaration annuelle de revenus les établissements d'enseignement fréquentés par les enfants ouvrant droit à réduction d'impôt.

Pour mémoire, on rappellera que l'article 2 de la loi de finances pour 1999 a déjà supprimé cette obligation concernant les enfants fréquentant un collège.

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