EXAMEN EN COMMISSION

Au cours réunion tenue dans l'après-midi du jeudi 21 octobre, sous la présidence de M. Alain Lambert, la commission a procédé à l'examen des crédits du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie : II - Enseignement supérieur, sur le rapport de M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a déclaré que le projet de budget de l'enseignement supérieur pour 2000 s'élevait à 52.462,9 millions de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une progression de 2,63 % par rapport à 1999. Il a observé que la croissance du budget de l'enseignement supérieur était moindre qu'en 1999, mais supérieure à celle de l'ensemble des budgets civils de l'Etat (0,9 %).

Il a fait remarquer que l'agrégat " action sociale " connaissait une nette progression, ses crédits étant portés à 9.614 millions de francs, ce qui correspond à une croissance de 8 % par rapport à l'an dernier.

Il a indiqué que cette progression résultait essentiellement de la mise en place du plan social étudiant.

Puis, il a évoqué les priorités du budget de l'enseignement supérieur.

Il a d'abord cité la poursuite de la mise en oeuvre du plan social étudiant, rappelant que l'objectif de ce plan était d'augmenter les aides directes pour accorder un soutien à 30 % des étudiants, sur les 1,7 million d'étudiants dépendant du ministère chargé de l'enseignement supérieur, et d'augmenter de 15 % le niveau moyen des aides.

Il a indiqué que le projet de loi de finances pour 2000 prévoyait 677 millions de francs supplémentaires sur le chapitre des bourses, afin de financer une hausse des taux des différentes aides et l'augmentation du nombre d'étudiants aidés.

Il a observé que la participation des étudiants au processus de décision et d'exercice de la citoyenneté était encouragée, et que l'amélioration des conditions de vie des étudiants était poursuivie, grâce à l'augmentation des moyens attribués aux oeuvres universitaires.

Il a jugé positives les mesures prises dans le cadre du plan social étudiant.

Puis il a évoqué le plan Université du troisième millénaire (U3M).

Il a observé qu'il était encore trop tôt pour connaître le détail de la répartition des fonds de la première tranche du plan U3M, les discussions s'effectuant dans le cadre des contrats de plan Etat-Régions n'étant pas achevées.

Il a indiqué que l'ensemble du plan U3M représentait plus de 38 milliards de francs en autorisations de programme, le reste demeurant à la charge des collectivités locales.

Par ailleurs, il a jugé contestable l'augmentation des moyens de fonctionnement du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Il a déclaré que 800 créations d'emplois enseignants étaient prévues ainsi que 400 emplois d'enseignants-chercheurs, et 500 emplois d'ingénieurs-personnels administratifs-techniques-ouvriers de services (IATOS).

Il a regretté le manque de lisibilité des informations gouvernementales au sujet des créations d'emplois et a rappelé avoir fait le même constat l'année dernière.

Puis il a souhaité formuler quelques observations.

Il a estimé que la maîtrise globale de la croissance des dépenses de fonctionnement était un impératif majeur qui s'impose à tous les budgets, y compris à celui de l'enseignement supérieur, et a regretté l'augmentation des dépenses ordinaires. Il s'est interrogé sur la pertinence de la création d'emplois, dans un contexte marqué par un reflux du nombre d'étudiants.

Il a regretté l'absence d'une politique globale de redéploiement des crédits qui permettrait de réformer l'enseignement supérieur à moyens constants.

Il a relevé les ambiguïtés et les retards qui affectent les réformes menées dans l'enseignement supérieur.

Il a relevé que le système d'orientation-réorientation ne fonctionnait pas de façon satisfaisante, de même que le tutorat dont le bilan apparaît également mitigé.

Il a insisté sur la nécessaire adaptation de l'enseignement supérieur au contexte européen et a souhaité voir se développer le nouveau grade à bac + 5, le " mastaire ".

Puis il a évoqué la restructuration du campus de Jussieu. Il a regretté la complexité du processus, et a exprimé le souhait de disposer d'informations plus précises à ce sujet.

Il a observé que les délais seraient probablement plus longs que ceux qui avaient été initialement prévus.

Il a estimé positive l'orientation prise par le plan social étudiant. Il a rappelé que M. Bernard Cieutat, dans un rapport sur l'effort de la Nation en direction des étudiants, s'était prononcé contre la création d'un statut de l'étudiant, préconisant d'augmenter plutôt les aides directes et indirectes aux étudiants en faveur des bourses, de l'hébergement, de la restauration ou encore du transport des étudiants.

Enfin, le rapporteur spécial a relevé le caractère inégal de l'effort financier en faveur des bibliothèques universitaires dans le projet de loi de finances pour 2000.

Il a rappelé que dans un rapport d'information sur les bibliothèques universitaires (" Bibliothèques universitaires : le temps des mutations ", Sénat, n° 59, session 1998-1999), il avait insisté sur la nécessité de poursuivre un effort soutenu afin d'améliorer les conditions d'accueil des bibliothèques universitaires.

Il a déclaré que le projet de budget pour 2000 prenait effectivement en compte la nécessaire amélioration de l'équipement des bibliothèques universitaires, en majorant de 15 millions de francs leurs moyens de fonctionnement, mais que l'effort en matière de personnels connaissait un net ralentissement, avec seulement 80 créations d'emplois en faveur des bibliothèques universitaires dans le projet de budget pour 2000, contre 150 l'an dernier. Cette évolution, a-t-il noté, est contraire aux orientations préconisées dans le rapport d'information précité.

Enfin, il a exprimé une inquiétude quant à la part qui serait affectée au financement des extensions et rénovations de bibliothèques dans le cadre du plan U3M.

Un débat s'est alors ouvert auquel ont participé MM. Philippe Marini, rapporteur général, Maurice Blin et Michel Sergent.

Le rapporteur général a souhaité en savoir davantage sur la place occupée par l'enseignement supérieur français en Europe et s'est interrogé sur la pertinence des évaluations disponibles. Il a souligné l'opportunité de développer la circulation des étudiants au sein de l'Europe.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur spécial, a indiqué que la réorganisation des cycles selon le modèle européen était en cours, les résistances de la part des enseignants et des étudiants étant moins vives. Il a approuvé la création du mastaire. Concernant l'évaluation internationale, il a déclaré qu'elle n'était pas vraiment développée. Il a cité le rapport réalisé au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale par M. Alain Claeys portant sur les conditions d'accueil des étudiants étrangers en France, et qui concluait aux insuffisances de notre dispositif actuel (" L'accueil des étudiants étrangers en France : enjeu commercial ou priorité éducative ? ").

M. Maurice Blin a souhaité connaître la part dévolue aux conseils régionaux dans le financement du plan U3M et s'est fait l'écho des revendications des collectivités locales qui souhaiteraient avoir un droit de regard sur les sommes qu'elles dépensent.

Il a souhaité avoir des précisions sur la décrue des effectifs et a soulevé le problème des ATOS.

M. Roland du Luart a partagé le point de vue du rapporteur spécial sur les insuffisances du dispositif d'accueil des étudiants étrangers. Il a observé que l'influence de la langue française était fortement en déclin, et que la venue d'étudiants étrangers, notamment dans les filières du droit, pouvait seule pallier ce phénomène. Enfin, il a regretté que le plan U3M n'intègre pas les créations nouvelles d'universités, estimant que la réfection des établissements existants, programmée dans le plan U3M, relevait plutôt du domaine régalien.

M. François Trucy a observé que les récriminations visant la politique d'attribution des visas étaient nombreuses, en particulier en Afrique.

M. Jean-Philippe Lachenaud a jugé souhaitable la simplification des procédures d'attribution des visas. Il a déclaré que le Plan U3M mettait l'accent sur la restructuration et la mise en sécurité des établissements, ainsi que sur l'amélioration des conditions de vie des étudiants, et non pas sur les créations d'universités. Il a exprimé sa crainte que les négociations avec les régions soient difficiles, compte tenu de leur faible motivation.

Il a indiqué que le nombre d'étudiants s'élevait à 1,507 million en l'an 2000, contre 1,515 l'an dernier. Il a estimé cette diminution non négligeable.

Concernant les ATOS, il a observé qu'un effort important de créations d'emplois avait été réalisé. Il a souhaité que les régions soient davantage associées aux orientations définies par le ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, dans la mesure où elles participent à l'effort financier. Il s'est fait l'avocat d'une procédure contractuelle, qui permettrait aux régions d'orienter le contenu pédagogique et la localisation des universités.

Puis il a proposé le rejet du budget de l'enseignement supérieur, rappelant que l'augmentation proposée des crédits n'allait pas dans le sens d'une rationalisation de la gestion.

Après un bref débat auquel ont participé MM. Philippe Marini, rapporteur général, Michel Sergent et Maurice Blin, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de l'enseignement supérieur.

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