EXAMEN DES ARTICLES

TITRE PREMIER
DE LA PRESTATION COMPENSATOIRE


Article premier A
(art. 272 du code civil)
Critères retenus pour la détermination des besoins
et des ressources des époux

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, tend à compléter les critères indicatifs retenus par le juge pour la détermination des besoins et des ressources des époux permettant de fixer la prestation compensatoire.

Il prend ainsi en compte deux nouveaux critères :

- la situation professionnelle des époux au regard du marché du travail ;

- la durée du mariage.

Apparaissent déjà dans l'article 272 du code civil la qualification professionnelle des époux et leur disponibilité pour de nouveaux emplois . La notion de situation au regard du marché du travail tend à apporter une précision utile eu égard aux situations difficiles auxquelles la crise économique a pu conduire.

Il serait cependant préférable de fusionner tous les critères concernant l'emploi. Votre commission vous proposera de viser la qualification et la situation professionnelles des époux au regard du marché du travail.

Il paraît tout a fait logique, même si elle n'est pas un critère d'attribution à elle seule, que la durée du mariage influe sur le montant de la prestation compensatoire dans la mesure où cette prestation doit indemniser la disparité créée par la rupture même . D'une manière générale, une rupture après une durée de mariage courte aura moins de chance de générer d'importantes disparités.

Votre commission vous proposera cependant de déplacer le critère de la durée du mariage après celui de l'âge et de l'état de santé des époux.

Par ailleurs, il est indiqué dans le même article 272 que le juge doit tenir compte de la perte éventuelle des droits des époux en matière de pension de réversion . Cette rédaction est antérieure à la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 qui a permis au conjoint divorcé non remarié de bénéficier de la pension de réversion. Désormais, le conjoint divorcé peut toucher la pension de réversion. Si le titulaire du droit à pension s'est remarié, le partage de la pension de réversion s'effectuera à son décès entre le conjoint survivant de le conjoint divorcé non remarié au prorata des années de mariage de chacun avec le titulaire décédé.

Votre commission juge donc préférable de viser de manière générale les droits respectifs des époux en matière de retraite.

Votre commission vous proposera un amendement tendant à donner une nouvelle rédaction à cet article afin de prendre en compte les trois modifications présentées ci-dessus.

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier A ainsi rédigé.

Article premier
(art. 273 du code civil)
Principe du versement de la prestation compensatoire en capital

Dans la rédaction du Sénat, cet article assouplissait les conditions de révision de la prestation compensatoire prévues à l'article 273 du code civil .

Tout en gardant le principe du caractère forfaitaire de la prestation compensatoire, le Sénat avait ainsi prévu la possibilité de révision de la prestation en cas de changement substantiel dans les ressources ou les besoins des parties.

Actuellement, l'article 273 du code civil dispose que la prestation compensatoire ne peut être révisée, même en cas de changement imprévu dans les ressources ou les besoins des parties, sauf dans le cas où l'absence de révision aurait pour l'un des conjoints des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

La notion d'exceptionnelle gravité a été interprétée très strictement par la jurisprudence, rendant de ce fait la révision quasiment impossible.

La Cour de cassation a de plus estimé que l'exceptionnelle gravité ne pouvait être examinée qu'à l'égard de la situation de celui qui l'invoque. Un débiteur ne pouvait donc pas se prévaloir de l'amélioration de la situation financière de l'autre conjoint.

La rédaction adoptée par le Sénat permettait au contraire à un époux de se prévaloir de l'amélioration de la situation de l'autre conjoint. L'action en révision étant ouverte aussi bien au créancier qu'au débiteur, le texte adopté ne s'opposait pas à ce que le juge prononce une augmentation de la rente en considération de l'amélioration de la situation du débiteur. Ce n'était cependant pas le but recherché par le Sénat.

L'Assemblée nationale a inscrit à cet article le principe du versement de la prestation compensatoire en capital dont le montant ne serait pas révisable .

Seuls seront possibles des aménagements concernant les modalités de paiement ( voir article premier quater ).

La primauté du capital, souhaitée par le législateur en 1975, est ainsi réaffirmée avec force.

Actuellement, l'article 274 du code civil énonce que la prestation prend la forme d'un capital lorsque la consistance des biens de l'époux débiteur le permet et l'article 276 prévoit l'attribution d'une rente à défaut de capital.

La rente restera néanmoins possible à titre exceptionnelle, mais seulement en considération de la situation du créancier, et non plus de la consistance des biens du débiteur. Son régime sera totalement différent de celui de la prestation en capital ( voir article 2 ).

Sans modifier le fond des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale, votre commission vous proposera un amendement de suppression, dans le texte proposé par cet article pour l'article 273 du code civil , de la seconde phrase prévoyant le principe du versement de la prestation en capital. Cette mention serait reprise à l'article 274 du code civil , de manière à respecter le plus possible l'objet des articles existants (voir article suivant).

Votre commission vous propose d'adopter l'article premier ainsi modifié.

Article additionnel après l'article premier
(art. 274 du code civil)
Principe du versement de la prestation compensatoire en capital

Votre commission vous proposera d'inscrire à l'article 274 du code civil le principe du paiement de la prestation en capital inscrit par l'Assemblée nationale à l'article 273 du code civil (voir article premier).

L'article 274 du code civil , qui prévoit actuellement le paiement en capital de la prestation si la consistance des biens du débiteur le permet, gardera ainsi un objet similaire. Cet article est d'ailleurs visé aux articles 285 et 294 du code civil relatifs aux pensions alimentaires versées respectivement en cas de rupture de la vie commune et de contribution à l'entretien et l'éducation des enfants.

Votre commission vous propose d'adopter un article additionnel après l'article premier .

Article premier bis
(art. 247 du code civil)
Compétence du juge aux affaires familiales pour statuer
sur les demandes de révision de la prestation compensatoire

Cet article, adopté par le Sénat, sur proposition du Gouvernement, avait pour objet de confier au juge aux affaires familiales la compétence pour statuer sur les demandes de révision de la prestation compensatoire, unifiant ainsi la compétence en matière de fixation et de révision de la prestation.

Actuellement, la révision de la prestation compensatoire incombe déjà au juge aux affaires familiales, en application de l'article 1084 du nouveau code de procédure civile , dans les divorces sur requête conjointe, quand la convention comporte une clause prévoyant cette révision en cas de changement imprévu dans les ressources ou les besoins de l'un d'entre eux.

Dans les autres cas de divorce, la révision revient au tribunal d'instance.

L'article 247 du code civil attribuant certaines compétences au juge aux affaires familiales après le prononcé du divorce ne mentionne en effet actuellement que les modalités d'exercice de l'autorité parentale, la modification de la pension alimentaire et la décision de confier l'enfant à un tiers.

Il est précisé que, dans ces cas, le juge est saisi sur simple requête ne nécessitant pas le ministère d'avocat.

En application du texte adopté, le juge aux affaires familiales deviendrait compétent pour tout le contentieux postérieur au divorce sur simple requête.

L'Assemblée nationale a déplacé cette disposition à l'article 2 quater. Elle a donc supprimé le présent article.

Votre commission ne vous demandera pas de rétablir l'article premier bis.

Article premier quater
(art. 276 du code civil)
Modalités de versement du capital

Dans cet article, le Sénat avait, sur proposition du Gouvernement, ouvert la possibilité, au débiteur comme au créancier d'une prestation compensatoire versée sous forme de rente, de demander à tout moment la capitalisation de cette rente.

Il avait à cet effet complété l'article 276 du code civil prévoyant actuellement la possibilité de versement de la prestation compensatoire sous forme de rente, à défaut de capital ou si celui-ci est insuffisant. Cette dernière disposition est désormais incompatible avec la construction adoptée par l'Assemblée nationale.

Le présent article réécrit donc entièrement l'article 276 du code civil , pour y introduire les dispositions relatives aux modalités de paiement du capital , à leur révision et à la transmissibilité de la prestation aux héritiers du débiteur, selon le schéma suivant :

- lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser le capital en une fois, le juge peut autoriser le paiement du capital sur huit années maximum par des versements mensuels ou annuels indexés comme en matière de pension alimentaire ;

- à la mort de l'époux débiteur, les héritiers doivent assumer le paiement de la charge du solde du capital ;

- le montant du capital n'est pas révisable. Seules ses modalités de paiement peuvent être modifiées , à l'initiative du débiteur et de ses héritiers, ou même, du créancier :

. le débiteur comme ses héritiers peuvent se libérer à tout moment du solde du capital,

. après la liquidation du régime matrimonial, le créancier peut lui-même saisir le juge d'une demande en paiement du solde du capital,

. le débiteur peut saisir le juge d'une demande de révision des modalités de paiement en cas de changement notable de sa situation. Dans ce cas, le juge peut alors autoriser, à titre exceptionnel et par une décision spéciale et motivée, le versement sur une durée supérieure à huit ans. Cette action est également ouverte aux héritiers du débiteur.

Ces dispositions semblent satisfaisantes à votre commission. La durée de huit ans choisie par l'Assemblée nationale pour le paiement du capital semble en phase avec les décisions actuellement prises par les juges. En effet, les trois quart des rentes temporaires prononcées en 1996 ont une durée inférieure à 10 ans. En outre, si l'on compare la valeur moyenne des prestations en capital allouées par les juges sur demande des épouses (203 480 F) et le montant moyen des rentes attribuées dans les mêmes conditions (2008 F par mois), on peut constater que le capital moyen versé correspond à 8,4 années de paiement de rente mensuelle moyenne .

Votre commission ne vous proposera donc pas de modification sur le fond.

Sur le plan formel, en revanche, elle vous proposera d'inscrire ces dispositions à l'article 275-1 du code civil qui prévoit actuellement le paiement du capital en trois annuités plutôt qu'à l'article 276 qui autorise actuellement la fixation d'une rente à défaut de capital.

Votre commission vous proposera d'adopter l'article premier quater ainsi modifié.

Article additionnel après l'article premier quater
(art. 276 du code civil)
Prestation compensatoire attribuée sous forme de rente viagère

Votre commission vous proposera d'inscrire à l'article 276 du code civil , prévoyant actuellement la possibilité pour le juge de prononcer des rentes à défaut de capital, les dispositions introduites par l'Assemblée nationale à l'article 276-1 du code civil (voir le paragraphe I de l'article 2) .

Ces dispositions prévoient la possibilité pour le juge de prononcer une rente viagère en considération de la situation du créancier de la prestation compensatoire.

Votre commission vous proposera de les modifier, ainsi qu'il est indiqué dans le commentaire de l'article 2, pour prévoir que le juge fixe la rente viagère par référence à un capital , après s'être assuré que le débiteur n'est pas en mesure de verser ce capital .

Votre commission vous propose d'adopter un article additionnel après l'article premier quater .

Article 2
(art. 276-1 du code civil)
Prestation compensatoire attribuée sous forme de rente viagère

Le Sénat avait précisé à cet article que le juge devait fixer la durée de la rente, celle-ci pouvant être viagère, en prenant en considération les éléments prévus à l'article 272 du code civil . Il avait de plus précisé que le décès de l'époux créancier avant l'expiration de la durée fixée mettait fin à la charge de la rente.

Ces dispositions modifiant le premier alinéa de l'article 276-1 du code civil ne remettaient pas en cause le droit actuel mais tendaient à inciter le juge à décider des rentes temporaires.

Le paragraphe I de cet article adopté par l'Assemblée nationale inscrit au premier alinéa de l'article 276-1 du code civil la possibilité pour le juge de fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère, par décision spéciale et motivée, dérogeant ainsi à l'obligation de versement de la prestation compensatoire sous la forme d'un capital éventuellement payable sur huit années.

La décision d'attribuer une rente viagère doit être prise en considération de l'âge ou de l'état de santé du créancier. Le montant de la rente est déterminé, comme celui du capital, en fonction des éléments d'appréciation énumérés à l'article 272 du code civil .

Les autres dispositions actuelles de l'article 276-1 du code civil ne sont pas modifiées sur le fond, le paragraphe II du présent article, n'opérant qu'une coordination rédactionnelle. La rente viagère reste donc, comme à l'heure actuelle, indexée et son montant peut varier par périodes successives suivant l'évolution probable des ressources et des besoins des parties. Pourrait ainsi être pris en compte le départ à la retraite du débiteur.

Les rentes temporaires sont donc supprimées. Seule subsiste la rente viagère attribuée en considération de la situation du créancier.

Votre commission souhaite que le versement du capital demeure privilégié dans tous les cas . Il importe donc que le juge fixe la rente viagère par référence à un capital , après s'être assuré que le débiteur n'est pas en mesure de verser ce capital . Dans le cas contraire, en effet, il n'y a aucune raison que le capital ne soit pas versé.

Votre commission vous proposera de modifier en ce sens les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale au paragraphe I du présent article.

Sur le plan formel, elle vous proposera de replacer à l'article 276 du code civil, qui autorise actuellement le juge à fixer une rente à défaut de capital, ces dispositions insérées par l'Assemblée nationale à l'article 276-1 du code civil .

Les dispositions figurant actuellement au paragraphe I du présent article seront donc reportées dans un article additionnel après l'article premier quater.

Au paragraphe I du présent article, votre commission vous proposera en conséquence un amendement de suppression du premier alinéa de l'actuel article 276-1 du code civil prévoyant la possibilité pour le juge de fixer des rentes temporaires.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

Article 2 bis
(art. 276-2 du code civil)
Déduction de la pension de réversion

Le Sénat avait, à cet article, expressément ouvert l'action en révision de la rente aux héritiers du débiteur.

Il avait à cet effet complété l'article 276-2 du code civil prévoyant actuellement qu'à la mort du débiteur, la charge de la rente passe à ses héritiers.

L'Assemblée nationale a reporté l'ensemble de la question de la révision de la rente viagère dans l'article suivant.

A cet article, elle a prévu que serait déduit du montant de la rente due le montant de la pension de réversion éventuellement perçue par le créancier du chef du conjoint décédé.

Elle a complété à cet effet l'article 276-2 du code civil , après y avoir apporté une modification de coordination avec la décision de suppression des rentes temporaires.

La pension de réversion régie par les articles L. 353-1 et suivants du code de la sécurité sociale , n'est pas de même nature que la prestation compensatoire. Elle n'est que la traduction des cotisations payées pendant la durée du mariage par le titulaire de la pension de retraite, auxquelles le conjoint divorcé peut être considéré comme ayant participé à travers sa contribution aux charges du mariage. La pension de réversion peut être considérée en quelque sorte comme un droit acquis à titre personnel à l'égard des assurances sociales.

Depuis la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, le conjoint divorcé non remarié bénéficie ainsi de la pension de réversion, ce qui n'était pas le cas lors du vote de la loi de 1975. Des prestations compensatoires ont donc pu être accordées en considération de la perte de pension de réversion ainsi que le prévoit l'article 272 du code civil .

Si le débiteur de la prestation compensatoire titulaire du droit à pension s'est remarié, le partage de la pension de réversion s'effectuera à son décès entre le conjoint survivant et le conjoint divorcé non remarié au prorata des années de mariage de chacun avec lui. La pension de réversion versée au conjoint divorcé non remarié s'impute donc sur le montant de la pension versée au conjoint survivant.

La déduction du montant de la pension de réversion du montant de la rente ne profitera cependant au conjoint survivant que s'il est lui-même héritier du débiteur de la pension.

Cette déduction semble néanmoins logique dans la mesure où la rente viagère a un caractère alimentaire et qu'il paraît anormal que le décès du débiteur de la pension soit une source d'enrichissement pour le créancier de la prestation compensatoire.

En cas de remariage ou de concubinage notoire d'un créancier fonctionnaire, la pension de réversion cesse de lui être versée. L'article L. 46 du code des pensions civiles et militaires de retraite prévoit en effet que " le conjoint survivant ou le conjoint divorcé qui contracte un nouveau mariage ou vit en état de concubinage notoire perd son droit à pension ".

La rédaction de cet article entraînerait le rétablissement du versement intégral de la prestation compensatoire, ce qui conduirait les héritiers du débiteur à voir leurs charges augmenter du fait du remariage ou de concubinage notoire de l'ex-époux créancier .

Pour éviter cette situation absurde, votre commission des Lois vous proposera un amendement précisant que, sauf décision contraire du juge saisi par le créancier, le montant de la prestation compensatoire ne sera pas rétabli à son niveau initial en cas de cessation du versement de la pension de réversion du fait du remariage ou du concubinage notoire du créancier.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 bis ainsi modifié .

Article 2 ter A
(art. 276-3 du code civil)
Révision des prestations compensatoires
fixées sous forme de rente viagère

L'Assemblée nationale a prévu à cet article les conditions de révision de la rente viagère .

Elle a introduit à cet effet un nouvel article 276-3 dans le code civil.

La révision de la rente serait possible en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties.

Elle ne pourrait intervenir qu'à la baisse, étant précisé qu'elle pourrait conduire à la suppression de la prestation.

L'action en révision serait ouverte au débiteur et à ses héritiers.

Ces dispositions introduites par l'Assemblée nationale pour la rente viagère se rapprochent de celles prévues par le Sénat pour la révision de la prestation compensatoire.

L'Assemblée nationale a préféré viser des changements " importants " dans les ressources ou les besoins des parties alors que le Sénat avait préféré employer le mot " substantiel ". Le rapporteur de l'Assemblée nationale a en effet craint que le terme substantiel ne soit pas de nature à conduire les juges à revoir leur jurisprudence restrictive.

De plus, l'Assemblée nationale a précisé que la révision ne pourrait intervenir qu'à la baisse . Il semble que l'intention du Sénat n'était pas, en assouplissant les conditions de révision, de permettre une révision de la prestation à la hausse. Enfin l'Assemblée nationale a expressément précisé, sur proposition de Mme Véronique Neiertz, que la rente pourrait être supprimée , ce qui rejoint les préoccupations exprimées lors de l'examen en séance publique au Sénat.

Pour éviter, en cas de difficultés temporaires du débiteur, une suppression radicale de la prestation, votre commission vous proposera de prévoir une possibilité de suspension de la rente. En outre, plutôt que d'autoriser les seules révisions à la baisse, elle vous proposera une rédaction plus souple de nature à permettre au juge, en cas d'amélioration de la situation du débiteur, de réévaluer ultérieurement une prestation qui aurait été revue à la baisse, sans pouvoir dépasser le montant initialement fixé .

Votre commission vous proposera deux amendements à cet effet.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ter A ainsi modifié.

Article 2 ter B
(art. 276-4 du code civil)
Transformation en capital des prestations compensatoires
fixées sous forme de rente viagère

A cet article, l'Assemblée nationale a prévu les conditions de transformation d'une rente viagère en capital .

A cet effet, elle a introduit un nouvel article 276-4 dans le code civil .

Elle a prévu que le débiteur et ses héritiers pourraient demander à tout moment la substitution d'un capital à une rente viagère.

Sur proposition du Gouvernement, l'Assemblée nationale a également ouvert cette action au créancier, s'il établit qu'une modification de la situation du débiteur permet cette substitution, notamment lors de la liquidation du régime matrimonial.

Votre commission vous proposera un amendement modifiant un visa à l'article 276 du code civil par coordination avec les décisions de modification de structure intervenues.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ter B ainsi modifié .

Article 2 ter
(art. 277 du code civil)
Garanties du paiement de la prestation compensatoire

Cet article, adopté par le Sénat sur proposition du Gouvernement, inclut, à l'article 277 du code civil , les contrats d'assurance parmi les garanties que peut imposer le juge à l'époux débiteur d'une rente.

Cette forme de garantie s'ajoute à celles déjà prévues par l'article 277 du code civil , à savoir l'hypothèque légale prévue au 1° de l'article 2121 du code civil pour le paiement des droits et créances d'un époux sur les biens de l'autre, l'hypothèque judiciaire définie à l'article 2123 du code civil , le gage et la caution. La jurisprudence avait interdit au juge de demander la constitution de garanties autres que celles énumérées audit article 277 .

L'Assemblée nationale a étendu les dispositions de l'article 277 du code civil à la garantie du paiement du capital.

Cette extension se justifie par la possibilité de versement du capital en plusieurs annuités. Actuellement, l'article 275-1 du code civil prévoyant la possibilité du versement du capital en trois annuités renvoie d'ailleurs à l'article 277.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ter sans modification .

Article 2 quater
(art. 247 du code civil)
Compétence du juge aux affaires familiales

L'Assemblée nationale a reporté à cet article la disposition, adoptée par le Sénat à l'article premier bis, donnant compétence au juge aux affaires familiales pour statuer sur les demandes de révision de la prestation compensatoire.

Elle en a cependant modifié la rédaction pour viser explicitement la modification des modalités de paiement. Seront ainsi concernées, non seulement les demandes de révision du montant de la rente, mais également les demandes de modification des modalités de paiement de la prestation, dans lesquelles il faut inclure les demandes de transformation de la rente en capital.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 quater sans modification.

Article 2 quinquies
(art. 274 et 275-1 du code civil)
Coordination

Par coordination avec les dispositions adoptées, l'Assemblée nationale a supprimé les articles 274 et 275-1 du code civil .

L'article 274 soumet la fixation de la prestation compensatoire en capital au fait que la consistance des biens de l'époux débiteur le permette.

L'article 275-1 permet le versement du capital en trois annuités, sous réserve de garanties.

Ces deux articles sont par ailleurs visés aux articles 285 et 294 du code civil relatifs aux pensions alimentaires versées respectivement pour rupture de la vie commune et pour l'entretien et l'éducation des enfants.

Compte tenu des modifications de structure opérées précédemment, lesdits articles resteront relatifs au paiement de la prestation en capital . Il n'est donc plus nécessaire de les abroger.

Votre commission vous propose de supprimer l'article 2 quinquies.

Article 2 sexies
(art. 278 du code civil)
Durée de la prestation compensatoire
dans le divorce par requête conjointe

A cet article, l'Assemblée nationale a adopté des dispositions spécifiques au cas de divorce par requête conjointe .

Elle a permis aux ex-conjoints de prévoir dans leur convention un terme extinctif ou une condition résolutoire au versement d'une prestation compensatoire et elle les a autorisés à prévoir le versement d'une rente temporaire .

Ces dispositions ont pour objet, selon le rapporteur de l'Assemblée nationale, d'encourager le recours à la procédure de divorce par requête conjointe et de favoriser le dialogue entre époux.

Elles donnent une base légale à des pratiques admises par la jurisprudence dans le seul cas de divorce par requête conjointe. Les ex-conjoints pourront ainsi prévoir la fin du versement de la prestation en cas de remariage du créancier ou de décès ou de départ à la retraite du débiteur.

Votre commission souscrit à l'objectif poursuivi par l'Assemblée nationale.

Il semble cependant que l'expression " condition résolutoire " ne soit pas adaptée.

Aux termes de l'article 1183 du code civil , la condition résolutoire " remet les choses au même état que si l'obligation n'avait pas existé ".

Il semble que l'intention de l'Assemblée nationale n'ait pas été de prévoir une restitution de la prestation versée. En tout état de cause, cela ne serait pas souhaitable compte tenu des situations inextricables auxquelles cela pourrait conduire.

Votre commission vous proposera en conséquence un amendement indiquant que les époux peuvent prévoir que le versement de la prestation cessera à compter de la réalisation d'un événement déterminé.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 sexies ainsi modifié .

Article 2 septies
(art. 279 du code civil)
Révision de la prestation compensatoire dans le divorce
par requête conjointe

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, coordonne les conditions de révision de la prestation compensatoire prévues en cas de divorce par requête conjointe avec celles relatives à la rente viagère.

L'Assemblée nationale a ainsi précisé à l'article 279 du code civil que, dans le cas de divorce par requête conjointe, les époux pourraient prévoir dans leur convention que chacun d'eux pourrait demander la révision de la prestation compensatoire en cas de changement " important ", et non plus de changement " imprévu ", dans ses ressources et ses besoins.

Il semble que, dans la mesure où aucune distinction n'est effectuée entre les différentes formes de prestation, on puisse en conclure que la révision du montant de la prestation serait possible dans tous les cas , y compris pour les prestations versées sous forme de capital et que la révision serait possible à la hausse.

En l'absence de dispositions spéciales, le droit commun de la révision s'appliquerait ainsi qu'il résulte de la jurisprudence actuelle.

Les conditions de révision d'une rente viagère semblent néanmoins beaucoup plus restrictives en cas de divorce par consentement mutuel que dans le droit commun puisque ne sont visés pour chaque époux que ses propres besoins et ressources. Il semble donc que les époux ne pourraient se prévaloir du changement de situation de l'autre époux.

Votre commission vous proposera un amendement harmonisant la rédaction applicable au divorce par consentement mutuel avec celle applicable en cas de divorce contentieux, pour permettre à chaque époux de se prévaloir de la situation de l'autre.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 septies ainsi modifié.

Articles additionnels après l'article 2 septies
(art. 80 quater, 156 et 757 A du code général des impôts)
Dispositions fiscales

Le régime fiscal actuel de la prestation compensatoire défavorise les débiteurs de prestation sous forme de capital par rapport aux débiteurs de prestation sous forme de rente et joue donc un rôle essentiel dans la préférence marquée par les parties pour la rente.

La rente est en effet, comme les pensions alimentaires, déductible du revenu de celui qui la paie ( art. 156 du code général des impôts ) et imposable avec les revenus de celui qui la reçoit ( art. 80 quater du code général des impôts). Le second ayant en général des revenus inférieurs à ceux du premier est soumis à un taux d'imposition moindre. Cette solution apparaît donc particulièrement avantageuse pour le débiteur sans peser sur les créanciers ayant des revenus modestes soumis en tout état de cause à un faible taux d'imposition.

La prestation versée sous forme de capital est soumise, soit au droit de partage de 1% prévu à l'article 748 du code général des impôts, soit aux droits de mutation à titre gratuit.

L'article 280 du code civil dispose que " les transferts et abandons prévus au présent paragraphe sont considérés comme participant au régime matrimonial. Ils ne sont pas assimilés à des donations ".

Cette disposition s'applique sans restriction aux prestations payées par un époux à l'aide de biens communs dans le cas d'un régime de communauté. S'applique dans ces cas le droit de partage de 1%.

L'article 757 A du code général des impôts dispose cependant que les versements en capital entre ex-époux sont soumis aux droits de mutation à titre gratuit lorsqu'ils proviennent des biens propres de l'un deux.

En application de cet article, l'administration a ainsi exigé des droits de mutation à titre gratuit en cas de versements en capital provenant de biens propres des époux quel que soit le régime matrimonial. Cette opération est conforme à la pratique en matière de liquidation de régime matrimonial même si elle peut sembler contrevenir à l'esprit de l'article 280 du code civil.

En revanche, contrairement à la pratique adoptée en matière de liquidation de régime matrimonial, l'administration fiscale a soumis aux droits de mutation à titre gratuit la prestation versée sous forme de biens indivis entre des époux séparés de biens.

Lors de la première lecture de la proposition au Sénat, votre commission des Lois avait souhaité adopter des dispositions fiscales favorisant le paiement de la prestation en capital.

Elle avait ainsi prévu de doubler l'abattement applicable pour le calcul de l'assiette des droits de mutation à titre gratuit exigibles en cas de versement en capital provenant des biens propres du débiteur.

Cet abattement, prévu à l'article 779 du code général des impôts, était à l'époque de 330 000 F. Il a été relevé à 500 000 F par la loi de finances pour 1999. Au delà de ce seuil, les sommes versées sont imposables à un taux progressif prévu à l'article 777 du code général des impôts et variant de 5% jusqu'à 50 000 F jusqu'à 40% au delà de 11 200 000 F.

Mme le garde des Sceaux a considéré qu'il ne convenait pas de favoriser les époux divorcés par rapport aux époux survivants et a craint des demandes reconventionnelles concernant les successions. Consciente de la nécessité d'adopter des dispositions favorables au paiement de la prestation sous forme de capital, elle s'est engagée à trouver une solution " moins pénalisante pour les finances publiques " qui réponde au souci de la commission des Lois.

Votre rapporteur avait en conséquence accepté de retirer la disposition en cause, l'article 40 de la Constitution ayant été évoqué ( article 3 de la proposition de loi ).

La prestation versée en plusieurs annuités en application de l'article 275-1 du code civil, ou des conventions entre époux dans le cas de divorce sur requête conjointe, n'est actuellement pas assimilée à une rente , donc non susceptible d'être imposable à l'impôt sur le revenu. Ont été néanmoins assimilées à des rentes des prestations dont les versements étaient périodiques et réguliers, même sur une durée ne dépassant pas trois ans.

La question se pose donc réellement de savoir quel sera le régime fiscal de la prestation versée sous forme de capital telle que prévue dans le texte adopté par l'Assemblée nationale.

Mme le garde des Sceaux s'est formellement engagée lors du débat à l'Assemblée nationale " à ce qu'une solution soit trouvée d'ici à la prochaine lecture en ce qui concerne le régime fiscal à l'égard de l'impôt sur le revenu des versements prévus par l'article 276 nouveau du code civil ".

Il est impératif que le dispositif adopté favorise un versement rapide de la prestation et donne à la nouvelle forme de versement de la prestation en capital un régime fiscal aussi attractif que celui de la rente .

Votre commission vous proposera donc d'assimiler, dans tous les cas, le capital reçu sous forme d'argent à une rente, quel que soit le nombre et la périodicité des versements effectués.

Les versements résultant d'abandons de biens en nature resteraient taxés comme des transferts de capital. Compte tenu du nouveau seuil de 500 000 F applicable depuis le 1 er janvier dernier pour l'application des droits de mutation à titre gratuit entre époux, votre commission estime moins nécessaire d'augmenter cet abattement.

En revanche, elle souhaite harmoniser dans tous les cas, les règles applicables en cas de versement de prestation compensatoire avec celles applicables en cas de liquidation de régime matrimonial.

Votre commission vous proposera donc d'adopter trois articles additionnels après l'article 2 septies :

- le premier compléterait l'article 156 du code général des impôts pour prévoir que seraient déduits des revenus du débiteur de la prestation les versements en capital effectués par lui sous forme de sommes d'argent, quel que soit le nombre et la périodicité des versements effectués. Si le revenu du débiteur était insuffisant pour que l'imputation puisse être totalement opérée, l'excédent serait reporté successivement sur les années suivantes, jusqu'à la huitième année suivant le premier versement ;

- le second compléterait l'article 80 quater du code général des impôts pour prévoir l'imposition sur le revenu des sommes d'argent reçues par le créancier, tout en permettant à ce dernier d'étaler sur huit ans la déclaration des sommes reçues, afin qu'un règlement plus rapide de la prestation ne le pénalise pas ;

- le dernier préciserait, à l'article 757 A du code général des impôts , que les abandons en nature de biens indivis entre époux séparés de biens ne seraient pas considérés comme des donations mais seraient soumis au droit de partage de 1%.

Ces trois articles seraient assortis d'un paragraphe II créant une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs pour compenser la perte de ressources pour le budget de l'Etat résultant des dispositions adoptées.

Votre commission vous propose d'adopter trois articles additionnels après l'article 2 septies.

TITRE II
DISPOSITIONS TRANSITOIRES


Article 4
Révision des rentes viagères en cours de versement

Cet article prévoyait la possibilité de révision des rentes en cours de versement dans les conditions prévues par le présent texte.

La révision des rentes aurait ainsi pu intervenir sur simple requête du débiteur ou de ses héritiers adressée au juge aux affaires familiales, en considération de changements substantiels intervenus dans les ressources ou les besoins des parties. Leur capitalisation aurait pu intervenir sur demande du débiteur comme du créancier.

L'Assemblée nationale a réservé cet article à la révision des rentes viagères . Elle a précisé que la révision des rentes, comme leur capitalisation, pourrait intervenir dans les conditions prévues respectivement par les articles 276-3 et 276-4 du code civil créés par les articles 2 ter A et 2 ter B de la proposition de loi.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 sans modification.

Article 5
Révision des rentes temporaires en cours de versement

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, précise les conditions de révision des rentes temporaires en cours de versement.

Comme les rentes viagères, ces rentes pourront être révisées à la baisse, à la demande du débiteur ou de ses héritiers, en cas de changement important dans les ressources ou les besoins des parties. Il est précisé que la révision ne pourra conduire à en proroger la durée initiale.

Les rentes pourront être transformées en un capital qui aura la consistance déterminée à l'article 275 du code civil résultant de la présente proposition, c'est à dire qu'il pourra consister en l'attribution de biens en pleine propriété ou pour l'usage et l'habitation. Le juge pourra décider d'autoriser le versement de ce capital sur une durée maximum de 8 années.

Il n'est pas prévu que la révision puisse conduire à la suppression de la rente . Il semble que cela devrait être fait, faute de quoi un raisonnement a contrario conduirait le juge a estimer que les rentes temporaires en cours de versement ne pourraient être supprimées comme pourraient l'être les rentes viagères à venir. Devront être également prévues les possibilités, adoptées précédemment pour les rentes viagères, de suspension et de variations successives en sens contraire du montant de la rente sous un plafond égal au montant initialement fixé.

Il semble en outre préférable de permettre au juge de prévoir un étalement de la durée de la rente en cas d'accord des parties .

Il serait également souhaitable d'accorder au créancier la possibilité de demander la capitalisation de la rente temporaire en cours de versement, dans les mêmes conditions que pour les rentes viagères.

Enfin il conviendra de modifier un visa à l'article 276 du code civil pour tenir compte des modifications de structures opérées.

Votre commission vous présentera donc cinq amendements à cet articles.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 ainsi modifié .

Article 6
Déduction des pensions de réversion des rentes en cours de versement

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, permet au juge de décider que le montant d'une pension de réversion, perçue du chef de l'ex-époux décédé, sera déduit du montant de la rente actuellement versée par ses héritiers.

La Commission des Lois de l'Assemblée nationale avait souhaité au départ prévoir la déduction automatique du montant de la pension de réversion. Mais le garde des Sceaux a convaincu l'Assemblée nationale qu'il fallait laisser au juge le soin de décider les cas dans lesquels une déduction devrait être opérée.

Votre commission considère qu'il n'y a pas de raison de ne pas appliquer aux rentes en cours les dispositions prévues pour les rentes à venir.

Elles vous proposera donc un amendement supprimant l'intervention du juge et rendant de ce fait la déduction de la pension de réversion automatique.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 ainsi modifié.

Article 7
Application de la loi aux instances en cours

Cet article, adopté par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, permet l'application des dispositions de la proposition de loi aux instances en cours n'ayant pas donné lieu à des décisions ayant force de chose jugée.

Dans le cas où des décisions ayant force de chose jugée seraient intervenues, les parties bénéficieraient des dispositions transitoires applicables aux rentes en cours de versement.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 7 sans modification .

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble de la proposition ainsi modifiée.

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