EXAMEN DES ARTICLES

Article 2
(article 7 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992)

Conditions de délivrance du certificat

Le Sénat avait apporté trois modifications à la rédaction de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1992.

Les deux premières figuraient à l'article 2 de la proposition de loi :

- en premier lieu, était supprimée la possibilité de classer comme monuments historiques au titre de la loi du 31 décembre 1913 les biens importés depuis moins de cinquante ans ;

- en second lieu, était prévu que la commission chargée d'émettre un avis sur les refus de certificat est composée à parité de représentants de l'Etat et de personnalités qualifiées.

Par ailleurs, par coordination avec le paragraphe II de l'article 3 de la proposition de loi qui prévoyait un régime de délivrance tacite du certificat, le Sénat avait supprimé le dernier alinéa de l'article 7 de la loi de 1992 qui imposait la motivation des décisions de délivrance du certificat et leur communication à la commission.

L'Assemblée nationale en première lecture, n'a retenu que deux des améliorations apportées par le Sénat à la procédure de délivrance des certificats :

- la suppression de la possibilité de classer les biens importés depuis moins de cinquante ans ;

- et la composition paritaire de la commission chargée d'émettre un avis sur les refus de certificat.

En revanche, elle a supprimé les dispositions prévoyant un régime de délivrance tacite du certificat et a rétabli le dernier alinéa de l'article 7 de la loi de 1992, tout en le modifiant pour prévoir, d'une part, que l'obligation de motivation s'appliquerait aux décisions de refus de certificat -ce qui était en fait déjà le cas en application de la loi du 11 juillet 1979 3( * ) - et non plus aux décisions de délivrance de certificat et, d'autre part, que les refus de certificat -et non les avis de la commission- seraient publiés.

• En deuxième lecture, le Sénat n'a pas souhaité réintroduire la disposition instituant un régime de délivrance tacite du certificat dans la mesure où, en l'absence de dispositions législatives expresses, une mesure réglementaire peut le prévoir. En effet, l'article 22 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations donne désormais un cadre législatif à l'intervention de décrets en Conseil d'Etat prévoyant des régimes de décisions implicites d'acceptation.

En revanche, le Sénat a rétabli le principe de publication des avis de la commission chargée de donner un avis sur les refus de certificat. En effet, si la publication des décisions ministérielles de refus de certificat est inspirée par un légitime souci de transparence, elle ne satisfaisait pas l'objectif poursuivi par le Sénat de conférer une plus grande autorité à cette instance dont il élargissait, par ailleurs, la composition.

L'Assemblée nationale , en deuxième lecture, n'a adopté à cet article qu'un amendement de coordination par rapport aux dispositions de l'article 9-1 introduit dans la loi de 1992 par l'article 5 de la proposition de loi afin de préciser que le refus de certificat -comme son renouvellement- n'ouvre droit à aucune indemnisation.

Position de la commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 5
(articles 9-1 à 9-4 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992)

Modalités d'acquisition par l'Etat de biens
auxquels le certificat a été refusé

• Cet article qui constitue la disposition la plus novatrice de la proposition de loi, prévoit les conditions d'acquisition par l'Etat d'une oeuvre considérée comme un " trésor national " au sens de l'article 4 de la loi de 1992. En outre, il renforce l'information des tiers -mais également de l'administration- à l'occasion de l'aliénation de biens faisant l'objet d'un refus de certificat.

La proposition de loi introduit dans la loi de 1992 quatre nouveaux articles :

L'article 9-1 précise les conditions dans lesquelles l'Etat peut acquérir un bien ayant fait l'objet d'un refus de certificat.

L'article 9-2 prévoit que l'autorité administrative est informée de tout transfert de propriété d'un bien culturel présentant le caractère de trésor national.

L'article 9-3 impose à tout propriétaire qui aliène un tel bien de faire connaître à l'acquéreur l'existence du refus de certificat et, le cas échéant, les offres d'achat présentées par l'administration dans le cadre de la procédure prévue à l'article 9-1.

L'article 9-4 prévoit la nullité de toute aliénation d'un trésor national après acceptation d'une offre d'achat présentée par l'Etat en application de l'article 9-1.

• En première lecture, l'Assemblée nationale avait apporté plusieurs modifications au texte adopté par le Sénat, dont elle acceptait au demeurant l'économie générale.

En ce qui concerne les dispositions de l'article 9-1, certaines précisaient utilement le dispositif, notamment en fixant les modalités de prise en charge des frais d'expertise.

En revanche, l'Assemblée nationale n'avait pas retenu les éléments de souplesse introduits par le Sénat à l'article 9-1, à savoir d'une part, la faculté pour le propriétaire, après un refus de certificat, de pouvoir relancer la procédure d'acquisition en demandant une nouvelle expertise du bien et, d'autre part, la possibilité pour le ministre de la culture d'accorder un certificat après un refus du propriétaire de vendre son bien à l'Etat au prix d'expertise.

Par ailleurs, elle avait supprimé la disposition visant à préciser que la décision de renouvellement d'un refus de certificat n'ouvre droit à aucune indemnisation.

Les modifications apportées aux articles 9-2 à 9-4 étaient d'ordre rédactionnel, sous réserve de l'introduction à l'article 9-3 d'une disposition sanctionnant le défaut d'information de l'acquéreur sur la qualité de trésor national du bien vendu par la nullité de la vente.

Le Sénat , en deuxième lecture, a adopté sans modification les articles 9-2 à 9-4. En revanche, à l'article 9-1, il est revenu à sa rédaction de première lecture en ce qui concerne :

- la possibilité laissée à l'administration d'apprécier s'il y a lieu de renouveler le refus du certificat après un refus de vente au prix d'expertise ;

- et les conditions dans lesquelles peut être relancée une procédure d'acquisition après le renouvellement du refus de certificat.

Par ailleurs, le Sénat a rétabli la disposition prévoyant que le renouvellement de refus de certificat n'ouvre droit à aucune indemnisation, précision sans laquelle la proposition de loi risquait d'être privée de son efficacité.

En effet, la suppression par l'Assemblée nationale de cette disposition aurait pu être comprise comme l'expression de la volonté du législateur de prévoir une indemnisation. Si telle avait été l'interprétation retenue par le juge, il y aurait eu fort à craindre que l'Etat ne se trouve dans une situation comparable à celle qui prévaut en cas de classement des biens mobiliers en vertu de la loi de 1913.

•  En troisième lecture, l'Assemblée nationale s'est ralliée sur ce point à l'interprétation du Sénat dans le souci de garantir l'efficacité de la procédure d'acquisition des trésors nationaux.

Cependant, elle en est revenue à son texte de première lecture concernant l'automaticité du renouvellement du refus de certificat dans le cas où le propriétaire ne veut pas se dessaisir de son bien au prix d'expertise. A l'Assemblée nationale, la ministre de la culture et de la communication a donné un avis favorable à l'amendement proposé en ce sens par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, au motif que " cette décision ne peut être laissée à l'appréciation de l'administration, qui demeure tenue par l'acte administratif de reconnaissance du statut du trésor national et par l'ensemble des obligations qui y sont attachées. " 4( * )

On soulignera cependant que la " reconnaissance " de la qualité de trésor national résulte du refus du certificat qui, comme le précise la loi de 1992, a un caractère temporaire.

Bien que le dispositif de 1992 puisse être sur ce point critiqué, il faut bien reconnaître qu'actuellement, les biens qui, à l'expiration du délai de validité du refus de certificat, n'ont pas été acquis ou classés par l'Etat, ne sont plus considérés comme des trésors nationaux, le refus de certificat n'étant pas renouvelable.

Par ailleurs, si la proposition de loi prévoit que le refus de certificat peut être renouvelé, elle n'a, en aucun cas, pour effet de rendre la première décision de refus irrévocable puisque, comme dans la situation qui prévalait jusqu'ici, si l'Etat n'a pas fait d'offre d'achat, le certificat devra être accordé.

Le Sénat avait estimé utile sur ce point d'introduire dans la procédure prévue à l'article 9-1 un élément de souplesse dans le souci de favoriser un dialogue -voire une négociation- avec certains propriétaires ou encore de permettre à l'administration de modifier sa position sur une oeuvre. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale présente l'avantage en quelque sorte de protéger l'administration de la tentation d'autoriser l'exportation d'une oeuvre déclarée " trésor national " que l'Etat aurait eu les moyens d'acquérir, risque qui, il faut bien l'avouer, est en réalité très minime, voire inexistant !

L'Assemblée nationale est également revenue à son texte de première lecture en ce qui concerne les conditions dans lesquelles peut être relancée la procédure d'acquisition.

Votre rapporteur souligne qu'en dépit d'une rédaction peu claire, ce texte doit être compris comme permettant à l'administration mais également au propriétaire de demander une nouvelle expertise du bien. La ministre de la culture et de la communication, tout en donnant un avis favorable à l'adoption de l'amendement proposé par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour revenir à la rédaction de première lecture de l'Assemblée nationale, a souligné que " si la discussion doit être réouverte, elle doit pouvoir l'être à l'initiative de chacune des parties ", interprétation qui confirmait les propos tenus par le gouvernement lors de la deuxième lecture au Sénat 5( * ) .

Position de la commission

Compte tenu de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

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