M. François TRUCY

IV. LES DÉPENSES D'ENTRETIEN ET DE FONCTIONNEMENT

Il s'agit d'un domaine sensible au sujet duquel votre rapporteur spécial ne peut que souligner l'importance du retard pris ces dernières années.

Même si l'évolution des dotations est satisfaisante, tant globalement que pour l'entretien programmé des matériels désormais financé exclusivement sur le titre V, les taux d'activité des matériels ne s'améliorent que lentement.

A. L'ÉVOLUTION DES DOTATIONS

Le tableau ci-dessous, qui met en perspective les dotations inscrites au budget 2005, fait apparaître par rapport à 2004 une croissance modérée du titre III dans son ensemble et à l'intérieur de celui-ci, à périmètre constant, une croissance relativement plus rapide des dépenses « hors RCS » par rapport à l'évolution du « RCS », c'est-à-dire la masse salariale.

Cette inversion de tendance se traduit par une légère augmentation de la part du « hors RCS » qui, en pourcentage du titre III, passe de 18,9 % en 2003, à 19,71 % en 2004, puis 19,8 % en 2005 .

1. La baisse des dépenses d'alimentation

En structure, à l'intérieur du « hors RCS » on assiste depuis 1997 à la baisse des dépenses d'alimentation , qui passent de 12,1 % à 7,74 %, tandis que les dépenses de carburant augmentent, au cours de la même période, de 9,2 % à 12,12 %.

2. Vers une plus grande sincérité de l'évaluation des dépenses de carburant ?

Au sujet des dépenses de carburant , votre rapporteur spécial voudrait faire une observation ayant trait à la sincérité du budget :

- l'année dernière les éléments retenus pour l'évaluation des frais de carburants étaient très optimistes, le dollar était anticipé sur une base inférieure à celle retenue pour le budget général, et il en était de même pour le prix du baril de pétrole. Rappelons qu'en 2003 la sous-évaluation de la consommation des crédits nécessaires à l'achat de carburant était évaluée à 40 millions d'euros (votre rapporteur spécial ne dispose pas, à ce jour, des informations nécessaires pour savoir si le même phénomène s'est reproduit en 2004) ;

- en 2005, les éléments de références retenus pour l'évaluation des frais de carburant, qui doivent s'élever à 331,551 millions d'euros , sont identiques aux paramètres retenus pour le cadrage du budget de l'Etat : soit un dollar anticipé à 0,81 euro et un baril de pétrole brut à 29,92 euros (notons que les hypothèses les plus hautes vont jusqu'à 40 dollars par baril, contre les 36,5 dollars retenus pour la construction du budget pour 2005).

B. L'ENTRETIEN PROGRAMMÉ DES MATÉRIELS

1. Des crédits en diminution de 3,25 % en 2005

La restauration de la disponibilité des matériels est une des priorités du présent gouvernement consacrée par la loi de programmation militaire. Le budget pour 2005 prévoit pour les armements classiques 2.057,862 millions d'euros de crédits de paiement et 2.626,694 millions d'euros d'autorisations de programme .

Par rapport à 2004, la diminution des crédits de paiement est de 3,25 % (après une augmentation de 11,12 % en 2004), tandis que les autorisations de programme progressent de 6,17 % (après une stagnation en 2004).

Le tableau ci-dessous montre que, par domaine, ce type de dépenses concerne, en 2005, essentiellement le secteur classique avec 2.057,9 millions d'euros de crédits de paiement et le nucléaire avec 672,59 millions d'euros (soit une diminution d'environ 90 millions d'euros par rapport à 2004).

A l'intérieur du secteur de l'armement classique, les crédits se répartissent de façon relativement équitable entre les trois armes : 852,35 millions d'euros pour l'armée de l'air, 673,87 millions d'euros pour la marine et 471,99 millions d'euros pour l'armée de terre .

En évolution, c'est la marine qui va voir ses dotations diminuer le plus rapidement en 2005 avec - 10 % (contre + 19,1 % entre 2003 et 2004), devant l'armée de terre, puis l'armée de l'air.

2. Les résultats en termes d'indisponibilité des matériels

a) L'armée de terre

L'armée de terre doit faire face à une diminution de ses crédits de paiement et à une réduction de près de 15 % de ses autorisations de programme.

En 2005, l'armée de terre sera soumise aux contraintes suivantes :

- augmentation des coûts unitaires des pièces de rechanges , notamment en provenance de GIAT-Industries ;

- augmentation du coût de soutien unitaire liée à l'arrivée de nouveaux matériels (à titre d'exemple, 0,24 million d'euros de coût de soutien unitaire moyen estimé pour le char Leclerc, contre 0,09 million d'euros pour un AMX 30 B2) ;

- vieillissement des parcs , notamment AMX 10P, AMX 10RC et VAB, entraînant une augmentation du coût de soutien et impliquant des opérations de rénovation ;

- coût de la valorisation de certains matériels ;

- apparition de charges nouvelles (opérations extérieures, protection de l'environnement, désamiantage, etc.).

b) La marine

La marine doit faire face à la fois aux indisponibilités périodiques pour entretien et réparation (IPER), aux indisponibilités pour entretiens intermédiaires (IEI) et aux périodes d'entretien intermédiaire (PEI).

Les crédits d'entretien programmé du matériel serviront principalement, en 2005 :

- pour les sous-marins lanceurs d'engins (SNLE), à la préparation de l'IPER du « Téméraire » (prévue en 2006-2007) et de l'IE longue de « l'Inflexible » (prévue en 2005) et à la poursuite de l'approvisionnement des rechanges pour les SNLE de type « Le Triomphant » ;

- pour la flotte, à la PEI puis à l'IPER du porte-avions « Charles de Gaulle » (prévue en 2006), à trois IPER de sous-marins nucléaires d'attaque (SNA), à savoir l'« Améthyste » en 2005, le « Rubis » en 2007/2008 et le « Saphir » en 2006/2007, une IPER de la « Jeanne d'Arc » (prévue fin 2006), ainsi qu'à cinq IPER de frégates (dont celles du « Cassard », du « Lamotte-Picquet » et du « Courbet », en 2005), à l'IEI de la « Jeanne d'Arc », du « Georges Leygues » et du « Dupleix » en 2005, et enfin à la poursuite des modernisation des CMT ;

- pour l'aéronautique, au maintien en condition opérationnelle des aéronefs, dont la part la plus importante reviendra aux 10 Rafale (65 millions d'euros), aux 50 Super-Etendard (55 millions d'euros) et aux 28 ATL2 (55 millions d'euros).

c) L'armée de l'air

L'armée de l'air a, grâce à l'effort de la structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD), réduit de 2002 à 2005 le taux d'indisponibilité dû à des causes logistiques. Ce taux est passé de 19 % en décembre 2001 à 7,41 % en juillet 2004.

Votre rapporteur spécial tient à souligner la pression exercée sur les coûts de maintenance par la sophistication croissante des matériels .

C. LES NIVEAUX D'ACTIVITÉ

Les efforts faits en matière de maintien en condition opérationnelle tardent à porter leurs fruits.

1. Des efforts pour l'armée de l'air, mais les résultats sont encore en deçà des objectifs fixés

Les objectifs d'activité pour l'armée de l'air, tels qu'ils résultent de la loi de programmation militaire, sont bien connus : 180 heures de vol pour un pilote de combat, 400 heures de vol pour un pilote de transports et 200 heures de vol pour un pilote d'hélicoptères. Les objectifs d'activité n'ont pas été atteints, avec en moyenne 178 heures de vol pour un pilote de combat, 330 heures de vols pour un pilote de transport et 195 heures de vol pour un pilote d'hélicoptère.

En fait, en 2003, l'armée de l'air n'a pas atteint son objectif global de 298.000 heures de vol . Le déficit de 32.208 heures de vol est moins important qu'en 2002, année où il s'établissait à 38.860 heures. Cela s'expliquerait par des problèmes de disponibilité des flottes de transport et de combat, ainsi que par la multiplication des périodes d'alerte.

Pour 2004, la prévision d'activité annuelle initiale de 270.709 heures de vol est toujours en vigueur à mi-gestion. Même si elle a été réduite par rapport aux objectifs fixés pour 2003, elle reste supérieure de 14.714 heures à l'exécution réalisée en 2003.

2. Les difficultés de l'armée de terre

L'armée de terre rencontre le même type de problème, le taux de disponibilité de ses véhicules blindés est de l'ordre de 60 %, tandis que le nombre d'heures de vol par pilote d'hélicoptère reste sensiblement inférieur aux objectifs de la loi de programmation : 145 heures de vol en 2001 et 2002 , au point que l'objectif 2003 et 2004 a été abaissé à 160 heures de vols pour tenir compte de l'indisponibilité des matériels.

Compte tenu de la disponibilité des matériels aériens, l'armée de terre ne prévoit d'atteindre les 180 heures de vol par pilote et par an fixés par la loi de programmation militaire (LPM) qu'à partir de 2006.

De même, le taux d'activité de l'armée de terre n'égale pas l'objectif fixé par la LPM, soit 100 jours d'activité. En 2003, il s'est établi à 95 jours. Pour le premier semestre de l'année 2004, l'armée de terre a effectué 40 jours d'activité (dont 17 avec des matériels organiques).

3. Des résultats encourageants mais encore mitigés pour la marine

En 2003, la marine peut faire état d'un volume d'activité global de 239.081 heures de navigation, ce qui représente 85 jours de mer par bâtiment , soit un léger retard de 2 jours de mer par bâtiment par rapport à 2002.

Elle estime, par ailleurs, que la norme d'activité de l'aviation navale est atteinte . C'est ainsi que celle-ci a effectué 51.150 heures de vols en 2003, soit 150 heures de plus que l'année précédente.

Le premier semestre 2004 a été marqué par les opérations Héraclès (Afghanistan, avril à mai 2004) et Carbet (Haïti, mars à juillet 2004).