D. LES QUESTIONS CONNEXES

S'appuyant sur le mandat que lui avait accordé le Conseil européen de Cologne, la CIG s'est penchée sur plusieurs questions qu'elle a jugées liées aux trois grands points que l'on vient d'examiner (couramment désignés comme le " reliquat d'Amsterdam ").

1. Composition et pouvoirs du Parlement européen

a) La composition

Le traité d'Amsterdam ayant, en principe une fois pour toutes, fixé à 700 membres l'effectif maximal du Parlement européen, et celui-ci comptant déjà aujourd'hui 626 membres, il était nécessaire, dans la perspective de l'élargissement, de revoir le nombre de députés par Etat membre pour que ce plafond puisse être respecté.

Le tableau ci-dessous décrit la répartition des sièges qui a été retenue pour l'Union à vingt-sept :

Etats membres

Population
(en millions d'habitants)

Nombre actuel de sièges

Nombre de sièges dans l'Union à 27

Population

par siège

Allemagne

82,04

99

99

828.686

Royaume-Uni

59,25

87

72

822.916

France

58,97

87

72

819.027

Italie

57,61

87

72

800.138

Espagne

39,39

64

50

787.800

Pologne

38,67

-

50

773.400

Roumanie

22,49

-

33

681.515

Pays-Bas

15,76

31

25

630.400

Grèce

10,53

25

22

478.636

République tchèque

10,29

-

20

514.500

Belgique

10,21

25

22

464.090

Hongrie

10,09

-

20

504.500

Portugal

9,98

25

22

453.636

Suède

8,85

22

18

491.666

Bulgarie

8,23

-

17

484.117

Autriche

8,08

21

17

475.294

Slovaquie

5,39

-

13

414.615

Danemark

5,31

16

13

408.461

Finlande

5,16

16

13

396.923

Irlande

3,74

15

12

311.666

Lituanie

3,70

-

12

308.333

Lettonie

2,44

-

8

305.000

Slovénie

1,98

-

7

282.857

Estonie

1,45

-

6

241.666

Chypre

0,75

-

6

125.000

Luxembourg

0,43

6

6

71.666

Malte

0,38

-

5

76.000

TOTAL

481,18

626

732

657.349

• On peut observer, d'une part, que la plafond fixé par le traité d'Amsterdam se trouve dépassé et, d'autre part, que l'Allemagne et le Luxembourg sont les seuls pays à ne pas perdre de sièges.

L'écart de sièges entre les " grands " pays est désormais le reflet à peu près exact des écarts démographiques. Le nombre d'habitants pour chaque siège de député européen diminue ensuite assez rapidement, de manière à maintenir une sur-représentation assez marquée des " petits Etats ". Ainsi, les cinq Etats les plus peuplés, qui regrouperont près de 70 % de la population de l'Union élargie, disposeront de moins de 57 % des sièges ; inversement, les dix Etats les moins peuplés, avec un peu plus de 5 % de la population de l'Union, disposeront de 12 % des sièges. Les inégalités de représentation demeurent donc relativement fortes.

Il est à noter que la diminution du nombre d'habitants par siège n'est pas linéaire, la Grèce, la Belgique et le Portugal bénéficiant d'un privilège par rapport à la République tchèque, la Hongrie, la Suède, la Bulgarie et l'Autriche. Ce résultat singulier est dû à des arbitrages de dernière minute au sein de la CIG.

• Durant le processus d'élargissement, le nombre des membres du Parlement européen et le nombre de sièges par Etat membre évolueront en fonction de règles complexes.

Ces nombres seront calculés pour la législature 2004-2009 en fonction des adhésions éventuellement intervenues avant le 1 er janvier 2004. La base de calcul sera le nombre de députés par Etat membre prévu pour une Union de vingt-sept membres. Ce nombre sera augmenté, dans une même proportion pour tous les Etats membres, de sorte que le nombre total de députés européens soit le plus proche possible de 732. Toutefois, le nombre de députés par Etat membre ne pourra dépasser le nombre actuel. De ce fait, l'écart entre l'Allemagne - dont le nombre de députés européens ne pourra être augmenté - et les autres " grands " Etats n'entrera dans la réalité que de manière progressive, en fonction des nouvelles adhésions.

En conséquence de ces règles, les adhésions qui interviendront en cours de législature auront pour effet de faire dépasser, transitoirement, le nouveau plafond de 732 membres pour l'effectif total du Parlement européen. Ce dépassement pourra être assez sensible, car le nombre des députés européens correspondant à ces adhésions en cours de législature sera affecté du même coefficient d'augmentation que celui utilisé, avant le début de la législature, pour déterminer le nombre de députés européens par Etat membre.

b) Les pouvoirs

Le traité d'Amsterdam avait déjà considérablement accru les pouvoirs du Parlement européen. La procédure de codécision avait été modifiée de manière à placer sur pied d'égalité, dans cette procédure, le Parlement européen et le Conseil ; parallèlement,  la codécision avait été étendue à un grand nombre de nouvelles matières ; enfin, la nomination du président de la Commission européenne avait été soumise à l'approbation du Parlement européen.

Le traité de Nice poursuit cette évolution, puisque la procédure de codécision s'appliquera à presque toutes les nouvelles matières où le Conseil statuera à la majorité qualifiée.

Dans le pilier communautaire, cette procédure sera désormais la procédure de droit commun, souffrant peu d'exceptions.

En outre, les pouvoirs du Parlement européen sont accrus en ce qui concerne la saisine de la Cour de Justice . Le Parlement européen pouvait seulement jusqu'à présent saisir celle-ci pour obtenir la sauvegarde de ses propres prérogatives. Désormais, comme la Commission ou comme un Etat membre, le Parlement pourra former des recours pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité instituant la Communauté européenne ou de toute règle de droit relative à son application, ou détournement de pouvoir, contre les actes du Conseil, de la Commission ou de la BCE.

De même, le Parlement européen pourra demander à la Cour de justice de rendre un avis sur la compatibilité d'un accord envisagé avec les dispositions du traité instituant la Communauté européenne.

2. La Cour de justice et le tribunal de première instance

Le traité de Nice prévoit une réforme importante de la juridiction communautaire, afin de faire face à son engorgement que l'élargissement ne pouvait qu'accentuer.

La Cour de justice restera formée d'un juge par Etat membre. Mais elle comprendra désormais plusieurs formations . Elle pourra siéger en chambres (composées de 3 ou 5 juges), en grande chambre (composée de onze juges) ou en assemblée plénière. Le Conseil, statuant à l'unanimité, pourra augmenter le nombre des avocats généraux, qui reste fixé à huit.

Les compétences du tribunal de première instance sont élargies, notamment, à certaines catégories de recours préjudiciels. En contrepartie, des chambres juridictionnelles pourront lui être adjointes pour connaître en première instance de certaines catégories de recours. Les chambres juridictionnelles seront créées par décision du Conseil statuant à l'unanimité. Une déclaration prévoit la création rapide d'une chambre juridictionnelle compétente pour statuer en première instance sur les litiges entre la Communauté et ses agents.

Le tribunal de première instance comprendra au moins un juge par Etat membre. La nomination des membres de la Cour de justice et du tribunal de première instance continuera à s'effectuer par accord entre les gouvernements des Etats membres.

3. Le Comité économique et social et le Comité des régions

La répartition des sièges entre les Etats membres est la même pour le Comité économique et social et pour le Comité des régions. Les règles actuelles sont conservées pour le nombre de sièges par Etat membre. L'effectif de ces deux comités augmentera donc fortement avec l'élargissement. Chacun d'eux passera de 222 à 344 membres dans l'Union élargie, conformément au tableau suivant :

Etats membres

Sièges

Allemagne

24

Royaume-Uni

24

France

24

Italie

24

Espagne

21

Pologne

21

Roumanie

15

Pays-Bas

12

Grèce

12

République tchèque

12

Belgique

12

Hongrie

12

Portugal

12

Suède

12

Bulgarie

12

Autriche

12

Slovaquie

9

Danemark

9

Finlande

9

Irlande

9

Lituanie

9

Lettonie

7

Slovénie

7

Estonie

7

Chypre

6

Luxembourg

6

Malte

5

TOTAL

344

4. Les points additionnels

La CIG a également décidé d'aborder certains points supplémentaires qui ne se rattachaient que très indirectement à son mandat, mais qui découlaient de l'actualité européenne : le risque de violation des droits fondamentaux par un Etat membre, le renforcement de la coopération judiciaire avec la création d'Eurojust, enfin le développement de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD).

a) Le risque de violation des droits fondamentaux

A la suite de la formation, en Autriche, d'un gouvernement comportant des ministres issus d'un parti d'extrême-droite, des mesures " sanctionnant " ce pays sur un plan politique avaient été prises en février 2000 par les quatorze partenaires de l'Autriche au sein de l'Union. Ces " sanctions " ont été levées au mois de septembre suivant, après une longue controverse.

Cet épisode a conduit à compléter la rédaction de l'article 7 du traité sur l'Union européenne, relatif aux décisions à prendre en cas de " violation grave et persistante " des droits fondamentaux par un Etat membre. Un paragraphe a été ajouté au début de cet article, afin de viser les cas où, sans qu'il y ait violation avérée des droits fondamentaux, il semble qu'il y ait un " risque clair " de violation de ces droits.

Le Conseil statue à la majorité des quatre cinquièmes de ses membres, après avis conforme du Parlement européen, pour constater l'existence d'un tel risque et adresser à l'Etat membre en cause des recommandations appropriées.

b) Le rôle d'Eurojust

Le Conseil européen de Tampere (octobre 1999) avait pris la décision de créer une unité, dénommée Eurojust, composée de procureurs, de magistrats (ou d'officiers de police ayant des compétences équivalentes), afin de contribuer à une bonne coordination entre les autorités nationales chargées des poursuites et d'apporter son concours dans les enquêtes relatives à la criminalité.

La CIG a jugé nécessaire de donner une base à l'action d'Eurojust dans le traité sur l'Union européenne, aux articles 29 et 31. Les dispositions retenues n'apportent pas d'éléments nouveaux quant à la composition et aux missions d'Eurojust.

c) Politique européenne de sécurité et de défense

La CIG a également décidé d'adapter le traité sur l'Union européenne aux développements de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) décidés en 1999 lors des Conseils européens de Cologne, puis d'Helsinki.

L'article 25 du traité sur l'Union européenne est modifié pour traduire la création du comité politique et de sécurité (COPS). Par rapport au comité politique auquel il succède, le COPS reçoit mission d'exercer, sous la responsabilité du Conseil, le contrôle politique et la direction stratégique des opérations de gestion de crise.

En outre, l'article 17 du TUE est modifié pour tenir compte de l'intégration de l'UEO à l'Union européenne.

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