2. La distinction entre les recherches avec ou sans bénéfice individuel direct

La loi du 20 décembre 1988 opère une nette distinction entre les recherches biomédicales selon qu'est attendu ou non un bénéfice direct pour la personne qui s'y prête.

Elle qualifie ainsi des " recherches biomédicales avec bénéfice individuel direct " les essais " dont on attend un bénéfice directe pour la personne qui s'y prête " 10 ( * ) .

A contrario , elle dénomme sans bénéfice individuel " toutes les autres recherches, qu'elles portent sur des personnes malades ou non ".

Cette distinction, claire et simple du moins dans son principe comporte des conséquences importantes.

Ces conséquences concernent tout d'abord l'appréciation du risque.

Si le principe général posé par l'article L. 209-2 du code de la santé proscrit toute recherche biomédicale si le risque prévisible encouru par les personnes qui s'y prêtent est " hors de proportion avec le bénéfice escompté pour ces personnes ou l'intérêt de cette recherche ", l'article L. 209-14 dispose que les recherches biomédicales sans bénéfice individuel direct " ne doivent comporter aucun risque prévisible sérieux pour la personne qui s'y prête ".

Elles concernent également les catégories de personnes pouvant se prêter à une recherche.

Si la recherche est sans bénéfice individuel direct, la loi interdit de solliciter les personnes privées de liberté par une décision judiciaire ou administrative, les malades en situation d'urgence et les personnes hospitalisées sans leur consentement. De même interdit-elle la recherche sur les personnes qui ne sont pas affiliées à un régime de sécurité sociale ou bénéficiaires d'un tel régime.

Elle pose des conditions supplémentaires pour deux autres catégories de personnes : les femmes enceintes, parturientes et mères qui allaitent d'une part, les mineurs, majeurs protégés et personnes admises dans un établissement sanitaire ou social 11 ( * ) d'autre part.

Outre la condition précitée de ne présenter " aucun risque prévisible sérieux ", la loi exige que la recherche sans bénéfice individuel direct :

- soit utile dans le premier cas " à la connaissance des phénomènes de la grossesse, de l'accouchement ou de l'allaitement " et dans le second cas " à des personnes présentant les mêmes caractéristiques d'âge, de maladie ou de handicap " ;

- ne puisse être réalisée autrement.

La distinction entre recherches avec ou sans bénéfice individuel direct entraîne en outre des régimes différents quant à la responsabilité du promoteur de la recherche 12 ( * ) .

Alors que pour les recherches biomédicales sans bénéfice individuel direct, le promoteur assume, même sans faute , l'indemnisation des conséquences dommageables de la recherche pour la personne qui s'y prête et celle de ses ayants droit. Pour les recherches biomédicales avec bénéfice individuel direct, le promoteur assume l'indemnisation des conséquences dommageables de la recherche pour la personne qui s'y prête et celle de ses ayants droit sauf preuve à sa charge que le dommage n'est pas imputable à sa faute ou à celle de tout intervenant .

Par ailleurs, si l'article L. 209-8 du code de la santé publique pose le principe général selon lequel " la recherche biomédicale ne donne lieu à aucune contrepartie financière directe ou indirecte pour la personne qui s'y prête " (hormis le remboursement des frais exposés), la loi (article L. 209-15 dudit code) tolère une exception pour les personnes se prêtant à une recherche sans bénéfice individuel direct.

Mais, dans le souci de prévenir toute dérive, elle prévoit un plafond aux indemnités que pourrait percevoir une même personne (plafond fixé réglementairement à 20.000 francs par an).

Elle interdit d'autre part qu'une personne puisse se prêter simultanément à plusieurs recherches.

Aussi prévoit-elle la tenue d'un fichier national des personnes se prêtant à des recherches sans bénéfice individuel direct.

Enfin, la distinction entre les recherches avec ou sans bénéfice individuel direct emporte une contrainte importante quant au lieu où se déroule la recherche. Les recherches sans bénéfice individuel direct ne peuvent en effet être réalisées que dans des lieux agréés selon les cas par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé ou par le ministre chargé de la santé, c'est-à-dire concrètement les directions régionales de l'action sanitaire et sociale. La loi (article L. 209-18 du code de la santé publique) précise que ces lieux doivent être " équipés des moyens matériels et techniques adaptés à la recherche et compatibles avec les impératifs de sécurité des personnes qui s'y prêtent ".

* 10 Selon les termes de l'article L. 209-1 du code de la santé publique.

* 11 Hormis le cas où cette admission a pour objet même l'engagement d'une recherche.

* 12 Selon les termes de l'article L. 209-7 du code de la santé publique.

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