III. LA SITUATION ACTUELLE : DES RISQUES MAÎTRISÉS, DES INCERTITUDES SUR LES CONSÉQUENCES DE L'ESB EN MATIÈRE DE SANTÉ PUBLIQUE, UNE CRISE SANS PRÉCÉDENT POUR LA FILIÈRE BOVINE

La France vient de connaître une grave crise alimentaire, alors que la sécurité alimentaire n'a jamais été aussi assurée qu'aujourd'hui.

En effet, la sécurité qui entoure la consommation de viande de boeuf est désormais assurée de manière rigoureuse du fait du nouveau rôle de l'AFSSA, des tests de dépistage et d'une traçabilité sans cesse renforcée.

A. DES MESURES DE SÉCURITÉ AUJOURD'HUI RADICALES

De nombreuses mesures de sécurité sanitaire et alimentaire ont été prises depuis 1996, afin de prévenir le risque de transmission de l'ESB. Ces décisions se sont fondées sur des avis scientifiques émanant, tant du Comité interministériel sur les encéphalopathies subaiguës spongiformes transmissibles (CIESST), créé le 17 avril 1996, que de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA), mise en place en mai 1999.

1. Le retrait des matières à risque de la chaîne alimentaire : une mesure décisive

a) Le retrait des matériaux à risque spécifiés : des yeux à l'iléon
(1) Des tissus particulièrement susceptibles d'être infectieux

Les matériaux à risque spécifiés (MRS) sont des tissus qui, en cas de contamination par l'ESB, et quand bien même aucun symptôme ne serait apparent, sont susceptibles d'être infectieux.

Comme on l'a vu précédemment, la France a décidé non sans mal, à de les retirer systématiquement de la chaîne alimentaire humaine et d'exclure leur recyclage en alimentation animale (arrêté du 28 juin 1996).

La portée du retrait des MRS a été progressivement étendue. Le système nerveux central (cerveau, moelle épinière, yeux) a été prioritairement visé dans la mesure où il correspond à la partie de l'animal qui concentre l'essentiel de l'infectiosité. Ont été ensuite ajoutés les organes ou tissus, tels que la rate, le thymus, les amygdales, dont l'infectiosité est réputée moindre, voire seulement suspectée.

Les dernières mesures, qui concernent le retrait de l'iléon (extrémité de l'intestin grêle), ont été prises sur le fondement des avis du Comité des ESST et de l'AFSSA : un arrêté du 10 juillet 2000 a imposé le retrait de l'iléon de tous les bovins. Cette décision allait moins loin que ne le préconisait le Comité, qui recommandait le retrait de la totalité de l'intestin. A la suite d'un avis de l'AFSSA du 11 octobre 2000, qui conclut que les procédés de traitement de l'intestin, tels que le délimonage, ne permettent pas d'éliminer totalement les formations lymphoïdes, vecteur de transmission, le ministre de l'Agriculture a décidé de rendre obligatoire l'exclusion de l'ensemble de l'intestin.

Cette mesure impose aux charcutiers de recourir à d'autres produits tels que des boyaux synthétiques pour la fabrication de certaines andouilles, andouillettes et autres cervelas. Ses effets sont néanmoins limités, dès lors que moins de 2 % de la production charcutière française est fabriquée à partir d'intestins de bovins.

Par ailleurs, les exclusions de MRS ont fait l'objet d'adaptations en fonction de l'âge des animaux visés, compte tenu de l'amélioration de la connaissance de la maladie. Dans un premier temps, les mesures de retrait des MRS ont concerné tous les bovins nés avant le 31 juillet 1991, date à partir de laquelle les farines animales étaient censées avoir disparu de l'alimentation animale. Puis cette mesure a concerné tous les bovins quel que soit leur âge (arrêté du 28 juin 1996).

L'obligation de retrait du système nerveux central a ensuite été limitée aux bovins de plus de six mois (arrêté du 17 septembre 1996), puis à ceux de plus de douze mois (10 juillet 2000), dans la mesure où l'infectiosité de ces matériaux n'est possible qu'à l'issue d'une certaine période d'incubation. En revanche, le retrait de la rate, des amygdales, du thymus et de l'intestin qui était soumis initialement à des conditions d'âge s'applique désormais (arrêté du 10 novembre 2000) quel que soit l'âge du bovin, dès lors que ces parties peuvent être infectées, même faiblement dès la phase précoce d'incubation.

Enfin, le retrait des MRS a été parallèlement imposé à d'autres espèces animales (ovins et caprins), afin de prendre en compte le risque de transmission de l'ESB aux petits ruminants. L'arrêté du 28 juin 1996 impose le retrait de leur système nerveux central. Cette mesure a été complétée par la suite en vue d'exclure également la rate de ces ruminants.

Tableau synthétique des MRS au sens
de la réglementation française

Crâne, y compris cervelle et yeux

Pour tous les bovins, ovins et caprins de + de 12 mois

Moelle épinière

Pour tous les bovins, ovins et caprins de + de 12 mois

Amygdales

Pour tous les bovins quel que soit leur âge

Pour les ovins et caprins de + de 12 mois

Rate

Pour tous les bovins quel que soit leur âge

Intestins, y compris les graisses mésentériques

Pour tous les bovins quel que soit leur âge

Thymus

Pour tous les bovins

Tête et viscères thoraciques et abdominales

Pour les ovins et caprins abattus dans le cadre de la police sanitaire de la tremblante

La commission d'enquête tient à souligner que la liste française des MRS est plus large que celle imposée depuis peu par l'Union européenne. Elle devrait être prochainement étendue, afin de tenir compte de l'obligation de retirer les os de la colonne vertébrale de la chaîne alimentaire.

Cette question a été débattue lors de la réunion interministérielle du 9 août 2000 : le « bleu » qui a été transmis à la commission montre que le ministère de la santé demandait le classement de la colonne vertébrale comme MRS, alors que le ministère de l'agriculture y était défavorable au motif que ce classement nécessiterait de mettre en place de nouveaux procédés de traitement en abattoir et en boucherie et un surcroît de travail pour les équipes de contrôle.

D'après les renseignements obtenus par la commission auprès du ministère de l'Agriculture, l'obligation de retrait de la colonne vertébrale s'imposera au stade de la découpe, qui peut être réalisée dans des ateliers de découpe, mais également en boucherie. Il convient à cet égard de rappeler que les bouchers achètent essentiellement la viande bovine sous forme de carcasse, qu'ils font ensuite maturer sur os. Les vertèbres seront donc collectées à ces stades par le service public de l'équarrissage.

S'agissant des ovins et des caprins, l'AFSSA a recommandé dans un avis du 15 février 2001 de retirer de la chaîne alimentaire :

- la tête (y compris la cervelle et les yeux), la moelle épinière, les amygdales et les viscères des troupeaux atteints de tremblante ;

- le crâne et la moelle épinière des animaux de plus de six mois (contre douze actuellement) ;

- la rate, les intestins et les amygdales pour tous les animaux.

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