c) Des transports contaminants

Les contaminations de transport s'expliquent pour les mêmes raisons : la livraison d'un fournisseur n'est pas spécialisée par type d'aliments, mais en fonction de ses clients et les aliments ne sont pas séparés de manière étanche dans les camions.

Les interlocuteurs de la commission, comme M. Jean-Jacques Rosaye, de la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire, ont indiqué avoir constaté des « éléments hétérogènes » dans les aliments livrés en vrac.

Comme l'a précisé M. Daniel Grémillet, président de la Chambre d'agriculture du département des Vosges, « la plupart des aliments sont livrés en vrac, c'est-à-dire que dès lors que le camion a déchargé, même si vous contestez la livraison, vous ne pouvez plus le faire parce qu'on peut toujours dire que vous l'avez mélangée à autre chose » .

Selon l'AFSSA, une possibilité de contamination lors des livraisons (entre le fournisseur de matières premières et le fabricant, le fabricant et le distributeur, le distributeur et l'exploitant) a été identifiée dans 26 cas sur 30. Le rapport ajoute :

« Il existe rarement un circuit de distribution dédié aux aliments pour ruminants, les contaminations croisées pouvant se produire en cas de transports successifs d'aliments destinés aux porcs et aux volailles ou de farines animales et d'aliments destinés aux ruminants (fonds de camions). La vérification de l'état de propreté du véhicule n'est pas effectuée de manière systématique. La modernisation progressive du parc de camions a permis de réduire, avec l'installation de transporteurs pneumatiques, les contaminations croisées par l'élimination des résidus dans le système de transport (il peut rester un résidu compris entre 25 et 30 kg d'aliments dans le système de transporteur à chaînes). Mais l'utilisation de tels dispositifs n'est pas encore généralisée.

« La livraison accidentelle d'un aliment destiné à une autre espèce a été constatée lors d'une enquête.

« Un guide de bonnes pratiques de transport a été publié en 1998 et diffusé auprès de la profession, mais son application n'est pas obligatoire. »

d) Les contaminations sur l'exploitation

Les contaminations sur l'exploitation constituent certainement une raison non négligeable du développement de l'ESB : la tentative de fraude, plus par ignorance du degré réel de risque des farines que par un quelconque « appât du gain », n'est pas à exclure. Des éleveurs, certainement en très petit nombre, sont en mesure de « fabriquer » un aliment à la ferme, à l'aide d'une mélangeuse.

Dans le cas d'exploitations mixtes (bovins, porcs, volailles) en situation de rupture de stocks, certains éleveurs ont pu donner à leur bétail un aliment volaille ou un aliment porc. M. Jean-Jacques Réveillon, directeur de la Brigade nationale d'enquêtes vétérinaires, a bien exposé cette possibilité à la commission : « Au cours de nos enquêtes épidémiologiques (...) nous obtenons des confidences en général indirectes et codées qui nous donnent à penser qu'effectivement, la pratique consistant à donner des aliments de volaille aux jeunes bovins n'est pas inexistante » . Comme le précise M. Réveillon, « on nous dit des choses du genre : « à bien y réfléchir, je me demande si elle ne s'est pas détachée un jour et si elle n'est pas allée manger dans le silo des cochons »... »

Il faut savoir en effet que « l'aliment porc ou volaille coûte moins cher » .

Les aliments sont stockés en silo. Comme le bovin est un animal peu sensible à la composition de l'aliment (du point de vue de son appétence, il est possible de lui donner de l'aliment porc ou volaille) et que d'autre part les fabricants ne reprennent pas les aliments de « fin de bande » lorsque les volumes sont trop faibles, la contamination croisée volontaire ou involontaire n'est pas à exclure.

La commission d'enquête citera, par exemple, le fameux « cas douteux », qui serait né en mai 1998 56 ( * ) : cet animal provenait d'une exploitation hébergeant des bovins et des porcs qui a fait l'objet d'une enquête sur site ayant permis de mettre en évidence un risque marqué de contamination croisée.

Le rôle de ces contaminations sur l'exploitation peut néanmoins être relativisé par rapport aux autres types de contaminations : sur 26 cas constatés au titre du programme de tests du « Grand ouest », 20 relevaient d'exploitations qui n'accueillaient que des bovins.

La commission d'enquête considère, en d'autres termes, que les contaminations sur l'exploitation ne sont pas à exclure, surtout avant les décisions de 1996, mais semblent n'avoir joué qu'un rôle mineur.

* 56 Une étude de la filiation génétique de cet animal est en cours : le géniteur présumé ne semble pas être le géniteur réel, les analyses d'ADN ayant montré une incompatibilité génétique entre les deux animaux.

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