III.  ANALYSE PAR SECTEUR

1.  Les activités hospitalières

Le service public hospitalier est assuré par les établissements publics de santé (EPS) et par ceux des établissements de santé privés qui répondent aux conditions fixées aux articles L. 6161-6 et L. 6161-9 du code de la santé publique, c'est-à-dire ceux qui sont admis à participer à l'exécution du service public hospitalier.

Les hôpitaux publics sont placés hors du champ d'application de la TVA pour leur activité d'hospitalisation, les soins médicaux qu'ils dispensent ainsi que les activités qui leur sont étroitement liées, en application de l'article 256 B du code général des impôts.

En application du 1° bis du 4 de l'article 261 du même code, les établissements privés titulaires de l'autorisation mentionnée à l'article L. 6122-1 du code de la santé publique sont exonérés de TVA à concurrence des frais d'hospitalisation et de traitement sans possibilité d'option lorsque les actes effectués sont consécutifs à une prescription médicale, que ces actes ouvrent droit ou non à remboursement de l'assurance maladie.

Enfin, les établissements privés qui ne répondent pas à cette définition sont redevables de la TVA. Il en est en particulier ainsi des établissements privés qui dispenseraient des soins sans avoir obtenu une autorisation de l'autorité compétente, ou après retrait de celle-ci.

Dès lors qu'ils sont exonérés de TVA, les établissements de santé sont assujettis à la taxe sur les salaires.

Le secteur des activités hospitalières constitue le premier redevable de la taxe sur les salaires en ayant acquitté au titre de 1998 environ 14 milliards de francs.

La présente étude porte exclusivement sur les établissements publics de santé (EPS) dont les comptes sont suivis de manière exhaustive par la direction de la comptabilité publique, qui a fourni les éléments chiffrés suivants.

Le total des recettes de l'ensemble de ces établissements s'est élevé à 272 milliards de francs.

Les subventions directes de l'Etat ou des collectivités locales représentent environ 1 % du budget de ces établissements soit 2,7 milliards de francs.

Si l'on applique ce même pourcentage au montant de taxe sur les salaires acquitté par les EPS qui est de 11,3 milliards de francs en 1998, les financements de l'Etat et des collectivités locales prendraient en charge 113 millions de francs de taxe sur les salaires.

Cela dit, l'essentiel du budget des EPS est financé par une dotation globale annuelle en application de l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale.

En prenant en compte la dotation globale de financement versée par les caisses primaires d'assurance-maladie, les « financements publics » représentent environ 87 % du budget des EPS. Si l'on applique ce même pourcentage à la taxe sur les salaires versée par les EPS, 9,8 milliards de francs seraient couverts par ces financements (11,3 x 87 %).

2.  L'action sociale hors associations

Les activités relevant de l'action sociale recouvrent notamment celles de l'accueil des enfants handicapés ou en difficulté, des adultes handicapés, des personnes âgées, les crèches, les centres d'aide par le travail, ...

Elles sont exercées soit au travers d'associations (voir ci-dessous le secteur associatif), soit d'établissements publics ou encore sous la forme commerciale.

Les activités d'action sociale sont soit exonérées de TVA (1°a et 3° du 7 de l'article 261 du code général des impôts), soit hors de son champ en application de l'article 256 B lorsqu'elles sont exercées par une personne morale de droit public.

Elles sont donc corrélativement assujetties à la taxe sur les salaires.

L'ensemble du secteur de l'action sociale a acquitté en 1998 environ 4 milliards de francs de taxe.

Comme pour les établissements publics de santé, l'étude ne porte que sur les établissements publics sociaux et médicaux sociaux (EPSMS). Les éléments chiffrés suivants ont été fournis par la direction de la comptabilité publique.

Le total des produits des EPSMS s'est élevé à 43 milliards de francs en 1999. Ils ont bénéficié de recettes publiques de l'Etat à hauteur 1 milliard de francs soit 2,4 % de leur budget total.

Les établissements publics sociaux et médico-sociaux ont acquitté au titre de la même année 1 milliard de francs de taxe. Si l'on applique le pourcentage correspondant à la part des fonds publics dans le budget des établissements, soit 2,4 %, au montant de la taxe sur les salaires acquitté, l'Etat et les collectivités locales prendraient en charge 24 millions de francs de taxe sur les salaires.

Si l'on tient compte des recettes en provenance des caisses primaires d'assurance-maladie, les fonds d'origine publique représentent comme pour le secteur hospitalier environ 87 %, du budget de ces établissements. La taxe sur les salaires acquittée par les EPSMS serait dans ces conditions couverte à hauteur de 870 millions de francs par ces financements.

3.  Le secteur de l'enseignement hors associations

Les activités d'enseignement scolaire et universitaire sont exonérées de TVA en application du 4°a du 4 de l'article 261 du code général des impôts. Il en est de même de la formation professionnelle continue assurée par des personnes morales de droit public, ou de droit privé « reconnues » (c'est-à-dire titulaire d'une attestation délivrée par l'autorité administrative compétente reconnaissant qu'elles remplissent les conditions fixées par la réglementation pour exercer leur activité dans le cadre de la formation professionnelle continue).

Les activités d'enseignement exonérées de TVA sont assujetties à la taxe sur les salaires. Toutefois, en application du dernier alinéa du 1 de l'article 231 du code général des impôts, les rémunérations payées par l'Etat sur le budget général sont exonérées de la taxe sur les salaires, lorsque cette exonération n'entraîne pas de distorsion dans les conditions de la concurrence.

Par suite, les rémunérations du personnel enseignant dans l'enseignement scolaire et universitaire ainsi que celles du personnel enseignant des établissements d'enseignement privés sous contrat prises en charge par l'Etat sont exonérées de la taxe sur les salaires.

En revanche les rémunérations des personnels non enseignants qui ne sont pas payées sur le budget de l'Etat mais par l'établissement lui-même sont assujetties à la taxe sur les salaires.

Le montant de taxe sur les salaires acquitté par le secteur de l'enseignement (hors écoles privées sous contrat qui sont comprises en principe dans le secteur associatif) s'est élevé en 1998 à 1,6 milliards de francs.

Les financements des collectivités publiques représentent 63,4 % du budget de ces établissements (source : ministère de l'éducation nationale, année 1998/99).

Si l'on applique ce même pourcentage au montant de taxe sur les salaires acquittée par ce secteur, les fonds publics prendraient en charge 1 milliard de francs de cet impôt.

4.  Le secteur associatif

Le fichier SIRENE (répertoire des entreprises et des établissements) comporte une liste de 250 000 associations, sur lesquelles 120 000 sont répertoriées comme associations employeuses, soit 48 % des associations.

Les principaux secteurs d'intervention des associations sont en priorité la santé et l'action sociale, secteurs dans lesquels sont employés près de 560 000 salariés, soit environ 380 000 personnes en équivalent temps plein.

Le secteur de l'éducation, avec 167 000 salariés, vient en second. Les écoles privées et de nombreux établissements d'enseignement supérieur sont en effet gérés par des associations.

La culture et le sport emploient près de 85 000 salariés.

Les associations sans but lucratif et dont la gestion est désintéressée sont exonérées de TVA en application du 1°du 7 de l'article 261 du code général des impôts. Elles sont donc corrélativement assujetties à la taxe sur les salaires lorsqu'elles emploient du personnel salarié.

Toutefois, elles bénéficient en application de l'article 1679 A du même code d'un abattement annuel en impôt qui s'élève en 2001 à 33 470 F. Après application de l'abattement les associations ont acquitté, en 1998, environ 8 milliards de francs de taxe.

Les dernières statistiques disponibles sur les budgets des associations concernent l'année 1995. Elles sont issues du rapport public de 2000 du Conseil d'Etat relatif aux associations de la loi de 1901.

En 1995, le budget des associations se serait élevé à 286 milliards de francs, et les sommes provenant de fonds publics à 166 milliards de francs. Si l'on retient la même répartition des fonds qu'en 1990, 70 % seraient des fonds de l'Etat et des collectivités locales soit 116 milliards de francs, et 50 milliards de francs proviendraient des organismes de sécurité sociale.

Le montant des fonds publics dont ont bénéficié les associations qui emploient des salariés n'est pas une donnée disponible.

Toutefois, si l'on admet que le budget des associations employeuses correspond au deux tiers du budget de l'ensemble des associations soit 190 milliards de francs et que les deux tiers des fonds publics leur sont attribués, celles-ci ont bénéficié de 110 milliards de francs de fonds publics soit 58 % de leur budget, dont 77 milliards de francs en provenance des collectivités publiques (40 % de leur budget) et 33 milliards de francs versés par des organismes de sécurité sociale.

La taxe sur les salaires acquittée par ces associations serait ainsi couverte à hauteur 3,2 milliards de francs par des fonds de l'Etat et des collectivités locales (8 x 40 %) et à hauteur d'environ 4,6 milliards de francs par des fonds publics incluant la sécurité sociale (8 x 58%).

5.  Les administrations et établissements publics autres que les établissements hospitaliers

En application de l'article 256 B du code général des impôts, les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la TVA pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsions dans les conditions de la concurrence.

En outre, les rémunérations de leur personnel payées sur le budget de l'Etat sont exonérées de la taxe sur les salaires lorsque cette exonération n'entraîne pas de distorsion dans les conditions de la concurrence (article 231-1 du code général des impôts). Les administrations acquittent environ 400 millions de francs de taxe sur les salaires.

Les caisses de sécurité sociale (caisses d'assurance maladie et d'assurance vieillesse), recensées dans le secteur administrations, ont acquitté au titre de 1998, 3,1 milliards de francs de taxe sur les salaires.

Si l'on considère que les ressources de ces caisses sont financées en totalité par des fonds d'origine publique, ces fonds prennent en charge la totalité du montant de taxe sur les salaires acquittée par ces organismes.

CONCLUSION

Si l'on retient pour hypothèse que les financements publics couvrent le paiement de la taxe sur les salaires à hauteur de la part qu'ils représentent dans le budget global des organismes, il apparaît que :

- L'Etat et les Collectivités locales « financeraient » environ 4,5 MdsF de taxe sur les salaires, soit moins de 10 % du produit total (9,6 %) ;

- L'ensemble des « financements publics », y compris la sécurité sociale, représenterait environ 19,5 MdsF, soit 41 % du produit total de la taxe sur les salaires.

La suppression de la taxe sur les salaires pour ces secteurs d'activité conduirait donc à un transfert de charges important entre les collectivités publiques et les organismes sociaux (15 MdsF environ).

PART DE TAXE SUR LES SALAIRES ACQUITTEE A PARTIR DE FINANCEMENTS PUBLICS (données 1998)

(en milliards de francs)

Budget total

Taxe sur les salaires

Financement Etat et collectivités locales

Financement Etat, collectivités locales et sécurité sociale

Etablissements publics de santé

Part correspondante de taxe sur les salaires

272

11,3

1,13

0,113

237

9,8

Etablissements publics sociaux et médicaux sociaux

Part correspondante de taxe sur les salaires

43

1

1

0,024

37,4

0,870

Enseignement

Part correspondante de taxe sur les salaires

1,6

1,0

1,0

Associations employant du personnel salarié

Part correspondante de taxe sur les salaires

190

8

77

3,2

33

4,6

Administrations : - proprement dites
- caisses de sécurité sociale

Part correspondante de taxe sur les salaires :
- administrations proprement dites
- caisses de sécurité sociale

0,400

3,1

0,400

0,400

3,1

1)

1)

Nota : Aucune donnée statistique n'est disponible sur certains des financements publics. Il est donc parfois nécessaire de recourir à des estimations et les résultats présentés doivent être interprétés avec une grande prudence.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 9 octobre 2001, sous la présidence de M. Alain Lambert, la commission a tout d'abord entendu une communication de M. Alain Lambert, président , sur la taxe sur les salaires , puis a procédé aux auditions de MM. Frédéric Donnedieu de Vabres et Michel Guichard, avocats associés d'Andersen Legal, puis de M. Hervé Le Floc'h Louboutin, directeur de la législation fiscale au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie .

M. Alain Lambert, président , a tout d'abord rappelé que la commission des finances avait déjà eu l'occasion, à travers deux groupes de travail, l'un sur les banques et l'autre sur les entreprises d'assurance, d'aborder la question de la taxe sur les salaires. Il a rappelé que cet impôt, relativement discret dans le paysage fiscal français, rapportait près de 50 milliards de francs par an au budget général, soit près de 2,7 % des recettes fiscales de l'Etat.

Il a expliqué cette discrétion par un nombre limité de redevables -le secteur des banques et des assurances-, le secteur associatif, le secteur hospitalier, le secteur social et médico-social, soit moins de 350.000 redevables- et un recouvrement facile et peu coûteux.

Il a ensuite souligné trois inconvénients majeurs de cet impôt. Tout d'abord, il a estimé que, comme toute taxe dont l'assiette est constituée par les rémunérations, la taxe sur les salaires était défavorable à l'emploi. Il a ensuite indiqué qu'elle était facteur de distorsion de concurrence, en particulier pour le secteur financier français, puisqu'il n'existait pas d'impôt comparable dans les autres pays européens. Enfin, M. Alain Lambert, président , a estimé que la puissance publique levait un impôt sur elle-même, puisque 41 % du produit total de cet impôt était acquitté par des financements publics.

Il a enfin rappelé que la mission sénatoriale d'information sur l'expatriation des compétences, des capitaux et des entreprises, présidée par M. Denis Badré, avait préconisé quelques semaines plus tôt une réforme de la taxe sur les salaires.

Puis la commission a procédé à l'audition de MM. Frédéric Donnedieu de Vabres et Michel Guichard, avocats associés d'Andersen Legal. Ils ont présenté leur étude sur la taxe sur les salaires. Ils ont rappelé l'historique de cette taxe et ses principales caractéristiques. En particulier, ils ont rappelé que depuis 1986, le produit de cette taxe avait doublé pour atteindre 50 milliards de francs en 2000, que le taux moyen d'imposition s'établissait à 8,9 % et que les collectivités publiques acquittaient 41,8 % de cet impôt. Ils ont rappelé les principales critiques émises par les redevables de la taxe sur les salaires et notamment sa difficile justification économique -notamment en matière d'emploi-, son caractère unique en Europe, sa possible contradiction avec la réglementation européenne, son rendement faussé par l'importance des financements publics qui concourt à son paiement, et sa progressivité, jugée excessive.

Ils ont ensuite évoqué les différentes pistes de réforme de la taxe sur les salaires : une suppression totale -qu'ils ont jugée budgétairement délicate-, une suppression partielle par secteurs, une suppression étalée dans le temps, l'instauration d'une réduction à l'embauche, ainsi que divers aménagements techniques de simplification.

A la suite de cet exposé, M. Yves Fréville a indiqué que la suppression de la taxe sur les salaires dans le secteur financier pourrait conduire à son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

M. Eric Doligé a estimé préférable de procéder à la suppression partielle de la taxe sur les salaires dans des secteurs où cet impôt constitue un véritable frein à l'embauche. Il a estimé en particulier que la suppression de la taxe sur les salaires dans le secteur hospitalier se résumerait à un simple jeu d'écritures sans impact décisif sur l'emploi.

M. Aymeri de Montesquiou a souhaité savoir comment la proposition visant à exclure de l'assiette de la taxe sur les salaires les rémunérations versées aux salariés détachés à l'étranger pouvait se concilier avec la lutte contre l'expatriation des compétences.

M. Denis Badré a souhaité connaître le sentiment de MM. Frédéric Donnedieu de Vabres et Michel Guichard sur le débat relatif à l'application du taux réduit de TVA.

M. Roland du Luart a souhaité avoir des précisions sur la nature du contentieux engagé devant la Cour de justice des communautés européennes concernant la taxe sur les salaires.

M. Alain Lambert, président , a souhaité savoir quelle proposition de réforme avait la préférence des deux intervenants et quel était leur sentiment sur la proposition de suppression du taux supérieur du barème de cette taxe faite par la mission sénatoriale d'information présidée par M. Denis Badré. Il a enfin souhaité connaître les modalités d'un éventuel remplacement de la taxe sur les salaires par la TVA.

M. Yann Gaillard s'est inquiété de savoir si le principe de territorialité ne permettait pas aux groupes internationaux d'échapper à la taxe sur les salaires.

M. Bernard Angels a rappelé que la suppression de la taxe sur les salaires, notamment dans le secteur financier, poserait un problème budgétaire aigu.

M. Paul Loridant s'est inquiété d'un éventuel remplacement de la taxe sur les salaires dans le secteur financier par la TVA qui risquerait d'avoir un effet inflationniste.

En réponse aux différents intervenants, MM. Frédéric Donnedieu de Vabres et Michel Guichard, avocats associés d'Andersen Legal, ont indiqué que le non-assujettissement des entreprises à la TVA avait aujourd'hui un coût pour ces entreprises en raison de la non-récupération de cette taxe. Ils ont précisé que le détachement d'un salarié ne constituait pas une « fuite de compétence », car elle n'était que provisoire. Ils ont rappelé que le contentieux engagé devant la Cour de justice des communautés européennes constituait avant tout un message politique du secteur bancaire à l'égard du gouvernement français. Parmi les pistes de réforme évoquées, ils ont marqué leur préférence pour la suppression pure et simple de la taxe ou une suppression sectorielle. La suppression du taux supérieur de la taxe aurait également le mérite à leurs yeux d'éroder petit à petit le poids de la taxe et d'en réduire la progressivité, jugée aujourd'hui trop lourde par les entreprises assujetties.

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Hervé Le Floc'h Louboutin, directeur de la législation fiscale au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Celui-ci a d'emblée présenté les trois objectifs possibles d'une réforme de la taxe sur les salaires.

Il a indiqué que le premier objectif d'une telle réforme pourrait être la contraction des masses budgétaires en jeu. Il a toutefois estimé que cet exercice serait très lourd -en raison du nombre élevé de redevables dont la situation devrait être étudiée au cas par cas- et incertain -en raison de l'absence de corrélation entre le montant de la taxe sur les salaires acquittée et le montant des subventions publiques reçues.

Il a estimé que la défense de l'emploi pouvait constituer un second objectif d'une réforme de la taxe sur les salaires, soulignant toutefois l'absence de travaux théoriques mesurant l'élasticité de l'emploi à la taxe sur les salaires. Il a en outre indiqué que la suppression de cet impôt aurait un effet nul dans le secteur hospitalier public -pour lequel la subvention publique s'ajusterait à la baisse- et très incertain dans le secteur financier -peu créateur d'emplois au cours des dernières années. Il a estimé que la suppression de la taxe sur les salaires ne pouvait constituer une priorité en matière de politique de l'emploi, d'autres mesures présentant une efficacité supérieure pour un coût moindre. En particulier, s'agissant du seul secteur financier, la suppression de la contribution des institutions financières (CIF) -qui pèse aussi sur les salaires- constituerait une mesure plus efficace que la suppression de la taxe sur les salaires.

Il a enfin évoqué un troisième objectif possible d'une réforme de la taxe sur les salaires, la simplification de cet impôt, dont le coût de gestion est toutefois très faible, de l'ordre de 0,5 % du produit. Il a évoqué à ce titre deux pistes de réforme, une déclaration unique et un taux unique, qui serait à fixer à 9,35 % à coût budgétaire constant, mais avec de lourds transferts de charges entre contribuables, ou à 7,8 % dans un objectif de minimisation de ces transferts de charges.

M. Aymeri de Montesquiou a estimé que les jeux d'écritures entre la taxe acquittée par des organismes bénéficiant par ailleurs de financements publics et le budget général de l'Etat avaient un coût économique et que la compensation de ces flux budgétaires devait être effectuée.

M. Eric Doligé s'est étonné de la facilité avec laquelle le gouvernement créait de nouveaux impôts alors que la suppression d'anciennes taxes était au contraire présentée aux parlementaires comme de véritables parcours du combattant.

M. Denis Badré a affirmé que la taxe sur les salaires constituait un handicap sérieux pour la compétitivité française.

M. Yves Fréville a rappelé que les secteurs financier et hospitalier n'étaient pas assujettis à la TVA. Il a également souligné que la taxe sur les salaires constituait un impôt progressif, et non proportionnel comme la TVA.

M. Paul Loridant s'est inquiété des risques de dérive de l'inflation en cas de remplacement de la taxe sur les salaires par la TVA dans le secteur financier.

M. Yann Gaillard a souhaité des précisions sur l'assujettissement à la TVA des entreprises du secteur financier dans les autres pays d'Europe.

En réponse, M. Hervé Le Floc'h Louboutin, directeur de la législation fiscale au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, a estimé que la suppression de la taxe sur les salaires n'était pas un exercice impossible, mais que la compensation budgétaire qu'elle impliquerait serait difficile. Il a rappelé le caractère très sectoriel de cette taxe et la lourdeur de son poids budgétaire. Il a reconnu que la taxe sur les salaires constituait un impôt unique en Europe dans le secteur financier et a indiqué que les prestations bancaires en Europe étaient presque toujours exonérées de TVA.

A l'issue de ces interventions, la commission a donné acte à M. le président Alain Lambert , rapporteur, de sa communication et décidé d'en publier les conclusions , ainsi que l'étude d'Andersen Legal et les contributions de la direction de la législation fiscale, sous forme d'un rapport d'information.

La taxe sur les salaires est un impôt peu connu.

Pourtant il rapporte près de 50 milliards de francs chaque année à l'Etat et a un impact économique très négatif pour la plupart de ses redevables : taxe assise sur les salaires, cet impôt est un frein à l'embauche, notamment dans les associations ; pour les banques et les assurances, la taxe sur les salaires est un impôt sans équivalent en Europe, qui encourage donc ces entreprises à se délocaliser.

La taxe sur les salaires est aussi un impôt étonnant. La puissance publique lève en effet un impôt sur elle-même : 41 % du produit de la taxe sur les salaires sont acquittés à l'aide de financements d'origine publique (budgets des hôpitaux, subventions publiques aux associations, budgets des caisses de sécurité sociale, etc.) ...

La commission des finances du Sénat a souhaité disposer d'une étude approfondie sur la taxe sur les salaires, ses caractéristiques et ses possibles pistes de réforme. Elle a confié cette étude à un cabinet d'avocats, Andersen Legal.

Le texte de cette étude, ainsi que les réponses du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à un questionnaire, sont repris dans le présent rapport.

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