B. LE PROFIL DU PUBLIC FÉMININ

Si tous les jeunes bénéficiaires du programme TRACE ont en commun de rencontrer de graves difficultés d'insertion, le profil des jeunes filles est un peu différent de celui des jeunes hommes.

Les statistiques de la DARES et les réponses qui ont été apportées au questionnaire de la délégation montrent que les jeunes filles sont en moyenne plus âgées que les garçons , même si l'on observe d'une année sur l'autre une tendance au « rajeunissement » de la population féminine qui entre dans le dispositif.

AGE À L'ENTRÉE EN TRACE PAR SEXE

(en pourcentage)

Age à l'entrée

du dispositif

Hommes

Femmes

Ensemble

1999

2000

1999

2000

1999

2000

16 ans

1,8

2,8

1,1

1,5

1,4

2,1

17 ans

7,7

9,9

5,4

6,3

6,6

8,1

18 ans

13,4

14,7

11,5

12,6

12,5

13,6

19 ans

15,8

15,5

15,8

16,3

15,8

15,9

20 ans

14,7

15,5

15,3

15,9

15,0

15,8

21 ans

12,3

11,9

13,5

13,8

12,9

12,8

22 ans

10,7

9,7

11,6

10,8

11,1

10,3

23 ans

9,9

8,2

10,0

9,0

10,0

8,6

24 ans

8,1

6,7

9,2

7,9

8,6

7,3

25 ans

4,8

4,2

5,4

4,9

5,1

4,5

26 ans

0,8

0,9

1,2

1,0

1,0

1,0

TOTAL

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

Source : Parcours - Traitement MES-DARES

Près de 80 % des jeunes du programme TRACE ont entre 18 et 24 ans, la tranche majoritaire est la tranche 18-21 et l'âge moyen 20/21 ans.

Les garçons l'emportent de près de 5 points dans la tranche d'âge 16/17 ans, et de plus de 2 chez les 18/19 ans, sans doute parce que les filles ont une durée de scolarité plus longue. La tendance s'inverse à partir de la tranche 20/21 ans avec une représentation des filles supérieure à celle des garçons. Les 25/26 ans sont très majoritairement des femmes et, dans certaines missions locales, tous les plus de 25 ans appartiennent exclusivement au public féminin.

Globalement, l'âge des jeunes filles est en moyenne plus élevé d'un ou deux ans par rapport à celui des jeunes hommes.

Une explication tient au niveau de formation des filles à l'entrée de TRACE, qui est généralement supérieur . Elles restent plus longtemps en effet dans le système scolaire et en sortent plus « diplômées ».

Rappelons qu'aux termes de la loi du 29 juillet 1998 et de ses circulaires d'application, le public visé par TRACE est constitué des jeunes sans diplôme ni qualification (niveau VI ou V bis) qui présentent des handicaps sociaux, personnels ou familiaux constituant un obstacle à leur accès direct à l'emploi ; au cas par cas, les jeunes diplômés ou qualifiés qui cumulent ces mêmes difficultés sont admis dans le dispositif. En 2000, à leur entrée dans le programme, 94 % des jeunes avaient un niveau de formation inférieur ou égal au CAP.

NOMENCLATURE DES NIVEAUX DE FORMATION

définie par la circulaire ministérielle n° II.67.300 du 11-7-1967

NIVEAUX

DÉFINITIONS

I et II

Personnel occupant des emplois exigeant normalement une formation de niveau égal ou supérieur à celui des écoles d'ingénieurs ou de la maîtrise.

III

Personnel occupant des emplois exigeant normalement une formation de niveau du brevet de technicien supérieur, du diplôme des instituts universitaires de technologie ou de fin de premier cycle de l'enseignement supérieur (deux ans de scolarité après le baccalauréat).

IV

Personnel occupant des emplois exigeant normalement une formation de niveau du baccalauréat ou du brevet de technicien ; trois ans de scolarité au-delà du premier cycle de l'enseignement de second degré, ou deux ans de formation au moins et de pratique professionnelle après l'acquisition d'une formation de niveau V ; cycle préparatoire (en promotion sociale) à l'entrée dans un cycle d'études supérieures ou techniques supérieures.

V

Personnel occupant des emplois exigeant normalement un niveau de formation équivalent à celui du brevet d'études professionnelles (BEP), (deux ans de scolarité au-delà du premier cycle de l'enseignement du second degré) et du certificat d'aptitude professionnelle (CAP) ; formation du niveau du brevet d'études de premier cycle (BEPC).

V bis

Personnel occupant des emplois supposant une formation spécialisée d'une durée maximum d'un an au-delà du premier cycle de l'enseignement du second degré, formation équivalente au plus à une 1 ère année de CAP ou BEP.

VI

Personnel occupant des emplois n'exigeant pas une formation allant au-delà de la scolarité obligatoire.

Si l'on se reporte aux chiffres de la DARES, 49,6 % des jeunes femmes du programme TRACE avaient en 2000 un niveau V ou IV et plus, contre 36,9 % des jeunes hommes. Les jeunes de niveau IV sont des femmes dans une proportion de 67 %.

STRUCTURE PAR NIVEAU DE FORMATION

DES GARÇONS ET DES FILLES

(en pourcentage)

Niveau de formation

Hommes

Femmes

Ensemble

1999

2000

1999

2000

1999

2000

IV et plus

2,7

4,1

5,3

8,2

3,9

6,2

V

29,6

32,8

35,8

41,4

32,6

37,3

V bis

31,8

31,9

30,9

28,6

31,4

30,2

VI

35,9

31,2

28,0

21,8

32,1

26,3

TOTAL

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

Source : Parcours - Traitement MES-DARES

D'une année sur l'autre, les écarts de niveau de formation entre les deux sexes se sont accusés : les filles sont de moins en moins représentées dans les faibles niveaux de qualification (- 7,9 points au niveau VI en 1999, - 9,4 en 2000 ; - 0,9 point au niveau V bis en 1999, - 3,3 en 2000), et de plus en plus dans les niveaux plus élevés (+ 6,2 points au niveau V en 1999, + 8,6 en 2000 ; + 2,6 points au niveau IV et plus en 1999, + 4,1 en 2000).

Lorsqu'elle est venue devant la délégation le 19 décembre 2001, Mme Brigitte Grésy a indiqué qu'un certain nombre de jeunes femmes avaient été refusées dans le programme TRACE en raison d'un diplôme trop élevé, ce constat conduisant à relever, ici comme ailleurs, le comportement paradoxal, mais couramment observé chez les jeunes filles, d'acceptation d'une déqualification lors de l'accès à l'emploi.

L'élargissement du programme devrait permettre, aux termes de la circulaire du 24 décembre 2001, « d'ouvrir l'accès à des jeunes diplômés, chômeurs de longue durée, jeunes femmes en particulier , en situation d'échec récurrent dans leur recherche d'emploi ».

On peut illustrer les écarts globaux filles/garçons par quelques situations locales. La répartition des jeunes du programme TRACE par niveau de formation est à la mission locale de Poitiers la suivante : 39,5 % des garçons sont en niveau VI, 54 % en niveau V non-validé, 4,4 % en niveau V et 2,2 % en niveau IV alors que la proportion des filles dans les mêmes niveaux est respectivement de 28,7 %, 45 %, 16,9 % et 9,2 %. A la mission locale de la Haute-Gironde, les jeunes hommes, certes plus nombreux (54,3 %), sont deux fois plus représentés en niveau VI (35 pour 17 jeunes femmes) et n'ont aucun représentant en niveau IV. La mission locale de l'Agglomération caennaise Hérouville-Saint-Clair, dans le Calvados, a accueilli en cumulé en niveau VI près de trois fois plus de jeunes hommes (certes majoritaires dans le programme puisqu'ils sont 59 %) que de jeunes femmes (313 contre 113) ; celle de Montluçon dans l'Allier compte 46,5 % de garçons d'un niveau inférieur à la troisième technologique contre 23,5 % de filles. A la PAIO du Sud-Charente où les effectifs sont paritaires à une unité près, le niveau des femmes est également nettement plus élevé puisqu'on compte une femme et aucun homme en niveau IV, 9 femmes et un homme en niveau V validé, 4 femmes et 2 hommes en niveau V non-validé, 8 femmes et 9 hommes en niveau V bis et enfin 5 femmes et 14 hommes en niveau VI. A la mission locale du Centre-Var, 9 % des effectifs totaux sont de niveau IV et, parmi eux, 88 % sont des jeunes femmes. Dans certaines missions locales comme celle de Thouars, dans les Deux-Sèvres, on compte même quelques filles de niveau III, ce qui est très exceptionnel pour les garçons (un garçon de niveau III à la mission locale de Saint-Flour, dans le Cantal). La mission locale départementale de l'Aveyron, où les jeunes femmes sont également plus diplômées, note que la diminution de la proportion des jeunes de niveau VI dans le public qu'elle accueille peut sans doute être imputée à la féminisation des effectifs. Le bilan d'ensemble des missions locales et PAIO de Picardie fait apparaître qu'à l'entrée 85 % des jeunes sont en niveau VI et V bis et que les garçons ont proportionnellement un niveau plus faible : 72 % d'entre eux ont un niveau VI contre 60,5 % des jeunes filles, et celles-ci sont pratiquement deux fois plus nombreuses (12,23 % contre 6,44 %) à avoir un CAP ou un BEP (niveau V).

Les chiffres constatés à l'échelon national constituent une moyenne et la supériorité des jeunes femmes quant au niveau de formation à l'entrée dans le programme TRACE admet bien sûr des exceptions locales . Certaines missions d'insertion, comme celles de Montereau, dans la Seine-et-Marne, ou de Pau, dans les Pyrénées-Atlantiques, déclarent un niveau de formation similaire pour garçons et filles, ou plus élevé pour les premiers, comme l'Espace Jeunes du Haut Jura où aucun représentant du sexe masculin ne figure en niveau VI et où le niveau IV compte 19 garçons pour 13 filles (avec, certes, un public féminin globalement légèrement inférieur : 34 contre 40) ou la mission locale d'Amboise qui comptabilise en niveau VI 24% des jeunes femmes et 18% des jeunes hommes et en niveau IV 8% de l'effectif masculin contre 2% seulement du public féminin. Par ailleurs, si les filles sont souvent plus nombreuses en niveau IV, il arrive aussi, même si le cas est plutôt rare, qu'elles soient plus nombreuses aux deux extrêmes, c'est-à-dire également en niveau VI, comme à la mission locale du Roussillon, ou à celle du bassin d'emploi de Sarreguemines qui, en cumulé, enregistre 33 femmes sur 105 en niveau VI contre 24 hommes sur 109 (12 femmes et un seul homme en niveau IV).

Le public féminin présente d'autres particularités.

La première est liée à la situation familiale . Les bénéficiaires du programme TRACE sont le plus souvent célibataires (neuf fois sur dix d'après la DARES). Mais il leur arrive de vivre en couple et même d'avoir un ou plusieurs enfants, et un tel cas se rencontre beaucoup plus fréquemment chez les jeunes femmes : 15 % d'entre elles ont une vie maritale contre 5 % des jeunes hommes et elles sont majoritaires parmi les chargés de famille. Mme Brigitte Grésy a indiqué devant la délégation que 3 % des effectifs de TRACE percevaient l'allocation de parent isolé (API) et qu'il s'agissait dans neuf cas sur dix d'une femme.

A la mission intercommunale de l'Ouest, à la Réunion, près de 20 % des jeunes femmes sont mariées ou mènent une vie maritale (contre moins de 6 % des hommes), elles sont 53 (sur un effectif total de 305) à avoir un enfant, 13 à en avoir deux et 3 à en avoir trois (3 hommes ont un enfant, 1 en a deux et un autre plus de quatre). De même, les mères célibataires sont nombreuses à la PAIO du Lorrain à la Guadeloupe : 8 sur 24, elles représentent un tiers du public féminin 10 ( * ) .

On rencontre des situations comparables en métropole, même si elles sont moins nombreuses. Ainsi, la mission locale du Centre-Var compte quatre fois plus de jeunes femmes que de jeunes hommes en situation maritale et 5 femmes célibataires avec enfant(s). A la mission locale de l'Agglomération tarbaise, 6 % des jeunes femmes entrées dans le programme TRACE étaient mariées et 12 % menaient une vie maritale. Le taux de célibat est de 95 % chez les jeunes hommes et de 86 % chez les jeunes femmes accueillis par la mission locale de Brive-la-Gaillarde, en Corrèze. A la mission locale de Saint-Flour, 8 femmes sont mariées ou en vie maritale, ce qui n'est le cas que d'un seul homme. Parmi le public TRACE de la PAIO de Bar-sur-Aube, tous les hommes sont célibataires, 3 femmes sont mariées, 3 autres vivent maritalement et deux d'entre elles totalisent quatre enfants. A la mission locale de l'Agglomération caennaise Hérouville-Saint-Clair, 20 % des jeunes femmes du programme sont chargées de famille contre 6,5 % des jeunes hommes. A la mission locale de Montluçon, elles sont la même proportion (un cinquième) et 13 % élèvent seules leur(s) enfant(s).

Plus souvent en vie maritale que leurs homologues masculins, les jeunes filles du programme TRACE sont aussi plus indépendantes puisqu'un quart d'entre elles, contre un dixième des jeunes hommes, vivent en dehors du domicile parental. Comme l'a relevé Mme Brigitte Grésy devant la délégation, le fait que le public féminin ait à faire face plus souvent aux charges de famille et à l'autonomie financière atteint ses possibilités de choix professionnels.

Autre particularité, on trouve plus d'étrangers non-européens parmi les jeunes femmes . En 2000, près d'un jeune sur dix entré dans le dispositif était de nationalité étrangère et le plus fréquemment originaire d'un pays extra-communautaire. Les jeunes filles étaient plus souvent de nationalité non-européenne que les jeunes hommes (9 % contre 7 %) (le phénomène connaît parfois des illustrations spectaculaires : ainsi, dans les Bouches-du-Rhône, la mission locale du Pays salonais comptabilise 28 jeunes filles d'origine étrangère hors CEE -soit 15 % des effectifs féminins du programme- et aucun garçon dans une situation similaire ; à la mission locale de la Brie et des Morins, en Seine-et-Marne, n'ont pas la nationalité française 5 jeunes dont 4 filles) .

Cette donnée statistique illustre les difficultés d'insertion professionnelle propres aux jeunes filles d'origine étrangère.

* 10 A l'occasion de la discussion de la loi d'orientation pour l'outre-mer au printemps 2000, la délégation avait attiré l'attention sur le nombre des familles monoparentales dans les départements d'outre-mer, notamment aux Antilles, et les difficultés qu'elles rencontrent, en rappelant que le chef de famille est, dans l'écrasante majorité des cas, un femme (rapport n° 361/1999-2000 - rapporteur Mme Dinah Derycke).

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