C. L'ACCLIMATATION D'UN NOUVEAU MODE DE RÉGULATION

1. L'ART : de la contestation...

a) La contestation de l'opposition de 1996

Malgré l'instauration, depuis les années 1980, d'une quinzaine d'autorités administratives indépendantes, la création, par la loi précitée du 26 juillet 1996, d'une Autorité de régulation des télécommunications (ART) fut vivement contestée par l'opposition parlementaire de l'époque.

Il est vrai qu'il était plus aisé de contester les modalités françaises de la régulation du secteur, qui relèvent de décisions nationales, au titre de la subsidiarité, que de remettre en cause l'ouverture à la concurrence, unanimement programmée à Bruxelles par les gouvernements successifs...

L'ART, ses pouvoirs, sa composition, avaient donc concentré nombre de critiques.

Lors de la présentation du projet de loi devant l'Assemblée nationale 36 ( * ) , François Fillon avait fort bien décrit la logique conduisant à la création de l'ART :

« Pourquoi une institution indépendante ? Parce que l'opérateur principal sur le marché, celui qui assurera le service public, restera sous le contrôle de l'Etat.

« Cette raison est déterminante : l'Etat ne saurait demeurer l'actionnaire majoritaire de France Télécom et prétendre en même temps faire respecter la loi du marché avec toute l'impartialité requise. Placer la puissance publique en position de juge et partie , cela reviendrait à fausser les règles de la concurrence, à décourager la libre entreprise, bref à tuer dans l'oeuf la libéralisation de nos télécommunications. La nouvelle autorité de régulation pourra, elle, garantir à tous un traitement équitable et arbitrer les litiges entre opérateurs concurrents en toute indépendance ».

Soulignons, en outre, que la création de l'Autorité de régulation des télécommunications consacrait la répartition des pouvoirs entre cette instance et le Gouvernement, qu'avait souhaitée votre commission dans le rapport d'information « L'avenir de France Télécom : un défi national ». Conformément à la tradition républicaine, le Gouvernement conserve les prérogatives essentielles, en particulier celles d'édicter la réglementation, de délivrer les licences et de contrôler le contenu et les tarifs du service public. Le vote des deux chambres du Parlement, et en particulier celui du Sénat, sur la proposition de la Commission des Affaires économiques, avait respecté cet équilibre subtil entre Gouvernement et ART, compte tenu du rôle économique et social du service public des télécommunications, mais aussi de son importance pour l'aménagement du territoire.

Ainsi, par exemple, nombre de responsabilités sont partagées entre l'ART et le ministre chargé des télécommunications. Certes, la distribution des rôles n'est pas strictement égalitaire, car la majeure partie de la régulation est dévolue à l'ART (délivrance des autorisations pour les réseaux indépendants, attribution des fréquences pour tous les réseaux, contrôle du respect par les opérateurs de leurs obligations et sanction des manquements, attribution des ressources en fréquences et en numérotation, établissement de la liste des opérateurs puissants qui sont soumis à des obligations particulières sur les marchés pertinents considérés, approbation préalable du catalogue d'interconnexion que les opérateurs puissants doivent publier...). Mais la loi a organisé un partage des rôles pour l'exercice de certaines compétences significatives , essentiellement l'homologation des tarifs de détail pour le service universel des télécommunications et les services pour lesquels il n'existe pas de concurrence (effectuée par le ministre après instruction par l'ART), la constatation par le ministre du coût du service universel à partir de la proposition de l'ART, enfin l'homologation par le ministre des décisions de nature réglementaire prises par l'Autorité dans les matières techniques mentionnées à l'article L.36-6 du code des postes et télécommunications.

La discussion des articles du projet de loi créant l'ART et définissant ses pouvoirs n'en donna pas moins lieu à une franche opposition de la part des parlementaires de la minorité de l'époque.

Ainsi, les députés du groupe socialiste en charge du dossier déposèrent-ils des amendements de suppression des dispositions portant création de l'ART, tandis que les orateurs de divers groupes de l'opposition 37 ( * ) soit adoptaient une démarche similaire, soit critiquaient fermement, dans leurs interventions orales et motions de procédure, l'instauration d'une autorité indépendante.

b) « L'épée de Damoclès » du rapport Delebarre

Après avoir refusé la perspective d'une ouverture partielle du capital de France Télécom pendant la campagne des législatives de 1997, Lionel Jospin, devenu Premier ministre, confia à Michel Delebarre, ancien ministre et député socialiste du Nord, une mission de « réflexion approfondie » sur France Télécom. Celle-ci devait ouvrir la voie, en octobre 1997, à la mise sur le marché d'une première tranche du capital de France Télécom, avec quelques mois de retard seulement par rapport au calendrier programmé par le précédent Gouvernement. En revanche, sur la question du rôle et des pouvoirs de l'ART, le rapport Delebarre, remis en septembre 1997, s'éloigne considérablement de la réforme engagée par Alain Juppé et François Fillon.

Ce rapport se demande ainsi si le Parlement et le Gouvernement avaient été assez clairs sur les « règles générales » qui devraient « encadrer » le travail de l'ART. Mettant en avant « le danger de la technicisation du débat de réglementation », le rapport Delebarre estime « qu'il suffit de parcourir les avis les plus récents de l'ART pour être convaincu d'une dérive quasi inévitable, compte tenu du domaine couvert par les télécommunications et de la précision à apporter dans certains avis ou règlements ».

Et de conclure : « Afin de limiter la dérive technicienne, l'ART doit se trouver dans l'obligation d'une relation plus étroite avec le Parlement afin de respecter des règles fondamentales de transparence, de débats... avant toute décision essentielle ».

Ces critiques n'étaient toutefois pas assorties de propositions précises quant à la réforme souhaitée de l'ART, le texte du rapport se contentant d'indiquer « qu'afin d'identifier le plus rapidement possible le contenu d'une modification éventuelle » [...] « il serait utile qu'un travail précis de comparaison entre les rôles, pouvoirs et moyens des « autorités administratives indépendantes » comparables au USA, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France soit effectué. »

A la connaissance de notre rapporteur, le Gouvernement, qui avait, lors de la conférence de presse tenue à Bercy le 8 septembre 1997, repris à son compte les conclusions du rapport Delebarre, y compris sur ce point, n'a pourtant jamais sérieusement lancé le travail préparatoire de refonte de la législation qu'aurait exigé une réforme . Dans ce domaine, les ministres de tutelle ne sont guère allés au-delà des déclarations d'intention, le communiqué de presse du 8 septembre 1997 indiquant seulement qu'une « clarification des responsabilités » était nécessaire et que le système de régulation spécifique mis en place en 1996, s'appuyant sur une autorité dotée de pouvoirs propres « sera amélioré en clarifiant les rôles respectifs du Parlement, du Gouvernement et de l'autorité indépendante ».

Au contraire, le Gouvernement issu des urnes en 1997, a dupliqué, en 2000, le modèle de l'ART à sa petite soeur du secteur de l'électricité, la Commission des régulation de l'Electricité (CRÉ).

2. ...à la consécration

a) Un modèle de régulation asymétrique  appliqué à d'autres secteurs

Une doctrine peu à peu constituée

Le débat sur la création des autorités administratives indépendantes n'est pas né avec l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications. Il est bien antérieur et a alimenté la doctrine 38 ( * ) depuis près de vingt ans.

Les autorités administratives indépendantes se sont créées dans un contexte de débat doctrinal intense, nourri par les expériences étrangères conduites antérieurement ou parallèlement, notamment aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, au Canada ou en Italie.

Comme le souligne le récent rapport du Conseil d'Etat, consacré à cette question, le débat s'est focalisé sur deux volets : l'un, dépassant très largement le cadre national, portant sur la régulation des activités économiques et sociales dans une économie de marché et sur le rôle de l'Etat dans cette régulation ; l'autre, de caractère plus spécifiquement français, et de contenu plus juridique, portant sur la possibilité d'insérer dans notre système institutionnel des autorités administratives agissant au nom de l'Etat sans être subordonnées au Gouvernement .

Le premier débat, relatif à la régulation des activités économiques dans une économie de marché et au rôle de l'Etat dans cette régulation, est le corollaire d'un certain désengagement de l'Etat, fruit d'une volonté de « démonopolisation » mise en oeuvre depuis les années 1980, en France, comme dans toute l'Europe, selon un mouvement continu, qui culmine avec l'ouverture à la concurrence d'activités jusque-là monopolistiques parce que dominées par le concept de service public national, comme les télécommunications ou la production et la distribution de l'électricité.

Ce mouvement d'ouverture des monopoles a fait naître un besoin d'instauration de nouveaux mécanismes, dits de « régulation », souvent confiés à des autorités distinctes de l'Etat et permettant d'apporter des garanties essentielles (suivant les cas, pluralisme, organisation de services pour toute la population, transparence...) au fonctionnement d'un marché, tout en assurant avec pragmatisme et réactivité l'adaptation du cadre réglementaire aux évolutions de ce marché.

La doctrine définit ce modèle de régulation, comme « un ensemble de techniques articulées entre elles pour organiser ou maintenir des équilibres économiques dans des secteurs qui n'ont pas, pour l'instant ou par leur nature, la force et les ressources de les produire eux-mêmes 39 ( * ) . »

Elle insiste sur le fait que le pragmatisme et l'efficacité guident la fonction de régulation : « un des attraits du système de régulation aux mains d'un régulateur autonome est le souci d'effectivité. On attend, en effet, de la régulation qu'elle assure en continu l'interactivité entre le droit et le fait. Ce qui vent dire qu'il appartient à l'autorité de régulation de faire évoluer en permanence la règle qu'elle applique pour mieux suivre l'évolution de comportements sur le terrain ou l'inventivité des opérateurs, et qu'elle doit parallèlement mettre fin en permanence aux comportements déviants ou susceptibles d'affecter les équilibres du système et plus encore, si possible, les prévenir ». 40 ( * )

La création de l'ART a permis de franchir une étape supplémentaire dans l'acclimatation, dans la tradition juridique française, de ce système de « régulation ». Plus spécifiquement, elle représente un modèle en matière de régulation « asymétrique », c'est-à-dire de régulation spécifique à un secteur, se superposant au droit commun de la concurrence, appliquée à un ancien monopole, où la position dominante d'un opérateur risque d'étouffer toute éclosion de la concurrence.

Un modèle dupliqué

D'ailleurs, la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, en créant la Commission de régulation de l'électricité (CRÉ), s'est très directement inspirée du modèle de l'ART, qu'il s'agisse de sa composition 41 ( * ) , des garanties d'indépendance de ses membres 42 ( * ) ou de ses pouvoirs : règlement des différends, pouvoir de sanction, approbation des tarifs de raccordement au réseau de transport d'électricité, pouvoir réglementaire d'application... Réciproquement, votre rapporteur estime que certaines lacunes dans le statut des membres du collège de l'ART 43 ( * ) devraient désormais être alignées sur le statut des membres de la CRÉ .

Lors de la discussion de cette loi, de nombreux ajouts du Sénat, proposés par son rapporteur notre collègue Henri Revol, ont d'ailleurs été conservés dans le texte promulgué, qui renforcent encore la similitude entre l'ART et la CRÉ, preuve s'il en était besoin de l'émergence d'un consensus sur ce sujet hier conflictuel.

Malgré les contestations du début de la législature, l'ART se trouve ainsi pleinement légitimée.

Soulignons également que l'ART a su construire sa crédibilité tant auprès des acteurs du secteur que dans ses relations avec d'autres institutions (le Conseil de la concurrence notamment), voire avec des juridictions (Cour d'appel de Paris) auxquelles ses décisions sont susceptibles d'être déférées. En outre, après s'être, dans un premier temps, semble-t-il par souci excessif de neutralité, quelque peu isolée du Parlement, elle a su contribuer à son information et entendre les préoccupations exprimées dans l'une ou l'autre chambre.

Votre Commission et votre groupe d'étude se félicitent de la greffe, dans le paysage institutionnel français, de ce modèle de régulation original qui paraît plus équilibré que celui adopté dans d'autres pays de l'Union européenne.

Les pouvoirs respectifs des gouvernements et des régulateurs indépendants se répartissent, en effet, de manière très différente dans les autres pays de l'Union européenne. En dépit d'une base commune, constituée par l'ensemble des textes communautaires actuellement applicables, la transposition qui a pu en être faite, dans les différentes Etats membres, oscille, en effet, entre un dessaisissement presque complet des instances gouvernementales au profit du régulateur et un rattachement direct du régulateur au ministre compétent. Le Portugal ou la Finlande illustrent le premier cas, la Belgique le second.

Au cours des entretiens tenus par votre rapporteur avec différents acteurs du secteur, plusieurs observateurs ont fait valoir le caractère « tempéré » de la régulation française en matière de télécommunications , par opposition avec des systèmes plus tranchés. Plusieurs personnes ont ainsi cité des décisions de l'OFTEL anglais ou du régulateur néerlandais, l'OPTA, parmi les causes des difficultés actuellement rencontrées par les opérateurs BT et KPN. Interrogée par votre rapporteur, la mission économique de la France aux Pays-Bas a fourni des éléments permettant de corroborer cette analyse.

Il en ressort que l'autorité de régulation néerlandaise s'est montrée particulièrement vigilante, lors de l'ouverture du marché, pour éviter tous abus de position dominante par l'opérateur historique. L'OPTA a ainsi imposé à KPN plusieurs mesures entraînant des coûts supplémentaires ou des manques à gagner importants :

- portabilité effective des numéros depuis le 1er avril 1999 ;

- révision du plafond tarifaire basé sur les appels nationaux jugés trop onéreux par l'OPTA ;

- obligation d'accès des autres opérateurs à son réseau fixe, à des tarifs inférieurs à ceux proposés aux abonnés de KPN ;

- obligation de partage des sites d'antennes avec les concurrents en téléphonie mobile.

En outre, les audits périodiques d'évaluation de l'OPTA mesurent son efficacité par la perte de parts de marché de KPN sur son marché domestique.

Ce modèle n'est pas celui, plus nuancé, institué en France par la loi du 26 juillet 1996.

b) Une instance désormais reconnue

Parmi les nombreux acteurs interrogés par votre rapporteur, bien peu réclament une remise en cause autre que marginale (et d'ailleurs parfois dans le sens d'un renforcement) des pouvoirs de l'ART.

Bien sûr, certaines personnes interrogées par votre rapporteur sont restées, depuis l'instauration de l'ART, hostiles à ce type de régulation. Ainsi, par exemple, le syndicat CGT-PTT estime-t-il que :

« La composition de l'ART est à revoir, tout comme ses finalités : représentativité d'élus, d'usagers, d'associations, de représentants d'entreprises et d'organisations professionnelles, de personnes qualifiées...

« Son rôle serait d'évaluer, de répondre aux attentes de la société, indépendamment des marchés boursiers ou des contraintes budgétaires. A ce sujet, nous demandons une révision de la Directive européenne concernant les organismes de régulation. »

Mais en ce qui concerne les représentants des entreprises soumises à la régulation, personne ne conteste la légitimité de l'ART.

Dans sa réponse écrite au questionnaire de votre rapporteur, France Télécom indique que « la répartition actuelle des pouvoirs entre l'ART et le Gouvernement, telle que voulue par le législateur en 1996, paraît satisfaisante », même si, lors de son audition 44 ( * ) devant la Commission des Affaires économiques, M. Michel Bon a souhaité que le secteur des télécommunications soit progressivement soumis au droit commun de la concurrence, une régulation spécifique ne demeurant, à son sens, nécessaire que pour les questions les plus techniques (comme l'interconnexion).

De leur côté, les associations d'opérateurs réclament toutes un renforcement de l'ART et de ses pouvoirs.

L'AFORS 45 ( * ) Télécom insiste particulièrement sur l'indépendance de l'ART et le renforcement de ses pouvoirs et de l'effectivité de ses décisions.

POSITION DE L'AFORST SUR LE MODÈLE FRANÇAIS
DE RÉGULATION DES TÉLÉCOMMUNICATIONS

Un certain nombre de missions réglementaires sont partagées en France entre un régulateur indépendant, l'ART, et le Ministère chargé des télécommunications, également autorité de tutelle de l'opérateur historique, France Télécom.

L'AFORS Télécom souhaite souligner la nécessité de séparer complètement les fonctions d'actionnaire de l'opérateur historique et d'autorité réglementaire.

S'agissant de l'ART, il convient :

- de renforcer de manière générale les pouvoirs de l'ART dans les domaines qui sont les siens ; ainsi une régulation forte est indispensable dans les domaines propres aux télécommunications, comprenant notamment les conséquences de la position de dominance initiale de l'opérateur historique, les conditions de l'interopérabilité entre opérateurs et la gestion des ressources rares; en revanche, les sujets qui ne relèvent pas de ces spécificités doivent rester du droit commun de la concurrence ;.

- d'assurer l'efficacité des décisions prises en vertu des pouvoirs qui doivent être ceux de l'ART en matière d'investigation, de décision et de sanctions afin qu'ils puissent s'imposer à tous, y compris à l'opérateur historique.

L'association des fournisseurs d'accès à Internet (AFA) souhaite elle aussi un renforcement des pouvoirs de l'ART, particulièrement pour la mise en oeuvre de ses décisions, ainsi qu'une clarification des rôles entre le Gouvernement et l'ART.

« L'actuelle répartition des pouvoirs entre l'ART et le gouvernement n'est pas satisfaisante. En principe, le gouvernement réglemente, et l'ART régule à partir des règles définies par le parlement et par le gouvernement. Ce dernier, du fait de son rôle d'actionnaire majoritaire de France Télécom, peut se trouver dans la position difficile où, en réglementant ou en ne réglementant pas (par exemple par une transposition tardive voire insatisfaisante de directives européennes), il joue de facto un rôle de régulation.

« L'AFA est donc attachée à ce que chacun puisse jouer pleinement et exactement son rôle, et soutiendra toute initiative permettant d'éviter au gouvernement de se retrouver en position de régulateur.

« Dans l'immédiat, outre le maintien des pouvoirs d'homologation a priori des tarifs d'interconnexion de France Télécom, l'AFA est favorable à ce que l'ART dispose de pouvoirs d'astreinte, comme la plupart de ses homologues européens, afin que ses décisions soient respectées par les opérateurs auxquels elles s'appliquent. »

Au rebours de ces propositions, le secrétariat d'Etat à l'industrie propose, dans sa réponse écrite à votre rapporteur, de « mettre à l'étude la création d'un commissaire du Gouvernement » auprès de l'ART. Cette solution avait été rejetée dès 1996 car elle altère la collégialité de l'organisme et institue des doutes sur son indispensable indépendance. Rappelons, en outre que, dans le modèle de régulation français, le Gouvernement n'est pas dénué de leviers d'action pour impulser la politique industrielle qu'il souhaite, sans qu'il soit besoin d'instituer, dans le secteur des télécommunications, une quelconque tutelle sur l'ART.

Les câblo-opérateurs réunis au sein de l'AFORM 46 ( * ) soulignent l'efficacité de la procédure d'arbitrage mise en oeuvre par l'ART : « Le pouvoir d'arbitrage concédé à l'ART, conformément aux articles L-36 et suivants du Code des Postes et des Télécommunications, lui permet de tenir efficacement son rôle de régulateur au sein du marché et ses décisions régulières d'arbitrage constituent aujourd'hui un corpus incontournable de règles fixant les relations entre opérateurs. Par ailleurs les conditions de mise en oeuvre de la procédure d'arbitrage ainsi que les critères d'éligibilité aux mesures conservatoires constituent pour les nouveaux entrants un dispositif efficace dans le règlement de différents. Enfin, les délais fixés par décret concernant les décisions d'arbitrage sont acceptables et compatibles avec la vie d'une entreprise » .

Très peu de personnes sollicitées par votre rapporteur se sont montrées favorables à la création d'un régulateur européen, ou à une fusion entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) et l'ART, préférant le maintien de l'ART dans sa forme actuelle.

* 36 Voir le Journal officiel des débats du 10 mai 1996.

* 37 Mme Ségolène Royal, MM. Jean-Claude Gayssot et Georges Sarre, notamment.

* 38 Le Conseil d'Etat, par exemple, a consacré aux autorités administratives indépendantes ses rapports publiés en 1983 et en 2001.

* 39 Marie-Anne Frison-Roche « La victoire du citoyen client ». Sociétal. n° 30, page 49.

* 40 Rapport 2001 du Conseil d'Etat, page 280.

* 41 A l'exception notable de l'association à ses délibérations d'un commissaire du Gouvernement, il est vrai justifié par le choix stratégique français de l'électronucléaire.

* 42 Incompatibilités, inamovibilité, non renouvellement.

* 43 S'agissant notamment du régime de retraite des membres de l'ART anciens fonctionnaires.

* 44 Compte rendu en annexe du présent rapport.

* 45 Association française des opérateurs de réseaux et de services, regroupant les opérateurs privés de télécommunications.

* 46 Association française des opérateurs de réseaux multiservices.

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