5. M. André Bohl, président de l'Association nationale des régies de services publics et des organismes constitués par les collectivités locales (ANROC)

La loi de transposition de février 2000 n'a rien changé à la loi de 1906 sur la distribution de l'électricité et à celle de 1946 sur les nationalisations. Il peut donc y avoir des contradictions juridiques qui risquent d'être un jour sources de conflits. Cette loi électricité définit le service public comme une obligation nationale française. L'État assure la cohérence des approvisionnements, fixe les règles de la concurrence et confie le transport à EDF qui a créé RTE. Les collectivités « concédantes » ou exploitantes directes assument la distribution sur leur seul territoire dans le cadre de contraintes techniques, sociales et environnementales. La complexité des réseaux et l'impératif de sécurité de fourniture s'imposent à ces distributeurs, comme les règles sociales des personnels des IEG. La politique d'environnement s'impose également sur la construction des lignes et sur les obligations d'achat. Le marché européen est singulièrement « ouvert » pour la production, mais séparé pour la fourniture et l'acheminement, qui regroupe transport et distribution.

L'éligibilité des clients est partielle et a comme conséquence pour le distributeur, l'obligation d'effectuer une partition de ses achats. Comme les réseaux de distribution sont communs aux clients, éligibles ou non, une entreprise peut difficilement assumer leur développement si le tarif d'accès varie selon la fiscalité locale, et les traders feront des bénéfices sur ces opérations. Nous ne sommes donc plus dans le cadre de la concurrence. Les déficits éventuels sont partiellement pris en charge par le Fonds d'amortissement (FACE) ou de péréquation (FPE). C'est donc le contribuable local qui paiera la différence.

Car les prix sont administrés pour des tarifs de fourniture et de péage d'acheminement. Une partie du péage est reversée au RTE par le distributeur, le déséquilibre de ses comptes pouvant entraîner la responsabilité du réseau de distribution. La valeur des réseaux qui appartiennent aux collectivités locales est difficile à apprécier en raison des concessions provisoires (depuis 1946) à EDF et GDF. Enfin, les communes se voient confisquer par l'État des réseaux qu'elles ont réalisés.

En conclusion, si l'ouverture du marché a été heureusement possible aux clients éligibles, il serait maintenant utile d'étudier les statuts juridiques et économiques des opérateurs des pays européens. Pour permettre l'exercice de la concurrence sans pénaliser le client captif ni charger le contribuable, il y a lieu de réviser le statut de la concession et d'autoriser l'éligibilité totale des entreprises locales de distribution ayant un client éligible. Le principe de la territorialité d'exercice de ces entreprises, s'il est cohérent avec le recours de la fiscalité locale en cas de déficit, ne l'est pas dans le cadre d'une ouverture du marché.

Il faudrait enfin s'interroger sur la possibilité pour ces entreprises de globaliser leurs achats pour faire face à la concurrence. La création de services d'achats et de fournitures est une modalité indispensable au bon fonctionnement de la concurrence.

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