C. LA NÉCESSITÉ D'UN RENFORCEMENT DU TRAITMENT SOCIAL DE LA PROSTITUTION

En même temps qu'il combat le proxénétisme, l'abolitionnisme cherche à prévenir la prostitution et à réinsérer les prostituées. La Convention du 2 décembre 1949 qu'il a inspirée, comme les ordonnances de 1960 qui ont appliqué cette dernière en France, ont donc nécessairement une dimension sociale.

En 2000, la délégation avait analysé en détail le dispositif de prévention et de réinsertion et constaté que l'approche française de la prostitution pêchait par son très maigre bilan social. Aucune avancée significative ne semble avoir été enregistrée depuis la publication du rapport d'information de la délégation.

Il convient de noter, au demeurant, que le volet réinsertion de la politique à l'égard de la prostitution a, de façon générale, été peu développé dans les Etats de l'Union européenne, y compris dans un pays comme la en Suède ou une loi prévoit cependant la suppression, dans certaines conditions, des dettes de la personne qui s'est livrée à la prostitution et souhaite en sortir.

En France, plus d'une vingtaine d'associations qui mobilisent près de 600 travailleurs sociaux et 700 bénévoles viennent en aide aux personnes qui se livrent à la prostitution. Le phénomène de la traite a singulièrement compliqué leur travail ; en effet, la population qui se livre à la prostitution a fortement évolué : il ne s'agit plus seulement d'aider des femmes françaises ou francophones par un suivi matériel, médical, social ; les associations ont aussi maintenant affaire à des femmes, des hommes, majeurs ou mineurs, le plus souvent étrangers, sans aucune connaissance ou presque de notre langue, sans papiers, soumis à des violences extrêmes et démunis de tout.

Le constat des représentants de ces associations est quasi unanime : financés essentiellement sur des problématiques de santé, ils n'ont pas vocation à intervenir directement pour soustraire ces jeunes à leur milieu et il leur est proprement insupportable, humanitairement parlant, de ne pouvoir apporter de réponse. Ne disposant pas, par exemple, de structures d'hébergement sécurisées qui mettraient les victimes à l'abri des trafiquants, les associations ont recours à toutes sortes de ressources pour leur offrir un refuge, et parfois, n'y parvenant pas elles-mêmes, font appel à des institutions religieuses.

Afin de stimuler une mobilisation accrue des moyens en faveur de la réinsertion et de la protection des personnes, la délégation préconise l'institution d'un Défenseur des victimes de l'exploitation sexuelle, autorité indépendante, dont la mission serait de servir d'interlocuteur permanent des associations, des services sociaux, des services de police et de justice qui sont confrontés à la prostitution. Cette institution pourrait fédérer les attentes et les besoins ainsi que les réponses à leur apporter, notamment en termes de structures d'accompagnement des décisions judiciaires et d'hébergement d'urgence.

Cette institution pourrait veiller au suivi concret de recommandations telles que celles formulées en 2000 par la délégation, tendant à améliorer la prévention et la réinsertion, notamment par un accroissement des soutiens aux associations qui oeuvrent dans le domaine de la prostitution et font un travail souvent remarquable, et par la définition des mesures fiscales et des conditions d'hébergement permettant d'aider les personnes à quitter la prostitution.

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