B. DES PAYS ENCOURAGEANT FORTEMENT LA TRANSMISSION ANTICIPÉE DU PATRIMOINE : LA GRANDE BRETAGNE ET LA BELGIQUE

Ont été regroupées dans cette catégorie la Grande-Bretagne et la Belgique dans la mesure où leurs législations fiscales en matière de mutation à titre gratuit ont pour trait commun d'exonérer totalement les donations consenties à tout donataire, quel que soit son lien de parenté avec le donateur, dès lors que ce dernier ne décède pas respectivement dans les sept ou trois ans de la mutation. C'est cette caractéristique commune qui confère à ces deux pays une compétitivité fiscale particulièrement efficace.

Cependant, la Grande-Bretagne aurait également pu, dans une certaine mesure, figurer dans la catégorie précédente en ce que son régime des mutations à titre gratuit prévoit notamment une exonération totale de droits lorsque la mutation intervient, sous certaines conditions, au profit du conjoint . Cependant, il serait impropre de classer la Grande Bretagne dans cette première catégorie dans la mesure où il ne s'agit pas d'exonération globale comme en Italie ou en Suisse dans certains Cantons, mais limitée aux transmissions aux conjoints.

Il convient encore de noter qu'au contraire de la Grande-Bretagne, si l'on fait exception du régime des donations, la fiscalité des mutations à titre gratuit en Belgique n'est pas beaucoup plus favorable que celle de la France. En effet, la tranche marginale du barème, certes imposée à 30%, contre 40% ou 60% en France, est cependant atteinte à partir de 500.000 euros. En outre, l'abattement accordé au conjoint ainsi qu'aux descendants en ligne directe est limité à 12.500 euros. Si ce n'était pour le régime d'exonération applicable aux dons manuels, la Belgique devrait donc être classée dans la troisième catégorie.

1. Exonération des donations en Grande-Bretagne en l'absence de décès du donateur dans les 7 ans de la donation

Au Royaume-Uni, le régime des mutations à titre gratuit a été unifié. Les donations et les successions sont ainsi assujetties à l' « Inheritance Tax » introduite en 1986, qui a remplacé la « Capital Transfer Tax » qui était en vigueur depuis 1975 et qui avait elle-même succédée à l' « Estate Duty ».

Le système britannique exonère largement la transmission anticipée du patrimoine par la notion de « Potentially Exempt Transfers » ou mutations potentiellement exonérées, permettant d'exonérer de tous droits de nombreuses catégories de donations. Le régime britannique prévoit ainsi l'exonération des donations en l'absence de décès du donateur dans les sept ans de la donation.

La Grande-Bretagne constitue ainsi, de par ce régime mais également en raison de l'exonération totale de droits prévue pour les transmissions entre époux domiciliés au Royaume-Uni au sens du droit fiscal anglais (« UK domiciled ») et de l'abattement très significatif de 396.000 euros (242.000 £) applicable au profit de tous donataires ou héritiers (et qui correspond en pratique à la tranche à taux zéro), un pays très attractif.

En outre, les donations dont la valeur n'excède pas annuellement 4.920 € (3.000 £) ne sont pas taxables. Cet abattement présente la particularité d'être reportable sur les années suivantes et permet de constituer une « réserve » de donation en franchise de droits.

En revanche, en cas de décès dans les sept ans de la donation, celle-ci est alors taxée au taux unique de 40% 54 ( * ) . Cependant, ce taux est réduit graduellement selon la date du décès plus ou moins proche de celle de la donation et varie ainsi de 8 à 40%.

La donation à un trust discrétionnaire, bien qu'entraînant la taxation immédiate de la mutation, permet de réduire le taux d'imposition à 20%. Cependant, en cas de décès du donateur dans les sept ans de ce transfert, un complément de droit de 20% est alors exigible. Toutefois, de même que précédemment, ce complément de droit est réduit selon la date du décès plus ou moins proche de celle de la mise en trust.

Le droit des mutations à titre gratuit britannique présente encore la particularité d'entraîner lors d'une donation, la taxation de la plus-value latente existant au jour de la donation sur le bien transmis. La plus-value est ainsi taxée au taux de 40% entre les mains du donateur sauf lorsqu'il s'agit de biens affectés à l'exercice d'une activité professionnelle (cf. ci-après régime des entreprises) ou en cas de recours à un trust discrétionnaire. En effet, l'imposition de la plus-value est alors reportée jusqu'à la cession ultérieure des biens concernés par le bénéficiaire.

Cependant, cette taxation est largement atténuée par l'application de la règle du « taper relief », système comparable au système français applicable en matière de plus-values immobilières ; la plus-value taxable est réduite par un abattement qui est fonction de la nature du bien cédé ( i.e. , bien professionnel ou privé) et de sa durée de détention. Ainsi, s'agissant de biens professionnels, la réduction maximale de la plus-value (75%) est atteinte au-delà de 4 ans de détention, soit un taux effectif d'imposition de 10%. Pour tous les autres biens, la réduction maximale (40%) est atteinte au-delà de 10 ans de détention, soit un taux effectif d'imposition de 24%. Par ailleurs, les plus-values réalisées au cours de l'année et n'excédant pas un total d'environ 12.277 € ( i.e. , 7.500 £) ne sont pas taxables.

En revanche, en cas de transmission par décès, la plus-value latente est purgée et donc totalement exonérée.

Ce régime des mutations à titre gratuit particulièrement favorable est illustré par le fait que seules 4% des successions sont imposables. Ceci est encore accentué par l'absence d'imposition de la fortune en Grande-Bretagne.

2. Exonération des donations en Belgique en l'absence de décès du donateur dans les 3 ans de la donation

Le régime fiscal des donations belge (notamment des dons manuels) prévoit que les donations sont exonérées à la double condition qu'elles ne fassent pas l'objet d'un acte enregistré en Belgique (ce qui conduit à exclure des donations d'immeubles situés en Belgique ou de droits portant sur de tels biens pour lesquels l'enregistrement de la donation est obligatoire) et que le donateur ne décède pas dans les trois ans de la donation.

Cependant, afin de donner date certaine aux donations et de faire courir le délai de 3 ans, les donations sont enregistrées à l'étranger et en pratique, plus particulièrement aux Pays-Bas où les donations ne sont pas taxées du fait de leur enregistrement.

Ce régime est particulièrement attractif en ce sens qu'il permet de transmettre tout ou partie de son patrimoine en franchise de droit.

En revanche, en cas de décès dans les trois ans de la mutation, la donation est alors taxée selon le régime applicable aux successions, c'est à dire selon un taux progressif dont le taux marginal est de 30% entre époux et en ligne directe au-delà de 500.000 €, et respectivement de 65% entre collatéraux, 70% entre parents jusqu'au 4ème degré et de 80% entre parents au-delà du 4ème degré et non parents au-delà de 175.000 €.

Il convient encore de noter que bien que la plus-value latente existant sur le bien objet de la mutation ne soit pas purgée du fait de la donation, l'efficacité de ce régime est encore renforcée dans la mesure où il se combine avec le régime d'exonération des plus-values des particuliers en Belgique (sauf lorsqu'il s'agit de cessions de biens professionnels). En outre, la Belgique ne taxe pas la fortune.

A titre de remarque, on notera que les règles exposées ci-dessus ne concernent que le régime applicable au niveau national. Or, du fait de l'autonomie législative et fiscale des régions flamande et wallonne, ces règles peuvent varier sensiblement d'une région à l'autre.

* 54 Lorsque le montant de la donation excède 396.880 € (cet abattement étant applicable tous les sept ans).

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