CHAPITRE IV

PROPOSITIONS : SOUTENIR LES FILIÈRES
DE HAUTE TECHNOLOGIE

Il n'est plus utile aujourd'hui de souligner le rôle des filières de haute technologie dans l'économie des grandes nations scientifiques. Chacun s'accorde à estimer que ce rôle va s'accroître.

C'est un risque réel qui peut conduire à la marginalisation et au déclin. C'est aussi une chance à saisir par notre pays.

Les références théoriques qui orientent aujourd'hui l'économie mondiale dénoncent explicitement le volontarisme politique en la matière.

Comment ? Il devient plus difficile, compte tenu des règles européennes et du dispositif de l'OMC, de mener une politique industrielle, au sens traditionnel du terme .

Pourtant, dans le même temps, la puissance qui a, le plus, porté le discours libéral et la progression de la mondialisation est celle qui soutient le plus massivement ses secteurs industriels de haute technologie .

D'autres la suivent.

En grossissant le trait, on a l'impression que la France a partiellement décroché de cette évolution ; qu'elle a suivi, depuis une dizaine d'années, les prescriptions du tout libéral sur la non-intervention de l'État dans le secteur industriel, fût-il stratégique à terme, en abandonnant ses modes d'intervention habituels sans lui en substituer d'autres.

Rappelons que si le CEA-LETI existe à Grenoble, c'est grâce à une volonté politique forte, à l'origine centrée vers la constitution d'une force atomique indépendante.

Rappelons également qu'il y a moins de dix ans, près de 50 millions d'euros de crédits de la Délégation générale à l'armement permettaient de soutenir certains des secteurs de la recherche technologique de base 24 ( * ) .

Rappelons, enfin, que consécutivement à la privatisation de France Telecom et à la disparition du CNET, 600 millions d'euros ( 300 millions d'euros pour le CNET, 300 milliards d'euros pour la direction des affaires industrielles de France Telecom ) ne sont plus dérivés annuellement vers la recherche et le développement dans les filières de haute technologie .

Ces ressources importantes et récurrentes n'ont pas été remplacées :

- les crédits que, d'après la loi de 1994, France Telecom est tenue de consacrer à la recherche (4 % de son chiffre d'affaires) sont consacrés de façon prioritaire par France Telecom à son métier d'opérateur, et non à la recherche fondamentale,

- les réseaux , qui devaient compenser la disparition du CNET (réseau national de recherche en télécommunications : 15 millions d'euros en 2003, réseau national des micro- et nanotechnologies : 12 millions d'euros en 2003, réseau national en technologies logicielles : 15 millions d'euros), n'allouent plus que des fonds annuels inférieurs à 50 millions d'euros.

Ce collapsus brutal des aides directes n'a pas été relayé par un accroissement des aides indirectes à la recherche en entreprises, comme, par exemple, le crédit d'impôt-recherche.

Le monde a changé et la réalité des pratiques étrangères ne peut être ignorée. Il faut en tirer toutes les conséquences.

Si la France ne met pas à niveau sa politique de soutien et si elle n'adapte pas ses modes d'intervention aux filières de haute technologie, elle ne participera pas réellement à la nouvelle révolution industrielle qui se prépare.

*

* *

Il est donc urgent d'agir.

Si notre pays a certains atouts, l'étude a prouvé que dans les secteurs stratégiques des semi-conducteurs et des micro et nanotechnologies, il n'y avait pas de position définitivement assise.

Quelles pourraient être les bases d'une nouvelle politique industrielle destinée à encourager les filières de haute technologie, en particulier celle des semi-conducteurs et des micro et nanosystèmes ?

Les propositions qui suivent sont l'esquisse d'une première réflexion.

* 24 En 1991, la dépense militaire représentait 63 % du budget de recherche-développement français, elle n'en représentait plus que 21 % en 2001.

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