II. MAINTENIR UNE PAC FORTE SUR SES DEUX PILIERS

A. CONFORTER LE PREMIER PILIER : LA COLONNE VERTÉBRALE DE LA PAC

1. Un rôle structurant

La mission d'information considère que le premier pilier est la pierre angulaire de la PAC et qu'il doit le rester.

L'Union européenne est une grande puissance agricole. Cette situation ne saurait être appréhendée comme un problème ou une anomalie transitoire, mais comme un véritable atout à préserver . En témoigne l'attitude des Etats-Unis, autre grande puissance agricole, qui n'éprouvent aucun scrupule à soutenir ouvertement, par une politique volontariste, une agriculture à laquelle ils confèrent une dimension stratégique.

Le maintien et le renforcement des outils du premier pilier sont nécessaires pour garantir, filière par filière, la compétitivité des différentes productions agricoles européennes .

Si des excès ont bien été constatés au tournant des années 1980, illustrés par les montagnes de beurre et de poudre de lait, ils sont maintenant corrigés. Dans la plupart des productions, les stocks sont aujourd'hui à des niveaux historiquement bas, comme l'a constaté M. Michel Fosseprez, membre du Bureau de la Confédération française de la Coopération agricole (CFCA) lors de son audition au Sénat.

Même si, dans le secteur laitier, des stocks de beurre (196.000 tonnes au 27 mars 2001) et de poudre de lait écrémé (100.000 tonnes à la même date) se sont récemment constitués, ils sont, avant tout, le reflet d'une mauvaise conjoncture mondiale et, en tous cas, sans commune mesure avec les stocks enregistrés au début des années 80 (de l'ordre d'un million de tonnes tant pour le beurre que pour la poudre de lait écrémé).

Aujourd'hui, les instruments de régulation n'ont pas vocation à opérer une gestion structurelle du marché, mais à en corriger les déséquilibres ponctuels.

Quand aux aides directes, elles ne peuvent être considérées comme une incitation à augmenter les volumes produits dans la mesure où la plupart d'entre elles sont assorties de mécanismes de contingentements , telles que les enveloppes de droits à primes pour les secteurs bovin et ovin ou les surfaces maximales garanties (SMG) pour les grandes cultures.

En outre, il convient de souligner les effets équilibrants du premier pilier en termes d'aménagement du territoire . Ainsi, les productions bénéficiant d'une organisation commune de marché (OCM) forte sont réparties de manière beaucoup plus harmonieuse sur l'ensemble du territoire européen que les productions peu soutenues par la PAC.

C'est ce que montre une étude 12 ( * ) sur la géographie de l'agriculture communautaire, publiée dans la revue Agreste du mois de décembre 2000, qui analyse l'évolution de la localisation des productions agricoles dans l'Union européenne entre 1983 et 1995.

Ainsi, les productions céréalières et bovines (lait et viande) restent présentes sur l'ensemble de l'Union européenne, alors que les productions porcines et avicoles tendent à se concentrer sur un petit nombre de bassins compétitifs. L'élevage porcin s'est installé dans les pays du Nord de l'Europe, tels que l'Allemagne, les Pays-Bas et le Danemark, mais cette concentration s'observe aussi à l'échelon français, dans la région Bretagne. De même, l'aviculture s'est principalement développée dans l'Ouest de la France et de l'Allemagne, aux Pays-Bas et au Danemark.

Il convient, à cet égard, d'insister sur l'impact positif de la territorialisation des dispositifs de soutien . Ainsi, les aides allouées au secteur bovin viande sont attribuées à chaque Etat membre sous la forme de quotas de primes, lesquelles sont ensuite réparties entre les différentes régions.

De même, les quotas laitiers qui font l'objet, en France, d'une gestion départementalisée, ont contribué à fixer la production et la transformation du lait sur les territoires. La suppression de ces quotas ne manquerait pas d'entraîner une relocalisation de l'activité laitière dans les zones dont la densité d'élevage et les coûts de production sont les plus favorables, au risque d'aggraver la déprise dans les espaces en difficulté.

Enfin, les futurs nouveaux Etats membres de l'Union européenne, dans lesquels l'agriculture garde une place importante, ont tout intérêt au maintien d'un premier pilier fort .

Ils auront en effet besoin, à moyen terme, de mesures de soutien et de régulation ciblées par produits afin de se moderniser et de réussir leur restructuration , même si l'adoption d'un système d'aides simplifié s'avère, dans un premier temps, préférable pour des raisons pratiques.

Quant au deuxième pilier , dont le développement apparaît tout à fait souhaitable, il n'aurait toutefois aucun sens si la vocation proprement économique de l'agriculture venait à disparaître . Les agriculteurs n'ont pas choisi ce métier pour devenir de simples jardiniers de l'espace rural.

* 12 « Géographie de l'agriculture communautaire : les productions soutenues par la PAC ne se concentrent pas », par M. Laurent Maillard, Mme Karine Daniel et M. François Colson, in Agreste Cahiers n°4, décembre 2000.

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