C. CLARIFIER LE PARTAGE ENTRE USAGER ET CONTRIBUABLE

1. Mieux tarifer les infrastructures

Votre rapporteur spécial avait tenté, dans son rapport sur le financement des infrastructures de transports, en 2001, d'estimer la part de l'usager dans ce financement . Il en avait déduit que « les règles de tarification sont mal définies ou inexistantes ».

Il reproduit ici quelques observations de son rapport :

« Les mécanismes de financement par péages ou redevances sont centraux dans l'économie des transports. Ils déterminent en effet la part de l'usager dans le financement de l'infrastructure par rapport à celle du contribuable.

« Cependant, l'application pratique du péage est encore très limitée, sauf pour la route et l'aérien.

« Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie fait preuve d'un optimisme forcené en indiquant : « les péages et redevances tendent à devenir le mode normal de prise en charge par l'usager des coûts d'infrastructures de transport. ». En effet, tous les chiffres montrent que le recours aux péages et redevances est encore très limité et inégal.

« Si la part de l'usager dans le financement des autoroutes concédées atteint 92 %, elle descend à 76 % pour le contrôle aérien, 63 % pour les aéroports, et 56 % pour les ports. Elle est très réduite pour le transport ferroviaire (25 %) et les voies navigables (9 %) et nulle pour les routes nationales ».

Mais le péage reste encore un modèle d'exception pour la plupart des modes de transport, à l'exception des autoroutes concédées, alors même que toutes les réflexions menées dans le cadre européen préconisent le développement du péage.

Effort de l'usager dans le financement des infrastructures

(en millions d'euros)

 

Etat

Fiscalité affectée

Collectivités locales

dette du gestionnaire

Effort de l'usager

Total

part de l'usager

Autoroutes concédées

 
 
 

457

4 939

5 397

92 %

Routes nationales

1 486

233

762

0

0

2 481

0 %

Total

1 486

233

762

457

4 939

7 878

63 %

Réseau ferré national

3 859

352

122

305

1 508

6 146

25 %

Contrôle aérien

32

192

0

76

946

1 246

76 %

Aéroports

0

252

12

46

521

831

63 %

Voies navigables

0

76

30

0

10

117

9 %

Ports

104

45

91

-15

291

517

56 %

Source : rapport du Sénat sur le financement des infrastructures de transports - 2001, ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Ces chiffres montrent bien que les autoroutes concédées sont financées presque exclusivement par les usagers et non par les contribuables . Les aéroports et les ports sont également majoritairement financés par l'usager. En revanche, c'est essentiellement le contribuable national ou local (particulièrement dans le cas des routes nationales) qui finance le réseau ferré, les routes nationales, et les voies navigables.

Votre rapporteur spécial est tout à fait favorable à augmenter la part de l'usager là où il est nécessaire de le faire, c'est-à-dire lorsque l'usager dispose d'un service de qualité.

En particulier l'instauration d'une redevance domaniale kilométrique pour l'utilisation commerciale du domaine public routier, prélevée sur les poids lourds circulant sur les autoroutes gratuites et sur les grandes liaisons à caractéristiques autoroutières, lui semble une idée intéressante, même s'il faut encore en préciser les modalités.

S'agissant des péages d'infrastructure ferroviaire , votre rapporteur spécial avait déjà souligné, à plusieurs reprises, la faiblesse de la tarification, en particulier pour le fret ferroviaire. Le niveau faible des péages s'expliquait jusqu'à présent par la faible capacité contributive de la SNCF et par les difficultés propres au service de fret ferroviaire. Une sous-tarification manifeste ne peut aujourd'hui se poursuivre du fait de l'ouverture du réseau de fret à la concurrence : maintenir des tarifs de péages très bas revient à subventionner les entreprises européennes qui décideraient d'utiliser ce service.

Votre rapporteur spécial s'étonne toutefois que s'agissant du fret ferroviaire, il soit proposé de couvrir les seuls coûts marginaux d'infrastructure alors que les trains express régionaux devraient couvrir, selon l'audit, les coûts complets.

Cette différence signifie-t-elle que le transport de voyageurs à caractère régional, qui participe pleinement à l'aménagement du territoire et au désengorgement du réseau routier, doit être moins soutenu que le transport de marchandises à longue distance ?

En tout état de cause, il est évident que toute tarification des trains express régionaux (TER) au coût complet devrait s'accompagner de transferts de ressources aux régions, autorités organisatrices de transport, pour leur permettre d'assumer cette nouvelle charge, en application de l'article 72 de la Constitution récemment modifié.

Par ailleurs, l'audit rappelle que les études économiques considèrent que les usagers, particuliers et professionnels, paient en moyenne les coûts qu'ils génèrent sur le réseau routier interurbain tant dans une optique de coût marginal social que de coût complet.

Il faut toutefois distinguer le réseau concédé et le réseau non concédé. Les poids lourds paient en moyenne plus que leur coût sur le réseau concédé mais pas sur le réseau non concédé. En effet, le réseau non concédé est aujourd'hui sous-tarifé. Pour les poids lourds, la sous-tarification porte sur 90 % des routes nationales ordinaires, 85 % des routes nationales à plus de 2 voies, et 10 % à 15 % des autoroutes concédées ou non concédées.

Le second sujet est la modulation spatiale et temporelle de la tarification. Le droit communautaire et national tendent à limiter le montant des péages à la couverture des coûts de construction, d'entretien et d'exploitation des ouvrages à péage sans permettre véritablement de moduler le tarif selon la plus ou moins grande congestion ou sensibilité de l'environnement.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page