2. La maîtrise des dépenses publiques, un levier pour réformer l'Etat

Nul doute que la pression sur la dépense amènera plus sûrement à la réforme de l'Etat que les dérapages passés. Alors qu'une tension sur les dépenses incite à l'imagination des gestionnaires et à l'efficacité, le gonflement des dépenses déresponsabilise. Il ne sanctionne ni le gaspillage des moyens financiers, ni un indéniable gâchis de ressources humaines.

La réforme de l'Etat devra déboucher sur une plus grande équité dans la gestion des deniers publics, où la répartition des moyens devra être liée à des besoins réels et renouvelés.. Dans certains de ces secteurs d'intervention, l'Etat a déjà fait sa mue, il n'est plus une administration de main d'oeuvre, mais une administration de compétences, dont les agents, plus motivés, plus polyvalents et plus qualifiés, assurent un service public à moindre coût.

Sur le plan budgétaire, il est donc possible de tirer les dividendes de ce progrès. Structures resserrées, agents plus productifs, informatisation pertinente sont synonymes de dépenses allégées. Là où il reste des efforts à accomplir, les recettes d'une meilleure gestion sont connues. Elles ont fait leur preuve en France ou à l'étranger : suppression des structures redondantes, diminution du nombre de niveaux hiérarchiques, accélération du « process » administratif, responsabilisation des acteurs, regroupement des agents sur un nombre de sites administratifs moins important, sans négliger pour autant le souci de proximité, informatisation des services et automatisation complète des tâches répétitives.

10 % d'économies pour des dépenses de l'ordre de 360 milliards d'euros permettraient presque de combler le déficit du budget de l'Etat...

a) Des réformes de structure ambitieuses

Les gains de productivité réalisés dans certains ministères ne pourront être engrangés que lorsque les conséquences de ceux-ci en matière de structure auront été tirées. Il faut évoquer ici le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, dont les investissements informatiques visent à contourner les effets du cloisonnement des administrations fiscales, sans s'attaquer au coeur du problème : la maîtrise des coûts de gestion des prélèvements obligatoires passe par le réduction des coûts de coordination entre les différentes administrations, les pays disposant d'une seule administration ayant un taux d'intervention inférieur aux pays dans lesquels la gestion des prélèvements obligatoires est assurée par plusieurs administrations.

L'exemple de la redevance-télévision peut être une nouvelle fois évoquée : sa suppression, souhaitable, ne serait utile que si le service chargé de son recouvrement pouvait être redéployé au sein des autres administrations existantes...

b) Des gains de productivité liés aux nouvelles technologies

Certains ministères n'ont pas encore fait leur « aggiornamento » informatique. Le sous-équipement informatique du ministère de la justice est par exemple criant et inquiétant au regard du nombre de dossiers à traiter.

c) Une implantation territoriale adaptée

Contrairement aux idées reçues, l'administration centrale n'emploie qu'une très faible partie des effectifs, de l'ordre de 5 %. L'immense majorité des fonctionnaires civils travaillent dans les services déconcentrés de l'Etat. Il convient donc de réfléchir à la carte administrative française en fonction des compétences transférées aux collectivités locales. En la matière, un audit doit être mené, qui répertorie les subdivisions administratives à supprimer. Ceci peut concerner en particulier le ministère de l'équipement ou le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Ce dernier a d'ailleurs annoncé qu'environ la moitié des 55 recettes de finances d'arrondissements seraient supprimées pour ne maintenir que celles situées dans les arrondissements les plus importants au sein de la direction générale de la comptabilité publique.

De la même manière les sous-préfectures ne peuvent plus constituer un « tabou » : la pertinence de cet échelon de gestion mérite d'être réexaminée.

d) La décentralisation et le principe de subsidiarité

Les conséquences de la décentralisation, vingt ans après, n'ont pas encore toutes été tirées en ce qui concerne les effectifs et les structures des services déconcentrés. Il ne paraît plus nécessaire que chaque ministère cumule une direction départementale et une direction régionale, alors même que les compétences sont partagées et parfois entièrement transférées aux collectivités locales (c'est le cas par exemple de l'administration de la jeunesse et des sports). De même, au regard de l'objectif d'efficacité de l'action publique, il n'est pas toujours pertinent qu'à chaque niveau de collectivité décentralisée corresponde un niveau déconcentré de l'Etat.

Lorsque les compétences sont décentralisées, il n'est pas conforme à l'impératif d'efficacité et de bonne gestion que l'Etat maintienne des services d'exécution à l'échelon local et il doit admettre qu'en matière d'action sociale, d'équipement ou de culture, son intervention dans les tâches de proximité et de gestion fait double emploi avec l'intervention des collectivités locales.

Dans le cadre du nouvel élan de décentralisation et des expérimentations de transfert de compétences qui doivent être menées au cours de la législature, la question du « doublon » des services déconcentrés de l'Etat avec ceux des collectivités territoriales doit être posée. La mise en place d'un droit à l'expérimentation au profit des collectivités locales est ainsi une occasion unique de réformer les services déconcentrés de l'Etat.

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