II. ADÉQUATION ENTRE MÉTIERS À FAIBLE EFFECTIF ET RÉPARTITION DES COMPÉTENCES FORMATIVES SUR LES TERRITOIRES

Vincent NIQUEUX, directeur de l'ITEMM - reprend le titre du thème et pose la question : faible effectif ou fort effectif ? C'est une question importante. Si l'on parle des artisans de la facture instrumentale dans les domaines dont l'ITEMM s'occupe (piano, instruments à vent, guitare, accordéon) en fabrication pure artisanale, on va parler de quelques artisans.

En cuivre, il y a cinq fabricants en France ; en haut bois, cinq ou six ; dans le domaine du piano, trois industriels ; Selmer, l'entreprise la plus importante dans le haut de gamme du saxophone, 600 salariés, la plus grosse entreprise française ; BuffetCrampon pour la clarinette. Le tour de la fabrication industrielle est très vite fait, mais aussi pour la fabrication artisanale.

Il est très important, quand on parle de la facture instrumentale de parler de la pointe de la facture instrumente, c'est-à-dire la fabrication artisanale. Environ 500 à 600 entreprises en France, tous instruments confondus. Il est très important de rappeler que cette facture instrumentale de métiers d'art purs et durs s'inscrit dans une filière d'ensemble qui réunit une dizaine d'industriels, une vingtaine de gros artisans, quelques centaines de petits artisans (TPE) et près d'un millier de magasins spécialisés ou généralistes en produits musicaux. Au risque de faire un peu de provocation et de briser un tabou, il est très difficile dans certains cas de faire totalement le distinguo entre l'artisan et le distributeur, parce que l'activité professionnelle est faite de la double activité. Il est extrêmement important de le prendre en compte pour pouvoir encore mieux travailler sur la pointe artisanale et de métiers d'art.

Ce qui veut dire que si l'on raisonne sur un total de 1 500 entreprises, on va raisonner dans les domaines de la facture instrumentale sur une dizaine de milliers d'artisans ou de salariés d'entreprises diverses et de magasins. En divisant par une dizaine d'annuités de travail, on arrive aux alentours de 250 emplois à pourvoir chaque année. Et sur ces 250 emplois, là aussi, surtout sur les secteurs d'activité de fabrication industrielle ou artisanale rare, on va avoir 70 % qui vont aller vers une activité de maintenance et technico-commerciale, et les 30 % qui vont rester dans l'artisanat pur.

Quand on parle formation, il est important de casser un peu le tabou du cloisonnement total et de bien évoquer cette globalité de filières qu'il faut prendre en compte puisqu'on a beaucoup parlé de la formation initiale pour l'économie du secteur et qu'on ne peut pas isoler totalement le champ de l'artisanat pur, même s'il représente l'activité la plus technique, celle qui représente le plus de savoir-faire.

C'est particulièrement vrai dans les domaines dont s'occupe l'ITEMM, c'est-à-dire les instruments de fabrication artisanale dans quelques cas très précis, et industrielle dans la plupart des cas : l'accordéon, le piano et les instruments à vent.

Les métiers vont être axés essentiellement sur les activités de maintenance réparation entretien accord, des métiers de très haute technicité qui exigent le même type d'expérience que celle que l'on évoque dans tous les métiers de création proprement dite, qui exigent la même longueur de formation, mais qui vont être sur un produit déjà réalisé. On pourrait définir des tâches extrêmement précises qui touchent à la restauration, au réglage, à la refabrication de pièces, à la restauration d'instruments anciens, et puis à tout ce qui va être le travail proprement musical des instruments classiques.

Il est important, quand on parle de faible effectif, de dire de quel effectif on parle. C'est important de dire aussi que l'on manque encore et toujours cruellement d'informations économiques quantifiées sur ces secteurs, non seulement en France, mais aussi à l'échelon européen. C'est difficile de parler de flux, de quantités, de débouchés, parce que ce sont des informations que l'on a que parcellaires.

Il est important de préciser cette particularité de la facture instrumentale française, en sachant qu'effectivement, la locomotive est une facture instrumentale haut de gamme, dans le domaine de la guitare il y a une quarantaine de très grands luthiers Français dont certains ont fabriqué quelques instruments par an, mais sur ces quelques instruments, un tiers ou deux tiers vont partir à l'étranger. Il existe des microréseaux d'exportation, ce qui montre bien le très haut niveau de facture instrumentale que l'on peut avoir et que l'on va retrouver dans les autres domaines de facture instrumentale.

Ce haut de gamme s'inscrit dans ce contexte global.

Cela pose la question de la formation et des diplômes. Deux grosses difficultés : Comment résoudre le problème de la formation pour les industriels où on parle d'une vraie technicité, mais où on a besoin de quelques postes par an ; pour les artisans « haut de gamme », il est besoin aussi de quelques postes par an.

D'où la nécessité d'avoir une sorte de noyau dur qui est une formation généraliste qui va toucher avant tout à la maintenance, à la réparation, à l'entretien, à l'accord des instruments, ce qui exige déjà une grande technicité et représente quelques flux par secteur instrumental de quelques dizaines de personnes par an. On va raisonner entre 5 et 30 postes disponibles par an. De ce point de vue, le fait d'avoir une école nationale correspond bien.

Cela ne permet de résoudre toutes les questions des industriels (Pleyel, Selmer, BuffetCrampon) qui sont en travail posté pour l'essentiel ou, de l'autre côté, pour les artisans ultra spécialisés dans la fabrication haut de gamme de la flûte traversière, des cuivres, de la flûte à bec, etc. où là, la transmission ne peut guère se faire que chez l'artisan lui-même. Il faut gérer une sorte de compromis et au moins s'appuyer sur un vivier de jeunes formés au moins de façon généraliste, en les spécialisant petit à petit pour essayer d'arriver à un niveau de performance qui leur permette d'enclencher après ce que Vincent NIQUEUX appellera l'ultra spécialisation. Mais c'est un débat constant et un ajustement très complexe. Ce qui est sûr, c'est que très logiquement, cela renvoie à l'existence d'une logique de centre national, puisqu'on est sur des flux de quelques dizaines d'élèves par an, et que le centre national a l'avantage de permettre une mutualisation de compétences, une mobilisation des professionnels, un affichage et une visibilité de ces formations.

Pour la première fois l'an dernier, les trois centres (ITEMM, Eschau et Mirecourt) sont allés à Musicora ; c'était la première fois que les trois centres affichaient l'offre de formation en France. C'est très important parce que, pour commencer, on ne connaît pas ces métiers. Les gens connaissent assez bien ou croient connaître les métiers de luthier du quatuor ; facteur d'orgues, on voit à peu près ce que cela veut dire. Quand on dit, « technicien de maintenance en accordéon », on ne sait. L'accordéon, 6 000 pièces, ce sont plusieurs années de travail pour comprendre comment ça s'ouvre et surtout comment ça se referme.

L'ITEMM est un drôle de centre de formation qui va illustrer d'éléments qui ont été dits dans le pragmatisme que l'on peut avoir sur la mise en place des formations. L'ITEMM est au Mans parce que ce sont des professionnels du Mans qui l'ont lancé. C'est un centre de formation national, associatif, créé par les professionnels du secteur et appuyé par l'Europe, le ministère de la Culture, le ministère de l'Education nationale, le ministère de l'Artisanat, la Communauté urbaine du Mans, la ville du Mans, le département de la Sarthe et la région Pays de Loire.

Il y a beaucoup de partenaires, mais cela ne fait pas forcément beaucoup d'argent, tout simplement parce que l'ITEMM est une création avant tout des professionnels, atypique, associative, école privée, centre de formation professionnelle continue et CFA national, mais ce partenariat très particulier qui a présidé à sa création en 1993, permet de marier une logique de recrutement national avec une logique d'implantation et de rayonnement local. L'ITEMM n'est plus au Mans par hasard, il là en relation avec toute une série de réseaux professionnels, culturels, et il est très important d'avoir cette logique d'implantation quelque part en région, même si la mission est nationale et, pour partie, européenne, surtout dans l'avenir.

Autre élément un peu atypique de l'ITEMM, il est exclusivement dédié aux métiers de la musique qui ne sont pas tous métiers d'art. Métiers de la musique, facture instrumentale principalement (piano, instruments à vent, guitare, accordéon), métiers commerciaux de la musique sur lesquels il y a un très beau chantier à faire, et nouvelles technologies (son, multimédia, mais appliqués aux métiers de la musique). C'est très important pour les décloisonnements techniques que cela permet petit à petit de mettre en place. Cela permet aussi de mutualiser un certain nombre de compétences.

Aujourd'hui, l'ITEMM accueille 220 apprentis et stagiaires, dont 150 sur la partie facture instrumentale chaque année. L'ITEMM travaille avec environ 150 maîtres d'apprentissage sur tout le territoire - ce sont eux avant tout les maîtres d'oeuvre de la formation. Globalement, l'ITEMM travaille avec tout le secteur professionnel.

L'ITEMM essaie d'inscrire son action dans la globalité d'une approche de l'entreprise. L'ITEMM a une fonction de pôle national d'innovation pour travailler aussi sur l'accompagnement économique et technique des entreprises, c'est un début, c'est à développer, et l'ITEMM a également une mission culturelle destinée à accueillir du jeune public et des publics professionnels pour leur faire découvrir ces métiers.

Il est important que la formation s'inscrive dans une démarche globale et que l'on puisse parler avec l'entreprise de la formation, mais aussi de ce qu'elle est, de sa transmission. Il est aussi très important que les jeunes qui arrivent sur le marché soient complètement impliqués dans cette approche.

En ce qui concerne les diplômes, l'ITEMM a repassé les diplômes à deux ans en repensant toute la filière diplômante à partir d'un CAP et d'un BMA. Deux fois deux ans en apprentissage, la logique voulant que les jeunes fassent plutôt quatre ans, mais les deux ans permettant un rythme différent dans l'acquisition du savoir avec un objectif de diplômes qui ne s'étalent pas trop. La sortie au niveau CAP permet d'envisager un premier placement sur des postes simples, tandis que le niveau BMA fait déjà entrer dans un niveau d'exigences bien plus fortes.

Auparavant, le CAP s'appelait « CAP facteur de... » Facteur de piano, facteur de guitare, facteur d'instruments à vent. Autrement dit, on voulait tout lui faire porter, de la réalisation à la conception de l'instrument, beaucoup de matières complémentaires. Le binôme CAP/BMA, cette approche en quatre ans permet aussi de faire monter le diplôme à la mesure de ce qu'ils sont devenus de fait.

Vincent NIQUEUX rappelle que le CAP, c'est quatre journées d'épreuves, cela ne fait jamais qu'une journée de moins que l'agrégation. Ils sont déjà très difficiles, et il fallait pouvoir disposer des exigences différentes entre CAP et BMA, qui plus est en se rapprochant des niveaux de qualification allemands pour un jour envisager de créer de véritables passerelles.

Ce CAP et le BMA ont intégré des matières d'acoustique, d'organologie, histoire des instruments, histoire de la musique, gestion, communication, vente. Cela correspond à ce que Vincent NIQUEUX évoquait quant à la nécessité d'intéresser le jeune à la globalité d'approche de l'entreprise pour qu'il puisse s'y insérer.

Dernier élément, l'ITEMM a fait de façon très volontariste le choix de l'apprentissage. La formation technique est avant tout chez le maître d'apprentissage, la pédagogie de l'alternance est quelque chose qui va très loin, c'est extrêmement important. L'ITEMM a quelques formules à temps plein, elles sont destinées à des publics qui ne peuvent pas aller vers l'apprentissage, mais la grande majorité d'élèves, c'est l'apprentissage.

Il était très intéressant d'entendre ce qui a été dit sur les mesures qui pourraient être prises, car l'ITEMM se heurte beaucoup aux difficultés d'accueillir un apprenti dans les toutes petites entreprises, lorsque l'atelier n'a même pas la place technique de recevoir un apprenti, qui plus est avoir à le payer. C'est une contrainte très forte pour certaines entreprises et il est important d'afficher un vrai volontarisme de ce côté-là.

L'autre intérêt des centres de formation nationaux, c'est aussi d'avoir cette visibilité qui évite parfois des formations sauvages sur le territoire, pas du tout contrôlées.

Depuis l'origine, 800 élèves sont passés par l'ITEMM, c'est 80 % des jeunes qui se sont installés ou qui sont devenus salariés dans les dix dernières années. Là aussi, la visibilité va s'accroître.

La question européenne est fondamentale. C'est une vraie difficulté d'assumer les niveaux CAP et BMA parce que aucun des dispositifs en cours de discussion au niveau universitaire ne prend en compte ces niveaux d'enseignement supérieur. Le peu de fluidité que l'on est en train de mettre dans l'enseignement supérieur n'intègre pas les niveaux CAP/BMA, et il y a un vrai travail à faire.

Par ailleurs, il y a un gisement d'emplois et de demandes extrêmement fortes à l'échelon européen et international.

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Françoise LANDAIS accueille maintenant Marlène SCHAEFFER qui est secrétaire générale adjointe du CNFA de la facture d'orgues à Eschau. Mme SCHAEFFER étant anciennement à la Chambre des métiers d'Alsace où elle était responsable des services économiques et formation régionaux, après un passage au ministère du Travail au service études et statistiques.

Marlène SCHAEFFER, secrétaire générale adjointe du CNFA facteurs d'orgues à Eschau - précise qu'elle est encore à la Chambre des métiers d'Alsace qui est cogestionnaire du CNFA.

Ce Centre National de Formation d'Apprentis de la facture d'orgues reçoit entre 40 et 45 jeunes. Il s'agit d'une trentaine de maîtres d'apprentissage, tous artisanaux, et l'effectif global des artisans dans le secteur est d'une centaine d'entreprises sur toute la France.

Parler de la décentralisation pour un centre de ce type qui reçoit aussi peu d'apprentis est certainement difficile. Décentralisation veut dire services de proximité, et services de proximité peut vouloir dire que chaque région, en fonction des entreprises qui sont sur son territoire, ait une volonté de développer ces entreprises, et donc de leur offrir une main-d'oeuvre qualifiée. Cela veut donc dire aussi, peut-être, multiplier les centres de formation.

Que deviennent alors des centres de formation nationaux comme ceux dont Vincent NIQUEUX a parlé, comme celui dont Marlène SCHAEFFER peut dire que c'est le sien ? Ils n'ont pas d'avenir, c'est bien évident ! Mais ces multiples centres de formation qui, dans l'imagination, vont être créés sur l'ensemble de la France auraient-ils un avenir ? Marlène SCHAEFFER pense que non, parce qu'elle croit aujourd'hui que si l'on veut être professionnel de la formation, il faut répondre à deux impératifs :

faire une formation de qualité, sinon, on n'est pas professionnel ;

faire une formation qui ne soit pas exorbitante en termes de coût.

A ces deux impératifs, aucun centre de formation dispersé sur l'ensemble de la France ne peut répondre.

Pour la première raison, une formation de qualité, ce n'est pas seulement de l'enseignement général, c'est de l'enseignement professionnel, c'est de la pratique dans les entreprises et c'est de la théorie professionnelle. Et qui plus est, l'enseignement général doit être intimement lié à l'enseignement professionnel. Si ceci n'est pas fait, c'est de la juxtaposition d'enseignements, mais ce n'est certainement pas contribuer à avoir une tête bien faite.

Pour cette première raison, Marlène SCHAEFFER pense que disperser les formations sur l'ensemble du territoire n'est certainement pas une bonne logique.

En ce qui concerne le coût, il est évident que l'on peut faire à moindre coût, cela veut dire qu'on ne fait pas beaucoup de formation professionnelle puisque c'est celle-là qui coûte cher. Il faut des équipements, il faut du personnel très qualifié ; sur l'enseignement général, si on en fait un tronc commun pour l'ensemble des métiers, c'est vrai, cela peut coûter moins cher, mais on perd de vue ce qui pour Marlène SCHAEFFER semble être l'objectif essentiel d'une formation professionnelle réussie, c'est que l'enseignement général soit interactif avec la partie professionnelle.

Sur ce deuxième point, disperser, multiplier les centres de formation semble être une logique qui ne devrait pas se mettre en place, parce que dispendieuse des deniers publics et parce que ne répondant pas à une formation de qualité.

Ce matin, le ministre DUTREIL a bien dit que la décentralisation devait laisser un espace pour une politique nationale. C'est ce que Vincent NIQUEUX a dit en d'autres mots. Marlène SCHAEFFER se joindra très volontiers à ce dernier pour conclure sur cette assertion : la nécessité de garder, dans le cadre de la décentralisation, pour des formations dont les effectifs sont effectivement faibles par nature - les métiers d'art sont de ces métiers, d'autres métiers artisanaux sont également des métiers à faible effectif - la nécessité d'avoir un champ national semble tout à fait déterminant pour l'avenir des métiers.

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Françoise LANDAIS donne la parole à Jean-Claude DORLEANS qui est le proviseur du lycée Jean-Baptiste Vuillaume pour l'Ecole nationale de Lutherie à Mirecourt.

Monsieur DORLEANS est un germaniste, il a eu un parcours assez exceptionnel. Il a beaucoup travaillé en Allemagne dans les lycées franco-allemands ou dans des instituts français et il a alterné passages à l'étranger et passages en France, et maintenant il est proviseur du lycée de Mirecourt.

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Le fait d'intervenir en dernier présente pour Jean-Claude DORLEANS , Proviseur du lycée Jean-Baptiste Vuillaume, Ecole Nationale de Lutherie à Mirecourt - l'immense avantage que tout est dit. Ce qui n'avait pas encore été dit vient de l'être, donc tout est dit. Mais présente également le risque qu'il va falloir redoubler d'efforts, surtout quand la vedette du spectacle est déjà passée et n'est plus derrière, non pas pour captiver votre attention, mais essayer de la maintenir.

L'Ecole Nationale de Lutherie de Mirecourt s'intègre en Europe dans le groupe incluant bien sûr Cremona en Italie, Mittenwald en Allemagne et Newark en Angleterre.

Comme l'a dit Marlène SCHAEFFER, parler de décentralisation est un exercice particulier, si ce n'est le lien fort qui existe entre l'Ecole Nationale de Lutherie et le Conseil régional.

L'objet de ce propos sera de présenter succinctement l'histoire de Mirecourt et de son école, la formation actuellement dispensée et les évolutions éventuelles.

L'HISTOIRE DE MIRECOURT ET DE SON ÉCOLE

Le plus vieux contrat d'apprentissage en lutherie à Mirecourt date de 1629, soit plus d'un siècle avant la charte signée en 1732. Sur un autre plan, selon cette charte, les luthiers de Mirecourt ont fait de Sainte Cécile leur patronne. La lutherie à Mirecourt a pris un véritable essor au XVIII e siècle. Les artisans de Mirecourt ont su combiner les influences de fabrication allemandes et italiennes, pour dans un premier temps copier un petit peu, même parfois beaucoup, et ensuite inventer la lutherie lorraine.

Mirecourt s'honore d'avoir formé les plus grands luthiers et archetiers français.

A la rentrée scolaire de 1970, notamment grâce à l'engagement d'Etienne VATELOT, est créée au lycée une section lutherie qui deviendra très vite l'Ecole Nationale de Lutherie, tout cela intégré dans le lycée Jean-Baptiste Vuillaume, lui-même luthier réputé fin du XVII e , début du XVIII e .

Durant une vingtaine d'années un brevet de technicien a été délivré (cinq années d'études).

LA FORMATION ACTUELLEMENT DISPENSÉE

Depuis 1990, les étendues sont étendues à un DMA attribué en trois années (2 années + 1 année de mise à niveau).

Pour chacune de ces trois années, une vingtaine d'heures est dispensée en atelier, une dizaine est consacrée à l'enseignement général, principalement en français, anglais, économie et gestion, et une dernière dizaine d'heures est consacrée aux arts appliqués.

La pratique d'un instrument à cordes frottées est une obligation de scolarité, mais pour le recrutement, seule une expérience musicale au sens large, ainsi que la connaissance suffisante de l'anglais et du français pour les élèves étrangers, sont requises.

La sélection s'effectue sur dossier à niveau Baccalauréat. Cela a été le changement entre le brevet de technicien où l'on pouvait intégrer l'école après le 3 e , et à partir de l'introduction du DMA, c'est niveau Baccalauréat (examen réussi ou non) ou l'équivalent pour les étudiants étrangers.

Une promotion compte entre 10 et 12 élèves selon les années pour une centaine de candidats. Ceci a plusieurs conséquences, dont celle qui fait que les professeurs sont très disponibles pour les étudiants. Le tout est complété par des stages chez des luthiers.

A Mirecourt, certains élèves n'ont pas eu leur Bac, mais ils avaient envie de faire de la lutherie, et un élève sortait des classes préparatoires Math Sup / Math Spé.

LES ÉVOLUTIONS ÉVENTUELLES

Comme toute institution, l'école de lutherie pense à son avenir. Sur le plan de la formation, deux axes constituent la réflexion actuelle :

L'intégration plus poussée de la restauration dans les études actuellement dispensées. Elle est très légèrement intégrée au début de la seconde année, mais il y aurait peut-être beaucoup à faire dans ce domaine.

La création d'une section archèterie qui est la spécificité mondiale de Mirecourt, contrairement à la lutherie dont Mirecourt n'a pas l'exclusivité.

Ces deux axes ne s'excluent pas, bien évidemment.

Comment appliquer cette extension de la formation au diplôme décerné ?

Il est permis d'étudier la prolongation du DMA actuel par une licence à vocation européenne. Mirecourt reçoit de plus en plus d'étudiants étrangers. Cette année, Mirecourt a reçu une Mexicaine, une Québécoise, un Lithuanien, une Grecque, un Israélien. On pourrait donc envisager un diplôme à consonance européenne. Cette extension ferait passer la formation actuelle de trois ans à quatre ans.

La profession a qui il convient de renouveler tous remerciements, a toujours conseillé judicieusement les responsables de l'école, que ce soit ses prédécesseurs ou Jean-Claude DORLEANS, que ce soit dans sa création ou dans son évolution. Le présent et l'avenir de l'établissement ne sauraient se concevoir sans eux, sans ce partenariat.

Partenariat qui vaut bien sûr également pour le Conseil régional et l'Education nationale.

En revenant en France après dix années de séjour outre-Atlantique, on découvre que Patrick POIVRE-D'ARVOR présente toujours le JT de 20 heures, que Thierry ROLLAND commente toujours les matches de football et qu'il y a toujours des petits frottements, puisqu'il s'agit de cordes frottées, entre ministères en France. Mais lesquels frottements ont été largement modulés par les propos qui ont été tenus cet après-midi.

Pour conclure, Jean-Claude DORLEANS a une pensée pour les élèves au sens large, pas seulement ceux de Mirecourt, et en ce qui concerne ceux de Mirecourt, sa plus grande surprise est de voir leur disponibilité et leur engagement, et leur foi dans ce qu'ils viennent apprendre.

En deux mois, Jean-Claude DORLEANS a vu des élèves charger des établis dans la camionnette du lycée, aller à la foire d'Epinal ou d'ailleurs présenter ce qu'ils font, y rester deux jours entiers à travailler devant les gens, à jouer de la musique, à participer à l'animation. Ce week-end, ils feront la même chose au salon de l'étudiant à Luxembourg, et Jean-Claude DORLEANS pense qu'il fallait aussi avoir une petite pensée pour cela, et que l'on essaie de surmonter les rivalités ou les susceptibilités internes en pensant en tout premier lieu à leur intérêt.

« Quoi que tu veuilles entreprendre, fais-le parce que l'enthousiasme a de l'audace »

Goethe

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Françoise LANDAIS remercie Jean-Claude DORLEANS, et à propos des élèves, elle évoque les propos de Vincent NIQUEUX pour rappeler que pour la première fois cette année, au salon Musicora, il y avait un regroupement des écoles. Pendant toute la durée du salon, les élèves ont montré leur travail, leur expérience et la façon dont ils apprenaient devant les visiteurs. Cela s'est fait en partenariat entre les deux ministères, Culture et Artisanat, et le stand était situé à côté de celui du ministère de la Culture.

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