Audition de M. Michel DEYME,
Secrétaire fédéral de la branche enseignement supérieur
des Syndicats généraux de l'éducation nationale - Confédération française
démocratique du travail (SGEN - CFDT),
et de M. Dominique BROSZKIEWICZ,
Secrétaire fédéral de la branche ATOS du SGEN-CFDT

(17 décembre 2003)

M. Jacques Valade, président - Nous allons maintenant entendre M. Michel Deyme, secrétaire fédéral de la branche enseignement supérieur du SGEN-CFDT accompagné de M. Dominique Broszkiewicz, secrétaire fédéral de la branche ATOS du SGEN-CFDT.

Nous souhaitons connaître votre position sur la réforme LMD et sur l'évolution de l'université française.

Messieurs, je vous cède la parole en vous demandant de bien vouloir en premier lieu vous présenter.

M. Michel Deyme - Merci, Monsieur le Président.

La fédération SGEN-CFDT a une double organisation. Une organisation territoriale à travers des syndicats qui sont départementaux ou académiques, et également une structuration en branches professionnelles. Je représente la branche des enseignants du supérieur et Dominique Broszkiewicz représente la branche des personnels ATOS du supérieur.

Je suis maître de conférence de pharmacotechnie à la faculté de pharmacie de Châtenay-Malabry qui dépend de l'université Paris Sud.

Vous nous avez demandé notre position sur la mise en place du système européen de diplômes qui après bien des vicissitudes et des changements de nom s'appelle maintenant le LMD. C'est un système que le SGEN-CFDT a défendu publiquement. Nous l'avons fait à travers un certain nombre de communiqués de presse, y compris des communiqués communs avec des organisations comme la FAGE, la FCPE et l'UNSA. Nous sommes également intervenus auprès du M. Luc Ferry, peu après sa nomination, pour lui de demander de s'assurer que les arrêtés d'habilitation des formations seraient bien mis en oeuvre.

Sur le LMD, nous n'avons qu'un seul problème qui est celui de la façon dont on le met en oeuvre et la façon dont le ministère assure le suivi de cette mise en oeuvre.

Deux points nous ont chagriné. Le premier est un point structurel. Il était prévu des comités de suivi. Ils ont été mis en place effectivement mais très tardivement et c'est le reproche que nous avions fait à l'époque au ministère.

On se rend compte actuellement dans le fonctionnement des ces comités qu'ils permettent de préciser progressivement les choses. C'est-à-dire de faire en sorte que les universités puissent réellement expérimenter des formations nouvelles et des cursus qui soient mieux adaptés aux besoins de formations, tant fondamentaux que professionnels des étudiants, tout en gardant une vue d'ensemble du système et afin que les décisions prises par les établissement n'aillent pas à l'encontre d'une meilleure lisibilité de la totalité du système.

On sait qu'il y a des problèmes de vocabulaire, en particulier au niveau des domaines scientifiques, des spécialités et des mentions. Il est à la fois nécessaire que les établissements bénéficient d'un minimum de liberté et puis que pour les étudiants, en particulier ceux qui entrent à l'université dans le cycle licence, tout ceci ne soit pas trop touffu.

Ces commissions fonctionnent bien. Je peux dire, pour avoir participé aux premières réunions de la commission licence, que l'ensemble des participants apporte en général une contribution tout à fait constructive quelques soient les organisations auxquelles ils appartiennent.

Le deuxième point qui nous oppose plus énergiquement au ministère et au Gouvernement, c'est qu'à notre avis la mesure des moyens nécessaires à la bonne mise en oeuvre de ce système n'a pas été prise en compte en termes budgétaires. La mise en place de ces structures, avec ce qu'elles demandent de suivi des étudiants et de travail d'orientation, l'ensemble des tâches pédagogiques ainsi rajoutées seront effectuées par les enseignants-chercheurs. Mais ceci va se faire au détriment de ce qui est la base de leur raison d'être et qui est leur activité de recherche. Cela me semble extrêmement pernicieux.

S'agissant de l'évolution de l'université, il y a le cadre législatif et réglementaire actuel qui est l'arrière-plan de ce qui a été le projet de loi sur l'autonomie ou la modernisation des universités. On nous avait indiqué, lors des réunions avec le cabinet du ministre, que c'était un projet de loi indispensable à la survie des universités. Apparemment, la nécessité est maintenant beaucoup moins pressante.

Si j'en crois les communiqués, ce projet de loi est remis à 2007. En effet, il faut attendre que l'ensemble des universités ait expérimenté la mise en oeuvre du LMD et le calendrier de cette mise en oeuvre suit celui de la contractualisation des universités dont les derniers contrats seront renouvelés en 2006.

Ceci étant, nous n'avons jamais été demandeurs d'un projet de loi modifiant profondément le cadre législatif actuel. Nous pensons que le dispositif résultant de la loi de 1984 comporte énormément de possibilités et permet aux établissements de se structurer de façon variable avec des fonctionnements qui peuvent être adaptés pour la plus grande part à leurs besoins.

Nous pensons que l'on n'a pas encore épuisé toutes les possibilités qui sont ouvertes aux établissements qui veulent bien s'en donner la peine, par cette loi de 1984. Qu'ils s'agissent des collaborations avec les collectivités territoriales, de l'organisation des établissements, de la mise en place de comité ou de commission, de la création de conseils d'orientation stratégique, des moyens fournis aux membres des différents conseils.

Nous ne sommes donc pas convaincus de l'urgence ni même de la nécessité d'un remaniement important de cette loi de 1984, à l'exception de deux ou trois petites dispositions intéressantes comme la délégation de signature des présidents d'université.

M. Dominique Broszkiewicz - À l'intérieur de notre organisation, les personnels non enseignants partagent le même point de vue que les personnels enseignants.

S'agissant du projet de loi sur l'autonomie des universités qui avait été envoyé aux organisations syndicales, nous avons eu quelques craintes ou questionnements.

La notion de budget global nous pose quelques problèmes. C'est quelque chose de relativement nouveau imposé par la LOLF. Nous ne voyons pas la nécessité de l'appliquer aux universités de manière aussi mécanique sans un débat de fond préalable.

Concernant les relations avec les conseils régionaux, ce sont des réalités qui existent déjà et les personnels ATOS ont été un peu échaudés par les récentes décisions concernant la décentralisation.

M. le Président - Je ne comprends pas les raisons pour lesquelles les personnels, notamment techniques, n'envisagent pas favorablement leur transfert de la fonction publique d'Etat à la fonction publique territoriale, dans la mesure où une proximité de leur employeur présente des avantages, sans pour autant remettre en cause leur appartenance à la communauté éducative.

M. Dominique Broszkiewicz - C'est bien au nom de la communauté éducative que nous avons des craintes. Le SGEN-CFDT se prononce sans ambiguïté pour le principe de la décentralisation.

Dans l'éducation nationale, il y a une déconcentration qui existe déjà au niveau de la gestion des personnels. Notre organisation est très attachée à la notion d'équipe éducative. La soumission à une double hiérarchie -collectivités territoriales et ministère de l'éducation nationale- peut être source de tiraillements. Les régions peuvent être tentées également d'utiliser autrement ces personnels.

M. Daniel Eckenspieller - Je regrette cette résistance de principe à une évolution pourtant logique. La maintenance des collèges est mieux assurée depuis qu'elle relève de la responsabilité des départements. Dans les écoles maternelles, les professeurs des écoles qui relèvent du ministère de l'éducation nationale, et les aides maternelles qui sont sous la responsabilité des collectivités territoriales, travaillent en bonne harmonie.

M. le Président - Tous les élus sont attachés à la qualité de l'enseignement scolaire et supérieur. Les craintes exprimées me paraissent sans fondement. Par contre, je suis opposé à ce que les collectivités territoriales procèdent elles-mêmes au recrutement des enseignants car là, il y aurait de graves disparités.

Messieurs, mes chers collègues, je vous remercie.

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