2. Les voies d'un réel dégonflement des effectifs

Ces données, qui montrent les limites de l'exercice actuel de réduction des effectifs, permettent de tracer la voie d'une réelle réduction des effectifs.

Premièrement, les ministères, comme celui des affaires étrangères ou celui de l'économie, des finances et de l'industrie, qui sont parvenus en 2004 à ne remplacer qu'un départ à la retraite sur deux, sont engagés dans une démarche de réorganisation et de modernisation dégageant des gains de productivité chiffrables.

La direction générale des impôts et la direction générale de la comptabilité publique , qui effectuent des travaux de masse pouvant largement être automatisés, enregistrent ainsi des gains de productivité annuels supérieurs à 1 % . Dans ces administrations, une baisse durable et substantielle des effectifs est enclenchée. D'autres ministères doivent pouvoir imiter cet exemple.

Deuxièmement, les ministères comme ceux de la justice et de l'intérieur qui connaissent des créations de postes, ne sont très logiquement pas en mesure d'atteindre un taux de remplacement des départs à la retraite de 50 %. Pour autant, une meilleure adéquation des effectifs aux besoins doit pouvoir être trouvée. Ainsi que le souligne notre collègue Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial des crédits de la sécurité, dans son rapport 126 ( * ) sur l'organisation du temps de travail et des procédures d'information des forces de sécurité intérieure , la répartition des effectifs de police et de gendarmerie reste inadaptée aux évolutions de la délinquance.

Troisièmement, les départs à la retraite des agents du ministère de l'éducation nationale représentent près de 70 % du total des départs. Ceci signifie qu' aucune action réelle sur les effectifs ne pourra avoir lieu si une réflexion n'est pas engagée au ministère de l'éducation nationale .

A court terme, les départs à la retraite doivent permettre de résorber au mieux les « surnombres académiques ». Comme l'indique 127 ( * ) notre collègue Roger Karoutchi, rapporteur spécial des crédits de l'enseignement scolaire, leur nombre était de 2.437 en 2003 (contre 2.597 l'année précédente), concentrés à 51 % dans six disciplines : génie électrique, allemand, philosophie, anglais, électrotechnique, physique : on peut donc se féliciter de ce que lors de son audition par votre commission des finances en date du 29 octobre 2003, M. Luc Ferry, alors ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche se soit notamment engagé, en réponse à une question du rapporteur spécial, à réduire le nombre d'enseignants en sureffectif dans leur discipline de près de 2.500 unités tout en reconnaissant que ce problème récurrent, qui dure depuis des années, était « exaspérant ».

Il convient sans doute d'aller plus loin dans les années à venir dans ce ministère, ainsi que l'affirme le rapporteur spécial, remarquant à cet égard que « L'enseignement scolaire a, il est vrai, de grandes capacités d'absorption de moyens supplémentaires », détaillant les différents procédés employés pour justifier une « surconsommation de moyens » :

On doit rappeler que la France dépense d'ores et déjà beaucoup plus que la moyenne des pays de l'OCDE pour l'enseignement scolaire (4,3 % de son produit intérieur brut, contre 3,6 %) 128 ( * ) , en particulier pour le second degré, notamment parce que le nombre moyen d'élèves par enseignant équivalent-temps plein dans le second degré est relativement faible (12,3 en France, contre 10,2 en Italie et 11,0 en Espagne ; mais 14,5 au Royaume-Uni ; 14,6 en Suède ; 15,1 au Japon ; 15,2 en Allemagne ; 15,9 aux Etats-Unis ; 17,1 aux Pays-Bas et 17,8 au Canada) 129 ( * ) . Cela confirme, s'il en était besoin, qu'il n'y a aucun lien mécanique entre les dépenses et les résultats .

A moyen terme, une autre gestion des effectifs enseignants doit être trouvée. Elle passe vraisemblablement par un élargissement du champ d'intervention des enseignants du secondaire. La fluidité des cursus scolaires, ainsi que la pluridisciplinarité du corps professoral, doivent permettre une réduction des effectifs, à qualité d'enseignement constante.

Plus généralement, pour atteindre l'objectif de réduction des effectifs, aucun sujet ne peut être tabou, qu'il s'agisse du temps de travail, de la rémunération au mérite, qui pourrait permettre une croissance de la productivité par agent, ou de l'absentéisme . A titre d'exemple, le taux d'absentéisme à la direction générale des impôts, pourtant loin de constituer un record dans le domaine, s'établit à 16,5, bien au-delà des ratios constatés dans le secteur privé, même dans les entreprises où les conditions de travail s'avèrent bien plus pénibles.

* 126 Rapport d'information n° 25 (2003-2004).

* 127 Rapport général, tome III, Annexe 24, « jeunesse et enseignement scolaire » fait au nom de la commission des finances du Sénat.

* 128 En 2000. Source : OCDE, Regards sur l'éducation, 2003.

* 129 Selon les calculs publiés par l'OCDE en 2003 (mais portant sur l'an 2000), les dépenses par élève ou étudiant, exprimées en parité des pouvoir d'achat, sont, en France, par rapport à la moyenne des pays de l'OCDE, inférieures de 0,4 % pour l'école maternelle et supérieures de 2  % pour l'école primaire, mais supérieures de 27 % pour le collège et de 37 % pour le lycée, alors qu'elles sont inférieures de 13 % pour l'enseignement supérieur. La France ce caractérise également par un paradoxe, puisqu'elle est l'un des pays où les horaires de classes des élèves du second degré sont les plus lourds, alors que les obligations de présence des enseignants y sont relativement réduites, ce qui explique qu'elle ne se place pas aussi favorablement pour le nombre d'élèves par classe.

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