B. UNE CRISE AVIVÉE PAR UNE HAUSSE DES PRIX DES CÉRÉALES SANS PRÉCÉDENT

Un déficit de production de céréales de l'ordre de 12 % par rapport à l'année précédente ne peut, à lui seul, expliquer le déroulement d'une crise alimentaire de grande ampleur. Le marché des céréales nigérien est à la fois alimenté par la production nationale et par des importations en provenance du marché sous-régional. Le déficit de production nationale aurait pu être compensé par une augmentation des importations à due concurrence. La mise en route de l'aide alimentaire par le dispositif national de gestion des crises aurait, de plus, pesé sur les prix. Compte tenu du faible niveau de déficit, l'augmentation des prix de céréales aurait pu ainsi rester modérée, ce qui aurait permis à la population de traverser la période de « soudure » sans plus de dommages que les années précédentes.

En réalité, les prix des céréales se sont envolés, alimentant des rumeurs d'une spéculation nourrie par le gouvernement et rendant difficile les stratégies d'adaptation des populations.

1. L'envolée des prix

Il est difficile d'obtenir des données permettant de suivre, année après année, et sur l'ensemble de la campagne, l'évolution des prix des céréales au Niger. L'envolée des prix, au-delà des niveaux atteints lors de la dernière crise alimentaire, en 2000 et 2001, a été relevée par tous les observateurs.

Sur les marchés des produits agricoles, contrairement à la normale, le niveau des prix des produits céréaliers est resté très élevé malgré la fin de la campagne agricole 2004 22 ( * ) , poursuivant ensuite une hausse graduelle. Comparés à ceux de l'année précédente, pour chaque période, les prix des produits alimentaires de base ont pour la plupart presque doublé en 2005 23 ( * ) . En février 2005, les prix des vivres étaient déjà comparables à ceux de la soudure de l'année 2003, durant les mois de juin, juillet et août. La hausse a été très marquée en juin 2005, les prix ayant commencé à refluer, avec les récoltes, au mois de septembre.

A cette évolution générale s'ajoutent des disparités locales. Comme dans la plupart des pays d'Afrique, il n'existe pas au Niger un marché national des céréales mais des marchés locaux. Les prix des céréales sont plus élevés au Nord qu'au Sud parce que les zones nord sont chroniquement déficitaires (exemple de Dakoro), que les zones déficitaires à plus de 50 % sont plus concentrées en 2005 au Nord qu'au Sud et, qu'au Nord, les zones de consommation sont très éloignées des zones de production.

Les prix des céréales - normalement 10.000 francs CFA le sac de mil - ont amorcé en juin 2005 une hausse importante, portant la valeur du sac de 100 kilos de mil à 22.700 francs CFA à Zinder, par exemple. A Tillaberi, au mois de juin 2005, le prix du sac de 100 kilos de mil a dépassé les 28.000 francs CFA.

Il a fallu attendre la dernière décade d'août 2005 pour assister à une baisse substantielle du coût des céréales sur certains marchés essentiels (Maradi) et dans des marchés de certains départements (Téra, Konni).  Comparée à juin 2005, la baisse du prix du mil, en août 2005 à Maradi était de 7 %.

Le graphique suivant, s'il signale un reflux des prix, montre l'écart persistant entre la moyenne quinquennale des prix au mois de septembre et les prix des semaines 35 et 36 de l'année 2005 24 ( * ) . Les écarts sont pour le mil de + 57 %, pour le sorgho de + 73 %, pour le maïs de + 57 % et pour le riz de + 19 %.

Prix des principales céréales au Niger :
moyenne sur 5 ans en septembre et semaines 35 et 36 de l'année 2005

(en francs CFA, pour un sac de 100 kilos)

Source : système d'information des marchés agricoles (SIMA) du Niger

* 22 L'arrivée des récoltes accroît l'offre, engendrant une baisse des prix.

* 23 Les prix ont varié de 109 francs CFA le kilo à 147 francs CFA pour le mil et de 96 francs CFA à 136 francs CFA le kilo pour le sorgho entre octobre 2003 et juillet 2004.

* 24 Semaine du 29 août au 4 septembre 2005 et du 5 septembre au 12 septembre 2005.

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