N° 16

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 12 octobre 2005

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le bénévolat dans le secteur associatif ,

Par M. Bernard MURAT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jacques Valade, président ; MM. Ambroise Dupont, Jacques Legendre, Serge Lagauche, Jean-Léonce Dupont, Ivan Renar, Michel Thiollière, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Philippe Nachbar, Pierre Martin, David Assouline, Jean-Marc Todeschini, secrétaires ; M. Jean Besson, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jean-Marie Bockel, Yannick Bodin, Pierre Bordier, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Gérard Collomb, Yves Dauge, Mme Annie David, MM. Christian Demuynck, Denis Detcheverry, Mme Muguette Dini, MM. Louis Duvernois, Jean-Paul Émin, Mme Françoise Férat, MM. François Fillon, Bernard Fournier, Hubert Haenel, Jean-François Humbert, Mme Christiane Hummel, MM. Soibahaddine Ibrahim, Alain Journet, André Labarrère, Philippe Labeyrie, Pierre Laffitte, Simon Loueckhote, Mme Lucienne Malovry, MM. Jean Louis Masson, Jean-Luc Mélenchon, Mme Colette Mélot, M. Jean-Luc Miraux, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Bernard Murat, Mme Monique Papon, MM. Jean-François Picheral, Jack Ralite, Philippe Richert, René-Pierre Signé, André Vallet, Marcel Vidal, Jean-François Voguet.

Associations.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

« Il n'y a pas de crise du bénévolat en France » : c'est ce qu'affirme M. Frédéric Bolotny, professeur au Centre de droit et d'économie du sport 1 ( * ) . L'idée selon laquelle « il n'y aurait plus de bénévoles » relève, selon lui, en réalité d'un « certain catastrophisme ambiant ».

Observateurs de terrain de la vie associative, les responsables de la Fonda 2 ( * ) reconnaissent que « dans les associations, l'engagement perdure mais revêt probablement des formes différentes de ce qui était traditionnellement connu » 3 ( * ) .

De « nouveaux bénévoles », qui ne répondent plus aux formes traditionnelles d'engagement, sont apparus et contribuent à « brouiller » l'image du bénévolat associatif.

Professeur à l'université de Paris VIII, sociologue et observatrice du monde associatif depuis plus de 15 ans, Mme Dan Ferrand-Bechmann évoque, quant à elle, un « retour du bénévolat » 4 ( * ) .

L'apparition à grande échelle des phénomènes de pauvreté et d'exclusion, conséquence du retournement économique de la fin des « Trente Glorieuses », serait, selon elle, à l'origine du développement de l'engagement bénévole en France, parce que « l'indifférence devient difficile, sinon insoutenable » 5 ( * ) .

Marqueur social de l'échec des solidarités nationales et des politiques sociales qui n'ont pas fait barrage à la pauvreté et à la montée des inégalités, la valorisation médiatique de l'engagement citoyen est également un phénomène nouveau : Coluche et le Téléthon dans les années 80, les artistes réunis dans le collectif des « Enfoirés » ou soutenant « Sidaction » 6 ( * ) dans les années 90, les sportifs de haut niveau qui participent à des compétitions dont l'intégralité des recettes est remise à une organisation caritative agissent comme autant de symboles qui servent de catalyseur à l'engagement bénévole.

Dès lors, « le bénévolat devient plus normal ; on en parle et on le vit. On le voit à la télévision. Des acteurs célèbres le pratiquent » 7 ( * ) .

Parallèlement, la perte d'attractivité des sphères politique et syndicale, -soupçonnées d'immobilisme face aux enjeux de la crise-, ont conduit des militants déçus ou des jeunes en quête d'engagement à se tourner vers le secteur associatif, qui apparaît comme l'ultime garant des valeurs de générosité et d'altruisme 8 ( * ) .

L'essor du bénévolat en France se lit aussi dans les statistiques : 12 millions de bénévoles en France en 2004, c'est le chiffre qui ressort des dernières études de l'INSEE 9 ( * ) .

Ils étaient 7,9 millions en 1990, (ce qui représentait 19 % des Français âgés de plus de 18 ans), 9,1 millions en 1993 et 10,4 millions en 1996 (soit respectivement 21 % et 23,4  % de cette même population).

Cette progression donne à la France une place privilégiée par rapport à ses voisins européens, le nombre de bénévoles pour 1 000 habitants y étant estimé à 17,6 10 ( * ) , alors qu'ils sont 14,4 en moyenne dans l'Union européenne 11 ( * ) .

Ces chiffres doivent être considérés avec la plus grande prudence, puisque toute personne qui déclare avoir aidé ponctuellement ou régulièrement une association au cours de l'année précédant celle du sondage est comptabilisée comme bénévole.

Si l'on considère les « bénévoles réguliers », qui répondent à trois critères cumulés 12 ( * ) : appartenant à une association, il ou elle exerce, sans contrepartie, une activité correspondant à une fonction continue bien définie et y consacre au minimum deux heures par semaine en moyenne annuelle, leur nombre se réduit à environ trois millions de personnes.

Les associations ne sont pas toutes égales face à cette évolution : certains secteurs ont en effet particulièrement profité des « nouveaux bénévoles ».

La répartition des effectifs bénévoles en équivalent temps plein entre les différentes activités associatives montrent que les associations sportives font figure de privilégiées : les bénévoles du secteur sportif représentent 31 % du nombre total, on trouve en seconde position l'action sociale (17 %) et en troisième position le secteur des loisirs et du tourisme social (15 %) 13 ( * ) .

Cette prépondérance s'explique par le fait que les clubs sportifs restent de modestes employeurs (57 % vivent sans aucun « employé temps plein », 71 % emploient entre 1 et 9 salariés à temps partiel) et que, faute de salariés, ils s'appuient majoritairement sur leurs bénévoles (92,5 % des associations sportives ont recours aux services bénévoles) 14 ( * ) .

Si, comme on peut le lire dans la tribune précitée, « le taux de création d'associations qui explose depuis plusieurs années montre combien l'engagement des citoyens (...) est à l'oeuvre », on peut se demander s'il est véritablement nécessaire de réfléchir aux moyens de soutenir un mouvement dont l'expansion semble naturelle ?

La première raison tient aux difficultés qu'ont les dirigeants associatifs à trouver des bénévoles.

Une enquête au cours de laquelle plus de 200 associations 15 ( * ) ont été interrogées montre que ces dernières ont pratiquement toutes (96 %) davantage besoin de bénévoles qu'il y a cinq ans 16 ( * ) , cette attente venant avant les besoins en biens matériels (65 %) et en moyens financiers (63 %) 17 ( * ) , ce qui prouve que ce sont précisément les bénévoles qui leur font le plus défaut.

Quand on compare l'évolution des créations d'associations à celle du nombre des bénévoles, il est clair que la courbe des premières est largement supérieure à celle des seconds.

Comme le montre le graphique ci-après, il apparaît même que, lorsque le nombre de créations d'associations est fort, comme en 2000-2001 et 2002-2003, les bénévoles ne suivent pas, et il faut alors se « partager la ressource ».

Études Cerphi, février 2002

La seconde tient aux attentes des bénévoles.

Manque de reconnaissance, réticence à assumer les postes de responsabilité à cause des risques de mise en cause personnelle, insuffisante couverture des risques, découragement de ceux pour qui « s'engager coûte trop cher » : autant de facteurs désincitatifs de l'engagement.

Souhaitant apporter des réponses concrètes aux aspirations de chacun, nous serons toujours confrontés à la difficulté, voire à l'impossibilité de conceptualiser la notion de bénévolat.

Si les tentatives pour la circonscrire ont été nombreuses et ont permis de dégager un certain nombre de critères 18 ( * ) , l'observation de la vie quotidienne des associations montre que toute tentative de définition est largement réductrice.

Qu'est-ce qui lie Sophie 19 ( * ) , 19 ans, future assistante sociale, qui consacre deux jours aux « Restos du coeur » pour valoriser son CV, Michel Vial 20 ( * ) , président de la Fédération française de judo, qui, pendant trente ans, a exercé des responsabilités au sein de la fédération parisienne tout en assumant un poste de directeur financier d'un laboratoire pharmaceutique en Auvergne et le « bénévole pauvre 21 ( * ) , bénéficiaire de l'association Secours catholique, qui vient aujourd'hui lui prêter main-forte dans l'espoir de « trouver quelqu'un à qui parler » ?

Ce sont pourtant tous les trois des « bénévoles ordinaires », avec des attentes, des projets, des besoins différents.

Bien incapable de dire « ce qu'il est », on sait néanmoins ce qu'il n'est pas : le bénévole n'est pas un « volontaire », statut qui, en France, renvoie à un cadre légal établi en mars 2000 par une loi sur le « volontariat civil de cohésion sociale et de solidarité », qui est actuellement en cours de réforme 22 ( * ) .

Le « volontaire » s'engage pour une durée précise, sur des programmes précis, en contrepartie d'une couverture sociale retraite et d'une indemnité représentative de ses frais, autant de rigidités profondément contraires au principe même du bénévolat.

Il ressort de l'ensemble de ces premières réflexions que les réponses que nous tenterons d'apporter pour encourager le bénévolat en France ne pourront être ni uniformes ni communes à l'ensemble du monde associatif.

Il nous faudra également éviter un écueil : comme le soulignait Mme Ferrand-Berhmann dans son ouvrage précité, « les dispositifs publics, parce que les décideurs sont à l'affût des moindres possibilités de créations d'emplois et les responsables soucieux de contrôle ou de régulation, menacent la qualité bénévole ».

Il ne sera donc pas question de donner un statut au bénévolat, qui ferait perdre son essence même au don de soi, basé sur l'engagement volontaire et la gratuité.

Il s'agira au contraire de tenter de répondre aux préoccupations de terrain, avec le souci de faciliter les démarches et d'accompagner ceux qui s'engagent en ayant toujours le souci de préserver le supplément d'âme du bénévolat, fondé sur « la liberté de celui qui donne comme de celui qui reçoit ». 23 ( * )

I. « CRISE » OU MUTATION DU BÉNÉVOLAT ?

« Les enjeux, les pratiques, les secteurs, l'organisation, le profil et les motivations des acteurs : tout a changé depuis 10 ans », soulignait Mme Dan Ferrand-Bechmann 24 ( * ) dans son ouvrage consacré au « métier de bénévole » 25 ( * ) .

Si « de nouveaux bénévoles [sont sortis] de l'ombre : plus jeunes, plus militants, plus partenaires des professionnels dans les dispositifs éducatifs, sociaux et culturels », l'apparition et la persistance des phénomènes d'exclusion a également fait émerger une nouvelle figure : celle du « bénévole pauvre ».

Isolé, et parfois marginalisé, il vient chercher dans l'association -dont il est souvent ou a été le bénéficiaire- un groupe d'appartenance et « quelqu'un à qui parler ».

La figure traditionnelle et rassurante de la « dame de charité » a donc laissé la place à une diversité de profils.

La diversification des champs d'intervention des associations a accompagné et précédé l'apparition de ces « nouveaux » bénévoles. Les secteurs correspondant aux problèmes nouveaux : insertion, environnement, intégration, femmes, lutte contre le chômage, défense des sans papiers, des sans abris... ont été largement investis par le champ associatif.

Certaines associations ont par ailleurs atteint une taille qui apparente leur fonctionnement à celui d'une entreprise. A l'instar du « Secours populaire » -4 000 petites antennes et structures aux niveaux local et départemental, 600 salariés et 72 000 bénévoles-, elles « gèrent » leurs bénévoles comme une société gère son personnel.

Intervenant lors d'un colloque organisé en octobre 2004 par l'AFTA 26 ( * ) , Mme Bottalico, directrice des ressources humaines du Secours populaire, témoignait par exemple des difficultés particulières qu'elle avait rencontrées dans la recherche d'un trésorier pour l'association : « A ce poste, il faut que l'engagement se double d'une forte compétence technique avec l'acceptation des responsabilités ».

Si le cas du Secours populaire, association au sein de laquelle se côtoient des professionnels, des engagés et une foule de « petites mains », parfois anciens ou actuels prestataires, donne une idée de la complexification des formes d'engagement, il n'est évidemment pas représentatif de la réalité du monde bénévole.

Les 72 000 bénévoles qui s'y consacrent n'ont, pour la plupart, rien en commun avec le petit groupe de voisins qui participent à l'association de quartier de M. Jean Laplace 27 ( * ) ou avec les parents qui se relaient à tour de rôle le week-end pour conduire les enfants du voisinage au club de football municipal.

Si l'hétérogénéité des candidats au bénévolat constitue une richesse, notamment en termes de ressources pour les associations, elle ne va pas sans poser de problèmes.

La diversité des motivations place en effet les responsables associatifs face à des aspirations différentes, voire divergentes, qu'ils ont parfois du mal à prendre en compte : ceux qui s'engagent ont un projet personnel qui doit s'articuler avec le projet associatif. Dès lors, comment harmoniser les deux ?

Réunis pour réfléchir à la nature de l'engagement bénévole dans les associations productrices de services, un certain nombre de ces responsables se faisaient ainsi l'écho de leurs interrogations : « L'association permet-elle à des gens qui veulent s'engager de réaliser leurs projets, tout en gardant son efficacité dans son propre projet ? Quel type de fonctionnement faut-il instaurer dans les associations pour assurer la relève de l'engagement, le bien-être et l'épanouissement des bénévoles et de leur projet ? » 28 ( * )

En s'appuyant sur les témoignages et les exemples de terrain, votre rapporteur va tenter de dresser quelques pistes pour comprendre la nature des modifications qui ont touché les aspirations et les attentes, tant des bénévoles que des responsables associatifs.

A. UN ENVIRONNEMENT INCERTAIN QUI A PROFONDÉMENT MODIFIÉ LA NATURE DE L'ENGAGEMENT BÉNÉVOLE

L'engagement ne peut s'analyser dans l'absolu.

En effet, il est profondément dépendant et inscrit dans son époque, qui détermine les champs d'intervention des actions associatives ainsi que la nature et les formes de l'engagement.

S'il est aujourd'hui fréquent d'entendre les responsables associatifs se plaindre de la difficulté de fidéliser leurs bénévoles, à l'instar de Pierre Lambin, qui regrette que « le phénomène du zapping frappe aussi le monde du bénévolat » 29 ( * ) , il n'est pas rare non plus de voir des associations « classer » certains CV d'aspirants au bénévolat, faute de pouvoir satisfaire les aspirations du candidat 30 ( * ) .

On ne peut donc pas parler d'altération de l'engagement -au contraire, il semble que les candidats soient plus nombreux aujourd'hui qu'hier- mais d'un changement de nature, corrélé à un nouvel environnement caractérisé par une augmentation des incertitudes.

1. Un environnement incertain...

La mondialisation et le libéralisme ont eu pour effet de placer les individus face à des exigences de mobilité et de flexibilité, contribuant à rendre leur environnement plus incertain, particulièrement à un moment où se délitent les milieux traditionnels d'appartenance.

a) Une plus grande probabilité de se trouver « en rupture » professionnelle ou personnelle

Cette probabilité découle en premier lieu de l'accélération du rythme de la vie, qui transforme le parcours individuel en une suite de mutations et de « nouveaux départs » et en second lieu de la « flexibilisation » accrue des rapports économiques et sociaux.

(1) Des parcours individuels plus saccadés...

Aujourd'hui, les individus sont plus mobiles : géographiquement, il n'est plus rare de changer de domicile plusieurs fois dans sa vie. Ces « déménagements » sont la conséquence de choix professionnels ou personnels.

Professionnellement, la carrière ne suit plus un déroulement linéaire, mais obéit à la logique de la tertiarisation de l'économie, plus immatérielle et par conséquent moins ancrée à un site ou à une région.

« De la même manière qu'aujourd'hui on ne fait plus 30 ans de carrière dans la même entreprise, on ne le fait plus dans une association », remarquait Bénédicte Halba 31 ( * ) .

La mobilité est aussi souvent la conséquence d'une rupture personnelle, subie ou choisie : l'individu n'est plus stabilisé dans une « famille », mais évolue en fonction de ses apparentements affectifs changeants.

(2) Reflet d'une « flexibilisation » des rapports sociaux

L'adaptation du droit du travail aux nouvelles caractéristiques de l'économie tertiaire constitue un facteur non négligeable de déstructuration des rythmes individuels et collectifs.

Il n'est plus rare aujourd'hui d'exercer des horaires de travail décalés, voire étirés, qui ne permettent que difficilement le regroupement d'une communauté salariale autour d'objectifs communs.

Les jeunes font partie des catégories les plus touchées par ce phénomène : les contrats à durée déterminée qu'ils enchaînent ne leur permettent que très difficilement de développer une vision à long terme dans des projets individuels ou collectifs.

De plus, une part significative de la population se trouve hors du champ de l'activité économique : retraités souvent jeunes et populations sans emploi cherchent des lieux d'appartenance où ils puissent développer leurs talents.

b) La dislocation des groupes d'appartenance traditionnels

Les groupes traditionnels d'appartenance auxquels les individus s'intégraient naturellement (groupes professionnels, d'agriculteurs, d'ouvriers, de cadres, de voisinage, de quartier, de village, familiaux...) se sont dilués.

Porteurs d'une culture, d'une connaissance fine de leurs milieux et de leurs règles, les individus pouvaient s'y identifier plus ou moins et se définissaient en grande partie par rapport à eux.

(1) La fin d'un bénévolat vécu comme le prolongement d'un itinéraire de vie

Autrefois, de nombreux bénévoles s'engageaient dans la vie associative après être passés par les mouvements d'éducation populaire ou confessionnels. C'était comme un itinéraire de vie qui préparait aux engagements politiques, syndicaux ou associatifs.

Il en découlait une très grande facilité d'intégration au sein du tissu associatif : « la greffe prenait vite, la personne disposant déjà d'une compétence ou d'une qualification, voire d'une culture du bénévolat ; ce n'est plus le cas » 32 ( * ) .

La mobilité, le chômage, la précarité, l'enfermement dans les quartiers urbains et l'enclavement des territoires ruraux ont rendu caduque cette pédagogie de la promotion de divers milieux pour leur insertion dans la société.

(2) Les conséquences pour le milieu associatif

Les répercussions sur le monde associatif sont de deux ordres :

D'une part, certaines associations se sont précisément constituées pour prendre le relais de ces anciennes affiliations et reconstituer un tissu social de proximité : c'est le cas de nombreuses associations de quartiers, comme « les violons de la baleine blanche », dont l'objectif est de redonner au quartier un environnement convivial où chacun peut trouver un lieu de proximité appuyé sur un support culturel, ou d' « Espace 19 » 33 ( * ) , dans le 19 e arrondissement de Paris, qui lutte contre l'exclusion en proposant des services de crèche, de halte garderie, de conseil conjugal, de centre de loisirs, et qui accueillent les jeunes et les personnes en difficulté.

D'autre part, le « bénévolat vocationnel », du début à la fin de la vie, est en voie de disparition. Marc Chabant, directeur des ressources et du développement des Scouts et Guides de France le reconnaît : « Les gens qui ont trente ans de parcours dans une seule association comme M. Vial 34 ( * ) et qui gravissent peu à peu tous les échelons, y en aura-t-il encore ? Probablement pas. » 35 ( * )

La prise en compte de la probabilité d'un changement dans les conditions de vie a incontestablement entraîné une modification de la nature de l'engagement bénévole : plus court, plus saccadé, il répond, pour certains bénévoles, à une logique assumée d'échanges.

* 1 V. l'article « Y a plus de bénévoles », paru dans la Revue juridique et économique du sport de juin 2004 (n° 71, p. 35).

* 2 Créée en 1981, la Fonda regroupe des responsables associatifs de tous les secteurs aux niveaux national et régional, pour analyser, réfléchir et agir en faveur de la vie associative.

* 3 La Tribune Fonda n°  169 consacrée à « l'engagement citoyen dans les associations : contexte, enjeux et conditions ».

* 4 « Le métier de bénévole » Dan Ferrand-Behrmann, ouvrage paru en avril 2002 aux éditions Anthropos.

* 5 C'est également l'opinion de Christian Arnsperger et Philippe Van Parji, économistes, pour qui « dans des sociétés de plus en plus diverses, de plus en plus libérées, de plus en plus désemparées, les questions de l'utilité sociale et de la place de l'individu sont plus aigues et plus urgentes que jamais ». Source : Éthique économique et sociale, la Découverte - Syrus, 2000.

* 6 Sidaction a pour mission de développer l'aide aux personnes touchées par le VIH, la prévention et la recherche sur le sida. Depuis sa création en février 1994, Sidaction a soutenu les programmes de quelques 350 équipes de recherche et de plus de 300 associations.

* 7 Issu du même ouvrage de Mme Dan Ferrand-Behrmann.

* 8 Les résultats de l'enquête réalisée à l'occasion des assises nationales de la vie associative en 1999 par le Credoc à la demande de la Délégation interministérielle à l'innovation sociale et à l'économie sociale (DIESS), sont significatifs : parmi les mots qui correspondent le mieux à la notion d'association, 96 % des personnes interrogées répondent le bénévolat [avant la solidarité (95 %) et le temps libre (86 %)].

* 9 INSEE première n° 946, février 2004.

* 10 A titre de comparaison, l'Allemagne compte 12 bénévoles et les Pays-bas 25,3 pour 1 000 habitants.

* 11 Source : calculs sur la base du programme Johns Hopkins, phase (1996-2001), Addes, Paris, 2001.

* 12 Étude du Centre d'études et de recherche sur la philanthropie réalisée en 2004.

* 13 Source : L'AFTA (Association française des trésoriers et responsables d'associations et autre organismes sans but lucratif), décembre 2004.

* 14 Josette Courtois, « Les associations, un monde méconnu », Crédit coopératif, 1991.

* 15 Présente sur la « toile Internet » depuis deux ans, l'organisme « jeveuxaider.com » permet aux associations d'exprimer leurs besoins, en particulier en matière de bénévolat et d'aide matérielle.

* 16 D'après l'enquête, ce besoin se fonde plus sur le développement de leurs activités (80 %) que sur une réduction du temps d'engagement des bénévoles (20 %).

* 17 Enquête de l'INSEE sur la vie associative (octobre 2002), réactualisée en novembre 2004.

* 18 Selon le Centre d'études et de recherche sur la philanthropie (Cerphi), cinq conditions caractérisent le bénévole, qui est « celui qui s'engage (notion d'engagement), de son plein gré (notion de liberté), de manière désintéressée (notion d'acte sans but lucratif) dans une action organisée (notion d'appartenance à un groupe, à une structure), au service de la communauté (notion d'intérêt commun). ». Ces critères rejoignent ceux dégagés par le Parlement européen dans une résolution du 16 décembre 1983 et recouvrent les 6 conditions posées dans la Déclaration universelle sur le bénévolat et le volontariat, adoptée en septembre 1990 par l'International Association for Volunteer Effort (IAVE).

* 19 Elle s'exprimait dans le journal « Libération » du mardi 7 décembre 2004.

* 20 Source : les actes du colloque organisé le 4 octobre 2004 par l'Association française des trésoriers et responsables d'associations (AFTA) sur le thème du recrutement des bénévoles.

* 21 Mme Jacqueline Mengin, vice-Présidente de la Fonda, faisait remarquer que cette catégorie de bénévoles tend à s'accroître avec le développement des phénomènes d'exclusion.

* 22 Le projet de loi relatif au volontariat associatif et à l'engagement éducatif a été adopté en
Conseil des ministres le 2 mars dernier et examiné au Sénat en première lecture au cours des séances du 11 et 12 mai 2005.

* 23 Pierre Rosenvallon, La nouvelle question sociale : repenser l'Etat-Providence, Le seuil, Paris, 1995.

* 24 Professeur à l'université Paris VIII, sociologue et observatrice du monde associatif depuis plus de 15 ans.

* 25 « Le métier de bénévole » Dan Ferrand-Behrmann, ouvrage paru en avril 2002 aux éditions Anthropos.

* 26 L'Association française des trésoriers et responsables d'associations et organismes sans but lucratif.

* 27 M. Jean Laplace est Président de l'Association « « Le Prieur » à Brive.

* 28 Source : la Tribune Fonda d'octobre 2004.

* 29 La lettre de l'économie du sport n° 734, vendredi 7 janvier 2005, « Y a-t-il une crise du bénévolat ? ».

* 30 Témoignage de Florence Daunis, Directrice générale adjointe d'Action contre la Faim, lors du colloque de l'AFTA, en octobre 2004.

* 31 La lettre de l'économie du sport n° 734, vendredi 7 janvier 2005, « Y a-t-il une crise du bénévolat ? ».

* 32 Gabriel d'Elloy, dans un article consacré à « la nature de l'engagement dans les associations de service »Tribune Fonda, octobre 2004.

* 33 « Espace 19 » gère trois centres sociaux dans le 19 e arrondissement de Paris, elle comprend 57 salariés et 350 bénévoles pour 60 équivalents temps plein, 800 familles qui adhèrent et un budget de 2 millions d'euros.

* 34 M. Vial est Président de la fédération française de judo.

* 35 Source : colloque AFTA, octobre 2004.

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