2. Renforcer la transparence des marchés « papier »

Le débat sur la spéculation est toujours délicat car ce terme a dans le langage courant une connotation négative. La terminologie retenue par les Américains pour distinguer les intervenants sur les marchés à terme « papier » est plus neutre : ils distinguent entre les acteurs commerciaux qui cherchent à couvrir un risque (par exemple la compagnie aérienne qui souhaite s'assurer du prix du kérosène) et les acteurs non commerciaux, à savoir tous ceux qui utilisent ces marchés dans une stratégie d'investissement.

La spéculation existe souvent parce qu'il existe un écart entre le prix du marché et le prix d'équilibre. Elle a donc plutôt tendance à ramener le prix vers son équilibre. Toutefois, les acteurs du marché peuvent également se laisser influencer par des tendances à la hausse ou à la baisse et dans ce cas, la spéculation alimente des anticipations autoréalisatrices : apparaît alors un phénomène de bulle (qu'elle soit immobilière ou financière) qui, lorsqu'elle éclate, affecte profondément l'économie.

Dès lors, comment lutter contre la très forte volatilité des marchés? Plus le marché est liquide, moins il est manipulable. Il convient donc certainement d'encourager la liquidité du marché, notamment par l'arrivée de nouveaux intervenants. A cet égard, on peut regretter que les PME ou certaines catégories socioprofessionnelles particulièrement sensibles à l'évolution du cours du pétrole (taxis, agriculteurs, pêcheurs, transporteurs routiers) n'interviennent pas sur les marchés à terme « papier » pour couvrir leur risque « pétrole » en raison des coûts de cette couverture et de l'absence de personnel compétent pour gérer cette activité. Il serait donc intéressant d'explorer la faisabilité d'une couverture des risques de ces acteurs économiques par les marchés à travers une mutualisation des coûts et des risques au niveau des syndicats et des fédérations professionnels.

Lors de leurs auditions, certains interlocuteurs ont également proposé, par exemple, de réguler le marché de gré à gré pour lutter contre la spéculation.

Il convient de rappeler que ce dernier n'est pas localisé physiquement. Les transactions hors marché sont effectuées directement entre le vendeur et l'acheteur. Contrairement aux marchés de Londres ou de New-York qui offrent un nombre limité de contrats standard sur certains types de produits avec des échéances cotées, le marché de gré à gré autorise la signature de contrats sur la plupart des produits à n'importe quelle échéance. Comment donc réguler un marché virtuel et mondial?

En réalité, il serait inexact de dire que le marché de gré à gré échappe à tout contrôle. Les établissements financiers sont soumis aux réglementations nationales et internationales qui prennent en compte leurs activités sur le marché de gré à gré. En France, par exemple, la Commission bancaire contrôle que ces dernières figurent bien sur le compte d'activité des établissements de crédit et vérifie le volume et le type des risques encourus.

Pour autant, le marché de gré à gré pourrait gagner en transparence à travers la publication de statistiques sur les volumes traités, les types de produits, la maturité des contrats ou encore le type d'instruments financiers utilisé. Ces informations pourraient être recensées par chaque organisme national de régulation puis centralisées et publiées par la Banque des Règlements Internationaux.

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