B. UNE PLACE À PART AU SEIN DU PAYSAGE ÉDUCATIF : LES ATOUTS D'UN SYSTÈME DE FORMATION ATYPIQUE ET PLURIEL

L'enseignement agricole, « marqué par sa spécificité et sa forte identité, tout en étant une composante à part entière du système éducatif général » 10 ( * ) , occupe une place originale au sein du paysage éducatif français.

D'un côté, il partage les grandes orientations fixées à notre système d'éducation et de formation et apporte une contribution à la réalisation des objectifs définis par la Nation : les réformes engagées y trouvent une répercussion directe, dans le respect des spécificités définies au code rural, comme ce fut le cas, notamment, de la récente loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005.

De l'autre, la pluralité de ses missions, sa petite dimension, ainsi que son rattachement à un ministère « technique », lui confèrent une plus grande réactivité pour s'adapter aux besoins des secteurs professionnels et des territoires. Par ses spécificités, il apporte, sans nul doute, une plus-value à l'ensemble de notre système éducatif, en proposant des réponses complémentaires et variées aux besoins de formation et de qualification.

1. Bref panorama d'un enseignement « hors norme »

L'enseignement agricole constitue une composante du service public d'éducation et de formation, relevant du ministère de l'agriculture. Il recouvre une gamme complète de formations, s'étendant de la classe de 4 e jusqu'au 3 e cycle de l'enseignement supérieur, et dispensées en formation initiale, par la voie de l'apprentissage ou en formation continue.

On distingue l'enseignement « technique », qui regroupe les formations du second degré et « post-baccalauréat », et l'enseignement supérieur agricole, comprenant des établissements que l'on classe, pour la plupart, dans la catégorie des « grandes écoles ».

a) L'enseignement technique : des réponses complémentaires et variées aux besoins de formation

L'enseignement technique agricole accueille, à la rentrée 2005 :

- plus de 175 800 élèves dans 850 établissements, soit une dimension qui le rend comparable à une académie de taille moyenne, en ne tenant compte que des effectifs du second degré de l'éducation nationale 11 ( * ) ;

- plus de 30 000 apprentis (soit moins de 10 % du total des jeunes en apprentissage), dans 159 centres de formation d'apprentis (CFA) 12 ( * ) ;

- enfin, plus de 119 500 adultes-stagiaires ont été formés, en 2004, dans 435 centres de formation professionnelle continue (187 centres publics et 248 centres privés).

L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE ARICOLE A LA RENTRÉE 2005

Nombre d'établissements

Nombre d'élèves

Part en %

Nombre de CFA

Nombre d'apprentis

Enseignement public

195
soit 218 lycées*

67 098

38,2

99

23 331

Enseignement privé

632

108 732

61,8

60

6 880

dont

CNEAP

203

51 006

29,0

UNMFREO

379

50 538

28,7

UNREP

47

6 826

3,9

Divers

3

362

0,2

Total public + privé

850

175 830

100

159

30 184

* Lycées d'enseignement général et technologique agricole (LEGTA) et lycées professionnels agricoles (LPA).

Source : Ministère de l'agriculture - Effectifs France métropolitaine + DOM + TOM

L'enseignement technique agricole est caractérisé par :

- une diversité des voies et filières de formation , d'une part, puisqu'il conjugue les filières générales (de la classe de 4 e aux sections scientifiques des classes préparatoires aux grandes écoles), technologiques et professionnelles (du certificat d'aptitude professionnelle agricole -CAPA- au brevet de technicien supérieur agricole -BTSA-), ces dernières étant dispensées en formation initiale scolaire, en apprentissage ou en formation continue ;

Cela permet ainsi de créer, au sein de la plupart des établissements, une mixité des publics -élèves, apprentis, adultes-stagiaires en formation continue, salariés agricoles des exploitations-, qui est une source d'enrichissement réciproque. Ce principe est en effet repris par l'éducation nationale dans le label « lycée des métiers » , consacré par la récente loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école.

- une diversité des « familles » d'établissements , d'autre part, publics et privés, qui partagent un grand nombre de caractéristiques communes, mais se différencient par leur statut, leur mode de fonctionnement, la pédagogie appliquée, l'offre de formation, etc., apportant ainsi chacune une identité et un savoir-faire spécifiques.

LES DIFFÉRENTES « FAMILLES » D'ÉTABLISSEMENTS

* L'enseignement public : les EPLEFPA

L'enseignement technique agricole est organisé en établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA).

Chaque EPLEFPA regroupe plusieurs centres constitutifs, qui peuvent être implantés sur plusieurs sites :

- un ou plusieurs lycées : lycée d'enseignement général et technologique agricole (LEGTA) ou lycée professionnel agricole (LPA) ;

- un ou plusieurs centres de formation d'apprentis (CFA) ;

- un ou plusieurs centres de formation professionnelle et de promotion agricole (CFPPA) ;

- un ou plusieurs ateliers technologiques ou exploitations agricoles, « qui assurent l'adaptation et la formation aux réalités pratiques, techniques et économiques, et qui contribuent à la démonstration, à l'expérimentation et à la diffusion des techniques nouvelles » (article L. 811-8 du code rural) .

* L'enseignement privé : des établissements relevant de trois fédérations

L'enseignement technique agricole privé se compose d'établissements gérés par des associations ou organismes affiliés à trois principales fédérations, et pratiquant deux types d'enseignement, à « temps plein » ou en alternance :

- le Conseil national de l'enseignement agricole privé (CNEAP) fédère les établissements agricoles confessionnels (lycées, centres d'adultes, CFA ou unités de formation par apprentissage), qui dispensent, en formation initiale, un enseignement « à temps plein » , comme dans l'enseignement public, c'est-à-dire « comportant des séquences pédagogiques dispensées dans l'établissement et sous forme de stages pratiques dans des exploitations ou entreprises du secteur agricole » (article L. 811-5 du Code rural) ;

- l' Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et de formation (UNMFREO) regroupe près de 439 associations de trois types (les Maisons familiales rurales, les Instituts ruraux et les Centres de formation et de promotion, pour la formation continue) ; ils dispensent un enseignement dit « à rythme approprié », faisant alterner deux semaines de formation à la MFR et deux semaines de formation en entreprise ;

- le réseau des établissements (lycées agricoles, centres de formation professionnelle continue, centres d'apprentissage) affiliés à l' Union nationale rurale d'éducation et de promotion (UNREP) est constitué d'organismes gestionnaires autonomes d'origines très différents (chambres d'agriculture, chambres de commerce, collectivités territoriales, associations ou fondations reconnues d'utilité publique, comme la Fondation des orphelins d'Auteuil) ; ses établissements scolaires fonctionnent soit à temps plein, soit en alternance.

(1) La formation initiale scolaire : des évolutions et des positionnements différents selon les « familles » d'établissements

A la rentrée 2005, les effectifs d'élèves et d'étudiants en formations supérieures courtes se répartissent comme indiqué dans le tableau ci-après.

RÉPARTITION DES EFFECTIFS D'ÉLÈVES (ANNEE 2005-2006)

Public

Privé

Total

CPA/CLIPA

611

131

742

4 e

1 535

12 459

13 994

3 e

2 564

16 884

19 448

CAPA

969

6 742

7 711

BEPA

17 796

39 404

57 200

2 nde générale et technologique

6 372

2 303

8 675

Bac général S

2 869

910

3 779

Bac technologique

9 511

3 700

13 211

Bac professionnel

9 712

13 360

23 072

BTA

1 701

5 609

7 310

BTSA

12 252

6 330

18 582

CPGE, classes Post BTSA

540

-

540

CPA : classes préparatoires à l'apprentissage ; CLIPA : classes d'initiation pré professionnelle en alternance ; BEPA : brevet d'études professionnelles agricoles ; BTA : Brevet de technicien agricole.

Source : Ministère de l'agriculture - Effectifs France métropolitaine + DOM

Si la très forte expansion des effectifs de l'enseignement agricole au cours de la décennie 1990 a profité à l'ensemble des « familles » d'établissements, le ralentissement de cette croissance a ensuite été plus marqué dans l'enseignement public, comme le montre le tableau page suivante.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS SCOLARISÉS
(ENSEIGNEMENT TECHNIQUE AGRICOLE)

1985

1990

1995

1999

2003

2005

Évolution 90/99
en %

Évolution 99/2005
en %

Public

53 525

56 620

66377

71 809

67 080

66 446

+ 26,8

- 7,5

Privé

Temps plein

45 865

43 505

51 052

57 332

54 524

56 059

+ 31,8

- 2,2

Rythme approprié

32 291

32 285

42 525

49 428

51 179

51 791

+ 53,1

+ 4,8

Total privé

78 156

75 790

93 577

106 760

105 700

107 850

+ 40,9

+ 1

Total public + privé

131 681

132 410

159 954

178 569

172 780

174 296

+ 34,9

- 2,4

Source : Ministère de l'agriculture - DGER - France métropolitaine + DOM

Ces évolutions s'expliquent notamment par les différences observées entre les « familles » d'établissements, selon les niveaux et les secteurs de formation qui y prédominent :

- les établissements publics ont redéployé leur offre vers le niveau III de formation, en net recul depuis 1999, au détriment des classes de 4 e et de 3 e (niveaux VI), qui connaissent aujourd'hui la plus forte attractivité ;

- au contraire, les établissements privés, notamment les Maisons familiales rurales, sont restés très présents dans les classes de niveau collège, tout en participant à l'élévation du niveau des diplômes délivrés.

PART DES DIFFÉRENTES VOIES DE FORMATION
DANS CHAQUE « FAMILLE » D'ÉTABLISSEMENTS (en %)

PUBLIC

PRIVÉ

ENSEMBLE

TOTAL

CNEAP

UNMFREO

UNREP

Ø Voie générale

21,8

30,2

25,9

34,9

29,6

27,1

Dont 4 e /3 e

7,1

27,3

20,0

34,6

28,9

19,6

2nde

9,6

2,1

4,1

0,3

0,7

5,0

Bac S

4,3

0,8

1,8

-

-

2,2

CPGE

0,8

-

-

-

-

0,3

Ø Voie technologique

14,3

3,4

6,5

0,6

1,1

7,6

Ø Voie professionnelle

63,9

66,4

67,6

64,5

69,3

65,3

- enfin, la répartition des effectifs par secteurs professionnels traduit des positionnements différents entre les établissements publics et privés ; le secteur des services aux personnes, qui connaît une expansion rapide ces dernières années, est prédominant dans le privé, alors qu'il reste plus marginal dans le public.

RÉPARTITION DES EFFECTIFS PAR SECTEURS PROFESSIONNELS

(2004-2005)

(en %)

Secteurs

Public

Privé TP

Privé RA

Ensemble

Production

48,2

28,4

35,5

38,5

Transformation

7,6

4,0

0,6

4,6

Forêt/Aménagement

27,0

14,6

13,4

19,4

Services aux personnes

9,0

42,4

42,6

28,6

Services aux entreprises

2,1

2,2

1,2

1,9

Commercialisation

6,1

8,3

6,6

7,0

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS ET DE LA PART (EN %)
DES STATUTS D'ENSEIGNEMENT PAR NIVEAU

1991

2004

Niveau VI et V bis (CPA/CLIPA, 4 e et 3 e )

Public

6 166 (23,0)

4 906 (14,0)

Privé TP

9 474 (41,6)

11 933 (33,9)

Privé RA

11 116 (41,6)

18 319 (52,1)

Part en %

20,2

20,2

Niveau V

(CAPA, BEPA)

Public

14 386 (31,2)

18 875 (29,5)

Privé TP

16 976 (36,8)

22 333 (34,8)

Privé RA

14 721 (32,0)

22 888 (35,7)

Part (en %)

34,8

36,9

Niveau IV

(2 nde , séries bac)

Public

26 044 (61,1)

29 910 (54,4)

Privé TP

11 671 (27,4)

16 196 (29,4)

Privé RA

4 908 (11,5)

8 891 (16,2)

Part (en %)

32,1

31,6

Niveau III

(BTSA, CPGE)

Public

11 269 (66,0)

13 169 (67,0)

Privé TP

4 935 (28,9)

4 968 (25,3)

Privé RA

871 (5,1)

1 520 (7,7)

Part (en %)

12,9

11,3

Ensemble

Public

57 865 (43,6)

66 860 (38,4)

Privé TP

43 056 (32,5)

55 430 (31,9)

Privé RA

31 616 (23,9)

51 618 (29,7)

Total

132 537 (100)

173 908 (100)

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS PAR NIVEAU

Niveaux

1991

1999

Évolution 91/99

en %

2004

2005

Évolution 99/05

en %

Ø VI et V bis

26 756

32 236

+ 20,5

35 158

34 194

+ 6,1

Ø V

46 083

63 641

+ 38,1

64 096

64 933

+ 2,0

Ø IV

42 623

60 002

+ 40,8

54 997

56 047

- 6,6

Ø III

17 075

22 690

+ 32,9

19 657

19 122

- 15,7

Ensemble

132 537

178 569

+ 34,7

173 908

174 296

- 2,4

Par cette pluralité, l'enseignement agricole peut apporter des réponses adaptées à des besoins très divers : il sait aussi bien « remettre sur les rails » des élèves en situation d'échec dans le système général, dans ses classes de 4 e et de 3 e notamment, que dispenser une formation d'excellence, dans des établissements équipés d'un matériel scientifique de pointe.

Votre rapporteur a pu approcher ces deux situations extrêmes lors d'un déplacement en Midi-Pyrénées :

- d'un côté, l'EPLEFPA d'Auzeville, dans la périphérie de Toulouse, se classe parmi les meilleurs lycées de la région et affiche d'excellents résultats aux concours des grandes écoles ; il accueille des élèves de classes préparatoires scientifiques de l'éducation nationale, pour qu'ils puissent bénéficier des équipements de ses laboratoires ;

- de l'autre, votre rapporteur s'est rendu dans un établissement relevant du CNEAP, qui accueille, dans un cadre familial et presque « artisanal », une centaine de jeunes filles, de la 4 e au BEP, pour les former aux métiers des services à la personne en milieu rural.

Ces deux types de formations ont leur place et leur utilité au sein du système, dont la richesse, et aussi l'originalité, est de conjuguer des voies complémentaires de formation. C'est ainsi méconnaître l'enseignement agricole que de le réduire à une voie de « remédiation » pour élèves « inadaptés », même si cette fonction a toute son importance et son intérêt.

(2) L'apprentissage

L'évolution des effectifs d'apprentis dans les centres de formation publics et privés relevant de l'enseignement agricole a suivi l'évolution générale des effectifs d'élèves : après s'être accru légèrement de 1980 à 1992, passant de 8 000 à 10 000, le nombre d'apprentis a fortement progressé à compter de 1993 (+ 19,5 % par an en moyenne) ; puis cette croissance s'est ralentie depuis 1998, comme le montre le graphique suivant.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS D'APPRENTIS

Source : Ministère de l'agriculture, L'enseignement agricole à la rentrée 2006

Cette croissance des effectifs s'est accompagnée d'une élévation du niveau des diplômes préparés :

1995

2000

2002

2003

2004

Niveau V

Public

60,6

58,7

58,0

56,6

Privé

50,1

45,4

43,1

42,1

Ensemble

69,6

58,5

55,7

54,6

53,4

Niveau IV

Public

25,6

25,9

26,1

27,5

Privé

25,8

27,1

29,0

27,7

Ensemble

19,2

25,6

26,2

26,7

27,5

Niveau III

Public

13,6

15,1

15,5

15,4

Privé

19,7

22,0

22,5

24,0

Ensemble

10,8

14,8

16,6

17,1

17,3

Source : Observatoire national de l'enseignement agricole, rapport 2006

Enfin, la répartition des apprentis par secteur se différencie de celle des élèves en formation initiale, et traduit une prédominance des secteurs de la production et de la forêt-aménagement (travaux paysagers, etc).

RÉPARTITION DES APPRENTIS PAR SECTEUR DE FORMATION
(2004-2005)

(en %)

Secteurs professionnels

Public

Privé

Total

Ø Production

44,6

37,6

43,0

Ø Transformation

4,0

6,5

4,6

Ø Forêt-Aménagement

39,5

29,7

37,3

Ø Métiers du cheval

5,4

5,6

5,4

Ø Services

1,6

4,2

2,2

Ø Commerce, distribution

4,8

16,5

7,4

Source : Observatoire national de l'enseignement agricole - Rapport 2006

(3) La formation professionnelle continue

Le volume d'activité des centres de formation professionnelle continue (en heures stagiaires) est en constante diminution depuis 1995 , passant de 27,7 millions à 16,5 millions en 2004, dont 65 % dans les centres publics (CFPPA) et 35 % dans les centres privés. De même, le nombre de stagiaires a diminué de 12 % de 2000 à 2004.

Cela représente près de 2 % du marché total de la formation professionnelle continue en France.

HEURES STAGIAIRES EN 2004 PAR NIVEAU

Source : Ministère de l'agriculture, L'enseignement agricole à la rentrée 2006

La diminution de la part des financements publics (65 % des fonds en 2004, dont près de 50 % provenant des conseils régionaux, contre parfois plus de 80 % en 2000), parallèle au développement de la concurrence sur le marché de la formation professionnelle continue, a déstabilisé de nombreux centres, aujourd'hui dans une situation financière très difficile.

Comme la présidente de l'association des directeurs de CFPPA l'a indiqué à votre rapporteur, seuls les centres ayant su diversifier leurs activités et leurs sources de financement sont actuellement dans une situation globalement bonne (environ 10 % d'entre eux).

b) L'enseignement supérieur agricole
(1) Un système d'excellence

L'enseignement supérieur agricole assure la formation d'ingénieurs, de paysagistes, de cadres spécialisés, d'enseignants, de chercheurs et de vétérinaires, dans 26 établissements -dont 19 écoles publiques et 7 écoles privées -, qui se déclinent en 7 catégories :

- les écoles d'ingénieurs publiques comportent 5 écoles nationales supérieures d'agronomie (ENSA) ou assimilées (INA-PG, ENSAM, ENSAR, ENSHAP de l'INH et ENSIA 13 ( * ) ) ainsi que 9 écoles nationales d'ingénieur des travaux (ENIT) et assimilées (ENITAB, ENITACF, ENESAD, ENITIAA, Formation des ingénieurs forestiers -FIF- de l'ENGREF, INSEA, ENIHP de l'INH, ENGEES 14 ( * ) ) ;

- les écoles d'ingénieurs privées , affiliées à la Fédération des écoles supérieures d'ingénieurs en agriculture -FESIA- (ESB, ESAP, ISAB, ISA-ITIAPE, ISARA 15 ( * ) ) ou non (ESITPA, ESB 16 ( * ) ) ;

- les 4 écoles nationales vétérinaires de Maisons-Alfort, Lyon, Nantes et Toulouse ;

- une école du paysage : l'École nationale supérieure du paysage (ENSP) de Versailles ;

- les écoles d'application , dont une vétérinaire : ENGREF, CNEARC, ENSV 17 ( * ) ;

- les centres de 3 e cycle : ISAA et IESIEL 18 ( * ) ;

- une école de formation initiale des professeurs des établissements d'enseignement secondaire agricole : l'École nationale de formation agronomique (ENFA) de Toulouse.

Les effectifs d'étudiants et d'apprentis ont connu une expansion rapide sur la dernière décennie, traduisant l'attractivité des formations délivrées : ils ont augmenté de plus de 30 % entre 1992 et 2002 (+32,3 % dans le public et +26,6 % dans le privé) ; cette croissance s'est poursuivie à un rythme rapide dans les formations de 3 e cycle, ainsi que dans les écoles privées, dont les effectifs ont augmenté de près de 10 % entre 2002 et 2005.

LES EFFECTIFS DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AGRICOLE (2005-2006)

* Le total corrigé tient compte des doubles inscriptions de certains étudiants.

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche, Direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER)

(2) La mise en place d'une organisation en 7 pôles régionaux

Afin de consolider l'attractivité des formations et de les doter d'une plus forte visibilité internationale , dans un système d'enseignement supérieur de plus en plus ouvert à la concurrence, M. Hervé Gaymard, alors ministre de l'agriculture, a annoncé, le 17 mai 2004, une ambitieuse réorganisation du système d'enseignement supérieur et de recherche agricoles en pôles régionaux de compétences .

Cette annonce, qui a précédé de deux ans la mise en place, par la loi de programme pour la recherche du 18 avril 2006 19 ( * ) , des « pôles de recherche et d'enseignement supérieur » (PRES), reprend la proposition qui avait été formulée par notre collègue, M. Pierre Laffitte, dans un rapport sur l'enseignement supérieur agricole remis au ministre de l'agriculture en 1994.

L'objectif de ce schéma est d'apporter au système une « taille critique » en potentiel humain et intellectuel , alors que la petite taille des établissements et leur dispersion sur le territoire (voir la carte ci-après) constitue un facteur de fragilité.

RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE
DES ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AGRICOLE

Source : Observatoire national de l'enseignement agricole, Rapport 2006

Ce faisant, cette organisation tend à renforcer l'ancrage territorial des établissements, tout en leur consolidant, au sein de ces pôles de compétences spécialisés autour d'une ou plusieurs thématiques d'excellence, la liaison entre l'enseignement supérieur, les instituts de recherche et les structures de développement relevant, notamment, du ministère de l'agriculture.

LA RÉORGANISATION DU SYSTÈME D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
ET DE RECHERCHE AGRICOLES

A l'issue d'une large concertation, un projet de réorganisation de l'enseignement supérieur agricole a été présenté le 17 mai 2004 devant le Conseil national de l'enseignement supérieur agricole, agroalimentaire et vétérinaire (CNESERAAV). Ce schéma s'appuie notamment sur la constitution de pôles géographiques de compétences en sciences et technologies du vivant, regroupant :

- des établissements publics d'enseignement supérieur relevant du ministère de l'agriculture, d'autres sous tutelle de l'éducation nationale ou d'autres départements ministériels, ainsi que des établissements privés, dans le cadre de conventions ;

- des établissements publics de recherche (INRA, CEMAGREF, AFSSA, IFREMER, INSERM, CNRS, CIRAD 20 ( * ) ...) ;

- des structures publiques et/ou professionnelles en charge du développement et du transfert de technologies, tels que les instituts et centres techniques agricoles (ACTA, ACTIA 21 ( * ) ...), ainsi que les organismes de soutien des processus d'innovation et la création d'entreprises innovantes (incubateurs, pépinières de jeunes entreprises, etc.).

Lors de l'annonce du 17 mai 2004, six pôles de compétences ont été proposés. La création d'un septième, le pôle lorrain, a été annoncée le 28 octobre 2005 :

- 4 pôles sont portés par des établissements sous tutelle du ministère de l'agriculture : les pôles francilien, montpelliérain, ouest et clermontois-lyonnais ;

- les 3 autres sont interministériels : les pôles toulousain, dijonnais et lorrain.

2. Une voie de promotion et d'insertion

Alors que la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'école du 23 avril 2005 a rappelé l'objectif de mener 100 % des jeunes à une qualification, l'enseignement agricole y apporte une contribution performante, tant en matière d'élévation des niveaux de formation que d'insertion professionnelle des jeunes.

Ce succès qui n'en dément pas fait de l'enseignement agricole une exception notable, au sein d'un enseignement technologique et professionnel qui a longtemps eu du mal à trouver sa place dans le système éducatif général.

a) Une élévation progressive du niveau des diplômés

La rénovation pédagogique mise en oeuvre à partir de la fin des années 1980 a engagé une harmonisation et un alignement progressifs des filières et des diplômes de l'enseignement agricole sur ceux de l'éducation nationale.

Elle a permis, d'une part, de poursuivre l'élévation du niveau de qualification des diplômés, en adaptant l'offre de formation aux nouveaux besoins des secteurs.

Elle a contribué, d'autre part, à améliorer la lisibilité de l'enseignement agricole et donc à renforcer son attractivité pour les jeunes, en facilitant les réorientations et les passages d'un système à l'autre.

Cet effort d'adaptation et de développement de l'appareil de formation s'est notamment traduit par :

- l'ouverture d'un baccalauréat général scientifique en 1993 ; seule une spécialité supplémentaire « biologie-écologie-agronomie » le différencie de la série correspondante de l'éducation nationale ;

- la mise en place, en 1993, du baccalauréat technologique , avec ses deux séries STAE (sciences et technologies et l'agronomie et de l'environnement) et STPA (sciences et technologies du produit agro-alimentaire) ;

- la création, à partir de la rentrée 1996, de quatre séries de baccalauréat professionnel spécifiques à l'enseignement agricole (conduite et gestion de l'exploitation agricole, productions horticoles, travaux paysagers, agro-équipement), créées dans le cadre d'un règlement général élaboré avec l'éducation nationale et destinées à se substituer au BTA.

Dans le même temps, l'offre de formation en BTSA (niveau III) s'est fortement développée au cours de la décennie 1990 , notamment dans l'enseignement public :

- les effectifs d'étudiants sont passés de 15 029 en 1990 à 22 147 en 1999, soit une hausse de plus de 47 % au cours de la décennie, avant de connaître depuis une nette diminution ;

- 160 classes de BTSA ont ouvert sur la période, dont 98 dans le public, 40 dans le privé à temps plein et 28 dans le privé à rythme approprié.

Ainsi, la part de chaque niveau de formation a évolué au profit des niveaux supérieurs (niveau IV -préparation au baccalauréat- et niveau III -filières post-baccalauréat : BTSA, classes post-BTSA et classes préparatoires aux grandes écoles), comme le retrace le tableau suivant.

ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION
DES EFFECTIFS D'ÉLÈVES PAR NIVEAU DE FORMATION (en %)

Année

Niveaux VI et V

Niveau IV

Niveau III

1985

68,4

24,3

7,3

1990

57,8

30,5

11,7

1995

55,4

32,3

12,3

2000

53,9

33,3

12,8

2005

57,1

32,0

10,9

L' allongement de la durée des scolarités a contribué à la très forte progression des effectifs de l'enseignement technique agricole : après une phase de progression lente, mais régulière, de 1985 à 1992 (+3 % sur la période), le rythme de croissance s'est fortement accéléré dès 1993 (+25 % en 4 ans), pour atteindre un pic en 1999 , avec plus de 178 500 élèves. Le tassement de cet « effet volume » a ensuite contribué au recul, puis à la stabilisation des effectifs observée depuis 2000.

b) Une « filière de la réussite »

Comme votre rapporteur le souligne dans chacun de ses rapports budgétaires, l'enseignement agricole apparaît comme une « filière de la réussite », en remplissant une fonction de promotion scolaire de ses élèves et en dispensant une formation qui conduit à l'emploi.

Cette efficacité a été mise en avant, une nouvelle fois, par le récent rapport de la mission d'audit de modernisation sur l'enseignement technique agricole 22 ( * ) , publié en juin 2006 sur commande du ministre chargé du budget et de la réforme de l'État.

Elle est mesurée par les indicateurs suivants :

- la réussite aux examens et diplômes ;

- les taux d'insertion professionnelle et de poursuite d'études , « qui complètent l'indicateur précédent à travers la mesure de l'« employabilité » des diplômés ou de leur capacité à valoriser les diplômes moins professionnalisants en poursuivant d'autres études » 23 ( * ) .

(1) Une voie de réussite scolaire : des résultats aux examens très satisfaisants

Il s'avère, tout d'abord, que les taux de réussite aux examens et diplômes sont, de façon générale, supérieurs à ceux observés, à diplômes équivalents, dans l'éducation nationale , comme le montre le tableau suivant.

RÉSULTATS AUX EXAMENS (SESSION 2005)

Diplômes de l'enseignement agricole

Taux de réussite

(en %)

Diplômes homologues de l'éducation nationale

Taux de réussite

(en %)

CAPA

84,2

CAP

77,0

BEPA

83,4

BEP

75,2

BTA

80,7

BT et BMA*

78,3

Bac professionnel

79,8

Bac professionnel

74,7

Bac S

79,8

Bac S

84,7

Bac technologique

77,9

Bac technologique

76,2

BTSA

71,0

BTS et assimilés

64,1

* BT : Brevet de technicien, BMA : Brevet des métiers d'art

On relèvera de surcroît, comme le constate la mission d'audit dans son rapport, que cette performance est d'autant plus notable que la proportion d'élèves issus des catégories socioprofessionnelles dites favorisées est plus faible dans l'enseignement agricole.

Par ailleurs, ces résultats n'ont cessé de s'améliorer ces dernières années, notamment aux niveaux V et IV : le taux global de réussite aux examens est ainsi passé de 71,3 % en 1993 à 79,8 % en 2005.

(2) Une voie de promotion scolaire : des taux élevés de poursuite d'études

En outre, l'enseignement agricole a un caractère promotionnel pour ses élèves : il contribue efficacement à l'élévation des niveaux de qualification, comme en témoignent les taux élevés de poursuite d'études .

LES POURSUITES D'ÉTUDES DES DIPLÔMÉS
DE L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE AGRICOLE

Diplômés qui poursuivent ou reprennent des études*
(en %)

Diplômés poursuivant des études qui ont obtenu un diplôme de niveau supérieur
(en %)

CAPA voie scolaire

71,6

53,0

CAPA apprentissage

53,8

54,7

BEPA voie scolaire

82,2

76,6

BTA voie scolaire

68,1

42,1

Bac technologique

94,9

81,9

Bac général série S

98,3

89,4

Bac Pro voie scolaire

47,5

48,7

BTSA voie scolaire

42,6

41,8

* Résultats des enquêtes réalisées 4 ans après l'obtention du diplôme, pour les promotions 2001 (CAPA, BTA, Bac technologique, Bac S, Bac professionnel) ou 2000 (BEPA, BTSA) .

L'enseignement agricole sert ainsi de tremplin , en permettant à un grand nombre de jeunes d'accéder à des niveaux de formation qu'ils n'auraient peut-être pas atteint en suivant la voie « générale ».

Il manque cependant, comme cela a été précisé à votre rapporteur, un indicateur précis sur le devenir scolaire des élèves à l'issue des classes de 4 e et de 3 e des établissements d'enseignement agricole.

(3) Une voie d'insertion : de bons résultats en termes d'accès à l'emploi

Enfin, l'efficacité du système se mesure par sa capacité à répondre à la demande de formation et à conduire les jeunes vers l'emploi : ainsi, les résultats obtenus en termes d'insertion professionnelle des diplômés sont à un niveau très satisfaisant, comme le montre le tableau suivant. Il faut néanmoins regretter l'absence d'indicateur harmonisé avec l'éducation nationale 24 ( * ) , permettant d'établir une comparaison objective entre les deux systèmes, notamment dans les secteurs de formation proches ou communs.

En, outre, pour les diplômés de l'enseignement supérieur agricole, le taux d'activité nette 25 ( * ) 4 ans après l'obtention du diplôme est de 95 % pour les ingénieurs et de 92 % pour les vétérinaires .

INSERTION PROFESSIONNELLE DES DIPLÔMÉS
4 ANS APRÈS L'OBTENTION DE LEUR TITRE

(en %)

Taux d'insertion

Indicateur de chômage

Total

Garçons

Filles

Total

Garçons

Filles

CAPA : Voie scolaire

65,7

74,0

56,0

28,0

20,9

36,6

Apprentissage

83,3

85,6

70,6

13,3

12,0

21,1

BEPA : Voie scolaire

78,3

84,4

74,7

14,2

9,8

17,1

Apprentissage

89,0

-

-

-

-

-

BTA : Voie scolaire

82,9

85,4

82,2

8,8

7,1

9,3

Apprentissage

93,7

-

-

-

-

-

Bac technologique

73,6

77,0

65,1

10,2

8,1

16,0

Bac pro : Voie scolaire

92,1

94,5

84,3

5,6

4,1

10,6

Apprentissage

92,9

-

-

-

-

-

BTSA : Voie scolaire

91,7

93,1

89,1

5,2

4,2

7,0

Apprentissage

94,1

-

-

-

-

-

* Résultats des enquêtes réalisées par l'ENESAD, auprès des promotions 2001 (CAPA, BTA, bac technologique, bac professionnel) ou 2000 (BEPA, BTSA).

Cette réussite s'est vu confirmer au fil des années, en parallèle à l'ouverture de la gamme des formations proposées dans l'enseignement technique. Toutefois, les résultats varient selon les filières :

- la filière « agroéquipement » présente les taux d'insertion les plus élevés : 94 % pour les titulaires d'un BEPA, 95,2 % pour les bacheliers professionnels, 97,8 % pour les diplômés de BTSA ;

- de façon générale, la filière « travaux paysagers » présente des taux d'insertion supérieurs à la moyenne (79,4 % pour les titulaires d'un CAPA, 84,6 % en BEPA) ; il en est de même, notamment, pour les filières « production agricole » ou « viticulture » ;

- les taux d'insertion sont les moins favorables pour les diplômés des secteurs des services, tout en restant à un niveau correct au-delà du CAPA (52,1 % en CAPA, 77,6 % en BEPA, 82,9 % en BTSA).

Ces chiffres sur l'insertion professionnelle des diplômés sont encore plus éloquents dès lors que l'on rappelle qu'un quart des étudiants quittent l'université au terme de la première année et que plus de 40 % en sortent sans diplôme après deux ans, sans véritable perspective de trouver un emploi.

3. Une efficacité fondée sur des spécificités à la valeur reconnue

La réussite de l'enseignement agricole repose, notamment, sur des spécificités qui lui sont propres : la pluralité des missions qui lui sont assignées par la loi, la pédagogie concrète mise en oeuvre, l'ancrage territorial des établissements et leur dimension humaine.

Les priorités récemment fixées par le législateur à notre système éducatif, dans les lois pour l'avenir de l'école, pour la cohésion sociale ou l'égalité des chances, y trouvent depuis longtemps une réalité : suivi individualisé des élèves, apprentissage et alternance dès 14 ans dans les Maisons familiales rurales, apprentissage de la citoyenneté, etc.

Ainsi, votre rapporteur juge utile de rappeler que l'enseignement agricole apporte des réponses performantes, qui ont fait leur preuve, à des débats récurrents : comment adapter l'école à la diversité des élèves ? Comment rapprocher le système éducatif des milieux professionnels et faciliter la transition formation-emploi ?...

a) Une pluralité de missions

La pluralité des missions confiées aux établissements d'enseignement agricole, publics comme privés, a été consacrée par le législateur en 1984, puis celles-ci ont été reformulées, actualisées et complétées par la loi d'orientation agricole de 1999.

Ces cinq missions inscrites dans le code rural 26 ( * ) sont les suivantes :

- assurer une formation générale, technologique et professionnelle initiale et continue ;

- contribuer à l'insertion scolaire des jeunes et à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes et des adultes ;

- participer à l'animation et au développement des territoires 27 ( * ) ;

- contribuer aux activités de développement, d'expérimentation et de recherche appliquée ;

- participer à des actions de coopération internationale, notamment en favorisant les échanges et l'accueil d'élèves, apprentis, étudiants, stagiaires et enseignants.

Ces missions consacrent l'ancrage territorial des établissements et impliquent une ouverture sur leur environnement social et professionnel, que l'on oppose souvent au repli des établissements relevant de l'éducation nationale. Leur exercice en synergie constitue un point fort du système, qui contribue à sa réussite et qu'il est donc impératif de préserver.

b) Un modèle pédagogique ?

L'une des premières caractéristiques généralement mises en avant est le caractère concret de l'enseignement agricole : celui-ci privilégie, en effet, la liaison quasi permanente entre l'acquis théorique et l'approche pratique, alors que le système général d'enseignement est recentré sur l'abstraction et les savoirs académiques.

La présence d'une exploitation agricole ou d'un atelier technologique , à la fois support d'apprentissage et lieu d'expérimentations, constitue un élément essentiel pour raccrocher les enseignements à la pratique et confronter les savoirs aux réalités du « terrain ».

Sur 218 établissements publics, 193 intègrent une exploitation agricole et 26 un atelier technologique.

Au-delà, par la nature même de ses objets d'étude -la nature et le vivant au sens large-, l'enseignement agricole mobilise chez les élèves une intelligence de la complexité et de l'action : les problèmes sont abordés dans leur globalité, de façon pluridisciplinaire, favorisant ainsi une transversalité des connaissances.

Ces compétences et savoir-faire sont des qualités appréciées et recherchées par les employeurs.

De même, les stages en milieu professionnel constituent, à tous les niveaux, un élément central dans les cursus scolaires : en effet, selon le diplôme préparé 28 ( * ) , les formations comportent en moyenne de 10 à 16 semaines d'immersion en entreprise . Premier contact avec le monde du travail, ces stages facilitent ensuite pour les élèves la transition vers l'emploi.

Par cette approche finalisée et concrète des savoirs , l'enseignement agricole permet de « raccrocher » certains jeunes au système scolaire et de leur offrir une planche de rebond .

Comme cela a été souligné, les résultats sont là, tant en termes de réussite aux examens que de poursuite d'études et d'insertion professionnelle : loin d'être une « voie sans issue », l'enseignement agricole accompagne de nombreux jeunes vers un niveau de qualification qu'ils n'auraient peut-être pas atteint en restant dans une salle de classe ordinaire.

c) Des établissements ancrés dans les territoires

Le réseau des établissements d'enseignement agricole assure un maillage dense du territoire 29 ( * ) : comme le montre la carte ci-dessous, ils sont présents, au niveau du second degré, dans l'ensemble des régions de métropole et d'outre-mer.

RÉPARTITION ET NOMBRE D'ÉTABLISSEMENTS
D'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE PAR REGION

Source : Observatoire national de l'enseignement agricole, Rapport 2006

Par ailleurs, près de la moitié des établissements se situent dans des communes de moins de 3 000 habitants .

Ce maillage n'est pas étranger aux liens étroits que les établissements tissent avec leur environnement social et professionnel : il s'agit d'un atout qu'il nous faut veiller à maintenir, face aux tentations de regroupement des structures, ne répondant qu'à des logiques d'économie budgétaire.

A la fois centres de ressources et acteurs de développement local, les établissements jouent un rôle structurant et actif en termes d'aménagement du territoire et de revitalisation des zones rurales, auquel les élus, qui en connaissent bien l'importance, sont très attachés.

La mission d'audit sur l'enseignement agricole a mis cela en avant, comme un facteur d' « efficacité au regard du territoire » : « les établissements d'enseignement agricole, du fait de leur origine et de leur localisation, sont profondément ancrés dans leurs territoires d'implantation, avec lesquels ils ont noué des relations très étroites et dont ils constituent un élément essentiel, économique, social, culturel et par conséquent politique. »

De la même façon, M. François Grosrichard a souligné, dans son rapport, combien les établissements d'enseignement agricole, en général implantés dans des zones à dominante rurale, étaient pour celles-ci « des leviers de développement ou des pôles de résistance au déclin » :

- ils « constituent souvent des « locomotives » économiques pour le canton, l'arrondissement, le bassin d'emploi où ils sont implantés, en termes de flux financiers ou commerciaux, de salaires des personnels, d'achats de fournitures, de réseaux de ramassage scolaire, de logement » ;

- ce sont aussi « des carrefours d'animation par la mise à disposition de leurs locaux » , et des centres de ressources « qui jouent une sorte de rôle de centre culturel « para municipal » ouvert à tous. »

- enfin, « leurs liens avec les élus locaux, les organismes agricoles, le milieu professionnel, les associations, les chambres de métiers et les chambres d'agriculture sont anciens et évidents ».

En effet, en raison de cette ouverture sur l'extérieur, les établissements ont une culture de projet et de partenariat qui contribue à leur rayonnement et leur influence au niveau local .

Ainsi, leur proximité avec le tissu économique et professionnel constitue un élément prépondérant d'aide à l'insertion professionnelle des jeunes et des adultes, en facilitant la transition vers l'emploi.

En cela, votre rapporteur a pu constater, lors d'un déplacement à Toulouse, la diversité des actions d'insertion menées par le CFPPA d'Auzeville, en partenariat avec l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) et le conseil régional, en direction des personnes les plus éloignées de l'emploi et notamment des prisonniers 30 ( * ) , en s'appuyant sur un réseau de plus de 1 000 entreprises.

La bonne réussite de ces actions repose, en particulier, sur les multiples liens tissés par l'établissement avec son environnement professionnel, qui lui assurent reconnaissance et crédibilité.

A cet égard, l'organisation des établissements constitue, en elle-même, un facteur d'ouverture et d'efficacité de l'enseignement agricole.

En effet, la composition des conseils d'administration des établissements publics se distingue de celle des collèges et lycées relevant de l'éducation nationale (voir tableau suivant), par la plus forte présence de personnalités extérieures à l'établissement, et notamment de représentants des milieux professionnels.

De surcroît, la présidence du conseil d'administration est assurée par une personnalité extérieure , bien souvent issue du milieu professionnel agricole ou un élu local.

Ce modèle est souvent pris en exemple, si bien qu'à l'initiative de notre collègue M. Jean-Claude Carle, rapporteur du projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école, les lycées professionnels relevant de l'éducation nationale pourront adopter, dans le cadre d'une expérimentation 31 ( * ) , ce pilotage « bicéphale », avec un président du conseil d'administration distinct du chef d'établissement.

COMPOSITION DES CONSEILS D'ADMINISTRATION DES EPLE ET DES EPLEFPA

EPLE* - Lycée

EPLEFPA**

1 er collège : les institutionnels

Le chef d'établissement, l'adjoint, le gestionnaire, le conseiller principal d'éducation, le chef des travaux.

1 représentant de la collectivité de rattachement, 3 représentants de la commune

Le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt (DDAF), le directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP), le directeur du centre d'information et d'orientation

1 personnalité qualifiée désignée par l'Inspection académique

2 conseillers régionaux, 1 conseiller général, 1 représentant de la commune

2 e collège : les personnels

7 personnels d'enseignement et d'éducation, 3 personnels ATOSS

6 personnels d'enseignement et d'éducation et 4 représentants des ATOSS et de l'exploitation

3 e collège : les usagers

5 parents d'élèves, 5 élèves

2 parents, 2 élèves, 1 ancien élève, 5 représentants des organisations professionnelles

Consultatifs

-

Le chef d'établissement, l'adjoint, le gestionnaire, les directeurs de centres, l'agent comptable

Présidence

Le directeur d'établissement

Une personnalité extérieure

* EPLE : Établissement public local d'enseignement (collèges et lycées relevant de l'éducation nationale)

** EPLEFPA : Établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole

Source : Rapport sur l'enseignement agricole, Mission d'audit de modernisation, juin 2006.

d) Une dimension humaine et sociale

Votre rapporteur a pu apprécier, en approfondissant, depuis cinq ans, sa connaissance du système, la dimension humaine et sociale de l'enseignement agricole, qui constitue un « supplément d'âme » et sans doute également l'un de ses principaux facteurs de réussite.

En effet, en allant au contact des équipes éducatives et des élèves dans les établissements, il semble bien que l'on ne retrouve dans aucun autre système de formation ce caractère familial et ces valeurs humaines sur lesquels l'enseignement agricole a bâti son identité.

Souvent présentés comme de grandes « maisons familiales », les établissements se distinguent en effet par plusieurs caractéristiques :

- leur taille humaine , puisqu'on compte en moyenne 210 élèves par établissement 32 ( * ) ; à titre de comparaison, dans l'enseignement public « ordinaire », les collèges accueillent en moyenne plus de 510 élèves, les lycées plus de 1 000 et les lycées professionnels plus de 420 (respectivement 360, 380 et 185 pour les établissements privés) ;

- l' association et la participation des familles à la scolarité de leurs enfants ;

- la présence, dans 98 % des établissements, d'un internat , autour duquel se crée une véritable vie sociale ; 58 % des élèves sont internes , alors qu'ils ne sont que 7 % dans les lycées généraux et 12 % dans les lycées professionnels relevant de l'éducation nationale ; cet encadrement est bénéfique pour de nombreux jeunes, qui font ainsi l'apprentissage de l'autonomie, de la vie en commun et du respect de l'autre, tout en étant immergés dans un cadre qui suscite le travail ;

- dans le même sens, l'éducation socioculturelle est une discipline propre à l'enseignement agricole, qui ne trouve pas d'équivalent ailleurs ; elle est assurée depuis 40 ans par un corps spécifique d'enseignants, dont le référentiel professionnel et les conditions d'exercice viennent d'être actualisés 33 ( * ) , portant ainsi reconnaissance de leur rôle fondamental en matière d'ouverture culturelle des élèves, d'élargissement de leur champ d'horizon et d'apprentissage du sens de l'initiative et des responsabilités.

Ces valeurs propres à l'enseignement agricole concourent, par-delà leur apport à la mission de formation de base, à éduquer des hommes et des femmes , en donnant à ces jeunes les repères qui font souvent défaut aux générations actuelles.

Néanmoins, compte tenu de ces réussites, le climat actuel d'austérité budgétaire suscite un profond sentiment d'incompréhension, partagé par l'ensemble des acteurs et partenaires du système : la logique comptable qui prévaut, conjuguée à un déficit de pilotage, est perçue comme un manque de reconnaissance et d'ambition. Ces inquiétudes face à l'avenir freinent la capacité de l'enseignement agricole à aller de l'avant .

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