LA PROCÉDURE DE TÉLÉDÉCLARATION DE L'IMPÔT SUR LE REVENU : 3 MAI 2006

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président , la commission a procédé à l'audition de M. Jean-Marc Fenet, directeur général adjoint des impôts , de M. Patrick Dailhé, directeur du programme informatique Copernic au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie , de M. Pierre Lepetit, inspecteur général des finances , et de M. Xavier de Thieulloy, contrôleur général des armées sur la procédure de télédéclaration de l'impôt sur le revenu .

M. Jean Arthuis, président , a indiqué au préalable que l'audition intervenait dans le cadre d'un cycle consacré à la modernisation et à la réforme de l'Etat et qu'elle visait notamment à suivre un audit de modernisation lancé par M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, consacré à la télédéclaration de l'impôt sur le revenu. Il a rappelé que la campagne de l'impôt sur le revenu pour 2005, durant laquelle 3,7 millions de déclarations avaient été faites par la voie d'internet, avait été marquée par de multiples incidents informatiques. Il a donc jugé utile que la commission suive la campagne de l'impôt sur le revenu pour 2006, où jusqu'à dix millions de télédéclarations étaient attendues, notant que M. Bernard Angels , rapporteur spécial de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », se rendrait tout spécialement dans un centre des impôts parisien le 18 mai 2006 pour faire le point sur la modernisation de la gestion de l'impôt, en application de l'article 57 de la LOLF.

Détaillant les résultats de l'audit, qui avait pour objet de faire le bilan de la campagne 2005 et d'examiner l'organisation et les procédures mises en place pour préparer la campagne 2006, M. Jean Arthuis, président , a précisé que, selon l'équipe d'audit, la campagne 2006 se préparait dans de bonnes conditions, le programme informatique COPERNIC ayant été adapté à l'objectif de prise en charge de 10 millions de télédéclarations. Il a, néanmoins, indiqué que l'audit faisait le constat d'un dimensionnement du système informatique encore problématique, car celui-ci ne pouvait conduire à absorber complètement les pics d'activité et que des solutions devaient donc être trouvées pour réguler les flux d'accès au service.

M. Jean-Marc Fenet, directeur général adjoint des impôts , a ensuite présenté la campagne de l'impôt sur le revenu pour 2006, qui serait marquée par l'extension de la préimpression des déclarations d'impôts, expérimentée en 2005 en Ille-et-Vilaine, et un nouvel essor de la télédéclaration. Il a indiqué que sur 34 millions de foyers fiscaux, 29 millions, soit 85 %, devraient recevoir une déclaration préremplie, expliquant que les 5 millions restants étaient, soit des artisans, commerçants et professions libérales, soit des contribuables pour lesquels l'identification avec un revenu a été considérée comme insuffisamment fiable pour être transposée en l'état sur la feuille d'impôt. Il a souligné que des erreurs seraient inévitables, même si celles-ci se révéleraient, en pourcentage, extrêmement réduites. En 2005, dans le département d'Ille-et-Vilaine, où la déclaration préremplie avait été expérimentée, seulement 13 % des revenus préimprimés avaient été corrigés à la hausse ou à la baisse. Dans 10 % des cas, les redevables recevant leur déclaration n'avaient plus eu qu'à la signer, n'ayant pas de revenus complémentaires, d'abattements, ou de réduction d'impôts à déclarer.

M. Michel Charasse a indiqué, s'agissant de la déclaration de revenu des élus locaux, que les indemnités avaient été systématiquement reportées sur la déclaration préremplie, alors que de nombreux élus faisaient le choix de la retenue à la source et s'étaient donc déjà acquittés de leurs obligations fiscales.

M. Pierre Lepetit a détaillé les mesures prises afin de tirer les enseignements des incidents informatiques de la campagne 2005, liés au succès inattendu, du moins dans ces proportions, de la télédéclaration, succès notamment dû à la réduction d'impôt de 20 euros votée par le Parlement à l'automne 2004 à l'initiative de la commission des finances du Sénat. Il a ainsi indiqué que le plafond horaire de connexions au site internet « impot.gouv.fr » avait été relevé de 6.000 à 25.000 entre 2005 et 2006, regrettant cependant qu'une mesure utile, comme l'extension de la période de déclaration des revenus, au-delà des soixante jours habituels, ou la fixation de plusieurs dates de déclaration, par zone géographique, n'ait pas été retenue. Il a en effet rappelé que, même lorsqu'ils déclaraient par internet, les contribuables tenaient compte de la date butoir de la déclaration « papier », sans recourir au délai supplémentaire offert aux télédéclarants.

Il a considéré, en conséquence, que des « embouteillages » sur le site internet « impot.gouv.fr » étaient prévisibles à la fin du mois de mai, soit à l'approche de la date limite d'envoi des déclarations « papier » fixée au 31 mai 2006, car le système informatique n'avait pas été conçu pour absorber tous les pics de connexion, en raison des coûts que cela aurait occasionné pour les finances publiques.

En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président , M. Jean-Marc Fenet a précisé que 10 millions d'euros supplémentaires avaient été dégagés en 2005 en matière d'investissement informatique et 20 millions d'euros s'agissant de l'assistance à maîtrise d'ouvrage. Il a rappelé, en outre, que la prévision de dépense fiscale liée à la réduction d'impôt de 20 euros pour télédéclaration s'établissait en loi de finances initiale pour 2006 à 105 millions d'euros.

En complément, M. Pierre Lepetit a considéré que le coût pour les finances publiques de la réduction d'impôt lui apparaissait supérieur aux gains directs liés à la télédéclaration.

M. Patrick Dailhé, directeur du programme informatique Copernic , a expliqué les mesures prises pour que le système informatique absorbe une fréquentation accrue des télédéclarants en 2006. Il a ainsi précisé que des indicateurs de fréquentation figuraient sur le site internet, informant l'usager des périodes les plus chargées et des heures les plus favorables pour effectuer sa déclaration. Il a souligné qu'un effort de prévision du trafic, avec l'appui d'instituts de sondage, avait été effectué, et que la direction générale des impôts comptait, dès lors, sur un nombre de télédéclarations compris entre 5,5 millions et 8 millions, la marge d'incertitude, importante, étant liée à l'impact incertain de la déclaration préremplie sur le comportement de certains contribuables. Il a précisé que de nombreux efforts de communication avaient été réalisés auprès des redevables, afin de les inciter à retirer leur certificat électronique le plus tôt possible (1,5 million de certificats ayant déjà été retirés), à ne pas attendre la fin du mois de mai pour effectuer leur télédéclaration et à éviter ainsi les pics de trafic. Il a indiqué qu'un sondage montrait que 90 % des contribuables télédéclarants voulaient faire leur déclaration avant la fin du mois de mai.

En réponse à M. Jean Arthuis, président , M. Patrick Dailhé a précisé que l'obtention préalable d'un certificat électronique avant de déclarer ses revenus par internet correspondait à une nécessité de sécurité s'agissant de données personnelles sensibles. Il a expliqué que le certificat, qui correspondait à une pièce d'identité électronique, gratuit pour les particuliers, pouvait être obtenu sur la base de trois données, numéro de télédéclarant, numéro fiscal et revenu fiscal de référence, issues de deux documents : avis et déclaration. Il s'est félicité, qu'à ce jour, aucune faille de sécurité n'ait été constatée, malgré les multiples tentatives d'intrusion auxquelles le site internet « impot.gouv.fr » avait dû faire face.

En réponse à M. Jean Arthuis, président , l'invitant à comparer le suivi des programmes informatiques au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à celui ayant cours au ministère de la défense, M. Xavier de Thieulloy, contrôleur général des armées , a mis en exergue l'expérience acquise par son ministère en raison de la complexité des programmes d'armement. Il a jugé que les procédures au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie étaient moins formalisées que celles, programmées de manière « quasi industrielle », du ministère de la défense.

M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » , a regretté que l'interface du site « impot.gouv.fr » soit encore trop peu conviviale et que les internautes non avertis puissent parfois éprouver des difficultés à retirer leur certificat électronique ou à effectuer leur déclaration en ligne. Il a relevé l'absence d'identifiant fiscal réellement unique, notant qu'un même contribuable disposait d'un identifiant différent selon qu'il s'agissait d'impôts locaux ou nationaux.

M. Patrick Dailhé a reconnu certaines difficultés de fonctionnement du site « impot.gouv.fr » liées à un changement de certificat en 2005, mais noté que les procédures avaient été améliorées en avril 2006, chaque télédéclarant recevant un accusé de réception lorsqu'il retirait son certificat.

En réponse à une remarque de M. Bernard Angels appelant à davantage de précision dans le calcul des gains de productivité issus de la télédéclaration, M. Jean-Marc Fenet a indiqué qu'il convenait de distinguer les gains directs des gains de productivité « diffus ». Il a montré que chaque télédéclaration conduisait à environ 6 minutes de temps de travail économisé, soit un gain global d'un emploi équivalent temps plein pour 16.000 télédéclarations, ou 62 à 63 emplois équivalent temps plein économisés par million de télédéclarations. Il a souligné que les gains de productivité diffus étaient plus difficiles à rattacher, par définition, à la télédéclaration, mais que la direction générale des impôts était engagée, dans son nouveau contrat de performance pour la période 2006/2008, dans une réduction de ses dépenses en valeur et le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, soit une baisse des effectifs de près de 5 %. Pour expliquer le niveau des gains de productivité annuels de la direction générale des impôts, s'établissant entre 2,5 et 3 %, il a indiqué qu'il faudrait faire la part entre l'augmentation tendancielle de la productivité, provoquée notamment par un effort de formation professionnelle considérable - entre 7 % et 8 % de la masse salariale y étant consacrés - et le retour sur investissement lié aux nouvelles applications informatiques. Il a jugé qu'il était difficile de faire une telle répartition, application informatique par application informatique. S'agissant des investissements informatiques, il a enfin rappelé qu'il faudrait prévoir, à l'avenir, des crédits consacrés à la maintenance et au renouvellement des matériels.

En complément, M. Pierre Lepetit a précisé que son audit avait établi que les gains de productivité directs issus de la télédéclaration pouvaient été évalués à 35 millions d'euros, tout en notant que ce chiffre ne reflétait que partiellement la réalité. Il a néanmoins considéré que l'évaluation des gains de productivité réalisée par la direction générale des impôts figurait à la pointe de ce qui se faisait dans l'administration française.

En réponse à une question de M. Jean-Claude Frécon liée à la déclaration préremplie, M. Jean-Marc Fenet a indiqué que chaque contribuable recevrait avec sa déclaration une notice explicative lui précisant qu'il lui était évidemment possible de rectifier les montants que l'administration fiscale inscrirait, si ceux-ci s'avéraient erronés. Il a souligné que le public visé par la déclaration préimprimée était notamment celui des personnes ayant des difficultés face à la trop grande complexité de la déclaration d'impôt comme, par exemple, certaines personnes âgées. Il a rappelé que tout changement dans le mode de gestion de l'impôt suscitait des difficultés d'adaptation des redevables, rappelant les difficultés de compréhension de certains redevables, à l'automne 2005, liées au couplage de la redevance audiovisuelle et de la taxe d'habitation.

Il a en outre répondu à M. Jean-Claude Frécon que, désormais, la dynamique de la télédéclaration lui paraissait lancée, même dans le cas où la réduction d'impôt de 20 euros adoptée à l'initiative de la commission, ainsi que M. Jean Arthuis, président , l'a rappelé, ne serait pas appelée à perdurer.

Enfin, M. Patrick Dailhé a rappelé que la télédéclaration dispensait le contribuable de produire des justificatifs.

M. Maurice Blin a souhaité obtenir des précisions sur les expériences étrangères et les leçons qu'en tiraient les administrations fiscales françaises.

En réponse, M. Jean-Marc Fenet a indiqué que la direction générale des impôts entretenait des relations étroites avec les administrations fiscales du Canada, de l'Espagne et du Royaume-Uni, qui avaient des préoccupations voisines des siennes. Il a précisé que la direction générale des impôts et l'administration canadienne pratiquaient des échanges de cadres, la France accueillant ainsi des cadres canadiens, pour une période de deux à trois ans, sur des postes opérationnels, faisant ainsi remarquer qu'un numéro deux des services fiscaux d'Aix en Provence avait été, il y a quelques années, de nationalité canadienne. S'agissant de la Grande-Bretagne, il a souligné, qu'une fois par an, se tenaient des comités de gestion conjoints et qu'il suivait avec intérêt la fusion des administrations fiscales en cours au Royaume-Uni.

Il a indiqué que l'administration fiscale canadienne avait une implantation territoriale limitée, privilégiant les relations dématérialisées avec les contribuables, et avait une approche « client » très développée, qui avait notamment inspiré le programme français « Pour vous simplifier l'impôt ». S'agissant de l'administration fiscale britannique, il a indiqué que celle-ci réfléchissait à dispenser de déclaration certains contribuables.

Enfin, à M. Jean Arthuis, président , qui l'interrogeait sur l'impact de la complexité de la législation fiscale en termes de gestion, il a répondu que la direction générale des impôts suivait le coût d'intervention de chaque impôt, et que certains impôts, comme la taxe sur les logements vacants, se caractérisaient par un taux d'intervention très important, bien au-delà de la TVA (0,82 %) ou des grands impôts locaux (de 0,85 % pour la taxe professionnelle à 3,86 % pour la taxe d'habitation).

LE FONCTIONNEMENT ADMINISTRATIF ET BUDGÉTAIRE DE LA DIRECTION DE LA POLICE DE L'AIR ET DES FRONTIÈRES (DPAF) DE ROISSY/LE BOURGET : 7 JUIN 2006

Réunie le mercredi 7 juin 2006 , sous la présidence de M. Denis Badré, vice-président , la commission a procédé à l' audition de MM. Jean-Yves Topin , directeur de la police de l'air et des frontières (DPAF) de Roissy , André-Michel Ventre , adjoint au directeur central de la police aux frontières, de Mme Anne Berriat , inspecteur général des services judiciaires , de MM. Jean-Guy de Chalvron, inspecteur général de l'administration , et Christophe Mazoyer , inspecteur général de la police nationale , sur le fonctionnement administratif et budgétaire de la DPAF de Roissy/Le Bourget.

M. Denis Badré, président , a indiqué que cette audition se déroulait dans le cadre des travaux menés par la commission des finances sur la réforme et la modernisation de l'Etat et s'inscrivait dans le suivi des audits de modernisation lancés, depuis octobre 2005, par M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat.

M. Jean Guy de Chalvron a observé que le rapport d'audit sur le fonctionnement administratif et budgétaire de la direction de la police de l'air et des frontières (DPAF) de Roissy était le produit d'une coopération entre quatre corps d'inspection : l'inspection générale des finances (IGF), l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ), l'inspection générale de la police nationale (IGPN) et l'inspection générale de l'administration (IGA). Il a précisé que cet audit avait été lancé en octobre 2005, lors de la première vague d'études, et avait été réalisé en un délai très restreint (moins de deux mois).

Avant d'évoquer les résultats de cet audit, il a souhaité replacer l'activité et les missions de la DPAF dans leur contexte : 55 millions de passagers transitent chaque année par l'aéroport de Roissy, 78.000 salariés y travaillent dans 750 entreprises, et 11 millions de personnes sont contrôlées chaque année. Il a souligné que ce niveau d'activité plaçait Roissy, en termes de sécurité publique, sur un pied d'égalité avec des villes telles que Nantes ou Dijon.

Revenant sur les conclusions de l'audit, il a estimé que les résultats enregistrés étaient globalement bons. Il a indiqué que la criminalité organisée restait assez importante, mais que la délinquance pouvait être considérée comme relativement faible. En matière de contrôle aux frontières, il a cité un taux de satisfaction du public, mesuré par Aéroports de Paris (ADP), de l'ordre de 90 %. Au regard des 12.000 non-admissions prononcées, il a jugé que le contrôle d'immigration était, pour sa part, relativement rigoureux. Il a ajouté que la durée de séjour des non-admis était de moins de deux jours.

En dépit de ces bons résultats d'ensemble, il a dressé le constat d'un niveau de performance, entendu comme le rapport entre le résultat et les moyens mis en oeuvre pour l'obtenir, moins satisfaisant.

Il a évoqué, tout d'abord, la nécessité de rationaliser l'organisation de la DPAF, dont l'une des trois directions souffre d'un périmètre de compétences mal défini. Il a constaté, par ailleurs, que le rythme d'accroissement des effectifs de la DPAF était trois fois plus élevé que celui du nombre de passagers. Il a regretté, enfin, l'inadéquation des effectifs affectés au contrôle de frontière avec les flux de passagers, les premiers étant stables sur les 24 heures, tandis que les seconds sont plus particulièrement concentrés entre 7 heures et 10 heures du matin, puis en début de soirée.

M. Jean-Guy de Chalvron a, ensuite, exposé la difficulté posée par la gestion budgétaire de la DPAF, dès lors que cette direction n'est responsable que d'une part marginale de son budget (5 millions d'euros sur une enveloppe budgétaire totale de 100 millions d'euros). Il a indiqué que le budget de la DPAF était alimenté via 7 « centres de ressource » différents, dont la préfecture de police de Paris et la direction départementale de l'action sociale (DDAS), et que cet éloignement des centres de décision budgétaire pouvait conduire à des choix inadaptés à la réalité du terrain. Il a ainsi pris pour exemple les frais de restauration, s'élevant à 82 euros pour trois repas par jour, alors qu'une telle prestation dans la fonction publique revient en moyenne à 45 euros. Il a également regretté qu'ADP soumette la DPAF à des loyers comparables à ceux pratiqués pour les locaux commerciaux au sein des aérogares. Il s'est étonné, par ailleurs, que la DPAF loue 1.630 places de parking pour un montant total de 1,5 million d'euros, alors qu'elle n'emploie que 1.750 personnes, et que son site n'accueille jamais plus de 700 personnes en même temps. Il a déploré, enfin, que le transport, géré par une société privée, des personnes non admises et devant être présentées au tribunal de Bobigny, représente un coût quasiment comparable à celui d'une course en taxi sur le même trajet.

Au total, il a estimé que certaines dépenses de la DPAF étaient surcalibrées par rapport aux besoins. Il a considéré qu'à très court terme près de deux millions d'euros d'économies étaient envisageables, à condition de stabiliser les effectifs à leur niveau actuel (1.750 emplois équivalent temps plein travaillé, ETPT) et de justifier rigoureusement les nouvelles demandes en moyens. A cet égard, il a noté qu'un courrier d'ADP, parvenu 48 heures plus tôt, faisait état d'une ristourne de 70.000 euros pour une facture abusive des terminaux mis à disposition de la DPAF dans le cadre de son activité de contrôle et de surveillance.

M. André-Michel Ventre a tenu à souligner la volonté de la direction générale de la PAF de prendre en compte cet audit et de créer une structure de suivi des applications concrètes de cette étude. Il a néanmoins estimé que certains marchés, comme celui passé avec les avocats, comportaient des enjeux trop importants pour pouvoir être seulement soumis à une logique comptable.

M. Jean-Yves Topin a rappelé que le cas de Roissy était difficile à appréhender, dès lors qu'il s'agissait d'un site atypique. Il a insisté sur le caractère souvent inopérant des « recettes habituelles », qui se heurtent aux fortes spécificités de Roissy.

En réponse aux observations contenues dans le rapport d'audit, il a annoncé qu'un nouvel organigramme avait été publié, le 27 mars dernier, et qu'une unité d'investigation et de recherche avait été créée, à Roissy, pour tenter de répondre au problème posé par la criminalité organisée.

Prenant en considération les remarques formulées dans l'audit en matière d'effectifs, il a souligné la difficulté pour la DPAF, à Roissy, de concilier plusieurs missions : organiser le contrôle aux frontières, mener la lutte contre le terrorisme et garantir la fluidité des échanges. Il a jugé, en outre, que les conditions d'emploi réglementaires liant la police nationale rendaient difficile une parfaite adaptation du niveau des effectifs de la DPAF aux horaires de pointe, tels qu'on les connaît sur l'aéroport de Roissy. Il a annoncé, toutefois, que 20 postes d'emploi avaient, d'ores et déjà, basculé de l'après-midi au matin, pour mieux répondre aux besoins.

Sur les aspects budgétaires, il a déclaré que la logique du contrôle de gestion était désormais en oeuvre à Roissy et qu'elle permettait de mieux appréhender toutes les dépenses. A cet égard, il a souhaité une réduction du nombre d'indicateurs envisagés (actuellement près de 180) pour suivre la dépense et la performance. Il a estimé que, si des économies n'étaient pas envisageables sur le budget de fonctionnement, elles étaient en revanche possibles dans le cadre de la passation et de la renégociation de marchés, tels que le marché d'interprétariat, dont le coût pourrait aisément être réduit de moitié (soit près de 360.000 euros d'économies), dès lors que l'on accepterait de prendre le risque juridique de « perdre » quelques affaires supplémentaires devant les tribunaux.

M. Jean-Yves Topin a précisé que de telles renégociations étaient en cours et que la DPAF n'était plus très loin, aujourd'hui, de réaliser l'objectif de 2 millions d'euros d'économie évoqué par la mission d'audit. Il a tenu à souligner que l'audit mené avait eu le mérite de permettre de réfléchir aux structures et aux dépenses de la DPAF, tout en ne perdant pas de vue l'évaluation des risques et des coûts.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Maurice Blin a estimé que les questions liées à la DPAF à Roissy étaient particulièrement sensibles et difficiles à traiter. Il a souhaité savoir si cette direction avait été invitée par son ministère à réaliser des efforts de rigueur, d'économie et de simplification. Il s'est interrogé sur l'augmentation des effectifs de la DPAF et sur l'évolution de la délinquance à Roissy. Il a cherché à savoir, enfin, si des échanges existaient, entre Roissy et des aéroports de même taille (Londres, etc...), afin de permettre des comparaisons en matière de moyens et d'organisation de la sécurité publique.

M. Jean-Guy de Chalvron a indiqué que l'augmentation des effectifs, au cours des dernières années, s'expliquait par un retard important, rendant nécessaire un rattrapage. Il a souligné l'impact de l'ouverture d'un nouveau terminal presque chaque année à Roissy, un satellite supplémentaire devant d'ailleurs être ouvert en 2007. Il a jugé, en définitive, que le niveau des effectifs aujourd'hui atteint correspondait désormais assez bien aux besoins.

M. Jean-Yves Topin a insisté, lui aussi, sur l'augmentation de l'activité de Roissy, justifiant aujourd'hui un niveau d'emplois de 1.750 ETPT. Il a ajouté que la DPAF était désormais également jugée sur un critère de qualité, le temps de contrôle, et qu'elle était de plus en plus considérée, par ADP et Air France, comme un simple prestataire de services.

A cet égard, il a indiqué que la DPAF allait pouvoir compter sur certaines avancées technologiques pour mener à bien ses missions et améliorer la qualité du service rendu : la lecture optique des passeports, le système de contrôle automatique des passagers européens (système « Fast track », fondé sur un abonnement), le visa biométrique...

M. Maurice Blin s'est interrogé sur les conséquences induites par l'apparition de nouveaux appareils à forte capacité de transport de voyageurs, tels que l'Airbus A380.

M. Jean-Yves Topin a considéré que la gestion de tels appareils était, certes, délicate mais qu'elle renvoyait à un savoir-faire déjà largement acquis au sein de la DPAF.

Mme Anne Berriat a jugé qu'en matière de délinquance, il avait été difficile d'analyser avec précision la situation à Roissy, dès lors que la mission n'avait pu s'appuyer que sur un nombre réduit de données statistiques, l'intérêt des compagnies aériennes, comme celui d'ADP ou, le cas échéant, d'entreprises stockant des marchandises, n'étant pas toujours de déclarer les infractions (vols...) commises. Elle a déclaré que, si la délinquance de voie publique (dégradation de véhicule, vols...) avait connu une forte baisse, le taux d'élucidation avait, malheureusement, lui aussi décru. Elle a déploré, en outre, que la délinquance organisée (vols de stocks, vols de bagages...), plus dangereuse et plus difficile à mesurer, était probablement sous-estimée.

Elle a rappelé qu'au cours de l'audit mené, le parquet de Bobigny avait exprimé sa satisfaction au regard des relations entretenues avec la DPAF de Roissy, mais qu'il avait aussi regretté que cette direction ne soit pas organisée pour traiter de manière satisfaisante la délinquance organisée. Aussi a-t-elle rappelé la proposition de la mission d'audit concernant l'installation d'une antenne de la police judiciaire (PJ) sur le site de Roissy, ainsi que le souhait de cette même mission de voir la DPAF se doter d'une unité de renseignement, dont les effectifs ne seraient pas soumis aux variations de flux d'entrants en France et pourraient, par conséquent, inscrire leur travail dans le temps.

M. Paul Girod s'est interrogé sur la qualité de la relation entretenue par la DPAF avec ADP, notamment dans un contexte de renégociation de marchés et de mise en place de certaines innovations techniques.

M. Jean-Yves Topin a observé que la culture d'ADP s'apparentait à celle d'un centre de profit et que cet établissement tendait à considérer l'Etat « comme un client comme les autres ». Il a déploré la nature de cette relation, qui tendait parfois à freiner ou à bloquer les projets et qui exigeait du représentant de l'Etat sur la plateforme une analyse attentive des dossiers traités en lien avec ADP.

A cet égard, M. Denis Badré, président, a relevé que l'audit mené pouvait précisément être un outil efficace pour la DPAF dans ses échanges avec ADP.

M. Jean-Yves Topin s'est effectivement accordé à reconnaître l'utilité de cette étude dans cette perspective.

M. Jean-Guy de Chalvron s'est interrogé sur la présence d'un représentant de la PAF au sein du conseil d'administration d'ADP.

M. Jean-Yves Topin a répondu que cette présence était, d'ores et déjà, effective.

M. André-Michel Ventre a insisté sur l'importance d'une telle présence. Il a souligné, par ailleurs, que la PAF était tenue de mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour atteindre les objectifs fixés par les pouvoirs publics en matière de sécurité publique. Il a cité, notamment, l'exemple du taux d'occupation des zones d'attente des personnes en instance (ZAPI), dont la baisse n'a pu être obtenue que grâce à une augmentation du nombre de non-admissions prononcées. Il a rappelé, à cet égard, qu'un tel résultat n'avait pu être obtenu que par la combinaison d'un « contrôle en porte d'avion » et de contrôles plus classiques, de telles actions requérant de toute façon l'otroi d'effectifs supplémentaires.

Il a ainsi confirmé que le niveau atteint à Roissy (1.750 ETPT) correspondait à un simple rattrapage et répondait bien aux besoins, même si le taux de croissance des effectifs avait été plus rapide, au cours des dernières années, que celui des passagers.

M. Denis Badré, président, s'est félicité de la méthode employée pour conduire cet audit, produit de la collaboration de quatre corps d'inspection différents. Il a souligné, en outre, la qualité manifeste du dialogue entretenu par les auditeurs avec les audités, débouchant sur des perspectives de progrès évidentes et une meilleure appréciation de la dépense. Il a estimé que cet audit illustrait bien le passage, induit par la LOLF, d'une culture de moyens à une culture de la performance.

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