b) L'exigence d'une politique publique courageuse et sélective

Face à ces évolutions, une adaptation des politiques publiques paraît nécessaire.

En premier lieu, compte tenu des opportunités de débouchés supplémentaires que les marchés émergents constituent pour nos domaines d'excellence, il serait sans doute utile de concentrer les actions publiques sur ces derniers. Tel est l'objet des pôles de compétitivité, de l'Agence de l'innovation industrielle ou du soutien aux systèmes productifs locaux, qui doivent tous être poursuivis et accentués dans le cadre d'une politique industrielle si possible européenne.

Mais en contrepartie, cette logique de concentration des efforts exige d'admettre que certains secteurs ou certaines productions ne seront, à un terme plus ou moins éloigné, plus viables et qu'il convient dès lors d'engager le plus tôt possible des politiques de reconversion plutôt que de continuer à investir en pure perte en entretenant l'illusion que ces activités ont un avenir. C'est une telle politique que mène sans états d'âme la Grande-Bretagne , comme a pu le constater le président de la mission commune d'information, lors de son déplacement à Londres le 16 avril dernier.

Fondamentalement, les Britanniques considèrent que la nationalité des entreprises est un concept inopérant en matière de politique industrielle , en donnant volontiers l'exemple de l'industrie automobile : en se restructurant, celle-ci a perdu les entreprises nationales, mais a retrouvé un niveau de production locale comparable aux années 1970 et nettement supérieur aux années 1980 .

En second lieu, cette nécessaire anticipation des mutations exige désormais une analyse plus fine des secteurs , du fait de la tendance au fractionnement de la chaîne de la valeur qui dissocie le sort de différentes activités au sein d'un même type de productions. S'il était relativement évident dans les années 1970 que le textile ou la sidérurgie avaient vocation à perdre la majeure partie de leurs effectifs, il est en revanche plus difficile de déterminer précisément quelles sont, dans le secteur de l'équipement automobile , les productions et les activités qui ont peu d'avenir en France, et ceux qui devraient au contraire perdurer.

Comme le propose notre collègue M. Gérard Cornu 312 ( * ) dans un récent rapport d'information, ce dernier secteur appelle en particulier un effort d'anticipation et un diagnostic le plus fin possible des perspectives de l'ensemble des phases de production. Il faudra que les conséquences en soient tirées au plus vite, sans attendre que l'inévitable montée de la concurrence chinoise n'ait produit ses dégâts. C'est à cette condition que les 100 millions d'euros consacrés par l'Etat à l'accompagnement des milliers de salariés menacés de pertes d'emploi dans ce secteur d'ici à 2012 313 ( * ) seront employés à bon escient, c'est-à-dire au service d'une « politique de vérité », qui n'encourage pas les forces vives du pays à s'investir dans des activités sans avenir.

* 312 Op. cit.

* 313 Dans le cadre du plan en faveur de l'automobile arrêté le 29 novembre 2006.

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