V. LES RESULTATS DU RECOUVREMENT DES CRÉANCES DE CONTRÔLE FISCAL

A - LE RECOUVREMENT COMPARÉ DU CONTRÔLE FISCAL EXTERNE ET DU CONTRÔLE SUR PIÈCES

La direction générale des impôts précise que le choix de mener un contrôle sur pièces ou un contrôle fiscal externe dépend en général de la typologie des anomalies décelées, qui permettent ou non une correction depuis le bureau.

Les redressements de TVA auxquels procède la direction générale des impôts à l'issue du contrôles fiscaux externes sont moins bien recouvrés que les redressements issus de contrôles sur pièces (respectivement 37 % et 50 %), alors que le volume des émissions est 9 fois supérieur (respectivement 2 792 millions et 315 millions fin 2005).

En outre, les admissions en non valeur de TVA sont nettement plus importantes dans le cadre du contrôle fiscal externe que du contrôle sur pièces : les fourchettes respectives sont de 15 à 18 % et de 25 à 28 %. Le taux de sursis ou de suspension de créances en raison des procédures collectives est à peu près identique dans les deux types de contrôle.

Ces analyses ne différent que peu significativement pour les « autres taxes » : droits d'enregistrement, ISF, recouvrés par la direction générale des impôts. Les émissions de titres provenant du contrôle fiscal externe y sont comparables en volume à celles du contrôle sur pièces (respectivement 798 millions et 707 millions fin 2005).

A la direction générale des douanes et des droits indirects, la performance du recouvrement varie dans des proportions inverses, les contrôles externes étant mieux recouvrés que les contrôles sur pièces. Le paradoxe n'est qu'apparent dans la mesure où les contrôles externes sont l'occasion de recueillir des informations utiles pour les services chargés du recouvrement.

Il en résulte que les restes à recouvrer proviennent essentiellement des redressements « immédiats », opérés après la libération des marchandises. En ce qui concerne les droits constatés lors de la vérification des marchandises, c'est-à-dire avant la levée de la sujétion douanière qui pèse sur les marchandises conduites en douane, le recouvrement est garanti par un gage ou une caution. Dès lors, parmi les redressements « immédiats», seules les sommes contestées par les redevables sont prises en charge.

Enfin, pour la direction générale de la comptabilité publique, les comparaisons entre contrôle fiscal externe et contrôle sur pièces portant sur l'impôt sur le revenu ne sont pas possibles en raison de l'indisponibilité des données dans le système informatique.

B - DONNÉES GLOBALES CONCERNANT LE TAUX DE RECOUVREMENT DU CONTRÔLE FISCAL

Le taux de recouvrement du contrôle fiscal par catégorie d'impôts est présenté dans le tableau suivant, sur le fondement des chiffres fournis par les trois directions générales.

Les données 17 ( * ) font apparaître une gradation dans la difficulté du recouvrement, indépendamment de l'évolution des prises en charges.

Recouvrement du contrôle fiscal sur l'impôt après prise en charge (IS/TS avant transfert)

année d'émission / pourcentage de recouvrement effectif au 31/12 de l'année suivante

2002

2003

2004

Contrôle fiscal externe sur l'impôt sur le revenu

25%

26%

19%

Contrôle fiscal externe sur l'impôt sur les sociétés (avant transfert)

34%

32%

27%

Contrôle fiscal externe sur la TVA

37%

38%

37 %

Contrôle sur pièces sur la TVA

47 %

46%

50 %

Contrôle sur pièces sur les taxes des douanes

64%

64%

64%

Contrôle fiscal externe sur les taxes des douanes

87%

87%

87%

S'agissant de l'impôt sur les sociétés, les données répertoriées ci-dessus tiennent compte de la création de la direction des grandes entreprises (DGE) au sein de la direction générale des impôts.

Apparaît notamment un recul du taux de recouvrement pour l'impôt sur le revenu, l'impôt le plus difficile à recouvrer, et pour l'impôt sur les sociétés. Le recouvrement des autres taxes est stable, à l'exception de la TVA dont le recouvrement s'améliore notablement.

Il convient, toutefois, de prendre garde aux imperfections des recueils statistiques car toutes les données ne sont pas auditées avec la même précision et les systèmes d'information ne rendent pas les mêmes indications (voir ci-dessus au I.A).

C - LES RÉSULTATS DE RECOUVREMENT OBTENUS PAR LA DIRECTION GÉNÉRALE DES DOUANES ET DES DROITS INDIRECTS

Dans la mesure où l'indicateur commun de recouvrement n'est pas utilisé par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), la Cour n'a pas pu appuyer son enquête sur des informations comptables. Les résultats mesurables de cette direction doivent donc être interprétés avec prudence.

Les données élémentaires renseignant les indicateurs de la DGDDI sont enregistrées par les services chargés des contrôles primaires et des contrôles externes dans l'application informatique dédiée au suivi du contentieux, SILCF (Système d'Information de Lutte Contre la Fraude). Les données sont ensuite agrégées dans des tableaux EXCEL, pour former les statistiques nationales de recouvrement de la direction générale.

Comme l'indique la DGDDI elle-même : « ces données font l'objet d'un contrôle de fiabilité par la hiérarchie au moment de leur première intégration. Cela étant, le système informatique SILCF ne permet pas encore, au stade actuel de son développement, le traitement complet des dossiers contentieux, depuis la constatation de l'infraction jusqu'à à la clôture définitive de l'affaire, lorsque les droits ou les pénalités ont été acquittés. Ainsi, l'absence actuelle de confirmation systématique de données initiales, notamment au moment de la prise en charge comptable des dossiers, de même que les `avatars' de gestion qui peuvent affecter la vie de certains dossiers, avec de fréquents impacts sur le montant des droits redressés et/ou effectivement recouvrés, perturbent de manière significative l'auditabilité de ces indicateurs ».

Les tableaux de données transmis à la Cour corroborent cette analyse. Ils montrent des taux de recouvrement fréquemment supérieurs à 100 % des droits redressés, anomalies que l'échelon central de la DGDDI n'est pas, à ce stade, en mesure de corriger.

Certes, au sein du dispositif de pilotage de la performance des services de la DGDDI, les indicateurs qui ont trait au suivi des droits/pénalités redressés et des droits/pénalités redressés effectivement recouvrés visent à mesurer de manière opérationnelle l'efficacité des activités de contrôle, en particulier la pertinence des méthodes d'analyse de risque et de ciblage de la fraude ainsi que la qualité du processus du recouvrement. Par ailleurs, l'analyse-risque des contrôles et l'efficacité globale de l'action en recouvrement des droits redressés et des pénalités infligées à la suite de contrôles douaniers constituent les objectifs majeurs du secteur douanier.

Il reste cependant indispensable de parvenir rapidement à une méthodologie permettant l'audit de ces indicateurs, en s'appuyant sur les évolutions techniques à apporter à l'outil SILCF. La DGDDI a indiqué que des évolutions prochaines permettraient de disposer d'un outil d'information comptable comparable à la base de données TRCF. Il lui faudra emprunter la même démarche que la direction générale des impôts et la direction générale de la comptabilité publique afin d'asseoir un indicateur de recouvrement commun aux trois réseaux.

D - LES POURSUITES

Les statistiques tenues par la DGCP et la DGI ne distinguent pas les actes de recouvrement contentieux selon qu'ils concernent des titres issus ou non du contrôle fiscal.

Toutefois, il est avéré que les actions contentieuses les plus offensives - à savoir les saisies conservatoires, mais surtout les actions civiles (action oblique, paulienne, etc...) et les mises en cause de dirigeants - concernent en grande majorité les cotes de contrôle fiscal.

Les poursuites pénales en matière fiscale constituent l'ultime étape de l'action de contrôle de l'administration. Au titre de l'année 2005, la DGI a saisi la Commission des infractions fiscales (CIF) de 1 021 propositions de poursuites correctionnelles et cette instance a autorisé le dépôt de 970 plaintes pour fraude fiscale, le nombre d'affaires variant peu d'une année sur l'autre. Par ailleurs, d'autres comportements très frauduleux ont été dénoncés aux autorités judiciaires sur le fondement du délit d'escroquerie. Au cours de l'année 2005, 14 plaintes pour escroquerie à la TVA ou à un autre impôt ont ainsi été déposées par la DGI.

Au-delà des poursuites pénales spécifiques aux procédures d'établissement de l'impôt, les poursuites en vue du recouvrement répondent à une finalité plus budgétaire que répressive et forment le moteur du recouvrement de ce type de créances contentieuses.

Le niveau des encaissements obtenus est en effet en grande partie déterminé par le nombre, la réactivité, la pugnacité et l'intensité des poursuites. C'est la raison pour laquelle les directions générales collectent 18 ( * ) annuellement des éléments statistiques sur les mesures de poursuites effectuées par les comptables des impôts.

Au plan des procédures civiles, les poursuites ne diffèrent pas dans l'un ou l'autre réseau et sont, sous certaines conditions (absence de nécessité de délivrance d'un titre exécutoire), assimilables à celles du secteur privé.

Les statistiques produites par les directions générales indiquent une évolution sensible des procédures courantes en matière de poursuites : saisies conservatoires, hypothèques autorisées par le juge de l'exécution, avis à tiers détenteur (ATD). Elles mettent en évidence une évolution sensible du nombre de poursuites (avis à tiers détenteurs) et des mesures conservatoires (saisies conservatoires et hypothèques provisoires prises après autorisation du juge de l'exécution).

L'évolution de ces actions montre que les comptables, tirant des enseignements des résultats statistiques de leurs actes, privilégient les poursuites les plus efficaces comme l'avis à tiers détenteur (plus de 20 % des actes sont au moins suivis d'un paiement à la DGI), plutôt que des poursuites et procédures plus classiques, mais plus coûteuses, comme la classique saisie sous ses diverses formes.

* 17 Les pourcentages sont présentés sans décimale pour faciliter l'analyse.

* 18 Au cours du précédent contrat, le réseau comptable de la DGI a été remodelé en profondeur du fait des rapprochements des structures, du transfert du recouvrement de l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur les salaires et de l'expérimentation des pôles de recouvrement.

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