PARTIE II : LE RECOUVREMENT CONTENTIEUX DES AMENDES ET CONDAMNATIONS JUDICIAIRES

I. LES PRINCIPES D'ORGANISATION DU RECOUVREMENT CONTENTIEUX DES AMENDES ET DES CONDAMNATIONS JUDICIAIRES POSÉS PAR LE DÉCRET DU 22 DÉCEMBRE 1964

Le décret n° 64-1333 du 22 décembre 1964 relatif au recouvrement des amendes et condamnations pécuniaires pose les principes d'organisation du recouvrement dans ses trois premiers articles.

L'article 1 er confie la responsabilité du recouvrement aux comptables du Trésor, à moins qu'un texte particulier ne confie cette responsabilité à d'autres comptables publics 38 ( * ) . La DGDDI et la DGI interviennent dans le recouvrement des amendes relatives respectivement à la fraude douanière et à la fraude fiscale mais cela représente moins de 1 % des recettes d'amendes 39 ( * ) .

Les articles 2 et 3 du décret du 22 décembre 1964 décrivent deux des phases du recouvrement, à partir du caractère exécutoire et du caractère définitif des décisions de justice.

L'article 2 précise que « Sont recouvrées par les comptables directs du Trésor, les condamnations prononcées par des décisions judiciaires devenues définitives ».

L'article 3 indique que « Les condamnations pécuniaires sont exigibles dès que la décision les prononçant est devenue exécutoire ».

Chronologiquement, la phase d'exigibilité démarre dès réception d'un titre exécutoire de décision par les comptables du Trésor puis la mise en oeuvre des procédures de recouvrement peut commencer lorsque la décision est devenue définitive.

II. LA DIVERSITÉ DES CONDITIONS DE PRISE EN CHARGE PAR LES COMPTABLES DU TRÉSOR

A - LA DIVERSITÉ D'ACQUISITION DES CARACTÈRES EXÉCUTOIRE ET DÉFINITIF DES DÉCISIONS

Des dispositifs successifs ont été adoptés afin de raccourcir le délai d'exécution des sanctions pécuniaires et d'améliorer ainsi le taux de recouvrement des amendes et condamnations judiciaires. Le code de procédure pénale 40 ( * ) a établi deux procédures simplifiées à côté de la procédure ordinaire.

1 - La procédure ordinaire de jugement des contraventions et délits

Les décisions rendues en matière pénale en première instance sont exécutoires dès le 11 ème jour suivant soit leur prononcé, lorsque la décision est contradictoire, soit leur signification si la décision a été qualifiée de contradictoire à signifier ou rendue par défaut.

Le délai de 10 jours correspond au délai ouvert au prévenu pour interjeter appel de la décision (art. L. 498 du Code de procédure pénale). Le délai d'appel de 2 mois réservé au procureur général ne fait pas obstacle à l'exécution de la peine (art. L. 505 et L. 548 du Code de procédure pénale).

Le jugement devient définitif après expiration des délais d'opposition, d'appel et de pourvoi en cassation.

2 - La procédure simplifiée de l'amende forfaitaire majorée

Les amendes forfaitaires sont majorées de plein droit et recouvrées au profit du Trésor public à défaut de paiement ou d'une requête présentée dans un délai de 45 jours (art. L. 529-2 du code de procédure pénale).

Le titre exécutoire des amendes forfaitaires majorées est émis par un officier du ministère public qui le transmet au comptable principal du Trésor (art.L.529-2 et R.49-5 du code de procédure pénale).

Le comptable du Trésor adresse au contrevenant un extrait du titre exécutoire le concernant sous forme d'avis l'invitant à s'acquitter du montant de l'amende. Dans les 30 jours de l'envoi de l'avis, le contrevenant peut former, auprès du ministère public, une réclamation motivée qui a pour effet d'annuler le titre exécutoire.

L'officier du ministère public saisi d'une réclamation recevable informe sans délai le comptable direct du Trésor de l'annulation du titre exécutoire de l'amende contestée (art. R.49-8 du code de procédure pénale).

3 - La procédure simplifiée de l'ordonnance pénale

Saisi par le ministère public qui a choisi la procédure simplifiée, le juge du tribunal de police ou de la juridiction de proximité statue, sans débat préalable, par une ordonnance pénale (art. L. 525 du code de procédure pénale).

Le ministère public peut, dans les 10 jours de l'ordonnance, former opposition à son exécution. Si, à l'expiration du délai, le ministère n'a pas fait opposition, l'ordonnance pénale est notifiée par lettre recommandée au condamné, ce qui la rend exécutoire.

Le prévenu dispose de 30 ou de 45 jours, selon que l'infraction constitue une contravention ou un délit, à compter de la date d'envoi de la lettre recommandée, pour s'acquitter du montant de l'amende et du droit fixe de procédure ou former opposition. A l'issue de ce délai, l'ordonnance pénale revêt un caractère définitif

B - L'HÉTÉROGÉNÉITÉ DES CONDITIONS D'ORDONNANCEMENT DANS LE SYSTÈME JUDICIAIRE

L'ordonnancement des amendes forfaitaires majorées constitue un cas simple : les officiers du ministère public (OMP) sont des ordonnateurs à part entière car ils prennent les décisions et délivrent les titres exécutoires afférents. En pratique, ils transmettent aux comptables du Trésor un titre exécutoire collectif dès que le volume d'amendes forfaitaires majorées est important.

En dehors des amendes forfaitaires majorées, la mise à exécution des condamnations judiciaires fait intervenir deux hiérarchies distinctes au sein des tribunaux de grande instance : les services du greffe relevant d'abord du greffier en chef puis du président du tribunal de grande instance et les services d'exécution des peines relevant du procureur de la République.

1 - Le rôle conjugué du parquet et du greffe dans la mise à exécution des peines

La mise à exécution des peines est distincte de l'exécution des peines. La mise à exécution consiste en l'accomplissement de l'ensemble des formalités précédant et autorisant l'exécution matérielle des peines.

Si le code de procédure pénale affirme la responsabilité du parquet dans l'exécution des peines (art.L.32 : « Le ministère public assure l'exécution des décisions de justice »), il attribue un rôle principal aux greffiers dans la notification et la signification des peines ainsi que dans la communication à l'égard des autres parties.

En pratique, une fois signé par le greffier et le président de la juridiction, le jugement constitue l'original classé au rang des « minutes » du greffe. Il donne lieu ensuite à une copie revêtue de la formule exécutoire qui sert en cas de signification. Des « extraits » sont établis par le greffier, parmi lesquels l'extrait-finances adressé au Trésor public en cas de prononcé d'une peine d'amende. Ces extraits doivent être vérifiés et visés par le ministère public.

2 - Des délais de transmission importants et seulement partiellement mesurés

L'article 3 du décret du 22 décembre 1964 fixe le délai d'envoi des extraits-finances à 35 jours à compter soit de la date du prononcé, soit de la date de signification de la décision.

Cependant, il n'existe actuellement aucun outil de suivi national disponible au ministère de la justice pour mesurer le délai entre la date de prononcé et la date d'émission du titre exécutoire. L'information sur ces délais provient de deux sources : les sept tribunaux de la région parisienne et le casier judiciaire.

Les sept tribunaux de la région parisienne sont équipés de l'applicatif Nouvelle chaîne pénale (NPC) qui les fait bénéficier d'un infocentre exploitant à des fins statistiques l'ensemble des données enregistrées.

L'autre source d'information sur les délais est constituée par le Casier judiciaire national (CNJ). Le service du Casier Judiciaire a réalisé un outil de suivi des délais d'inscription par juridiction. Le délai d'inscription au Casier judiciaire constitue un indicateur de performance du ministère de la justice dans le cadre de la LOLF.

De toute évidence le délai de 35 jours n'est pas respecté par les greffes et les parquets dont les services sont encombrés.

Ainsi, le Rapport sur la mise en place des bureaux d'exécution des peines (B.E.X.) , remis en avril 2006 et établi conjointement par l'inspection générale des services judiciaires et par l'inspection générale de l'administration dans le cadre des audits de modernisation, indique que « 37 % des décisions prononçant une peine d'amende ne sont pas actuellement transmises au Trésor public pour exécution 18 mois après leur prononcé, sans motif juridique particulier » .

Le Rapport sur l'effectivité de l'exécution des sanctions pénales établi par l'inspection générale des services judiciaires en juillet 2002 estimait, à partir d'un échantillon, à 66 jours le délai s'écoulant entre le prononcé et la mise à exécution par les parquets des jugements rendus par les tribunaux de police.

* 38 Article 1 er du décret du 22 décembre 1964 : « Les amendes et condamnations pécuniaires sont recouvrées par les comptables directs du Trésor sauf lorsqu'un texte particulier en a confié l'encaissement à d'autres comptables ».

* 39 Soit 6 millions des 645 millions de recettes d'amendes inscrites au budget de 2004.

* 40 Livre II du code de procédure pénale portant sur les « juridictions de jugements »

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