CONCLUSION

Il faut réformer l'AJ .

Si toute réforme nécessite certes du courage et peut se révéler difficile, celle de l'AJ présente au moins l'avantage de s'appuyer sur un diagnostic largement partagé par les acteurs partie prenante au dispositif. Le système en place depuis 1991 a désormais « touché ses limites » et doit être remis à plat.

Les deux piliers de la réforme de l'AJ doivent, incontestablement, être les principes de transparence et de responsabilité . La perte de vue de ces points cardinaux explique en effet, pour une part, le grippage actuel de la mécanique.

Dans la perspective de la réforme, un élément doit être relevé comme un facteur clef de réussite de l'action à mener : tous les acteurs ont leur part à prendre dans la modernisation de l'AJ . Il ne s'agit ni de remettre en cause la philosophie même de l'aide et de laisser le justiciable le plus fragile s'éloigner inexorablement de la justice, ni de stigmatiser une profession, et encore moins d'organiser méthodiquement un désengagement de l'Etat aux conséquences imprévisibles. Il s'agit, en revanche, d'imaginer un nouveau contrat autour de l'accès à la justice pour les plus démunis.

Au terme de sa mission de contrôle, votre rapporteur spécial est convaincu que ce nouveau contrat peut reposer sur quelques grandes idées simples.

Tout d'abord, la profession d'avocat dans son ensemble doit être pleinement impliquée dans le système de l'AJ. Il faut, en effet, en finir avec cette inégalité particulièrement choquante qui consiste à ce qu'un avocat sur deux ne participe pas au bon fonctionnement de l'aide . Le rétablissement de l'équité au sein de cette profession passe par une participation, en temps ou en argent, à cette expression de la solidarité nationale qu'est l'AJ. Dans le même temps, l'avocat doit pouvoir bénéficier d'une rémunération plus proche qu'aujourd'hui de la réalité de son travail et de la qualité de son engagement au service des plus fragiles, grâce à l'instauration d' un nouveau « barème horaires » .

Le justiciable , ensuite, ne peut se désintéresser d'un système qui lui garantit un accès de qualité à la justice lorsqu'il ne dispose que de moyens très limités ou se retrouve dans une situation de détresse particulière. La création d'un « ticket modérateur justice » doit contribuer à responsabiliser le bénéficiaire de l'AJ. Le niveau de ce ticket devra bien évidemment être fixé de manière à inciter suffisamment à un comportement citoyen sans freiner pour autant l'accès des plus démunis aux Palais de justice.

Conformément à l'esprit et à la ligne directrice tracée par la LOLF, l'Etat , pour sa part, doit être le garant de la performance du système de l'AJ, non seulement parce qu'il le finance mais aussi parce qu'il l'opère. La chaîne de l'AJ, qui va du BAJ aux services du Trésor public (pour le recouvrement) en passant par les magistrats, réunit une communauté autour d'un objectif partagé : rendre des décisions de qualité, dans les meilleurs délais possibles, en facilitant l'accès des plus faibles à la justice. Cette communauté doit désormais relever le défi des réorganisations induites par la réforme de la carte judiciaire et le passage aux nouvelles technologies , en faisant de ces évolutions non une contrainte subie mais un levier de progrès activé au profit d'un système de l'AJ modernisé.

Enfin, pour l'avenir, l'évaluation de l'impact sur les crédits de l'AJ de toute nouvelle loi s'impose comme indispensable . Le succès de la réforme de l'AJ dépendra en effet, sur le moyen terme, de la capacité du législateur à en finir avec un pilotage à vue pénalisant l'institution judiciaire dans son ensemble et mettant en péril la soutenabilité de la dépense liée à l'AJ en particulier.

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