C. DONNEES PAR DISPOSITIFS D'INTERVENTION DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

1. Le degré de rigidité des interventions de la politique de la ville : des dépenses fréquemment rigides en pratique

Sur le programme 147 Équité sociale et territoriale et soutien , les dépenses d'intervention de l'État sont, en général, fondées sur des décisions unilatérales. Ce degré de rigidité relativement faible devrait rendre plus souple la gestion de ces interventions. Ce constat mérite, en réalité, d'être nuancé dans la mesure où certains dispositifs sont beaucoup plus rigides en pratique :

- Si une négociation sur les subventions versées au titre d'un contrat de ville donné avait bien lieu tous les ans sur la période 2000-2006, un « socle » stable était, de fait, reconduit au sein de cette programmation 95 ( * ) ;

- Certains dispositifs présentent, à bien des égards, des caractéristiques similaires à celles des contrats aidés et emportent un engagement pluriannuel. C'est le cas, par exemple, des « adultes-relais » 96 ( * ) ou des équipes projet 97 ( * ) de la politique de la ville.

- Les compensations d'exonérations fiscales et sociales en ZFU constituent, par ailleurs, un dispositif d'intervention très rigide , résultant de droits à prestations ouverts à des bénéficiaires en vertu d'un régime légal et réglementaire.

2. Des dispositifs nombreux et instables dans le temps

Cette rigidité des dépenses n'empêche pas une instabilité du régime juridique des dispositifs d'intervention de la politique de la ville. Des tableaux de synthèse de ces dispositifs sont présentés en annexe à ce rapport. Ces tableaux font ressortir le nombre très élevé de textes applicables à ces dispositifs et leur variabilité dans le temps. Le régime des « adultes-relais » a, ainsi, été affecté par une instabilité caractérisée sur la période récente.

Le dispositif « adultes-relais » et son instabilité récente

L'article L.12-10-1 du code du travail définit les activités exercées par les adultes-relais comme « visant à améliorer, dans les zones urbaines sensibles et les autres territoires prioritaires des contrats de ville, les relations entre les habitants de ces quartiers et les services publics ainsi que les rapports sociaux dans les espaces publics ou collectifs » . Les employeurs des adultes-relais sont en majorité des associations (85 %).

Dans une circulaire du 24 octobre 2005, la déléguée interministérielle à la Ville invitait les préfets à « anticiper la sortie du dispositif » , compte tenu des moyens financiers disponibles. Après les violences urbaines de la fin de l'année 2005, le Premier ministre annonçait le doublement du nombre de contrats. Les modalités de gestion du dispositif sont également compliquées, pour l'année 2007, par la création de l'ACSÉ 98 ( * ) .

Après cette phase de quasi mise en extinction du dispositif au cours de l'année 2005, le nombre de conventions actives est brusquement remonté de 2 900 au 31 décembre 2005 à 3 500 au 31 décembre 2006 (soit + 21 %).

Les associations rencontrées par la Cour ont fait état de l'impact très négatif de cette instabilité pour la conduite des actions menées dans les quartiers.

Cette instabilité des dispositifs spécifiques vient, d'une certaine façon, démultiplier l'instabilité des dispositifs d'intervention de droit commun également mobilisés en direction des quartiers sensibles, comme les contrats aidés 99 ( * ) . Les effets cumulatifs de cette double instabilité rendent particulièrement délicate la conduite dans la durée d'une action en direction des quartiers en difficulté.

Les acteurs de la politique de la ville rencontrés par la Cour sur le terrain ont d'ailleurs très fréquemment critiqué cette instabilité des dispositifs d'intervention. L'une des associations rencontrées a indiqué à la Cour que l'un de ses emplois de médiation sociale avait été successivement financé, depuis 2000, sur la base du dispositif emplois-jeunes, puis du dispositif adultes-relais, avant d'entrer dans le cadre d'un contrat aidé du conseil régional.

La stabilisation du régime des dispositifs d'intervention de la politique de la ville apparaît prioritaire. L'objectif pourrait être de parvenir à stabiliser une armature cohérente de dispositifs d'intervention exerçant un véritable effet structurant sur les quartiers sensibles. Cette nécessité de stabilisation n'exclut pas, cependant, le besoin d'une mise en conformité de certains dispositifs. C'est le cas, en particulier, du régime financier du dispositif « adultes-relais », longtemps dérogatoire et peu orthodoxe, et qui a été régularisé à la fin de l'année 2006 100 ( * ) .

* 95 C'était le cas, en particulier, pour le financement des opérations « ville, vie, vacances » ou des centres de ressources de la politique de la ville.

* 96 Les contrats des adultes-relais sont prévus pour trois ans.

* 97 Les « équipes-projet » ou de « maîtrise d'oeuvre urbaine et sociale » constituent le dispositif de direction et de conduite de projet du contrat de ville.

* 98 Les nouvelles conventions signées après le 1 er janvier 2007 (avec un nouveau modèle de convention) sont prises en charge par l'ACSÉ, qui a conclu une convention avec le CNASEA pour le paiement des aides. Les conventions renouvelées après le 1 er janvier 2007 sont prises en charge par l'ACSÉ mais seulement à leur date de renouvellement. Les conventions signées avant le 1 er janvier 2007 continuent d'être payées par les trésoreries générales jusqu'à la conclusion d'un avenant de transfert entre la préfecture et les services employeurs.

* 99 La Cour a analysé cette instabilité dans le temps des contrats aidés dans le rapport Quelle efficacité pour les contrats aidés de la politique de l'emploi ? qu'elle a remis en octobre 2006 à la commission des finances du Sénat.

* 100 De 2000 à 2004, les crédits relatifs au dispositif adultes relais ont été consommés conformément au décret n° 2000-540 du 16 juin 2000 et à la circulaire DIV/DPT-IEDE/2000/231 du 26 avril 2000. Ces textes prévoyaient une procédure de gestion particulièrement complexe : engagement comptable central, engagement juridique au niveau du département, délégation des crédits de paiement au niveau régional, liquidation par le comptable et dépense sans ordonnancement préalable, le cas échéant en dépassement de crédit. À compter de 2005, une procédure plus normale a été utilisée : délégation de crédits et dépenses après ordonnancement. Cependant, cette nouvelle procédure est intervenue sur la seule base d'un document de la direction générale de la comptabilité publique ; le décret de 2000 n'a été abrogé qu'à la fin de 2006 (décret n° 2006-1788 du 23 décembre 2006).

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