b) Les aides à la couverture complémentaire

La couverture complémentaire, comme son nom l'indique, joue principalement un rôle de co-payeur par défaut : elle prend en charge la partie des prestations remboursables non financées par l'AMO ou la dépense non reconnue par elle. La France est le pays où cette fonction quasi unique est dévolue aux assurances privées alors que, dans les autres pays, la fonction est davantage celle d'une assurance substitutive (l'assurance financée par fonds publics étant plutôt réservée à des catégories de personnes à bas revenus) ou celle d'une assurance supplémentaire (une partie du panier de biens leur étant abandonnée en totalité).

Jusqu'à la création récente des contrats solidaires (2002) et responsables (2004) et la multiplication des participations forfaitaires non remboursables par l'assurance complémentaire, les mesures d'économies des régimes obligatoires avaient pour conséquence quasiment mécanique d'être prises en charge par les AMC, sans que soit totalement intégré dans ce scénario de vases communicants l'alourdissement de la charge que ce processus engendre pour les ménages compte tenu notamment de l'écart de coûts de gestion répercutés dans les primes.

L'objectif poursuivi au fil des ans s'est davantage focalisé sur la nécessaire extension de la couverture complémentaire à toute la population, couverture privée qu'il convenait à la fois d'encourager et de réguler pour éviter une sélection des risques et/ou une démutualisation trop forte des risques.

Cette stratégie s'est traduite d'une part par le financement ou l'aide au financement d'une complémentaire pour les revenus les plus bas, d'autre part par des incitations en direction des travailleurs indépendants et des travailleurs salariés. Un schéma identique est en train de se mettre en place pour les fonctionnaires, mais avec un but quelque peu différent : il s'agit moins d'inciter à l'achat d'une complémentaire que d'imposer, par ce truchement, une mise en concurrence des assureurs 26 ( * ) .

Les principaux mécanismes de cet encouragement à l'extension de la couverture complémentaire sont rappelés ci-dessous.

(1) La complémentaire santé des bas revenus :

Deux dispositifs doivent être distingués :

- la CMU complémentaire (loi du 27 juillet 1999), qui est une assurance complémentaire santé gratuite, encadrée par la définition d'un panier de soins spécifiques, des tarifs facturables (pas de dépassements sauf exception et pratique du tiers payant) et par le montant des prestations remboursées par le fonds de financement de la CMU aux organismes gestionnaires ;

- l'Aide au paiement d'une assurance Complémentaire Santé (ACS) (loi du 13 août 2004) qui vise à éviter les effets de seuil créés par le dispositif de la CMUC placé sous conditions de ressources, en aidant financièrement ceux dont les ressources sont à peine supérieures, à acquérir une assurance complémentaire santé de droit commun sur le marché. L'aide est différenciée selon l'âge du bénéficiaire et représentait en 2007 à peu près la moitié du coût moyen des contrats aidés.

Ces deux dispositifs ont connu des modifications destinées à en renforcer les effets : relèvement des plafonds de ressources et des forfaits financés. Le forfait CMUC remboursé par le fonds est passé à 340 € par an en 2006, le plafond de l'ACS a été remonté en 2007 (d'abord de 15 %, puis de 20 % au 1 er janvier 2007, soit 8 614,55 €) ainsi que le montant de l'aide (de 75 € à 100 € par personne de moins de 25 ans, 150 € à 200 € par personne de 25 à 59 ans, de 250 € à 400 € par personne de 60 ans et plus).

La CMUC compte environ 4,8 millions de bénéficiaires : le remboursement des forfaits a représenté en 2006 une dépense de 1 647 M€, financée via le fonds par 650 M€ de contribution prélevée sur le chiffre d'affaires santé des OC (passé de 1,75 % à 2,5 % en 2006), par 346 M€ de dotation Etat et par 621 M€ de taxes affectées.

L'ACS compte environ 275 000 bénéficiaires pour une cible estimée à 2 millions de personnes. La dépense en 2006 a été de 40 M€ financée via le fonds par l'assurance maladie : il s'agit d'un crédit d'impôt dont bénéficient les organismes complémentaires qui accordent une réduction de cotisations aux bénéficiaires de l'ACS et se font rembourser par le fonds CMUC.

Au final, alors que 7 millions de Français sont réputés être sous le seuil de pauvreté (ressources inférieures à 817 € mensuels, soit 60 % du niveau de vie médian selon le critère d'Eurostat 27 ( * ) ), 4,8 millions bénéficient de la CMUC (ressources inférieures à 606 € mensuels) et 275 000 personnes bénéficient de l'ACS (ressources comprises entre 606 € et 727 €), leur couverture complémentaire leur coûtant cependant en moyenne 352 € par an.

(2) Les incitations à la protection sociale complémentaire des travailleurs indépendants et salariés

Ces incitations correspondent aux contrats Madelin destinés aux travailleurs indépendants (créé par la loi du 11 février 1994) et aux contrats collectifs d'entreprises qui peuvent être facultatifs ou obligatoires.

Le chiffrage réalisé infra ne porte que sur la partie maladie (risque « soins de santé »), mais il convient de rappeler qu'historiquement, c'est le risque lourd « prévoyance » au sens strict (incapacité, invalidité, décès) qui a été introduit en premier lieu, en même temps que les retraites complémentaires dès 1947. La couverture maladie qui représente pour les complémentaires un risque léger compte tenu de sa fonction actuelle a été introduite plus tardivement dans les années 60.

La philosophie simplifiée des aides fiscales et sociales mises en place conduit in fine à traiter les cotisations versées aux complémentaires comme des cotisations obligatoires. La justification avancée est que la couverture complémentaire est un « prolongement naturel » des missions de la sécurité sociale 28 ( * ) .

(a) Les contrats Madelin

Selon la FFSA, sur le seul portefeuille des sociétés d'assurance, toutes garanties confondues,il y aurait à fin 2006 1,1 million de contrats en cours et 75% des travailleurs non salariés seraient détenteurs d'un contrat prévoyance Madelin (frais de soins, décès, incapacité, invalidité).

Les cotisations sont considérées comme des charges déductibles : à ce titre elles n'entrent pas dans le BIC (bénéfice industriel et commercial) ni dans le BNC (bénéfice non commercial) déclaré 29 ( * ) .

En conséquence, elles diminuent l'assiette de l'impôt sur le revenu - IR - (le bénéfice est en effet réintégré dans le revenu soumis à l'IR) ainsi que l'assiette des cotisations obligatoires, également calculées sur ce revenu.

L'aide fiscale est évaluée à 300 M€ pour le risque santé par la DLF. (auquel s'ajoutent 200 M€ pour le risque prévoyance).

L'aide sociale n'est pas chiffrée, le rapport au Parlement précité n'ayant pas couvert l'ensemble des dispositifs d'exonération.

(b) Les contrats collectifs d'entreprise

Depuis la réforme des retraites (loi du 21 août 2003), seuls les contrats collectifs obligatoires sont concernés par les aides sociales à compter du 1 er janvier 2005 pour les entreprises qui en ont fait le choix : toutefois, une période transitoire a été prévue puis rallongée, l'application de cette restriction n'étant obligatoire qu'à compter du 1 er Janvier 2009 30 ( * ) .

Ce dispositif concerne un nombre important de personnes. Au vu des enquêtes utilisables sur cette question - PSCE 2003, CREDOC 2005 commandée par le CTIP, ESPS 2006 - les taux suivants font référence 31 ( * ) (il s'agit de taux constatés sur échantillons) :

- les contrats collectifs santé seraient proposés à 67 % des salariés et couvriraient environ 56 % de la population française -cotisants et ayant droits - (CREDOC), mais leur chiffre d'affaires ne représentait en 2006 que 35 % du CA santé selon les données financières produites par les groupements professionnels (les contrats collectifs bénéficient en effet de tarifs plus avantageux dus à la mutualisation du risque dans l'entreprise et au caractère captif de la population couverte dans le cas des contrats obligatoires) ;

- 50 % des contrats collectifs sont obligatoires ;

- les entreprises abondent pour environ 58 % les cotisations appelées, mais 14 % des entreprises n'apportent aucun financement.

Le principe est le suivant :

- pour les employeurs :

* diminution de l'assiette des cotisations patronales (art.L242-1 du Code de la Sécurité sociale) : les contributions des employeurs destinées au financement des régimes de prévoyance complémentaire sont exclues de l'assiette des cotisations de sécurité sociale propre à chaque assuré pour une fraction n'excédant pas un montant égal à la somme de 6 % du plafond de la sécurité sociale et de 1,5 % de la rémunération soumise à cotisations de sécurité sociale, le total ainsi obtenu ne pouvant excéder 12 % du plafond de la sécurité sociale.

La participation possible du comité d'entreprise est assimilée à la contribution de l'employeur. Ces contributions sont en revanche assujetties à CSG en tant que revenus d'activité et, par voie de conséquence, à CRDS.

* diminution de l'assiette de l'IS (art.39-1 du Code Général des Impôts).

- pour les salariés affiliés obligatoires est déductible du revenu déclaré pour l'IR (article 83 du Code Général des impôts) le montant de la cotisation ou prime versée à la complémentaire, y compris la contribution de l'employeur , dans les limites indiquées ci-dessous. En revanche, la prime n'est pas déductible de l'assiette des cotisations salariales.

Code des impôts article 83

1°quater Les cotisations ou primes versées aux régimes de prévoyance complémentaire auxquels le salarié est affilié à titre obligatoire.

Les cotisations ou les primes mentionnées à l'alinéa précédent sont déductibles dans la limite, y compris les versements de l'employeur , d'un montant égal à la somme de 7% du montant annuel du plafond mentionné à l'article L.241-3 du code de la sécurité sociale et de 3% de la rémunération annuelle brute, sans que le total ainsi obtenu puisse excéder 3% de huit fois le montant annuel du plafond précité. En cas d'excédent, celui-ci est ajouté à la rémunération.

Ces aides s'appliquent uniquement si les contrats collectifs sont solidaires et responsables.

(3) La fiscalité des assureurs complémentaires

La fiscalité des assureurs complémentaires subit des transformations depuis 15 ans pour deux raisons qui tiennent à l'harmonisation entre familles d'assureurs et aux modalités de régulation du marché par les pouvoirs publics.

(a) L'harmonisation des règles d'assujettissement fiscal entre les trois familles d'assureurs

Le droit européen conduit en effet à effacer progressivement les différences liées au statut juridique des assureurs (mutuelles, IP et sociétés d'assurances) : transposition de la directive de 1992 avec la révision du code de la mutualité en 2002 et dispositions de la loi de finances rectificative de 2006, applicables le 1 er janvier 2008.

La première harmonisation des règles d'assujettissement est intervenue en 2002 : elle a consisté à appliquer uniformément aux trois familles d'assureurs la taxe sur le chiffre d'affaires (TCA) de 7 % à laquelle les mutuelles et les IP n'étaient jusqu'alors pas soumises.

La seconde étape est intervenue dans la loi de finances rectificative de 2006 (article 88) et devait s'appliquer le 1 er janvier 2008 : elle consiste à soumettre de manière très progressive les mutuelles à la taxe professionnelle et à l'IS jusqu'alors applicable aux IP et sociétés d'assurances. L'IS devait entrer progressivement en vigueur entre 2009 et 2013 et la taxe professionnelle à partir de 2010. En raison de l'enquête de la Commission européenne enclenchée fin 2007 - voir infra), la LFR de 2007 (article 28) a repoussé ce délai d'application d'un an.

(b) La régulation du marché des assureurs

L'article 88 de la loi de finances rectificative pour 2006 cité ci-dessus crée parallèlement, pour l'ensemble des OC, quel que soit leur statut juridique, un régime d'exonération de l'IS et de la taxe professionnelle sur le CA des contrats complémentaires santé sous certaines conditions.

Conditions requises pour bénéficier de l'exonération fiscale

- l'OC doit être inscrit au registre des organismes gestionnaires de la CMU complémentaire ;

- sur l'ensemble des contrats souscrits par un OC, les contrats « solidaires et responsables » doivent représenter un nombre minimum de personnes ou une certaine proportion de contrats (pour les opérations individuelles ou collectives à adhésion facultative, au moins 150 000 personnes couvertes ou entre 80 et 90% des contrats ; pour les opérations collectives à adhésion obligatoire, au moins 120 000 personnes couvertes ou entre 90 et 95% des contrats) ;

- les OC doivent satisfaire à au moins une des quatre obligations suivantes :

1. des dispositifs de modulation tarifaire ou de prise en charge des cotisations liées à la situation sociale des assurés sont mis en oeuvre ;

2. en individuelle ou collective à adhésion facultative, 3 à 6% au moins des assurés doivent bénéficier de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé ;

3. les personnes âgées de 65 ans et plus représentent au moins 15 à 20% des assurés de l'OC ;

4. les personnes âgées de moins de 25 ans représentent au moins entre 28 et 35% des assurés.

(4) Les raisons de l'enquête ouverte par la commission européenne

D'une part, les aides fiscales et sociales des contrats collectifs ne s'appliquent qu'en cas de contrats responsables : les assureurs complémentaires se voient donc dans la quasi-obligation de ne proposer que des contrats responsables aux entreprises, ce qui bien entendu touche différemment les trois types d'assureurs, au premier chef les IP (dont les contrats collectifs représentent 78 % de leur marché, contre 41 % pour les sociétés d'assurance et 26 % pour les mutuelles.

En revanche, pour les OC, la vente de contrats individuels non responsables n'entraîne pas une perte de marché, mais seulement une perte de l'exonération de la TCA de 7 %.

L'enquête de la commission européenne :

La Commission Européenne a ouvert une enquête formelle afin de vérifier si le projet français d'aides fiscales aux organismes assureurs à raison de leurs activités de gestion des contrats d'assurance dits solidaires et responsables est compatible avec les règles du traité CE en matière d'aides d'Etat. La France considère que ces aides sont des mesures sociales bénéficiant intégralement au consommateur final, sans discrimination quant au fournisseur du contrat d'assurance et qu'elles sont donc compatibles avec le marché commun. La Commission ne met pas en doute l'objectif social général des mesures, mais s'interroge sur leur caractère non discriminatoire et sur la mesure dans laquelle les consommateurs bénéficieraient effectivement des avantages accordés aux organismes assureurs. L'ouverture d'une enquête formelle donne aux tiers intéressés la possibilité de faire connaître leur point de vue. Elle ne préjuge en rien de l'issue de la procédure.

Fin 2006, les autorités françaises ont notifié une série de mesures d'aides en faveur du développement des contrats d'assurance solidaires et responsables. La première mesure est un régime d'exonération d'impôt sur les sociétés et de taxe professionnelle à raison des opérations de gestion de certains contrats d'assurance maladie . La deuxième mesure prévoit la déduction fiscale des dotations aux provisions d'égalisation afférant à certains contrats d'assurances complémentaires collectifs qui couvrent les risques liés au décès, à l'invalidité, à l'incapacité . Une troisième mesure, la soumission progressive des mutuelles aux règles fiscales de droit commun sera traitée dans le cadre d'une procédure distincte relative à l'extinction du régime fiscal particulier qui leur est actuellement accordé.

Les autorités françaises estiment que ces mesures sont compatibles avec les règles en matière d'aides d'État en application de l'article 87, paragraphe 2, sous a) du traité CE, qui prévoit que les aides à caractère social octroyées aux consommateurs individuels sont compatibles avec le marché commun, à condition qu'elles soient accordées sans discrimination liée à l'origine des produits.

À ce stade, la Commission exprime des doutes quant à la satisfaction des trois conditions posées par le traité, à savoir le caractère social des mesures d'aide, le transfert effectif des avantages à des consommateurs individuels, enfin leur caractère non discriminatoire.

Premièrement, sous réserve de certaines précisions à apporter par décret, l'objectif social de la première mesure pourra sans doute être reconnu. Il s'agit de rendre la couverture assurance-maladie complémentaire accessible à l'ensemble de la population française. Cependant, l'objectif social de la deuxième mesure semble moins bien établi à ce stade si l'on se place au moment de la souscription des contrats et non au moment de la survenance des évènements graves couverts par ces contrats.

Deuxièmement, dans les deux cas, le consommateur individuel n'est que le bénéficiaire indirect des avantages fiscaux accordés aux organismes assureurs qui offriront les contrats éligibles . La Commission doute à ce stade que le mécanisme du marché puisse garantir, à lui seul, le transfert intégral de ces avantages au consommateur. Ce doute est renforcé, dans le cas de la première mesure, par la présence de seuils à respecter qui risque de réduire le nombre d'organismes pouvant offrir les contrats solidaires et responsables et dans le cas de la deuxième mesure, par la forte concentration entre les mains des institutions de prévoyance qui caractérise, semble-t-il, le marché des contrats collectifs éligibles. Le transfert intégral de l'avantage au consommateur individuel semble donc, à ce stade, hypothétique et aléatoire.

Troisièmement, certaines conditions imposées pour bénéficier de la première mesure comme le nombre ou le taux minimum de contrats solidaires et responsables en portefeuille, semblent introduire une discrimination au profit de certains organismes assureurs plus importants ou plus spécialisés au détriment notamment des nouveaux entrants sur le marché qui offriraient pourtant des contrats solidaires et responsables.

(5) Estimation financière des aides apportées, des financeurs et des bénéficiaires

- En ce qui concerne la perte de recettes fiscales, seul le contrat Madelin est suivi et donc connu par la DLF : 300 M€ pour le risque santé.

En revanche, la perte d'IS et de IR liée aux contrats collectifs n'est pas suivie, car il ne s'agit pas juridiquement d'une « dépense fiscale » : pour l'employeur, sa contribution est assimilée à une charge qui vient en déduction de l'assiette ; pour les salariés, il ne s'agit pas d'un dispositif incitatif mais obligatoire.

Quant à l'exonération de TCA, c'est une dépense fiscale : toutefois le chiffrage établi pour le PLF 2007 était fondé sur un CA inférieur à celui déclaré par les assureurs complémentaires et sur l'hypothèse d'un taux de 91,7 % 32 ( * ) de contrats responsables (alors que les informations communiquées par la DREES font plutôt état d'un taux de 98 %).

- En ce qui concerne la perte de recettes sociales , le rapport du gouvernement au Parlement estime la diminution d'assiette, mais pas la perte ; la Cour, dans le RALFSS 2007 a estimé la perte en appliquant un taux moyen de cotisations de 38,7 % (égal à la somme des taux salariaux et patronaux). Toutefois, ces calculs concernent la prévoyance en entreprise tous risques.

Le contrat Madelin ne donne lieu à aucune estimation.

Les exemptions d'assiette de cotisations sociales ne donnent pas lieu à compensation par le budget de l'Etat.

Explication apportée dans le rapport transmis au Parlement

L'obligation de compensation a été instaurée par la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale. Renforcée par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie, cette obligation ne porte pour les exonérations que sur les mesures instituées à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi du 25 juillet 1994 et pour les exemptions d'assiette sur celles créées après le 13 août 2004 (cf. annexe 1). Les dispositifs en cause ayant été, pour la plupart d'entre eux, instaurés avant 1994, la compensation par le budget de l'Etat ne leur est pas applicable.

D'autre part, la logique de ces dispositifs, ou leurs caractéristiques techniques peuvent conduire à ne pas les assimiler directement à de la rémunération sous forme de salaire, assiette habituelle des cotisations de sécurité sociale.

La Cour, soit pour combler l'absence d'informations (perte de recettes fiscales), soit pour affiner les chiffrages réalisés sur la totalité de la protection sociale d'entreprise (perte de recettes sociales) a retenu les hypothèses suivantes (voir encadré) pour cerner le montant des aides sociales et fiscales relatives au seul volet des contrats collectifs d'entreprises sur le risque santé.

Hypothèses retenues

- le chiffres d'affaires indiqué par les groupements professionnels eux-mêmes, c'est-à-dire 10,5 Md€ ;

- un taux de contrats responsables de 98 %, soit un CA assureurs soumis à exonérations de 10,3 Md€ ;

- une réfaction de 14 % tenant au taux d'entreprises qui ne participent pas au financement (cf. supra), soit un montant de primes entrant dans le champ des aides de 8,8 Md€ ;

- un taux moyen d'abondement des entreprises de 58 %, soit 5,1 Md€ de primes payées par les entreprises et 3,7 Md€ par les salariés ;

- un taux moyen d'IR pour les salariés de 15 % qui s'applique au total des cotisations versées à la complémentaire (et pas seulement à la part salariée) ;

- un taux d'IS pour les entreprises de 33 % ;

- un taux moyen total de cotisations obligatoires patronales et salariales de 37,88 % (RALFSS 2007) : il est appliqué à la contribution des employeurs (5,1 Md€) ce qui conduit à considérer celle-ci comme un substitut de salaire ; dans le cas contraire, il convient d'appliquer le taux de cotisations patronales, ce qui minore la perte de cotisations de 500 M€.

Tableau n° 21

Perte fiscale

Perte de cotisations sociales

Contrats Madelin

300 M€

Non chiffré

Contrats collectifs

Versant entreprises (IS)

1 683 M€

1 932 M€

Contrats collectifs

Versant salariés (IR)

1 320 M€

Fiscalité des assureurs :

TCA

721 M€

Fiscalité des assureurs :

IS et TP : non appliqué

non chiffré

Total

4 024 M€

1 932 M€

Source Cour

Au total, en sommant les aides à la CMUC et l'ACS et les aides relatives aux contrats Madelin et contrats collectifs d'entreprise, le coût global de la politique d'extension de la complémentaire santé peut être estimé à 7 643 M€ : 1 687 M€ en direction des bas revenus (CMUC et ACS) et 5 235 M€ en direction des travailleurs indépendants et salariés(contrats Madelin et contrats collectifs), 721 M€ consacrés à la politique de régulation des contrats des assureurs privés (exonération de la TCA sur la partie santé des contrats responsables).

Ce montant de 7 643 M€ doit être rapproché du montant des prestations versées au titre de la complémentaire santé, soit 21 872 M€ (20 436 M€ de prestations des AMC + 1 436 M€ de CMUC gérée par les organismes de base) : les aides représentent donc un coût supplémentaire de 35 % par rapport aux prestations remboursées par la couverture complémentaire santé.

Le financement de ce coût se répartit en :

- 4 991 M€ à la charge de l'Etat (4 024 M€ + 346 M€ de dotation au fonds CMU + 621 M€ de taxes affectées au fonds CMU) ;

- 1 972 M€ à la charge de la Sécurité sociale (1932 M€ + 40 M€ d'ACS), sans compter les exonérations de charges sociales relatives aux contrats Madelin ;

- enfin 650 M€ à la charge des assureurs complémentaires (contribution au fonds CMU).

La contribution requise des ménages pour financer leur couverture complémentaire est donc allégée par le dispositif d'aides à la couverture d'entreprise et les contrats Madelin à hauteur de 6,4 Md€ : contribution des employeurs (5,1 Md€) et exonération d'IR (1,3 Md€).

Ainsi, pour les ménages, les prestations reçues au titre de la couverture complémentaire (21,9 Md€) sont légèrement supérieures aux cotisations qu'ils financent effectivement (25,5 Md€ de primes - 6,4 Md€ d'aides = 19,1 Md€).

Même si la pratique indique que les ménages ont un sentiment de gratuité au moment où ils consomment des prestations remboursées par les AMC - argument qui justifie officiellement l'augmentation du copaiement d'ordre public via les contrats responsables - leur participation financière nette à leur couverture complémentaire est donc à peu près équivalente aux prestations qu'ils en reçoivent. Par rapport au paiement direct de soins non couverts et non remboursés, l'apport de la couverture complémentaire réside donc davantage dans la mutualisation des risques organisée entre les assurés que dans une diminution de l'effort financier demandé aux ménages pris dans leur ensemble.

* 26 Loi de modernisation de la fonction publique du 2 février 2007, décret d'application du 19 septembre 2007 et mise en place d'une mission d'appui pour aider les ministères à faire les appels d'offre.

* 27 Le niveau jusqu'à présent retenu en France était de 50 %, soit 681 €.

* 28 Rapport du Gouvernement au Parlement de fin 2007 : conformément à la loi n° 2002-1487 du 20 décembre 2002 (article 9), le gouvernement transmet au Parlement tous les cinq ans un rapport présentant un état et une évaluation financière des dispositifs affectant l'assiette des cotisations et contributions de sécurité sociale, dans le but de chiffrer les pertes de recettes pour l'Etat et la sécurité sociale.

* 29 Déductions plafonnées : voir annexe 11.

* 30 Une décision ministérielle du 13 février 2008 a en effet repoussé la date butoir, initialement prévue au1 er juillet 2008.

* 31 La question de l'information relative aux complémentaires a été examinée dans la partie II, chapitre III : l'ACAM dispose des informations exhaustives pour produire des chiffres exacts en la matière.

* 32 90 % pour les sociétés d'assurance et les IP, 100 % pour les mutuelles

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