b) Un mode de gestion peu efficient

Interrogé par votre rapporteure spéciale sur cette mauvaise évaluation des besoins, le ministère de l'agriculture et de la pêche avance deux types d'arguments :

- la sous-budgétisation des crédits destinés à la lutte contre la FCO en loi de finances pour 2007 s'expliquerait, tout d'abord, par le fait que l'ampleur de l'évolution de la maladie n'était pas prévisible au printemps de l'année 2006, c'est-à-dire au moment de l'élaboration du projet de loi de finances pour 2007. Seuls six cas étaient alors notifiés en France ;

- quant à la sous-budgétisation des crédits destinés à la lutte contre la FCO en loi de finances pour 2008, le ministère de l'agriculture et de la pêche indique que le sujet n'était pas encore, au moment des discussions budgétaires du printemps 2007, identifié comme « un risque budgétaire majeur » 35 ( * ) . S'il est exact que le ministère de l'agriculture et de la pêche disposait d'une information plus fine sur les besoins budgétaires lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2008, il lui estimait néanmoins impossible de calibrer avec précision ces besoins. Etant donné les incertitudes pesant notamment sur le montant du marché public passé avec les laboratoires pharmaceutiques, ainsi que sur l'éventuelle participation de l'Union européenne, le ministère de la pêche et de l'agriculture indique avoir « préféré solliciter des ouvertures de crédits au cours de l'année 2008, plutôt que d'inscrire en base des sommes à titre prévisionnel » 36 ( * ) .

Si votre rapporteure spéciale a entendu ces arguments, elle tient néanmoins à souligner que dès le 31 octobre 2006, soit avant la préparation du projet de loi de finances pour 2008, le directeur général de l'organisation mondiale pour la santé animale (OIE) soulignait les risques de diffusion rapide de la maladie , indiquant ainsi : « Nous sommes confrontés à un événement épidémiologique nouveau puisque par le passé tous les foyers de fièvre catarrhale du mouton étaient dus à un vecteur africain ; par conséquent, la maladie peut désormais devenir endémique dans toute la région, avec le risque de voir apparaître un nombre accru de cas au printemps et en été, saisons pendant lesquelles l'activité du vecteur devient très importante. [...] Compte tenu de l'adaptabilité de [l'insecte vecteur] aux conditions climatiques européennes, le virus a désormais la capacité de se répandre géographiquement au sein du continent européen, ce qui pourrait nécessiter de la part des pays de réviser leurs mesures de contrôle et de surveillance de la maladie » 37 ( * ) .

Par ailleurs, votre rapporteure spéciale note que si le coût lié à la prise en charge des vaccins et de la vaccination était incertain, en revanche, les besoins de financement liés à la surveillance sérologique et entomologique du territoire étaient, eux, davantage prévisibles .

Votre rapporteure spéciale s'interroge donc sur ce mode de gestion budgétaire, qui témoigne d'une mauvaise évaluation des besoins en loi de finances initiale , ceci d'autant plus que, comme elle a eu l'occasion de le souligner au moment de l'examen du projet de loi de règlement des comptes et de rapport de gestion pour l'année 2007 38 ( * ) , les crédits ouverts par le décret d'avance du 25 octobre 2007 n'ont pu être consommés en totalité en raison de leur ouverture trop tardive. Ils ont donc dû être reportés sur l'exercice 2008. Selon les données transmises par la direction générale de l'alimentation, cette sous-consommation des crédits serait liée au délai d'instruction préalable des dossiers d'indemnisation des éleveurs.

Interrogé par votre rapporteure spéciale sur ce mode de gestion peu efficient qui consiste à sous-budgétiser en loi de finances, avoir recours ensuite à la technique du décret d'avance, et finalement reporter sur les exercices suivants les crédits non consommés en raison de leur ouverture trop tardive , M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, est convenu que son ministère, qui connaît un déficit structurel, ne disposait pas des instruments de gestion de crise appropriés aux aléas climatiques, sanitaires et économiques auxquels était exposé le monde agricole 39 ( * ) .

* 35 Réponse au questionnaire adressé par votre rapporteure spéciale à M. Jérôme-André Gauthier et Mme Emmanuelle Soubeyran, conseillers auprès de M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, le 28 février 2008.

* 36 Réponse au questionnaire adressé par votre rapporteure spéciale à M. Jérôme-André Gauthier et Mme Emmanuelle Soubeyran, conseillers auprès de M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, le 28 février 2008.

* 37 Communiqué de presse de l'OIE du 31 octobre 2006.

* 38 Rapport n° 433 (2007-2008), tome II.

* 39 Audition du 2 juillet 2008 de M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche, dans le cadre de l'examen du projet de loi de règlement des comptes et de rapport de gestion pour 2007.

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