E. LA SITUATION EN CHINE

À l'initiative de M. Jean-Claude Mignon (Seine-et-Marne - UMP), président de la délégation française, la commission des questions politiques a souhaité débattre de la situation politique en Chine dans un contexte marqué à la fois par les événements au Tibet et la catastrophe humanitaire du Sichuan. Soulignant les progrès accomplis par la Chine sur le plan économique, le texte soumis à l'Assemblée parlementaire dénonce l'absence de corrélation entre développement économique et respect des droits de l'Homme. Les atteintes répétées aux libertés fondamentales constatées en Chine ne peuvent se justifier par une quelconque tradition culturelle, minimisant les droits de l'Homme et l'État de droit. Cette dénonciation n'exclut pas pour autant le renforcement du dialogue avec la Chine, comme l'a souligné M. Jean-Claude Mignon , rapporteur du texte :

« Avoir eu la chance de me voir confier la rédaction de ce rapport est pour moi un honneur, comme il est un honneur pour l'Assemblée parlementaire d'avoir eu le courage de traiter aujourd'hui ce sujet assez sensible.

Je n'ai pas eu l'intention de rédiger un rapport à charge contre un pays, la Chine, qui n'est pas n'importe quel pays, mais qui est d'abord un pays, quelle que soit son importance. J'ai souhaité que mon rapport soit équilibré et que l'on puisse y évoquer tout : ce qui est agréable à entendre comme ce qui risque de fâcher.

Nul ne peut contester que la Chine est un grand pays, et qu'elle a fait des progrès considérables ces dernières décennies, mais qu'un certain nombre de problèmes ne sont pas encore réglés. La Chine a accompli des progrès sur le plan économique ; elle a su se poser dans les relations internationales et est intervenue dans bien des débats pour tenter de servir d'arbitre ; tout cela peut être salué. Cependant force est de constater que la Chine aujourd'hui, malheureusement, ne respecte pas complètement - et même ne respecte pas du tout - les droits de l'Homme tels que nous les concevons dans cette Assemblée et que, lorsqu'elle a postulé il y a quelques années pour être le pays hôte des Jeux olympiques et que la ville de Pékin a été choisie, un certain nombre d'engagements avaient été contractés par nos amis chinois. Malheureusement, ils ne sont pas complètement respectés aujourd'hui.

Je veux aussi souligner, comme je l'ai fait dans mon rapport, que la communauté internationale et le monde entier ont été touchés par le drame qui a endeuillé la Chine. C'est pour cette raison que j'ai souhaité, dans l'exposé des motifs et dans le projet de résolution, faire part de nos condoléances à nos amis chinois.

Monsieur le Président, j'ai essayé d'être le plus objectif possible dans ce rapport.

J'évoque ce qui est inconcevable pour nous, à savoir la peine de mort, la restriction des libertés, la manière dont la démocratie, malheureusement, est inexistante dans ce pays. Lorsqu'on essaie de discuter avec un pays aussi grand que la Chine, qui est un grand voisin du Conseil de l'Europe, nous évoquons des sujets, des problèmes qui se passent également dans un certain nombre de pays qui sont hors du périmètre du Conseil de l'Europe. Les droits de l'homme sont universels, ils n'ont pas de frontières. Il est de notre devoir, de notre responsabilité d'avoir le courage de le dire.

Une fois cela posé, que restera-t-il de ce rapport si nous n'avons pas la volonté de tendre la main à nos amis chinois ? C'est la raison pour laquelle je propose, dans le projet de résolution, comme nous avons su le faire dans le passé, et dès 1957 pour le premier pays accédant au statut d'observateur, à savoir Israël, de renouer et d'enrichir le dialogue qui existe déjà.

En effet, ainsi que l'a évoqué M. l'Ambassadeur de Chine à Paris, lequel a eu la gentillesse et l'amabilité de me recevoir longuement, la Chine entretient d'excellentes relations bilatérales avec chacun des 47 États membres du Conseil de l'Europe.

Je souhaite, dans ce projet de résolution, que nous tendions la main à la Chine, de manière à pouvoir un jour envisager de proposer à ce grand pays d'être observateur, au même titre que le sont d'autres grands pays, comme le Canada, le Mexique ou Israël et, en ce qui concerne le Comité des ministres, les États-Unis, le Japon et encore d'autres pays.

J'espère que ce rapport pourra être parfaitement compris par les uns et par les autres.

Monsieur le Président, je m'en remets à la sagesse de notre Assemblée pour faire en sorte qu'il ne soit pas dénaturé, car je peux vous assurer que chaque mot a été pesé, chaque tournure de phrase a été choisie dans l'intérêt de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe que vous présidez. »

M. Jean-Guy Branger (Charente-Maritime - UMP) a souhaité mettre en avant la légitimité du Conseil de l'Europe à se saisir d'une telle question, appelant l'organisation à réaffirmer ses valeurs dans le cadre d'un dialogue avec la Chine :

« Je suis très heureux que la maison des droits de l'Homme qu'est le Conseil de l'Europe se saisisse enfin de la situation des libertés fondamentales en Chine quelques semaines après les violences perpétrées au Tibet, mais déjà dix-neuf ans après le massacre de la place Tian'anmen. Permettez-moi, à cet égard, de remercier chaleureusement mon collègue Jean-Claude Mignon pour avoir su mobiliser notre institution sur ce sujet essentiel et faire organiser un débat ouvert sur l'attitude à adopter avec Pékin. Je regrette, comme lui, que le Dalaï Lama n'ait pu répondre à l'invitation du Conseil de l'Europe pour nous éclairer sur le quotidien à Lhassa.

J'aurais également aimé que Yang Chunlin, défenseur de la cause de 40 000 cultivateurs expropriés de leurs terres sans compensation, assiste à nos échanges et nous présente les difficultés rencontrées par les sans-terres. La lumière aurait, ainsi, été mise sur l'absence de droits sociaux dans un État qui ajoute aux maux du totalitarisme politique les excès du libéralisme économique. Arrêté le 6 juillet dernier pour « subversion de l'État », ses jambes et ses bras ont été étirés et enchaînés aux quatre coins d'un lit en métal.

J'aurais aimé que Hua Huaiqi, pasteur au sein d'une église « domestique », vienne nous décrire l'attitude du pouvoir à l'égard des mouvements religieux ou spirituels. Condamné à l'issue d'un procès à huis clos, il est aujourd'hui battu en prison. Sa mère, âgée de 76 ans, a été condamnée à deux ans d'emprisonnement pour avoir protesté contre l'arrestation de son fils. La justice lui reproche d'avoir brisé le phare d'une voiture de police.

J'aurais aimé accueillir Kim Yong-Ja pour qu'elle nous parle de la traite de jeunes Nord-Coréennes en Chine dont elle a été victime. Arrêtée sans papier, elle s'est suicidée en prison. Par-delà son cas, nous aurions pu aborder le sort des femmes chinoises, victimes de discriminations et de violences en tous genres.

J'aurais aimé entendre Ablikim Abdiriyim, militant pour la reconnaissance de la langue ouïghoure sur l'Internet chinois, nous parler de la situation dramatique que vivent les mouvements autonomistes régionaux. Arrêté, torturé, il peine aujourd'hui à reconnaître sa propre famille.

J'aurais aimé que Hu Jia s'exprime sur le sida et l'écologie en Chine. Arrêté le 27 décembre dernier, il a été condamné à trois ans et demi de prison pour incitation à la subversion. Son épouse est également sous la menace d'une arrestation et des violences concomitantes à celle-ci.

J'aurais aimé écouter l'avocat Gao Zhiseng nous dresser un état des lieux des libertés fondamentales en Chine. Lui aussi condamné en décembre 2006 pour incitation à la subversion, il a été détenu au secret et torturé entre le 24 juin et le 4 juillet 2007 puis à l'automne suivant. Il est aujourd'hui assigné à domicile.

Avec eux, nous aurions pu débattre des modalités d'un dialogue nécessaire et utile avec Pékin. Ils auraient pu nous faire part de leurs réflexions sur l'ampleur des progrès à accomplir pour le Parlement chinois avant de devenir, éventuellement, observateur auprès de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, sachant que ce statut confère une certaine légitimité démocratique.

Par ailleurs, ils se seraient sans doute étonnés de notre propre frilosité à utiliser l'expression « droits de l'Homme » dans le titre d'un rapport du Conseil de l'Europe consacré à la Chine. Ces quelques mots ne sont-ils pas, pourtant, notre raison d'être ? Ou doit-on les considérer comme une incitation à la subversion ?

J'ai évoqué, Monsieur le Président, mes chers collègues, tout ces cas pour souligner l'ampleur des progrès restant à accomplir. Je ne doute pas que la Chine puisse y parvenir dans un très proche avenir. Un dialogue nourri et des échanges concrets permettront à ce pays ami d'accéder à une nouvelle forme de modernité et d'incarner pleinement un idéal de liberté. »

M. Francis Grignon (Bas-Rhin - UMP) a, pour sa part, insisté sur l'universalité des droits de l'Homme et contesté tout relativisme culturel en la matière :

« Merci à Jean-Claude Mignon d'avoir pris l'initiative de ce rapport qui devrait être le point de départ d'un dialogue qui sera long et ardu avec la Chine. Certes, la tâche ne sera pas facile, mais je suis persuadé que l'on ne peut pas ignorer, dans le cadre de la mondialisation de tous les échanges et de notre action qui doit donc être maintenant planétaire, un tel pays qui a vocation à être un jour la première puissance mondiale.

Le séisme survenu au Sichuan, le 12 mai dernier, qui a fait plus de 80 000 victimes et 15 millions de sans-abri, a totalement éclipsé les autres sujets, en particulier la situation au Tibet et, plus généralement, la question des droits de l'homme dans ce pays.

Ces deux crises - le Tibet et le séisme - illustrent bien la capacité d'adaptation de la Chine. Recourant à la répression policière au Tibet, qu'elle considère comme une question de politique intérieure relevant de sa souveraineté nationale, la Chine a fait preuve d'une transparence qu'on ne lui connaissait pas dans la gestion des conséquences du séisme. Après le Tibet, il était indispensable pour Pékin de donner des gages. De ce point de vue, son opération de communication a parfaitement réussi.

Cela démontre aussi, s'il en était besoin, que les autorités chinoises savent très bien ce que la communauté internationale attend d'elles, notamment en matière de droits de l'homme. N'oublions pas que le pragmatisme, bien plus que l'idéologie, est le principe conducteur du régime.

Dans le cadre d'un dialogue avec la Chine, qui est impératif, saluons la reprise du dialogue entre les autorités chinoises et les représentants du Dalaï Lama, qui constitue sans doute la seule voie raisonnable pour parvenir à une solution durable au Tibet.

Toutefois, et sur un plan plus général, il me semble que le Conseil de l'Europe doit éviter un écueil, celui de donner du crédit à l'idée, qui gagne indéniablement du terrain aujourd'hui, selon laquelle les droits de l'homme ne seraient qu'un produit de la culture occidentale et, par conséquent, n'auraient qu'une valeur relative. Au contraire, nous devons veiller à défendre le principe de l'universalité des droits de l'homme. En cela, j'appuie totalement M. Mignon qui insiste bien sur ce point dans son rapport.

Il existe une conception chinoise des droits de l'homme, inspirée de la tradition confucéenne : le groupe compte bien plus que l'individu. La conception chinoise des droits se concentre sur les obligations du citoyen - par exemple, assurer la prospérité et la puissance de l'État - et non sur l'obligation du gouvernement d'assurer le respect des libertés.

Les autorités chinoises considèrent que la notion de droits de l'homme doit inclure des normes de qualité de vie, des mesures de santé ou de prospérité économique. Elles estiment donc que l'augmentation du niveau de vie de la population, indéniable, quoique de plus en plus inégalitaire, constitue le meilleur indicateur de l'amélioration de la situation des droits de l'homme dans le pays.

Nous devons donc être vigilants face à cette conception des droits de l'homme.

Cela étant, la Chine est un peu la version vingt-et-unième siècle du Far-West, avec la technologie et la vitesse en prime. On a bien réussi à développer les droits de l'homme au Far-West. Alors, espérons que les droits de l'homme progresseront aussi vite en Chine que l'appétit à se développer et à acquérir des biens matériels ! »

Convaincu de la nécessité d'instaurer un dialogue avec la Chine, M. François Rochebloine (Loire - NC) n'en a pas moins condamné les méthodes autoritaires mises au service de l'efficacité politique par le pouvoir en place :

« La conjonction d'une fête - les Jeux Olympiques -, d'un conflit - le Tibet - et d'un drame - le séisme - conduit à donner une tonalité forte à un débat politique que l'on pourrait qualifier de naturel, tant il est normal qu'une assemblée internationale comme la nôtre s'intéresse aux événements qui affectent la Chine, puissance mondiale.

C'est une conviction analogue qui animait le général de Gaulle lorsqu'il décida de nouer des relations diplomatiques avec la République populaire de Chine. La France avait tout intérêt à créer ainsi avec ce grand pays, appelé à compter dans le monde, les conditions d'un dialogue et, éventuellement, d'une coopération.

La pratique a donné raison au général de Gaulle. En même temps, les années passant, nous constatons combien la Chine demeure pour nos esprits occidentaux un mystère. Pour reprendre le titre du célèbre ouvrage d'Alain Peyrefitte, la Chine s'est éveillée, et à coup sûr, les interrogations sont nombreuses sur les intentions politiques et le devenir de cette immense collectivité humaine.

Il est incontestable que des comportements non conformes à notre conception commune des droits de l'homme peuvent être relevés à de trop nombreuses occasions dans l'actualité chinoise telle qu'elle nous parvient en Occident. La manière dont sont conduites les procédures pénales, les condamnations à mort en série, les exécutions publiques, tout cela est choquant. La négation ou la dévaluation apparente, dans les déclarations officielles, de la réalité du peuple tibétain et de sa civilisation, et les restrictions des libertés qui sont les conséquences de cette attitude, créent un sentiment inacceptable de malaise, même si la Chine n'a pas le monopole de la stratégie politique du déni d'exister.

Le choix délibéré de cette attitude n'est pas seulement la traduction d'un problème culturel, que l'on pourrait tenter de surmonter en se référant - hommage classique dans cette Assemblée - au pluralisme culturel, voire religieux et à ses vertus. Il s'agit d'un problème politique, d'une conception du pouvoir et de l'autorité.

Tout, dans les actes ou dans les déclarations publiques des dirigeants chinois, donne à penser qu'ils sont réellement convaincus de la nécessité de recourir à des méthodes autoritaires pour maîtriser les évolutions politiques et sociales d'un ensemble dont on a peine à percevoir les dimensions réelles depuis l'Europe. Entre autres exemples, les choix imposés de politique démographique, d'une part, les atteintes à la liberté d'expression des opposants, d'autre part, sont des mesures symboliques de cette volonté de contrôle. La situation peut encore être aggravée par la diversité des interprétations que les autorités locales du Parti et de l'État donnent des directives centrales, notamment en ce qui concerne la liberté de culte.

C'est ce lien entre méthodes autoritaires et efficacité politique qu'il faut dénoncer et critiquer. Il ne faut cependant pas le faire en commençant par proclamer avant toute discussion la supériorité de notre système de valeurs ; c'est une attitude confortable mais inefficace. Il vaut mieux tenter de montrer aux dirigeants chinois, à la lumière de notre expérience commune, combien la reconnaissance de la liberté politique est un atout collectif pour une société développée ou qui aspire au développement.

Notre expérience de la démocratie passe par l'expérience du long chemin de sa construction. Plutôt que des réunions solennelles, peut-être que des rencontres informelles, placées sous le signe de l'échange d'informations et d'analyses, nous permettraient-elles d'avancer sur le terrain politique qui nous revient en propre, sans remettre en cause les actions humanitaires et les initiatives de la société civile. »

M. André Schneider (Bas-Rhin - UMP) a préféré souligner la difficulté d'instaurer un dialogue avec les autorités chinoises, incapables de s'orienter vers la libéralisation de leurs institutions :

« Je tiens à féliciter notre collègue et ami, Jean-Claude Mignon, pour son excellent rapport sur la situation en Chine.

Le tableau qu'il dresse de la situation politique en Chine à la veille des Jeux Olympiques n'incite pas à un optimisme démesuré. De même, l'audition publique organisée ici en avril dernier, en marge de la session, par la commission des questions politiques, a témoigné de l'absence persistante d'avancées en matière de démocratie en Chine.

Si l'on s'en tient aux propos du rapporteur et que l'on examine la situation de la démocratie et des droits de l'homme ou la question du Tibet, le constat est plutôt accablant : délits d'opinion, détentions administratives, censure d'Internet, exécutions massives, recours encore massif à la peine de mort, détentions arbitraires, arrestations des militants des droits de l'homme, répression brutale au Tibet... La liste est malheureusement longue.

L'organisation des Jeux Olympiques à Pékin ne semble pas inciter le Gouvernement chinois à la mansuétude ou simplement à la libéralisation du régime.

Comme le rappelle le rapporteur, le régime communiste chinois bute sur les valeurs même qui sont au fondement des démocraties modernes. Le Parti unique étend son contrôle à tous les aspects de la vie quotidienne de la population chinoise. Les valeurs sur lesquelles se fonde le régime chinois sont bien différentes de celles que défend le Conseil de l'Europe.

Quant au dialogue avec la Chine, il est d'autant plus difficile que celle-ci conteste l'universalité des droits de l'homme et qu'elle tend à considérer toute critique comme une ingérence dans ses affaires intérieures. Dès lors, tout dialogue avec la Chine ne peut être, de la part de notre Assemblée, que marqué par la plus grande vigilance et la plus grande fermeté quant au respect impératif des droits de l'homme. La Chine ne peut se contenter de s'enorgueillir de ses progrès sur le plan économique ; elle doit témoigner de sa volonté de progresser sur la voie de la démocratisation, comme elle s'y était engagée auprès du Comité international olympique.

Le rapporteur avait d'ailleurs proposé, lors de la dernière session, que le Conseil de l'Europe invite le Dalaï Lama à s'exprimer dans cette enceinte. Cela, qui n'a pas été possible pour cette fois-ci, pourrait se faire lors de la session d'octobre prochain. Voilà qui déplaira sans doute aux autorités chinoises, mais l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe semble être le lieu approprié pour offrir une tribune au Dalaï Lama, alors même que les événements du Tibet ne seront plus sous les feux de l'actualité.

Le projet de résolution soumis à l'Assemblée invite tous les États membres à une approche cohérente et constante à l'égard de la Chine. Notre Assemblée doit faire de même et rester ferme sur la défense des principes qui sont à la base même de notre organisation : la défense et la promotion des droits de l'homme, la primauté de l'État de droit sur l'arbitraire, la démocratie pluraliste.

Pour la Chine, le chemin semble encore long, mais, comme le dit fort justement un proverbe chinois, « un voyage de mille pas commence par un pas ». Nous attendons que, à défaut d'un grand bond en avant, ce pas soit franchi ! »

Le débat au sein de l'hémicycle a souligné l'importance, aux yeux des parlementaires, de la question du Tibet et du problème d'un éventuel boycott des Jeux Olympiques. M. Jean-Claude Mignon a néanmoins souhaité, dans sa réponse à l'Assemblée, que le débat ne s'écarte pas de son propos initial :

« Je suis un rapporteur heureux, car tous les propos que j'ai entendus honorent notre Assemblée. J'ai souhaité intégrer, en 1993, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, parce que c'est la maison où sont évoqués les droits de l'homme. Nous voici en plein dans le sujet.

Je partage pleinement les points de vue exprimés par les représentants des cinq groupes politiques. Lord Russell-Johnston, notre ancien président, toujours très perspicace, a eu raison de relever que, contrairement à ce qui est écrit à l'article 15.2 du projet de résolution, tous les États membres n'ont pas ratifié la Déclaration universelle des Droits de l'Homme. Pardon de cette erreur.

Je suis heureux aussi parce qu'il s'agit d'un travail collectif. Mon nom a été cité, mais je ne suis que le modeste rapporteur d'un document qui a été préparé avec des parlementaires et grâce au concours de personnes hautement qualifiées qui travaillent dans cette maison ; et nous constatons de nouveau la grande qualité de ce qui a été réalisé ici.

On a évoqué les Jeux Olympiques. Ce n'est pas le sujet, mais, à mon avis, le boycottage serait une erreur. Je souhaite que le Président de la République de mon pays soit présent à la cérémonie d'ouverture.

On a beaucoup parlé du Tibet, mais ce n'est pas un rapport sur le Tibet ; c'est un rapport sur la Chine. Le Tibet n'est pas toute la Chine et la Chine n'est pas que le Tibet.

Selon Mme Goryacheva, nous débattrions sans les avis de nos amis tibétains et de nos amis chinois. Je le dis très aimablement ; c'est le contraire. A l'initiative de M. Lindblad, le président de la commission des questions politiques, nous avons organisé, lors de la précédente session, une audition à laquelle tout le monde était invité. Nous avons entendu le représentant du Dalaï Lama. Je regrette que les représentants de la République populaire de Chine n'aient pas répondu à l'invitation. Puisqu'ils ne sont pas venus à nous, je suis allé à eux !

Dans mon rapport, j'ai remercié publiquement et chaleureusement l'ambassadeur de Chine pour l'audition qu'il m'a accordée. Par correction, je lui ai adressé un courrier pour l'informer de la décision de l'Assemblée parlementaire et de la commission des questions politiques de rédiger un rapport sur son pays et lui indiquer que je souhaitais me présenter à lui. Il m'a répondu dans les quarante-huit heures. Pas plus tard qu'hier, j'étais encore reçu par le consul représentant la République populaire de Chine à Strasbourg. J'ai donc eu les contacts que vous réclamez.

Je n'ai pas le sentiment que nous donnions dans ce rapport des leçons à qui que ce soit. D'ailleurs, de quel droit donnerais-je des leçons ? Mon pays, la France, est-il en mesure de donner des leçons à qui que ce soit en matière de droits de l'homme ? Nous ne sommes pas parfaits et je doute qu'autour de moi, dans cet hémicycle, les représentants des quarante-six autres États soient en mesure de donner des leçons. Ce n'est pas du tout le rôle qui m'était imparti.

Monsieur Herkel, vous auriez souhaité un rapport plus « musclé ». Je n'ai pas la réputation d'être quelqu'un de mou et je peux aussi parler fort, mais mon expérience de parlementaire, longue - hélas ! de déjà vingt ans, même si cela ne se voit pas, je fais encore très jeune ! - m'a appris le sens des mots « diplomatie », « tolérance », « patience » et « dialogue ». Avec un pays comme la Chine, grand pays respectable, au même titre que chacun des quarante-sept États qui siègent ici, nous devons faire preuve de diplomatie, de tolérance, de patience et de dialogue. C'est tout l'objet du rapport.

Vous dites que mon rapport est trop bref. Nous aurions sans doute pu évoquer d'autres sujets, mais ce n'est qu'un premier rapport ; j'espère qu'il y en aura d'autres et que le dialogue pourra se nouer avec nos amis chinois, dont des représentants sont présents ici. Je les salue.

Au point 16 du projet de résolution, je fais état de la possibilité, à terme, de proposer à la Chine de nous rejoindre avec le statut d'observateur. Quand l'idée m'en est venue, j'ai commencé par faire quelques sondages autour de moi afin d'apprécier comment la proposition pouvait être perçue. Je n'ai encore entendu aucune critique formulée à l'encontre de cette proposition qui, me semble-t-il, honore l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

L'an prochain, nous fêterons le soixantième anniversaire du Conseil de l'Europe. Si l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe ouvrait un véritable dialogue avec la Chine, ce serait le plus beau cadeau qui nous serait offert, à l'instar de ce que nous avons fait, Lord Russell-Johnston, pour le cinquantième anniversaire du Conseil de l'Europe lorsque nous avons coprésidé, tous deux dans cette salle, l'Assemblée des jeunes du Conseil de l'Europe. »

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