B. SURPÊCHE, STOCKS EN DIFFICULTÉ : UN DIAGNOSTIC MONDIAL UNANIME

La période d'expansion de la pêche est aujourd'hui terminée . La réserve de stocks vierges s'épuise. L'intensification de la pêche sur les stocks encore sous-exploités compense à peine la baisse de production des stocks surexploités.

Les ressources halieutiques, alimentation humaine :
vue d'ensemble (source : SOFIA 2006)

La production globale de poisson s'élevait en 2004, selon la FAO à 140,5 millions de tonnes.

Mais cette production comprend plusieurs éléments très différents qui ne seront pas tous pris en compte par votre rapporteur :

- Les pêches de capture représentent 95 millions de tonnes dont 9,2 pour les pêches continentales et 85,8 millions pour les pêches de capture marines , qui seront au coeur des développements qui vont suivre.

- L'aquaculture représente 45,5 millions de tonnes, dont 27,2 en eau douce et 18,3 en mer.

Ces ressources sont utilisées à hauteur de 105,6 millions de tonnes pour la consommation humaine et de 34,8 millions de tonnes pour d'autres usages notamment l'alimentation animale (aquaculture ou non).

Ainsi, en 2004, l'approvisionnement en poisson de consommation par habitant dans le monde s'établissait à 16,6 kg , soit le plus haut niveau depuis l'existence de ces statistiques (1974). La consommation de poisson n'était que de 9 kg en 1961 . Mais la consommation de poisson est très inégale selon la richesse. Plus on est riche, plus on consomme de poisson (29,7 kg/hab dans les pays industrialisés) mais moins on en dépend pour son alimentation (7,8 % de l'apport en protéines animales). Sur 104 millions de tonnes destinées à la consommation humaine, seulement 7 millions ont été consommées en Afrique (8,2 kg / hab).

L'alimentation humaine en produits aquatiques est désormais assurée à 43 % par l'aquaculture qui apparaît à beaucoup comme la nouvelle frontière des ressources halieutiques, sujet auquel votre rapporteur consacrera un développement particulier.

Globalement, le poisson a assuré à plus de 2,6 milliards de personnes au moins 20 % de leur apport en protéines animales. En moyenne, cet apport s'établit à environ 15 %.

La Chine est de très loin, selon ses statistiques officielles, le plus gros producteur halieutique du monde. A elle seule, elle représente 47,5 millions de tonnes .

Quatre grandes zones de pêche produisent 68 % des captures mondiales : le Pacifique Nord-Ouest avec 21,6 millions de tonnes (pilchard, anchois japonais, lieu), 25 % du total, le Pacifique Sud-Est avec 15,4 Mt (anchois du Pérou, chinchard du Chili), le Pacifique centre Ouest avec 11 Mt et l'Atlantique du Nord-Est avec 9,9 Mt.

1. La détérioration continue des stocks halieutiques

Contrairement à certaines affirmations, la crise des pêcheries et la situation particulièrement dégradée des stocks sont bien connues en termes biologiques et font l'objet d'un large consensus au niveau mondial .

La crise est réelle, elle n'est le fruit ni d'une lubie ni d'une hallucination de scientifiques ou d'écologistes. La morue ne s'est pas concentrée sous la banquise arctique, les thons rouges ne se cachent pas dans une fosse en Méditerranée. Dans bien des cas, le poisson n'est pas parti plus loin, il n'est tout simplement plus, ni là où on le pêchait habituellement, ni ailleurs.

Bien sûr, il est toujours possible de nier contre l'avis de tous les scientifiques à travers le monde car « ils ne savent pas pêcher », « ils font leur sondage là où il n'y a pas de poissons »...mais la crise économique du secteur et les volumes débarqués prouvent le contraire. Si le poisson était toujours là dans les mêmes quantités, on ne constaterait ni stagnation voire diminution des débarquements, ni effondrements de stocks, ni descente dans la chaîne alimentaire...

a) La stagnation, voire la diminution, des prises au niveau mondial

Depuis 1950, les débarquements des pêches de capture marines ont crû de manière spectaculaire passant de 15 à 85,4 millions de tonnes en 2004 .

Mais depuis la fin des années 1980, les volumes n'augmentent plus malgré l'augmentation du nombre de pêcheurs et l'augmentation de l'effort de pêche .

Il faut ajouter que la FAO a indiqué publiquement que, compte tenu de la part prise par les pêcheries chinoises et compte tenu des limites du système statistique de ce pays, il était souhaitable de la considérer séparément. Le rapport SOFIA 16 ( * ) 2006 note : « Cependant, divers éléments donnent encore à penser que les statistiques de production halieutique et aquacole de la Chine seraient trop élevées ». D'ailleurs hors Chine, mais aquaculture incluse, la production mondiale stagne à environ 90 millions de tonnes depuis la fin des années 1980. Toute la croissance depuis cette date est due à la Chine. Il est même probable que l'on assiste déjà à une baisse du volume des prises mondiales depuis la fin des années 1980.

Un second élément renforce cette indication. Il semblerait que les rejets de poissons de basse valeur, précédemment jugés impropres à la consommation, seraient en diminution en raison de la demande en farine ou tout simplement de leur commercialisation pour l'alimentation humaine. Alors qu'auparavant ils n'étaient pas comptabilisés car laissés en mer, ils seraient désormais débarqués et contribueraient à l'impression de stabilité des prises. Cette évolution a pu être estimée à 10 millions de tonnes entre 1994 et 2004 (Kelleher, 2005 et Tacon, 2006).

* 16 Situation mondiale des pêches et de l'aquaculture.

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