2. La nécessité, à plus long terme, de décloisonner les différentes voies de formation par alternance

- La concentration des aides sur les contrats d'apprentissage et de professionnalisation conduit, tout d'abord, à rappeler l'importance de l'alternance sous statut scolaire . Le rapport pour avis 46 ( * ) de M. Jean-Claude Carle, Mmes Françoise Férat et Brigitte Gonthier-Maurin, présenté au nom de la commission des affaires culturelles, nuance les conclusions trop univoques qui pourraient être tirées de l'analyse de l'employabilité des jeunes dans le rapport précité de M. Éric Besson. Tout d'abord, les diplômés de l'enseignement professionnel sous statut scolaire s'insèrent incontestablement moins bien à court terme que les apprentis, mais un rattrapage partiel du différentiel d'insertion s'opère dans les années suivant l'entrée sur le marché du travail . En second lieu, les taux de réussite aux examens restent encore très inférieurs pour les élèves de l'apprentissage : l'écart peut atteindre près de 24 % pour les brevets de technicien ou les brevets des métiers d'art. Pour expliquer cette situation, le rapport indique que la rupture avec l'environnement scolaire « qui fait tout l'intérêt de l'apprentissage, rend d'autant plus difficile l'obtention finale du diplôme en éloignant l'apprenti de l'habitus scolaire qui était jusque-là le sien. » (...) « Au surplus, l'apprentissage offre un socle de connaissances générales et professionnelles relativement plus restreint que l'enseignement sous statut scolaire : en conséquence, les apprentis sont souvent moins armés que les lycéens professionnels pour évoluer tout au long de leur carrière ».

- La mission d'information note que ces considérations renforcent la pertinence de sa recommandation tendant à faire de la voie professionnelle une filière d'excellence, notamment en créant, dans le prolongement des lycées des métiers, des grandes écoles renforçant le prestige et l'attractivité de cette filière. Ainsi, il serait très positif, comme l'a indiqué M. Laurent Wauquiez à la mission, que l'école Polytechnique, par exemple, s'engage sur la voie de l'apprentissage, non pas tant pour favoriser l'insertion professionnelle des futurs polytechniciens que pour améliorer l'image de cette voie de formation.

La mission souligne ainsi, dans l'intérêt des jeunes, la nécessité de mutualiser les ressources et les moyens pédagogiques de toutes les formes d'alternance et préconise la généralisation des expériences réussies dans ce domaine.

Votre mission rejoint les conclusions de la mission d'information du Sénat précitée, sur la formation professionnelle qui préconise de créer des points de contact entre le monde scolaire et universitaire et le monde du travail, ainsi que pour construire des passerelles entre ces modes de formation en citant les efforts menés sur le terrain. De manière particulièrement illustrative, M. Jean-Paul Denanot, président du conseil régional du Limousin et président de la commission formation professionnelle de l'Association des Régions de France (ARF), avait apporté le témoignage suivant: « Le Limousin est assez atypique à cet égard, la plupart de ses centres de formation d'apprentis étant situés auprès des lycées professionnels. Cette situation permet une certaine cohérence entre l'apprentissage et les lycées professionnels. Je souhaiterais, malgré la résistance institutionnelle et professionnelle, que les lycées deviennent davantage des lycées des métiers, c'est-à-dire soient dotés des trois composantes : formation initiale traditionnelle, apprentissage et formation professionnelle tout au long de la vie . Ceci permettrait de réaliser des économies d'échelle de moyens. Les lycées professionnels pourraient en outre disposer d'une meilleure vision de la situation en matière de formation. La résistance à un tel type de projet reste cependant forte, notamment de la part du personnel enseignant. En tant qu'« ancien » de l'éducation nationale, je tente de convaincre de l'intérêt de tous du groupement des trois publics (élèves de la formation initiale, stagiaires de la formation professionnelle et apprentis) surtout en milieu rural. (...) Nous devons encore réfléchir aux mesures de stabilisation des personnels et d'accompagnement, notamment en termes de diversité des rythmes. Ces mesures n'éviteront peut-être pas la concurrence, mais permettront sans doute de l'atténuer. (...) Je crois que les autres régions commencent désormais à prendre conscience que la mise en place d'un CFA auprès d'un lycée professionnel est possible et permet une certaine simplification. »

- Le discours du 24 avril 2009 sur l'emploi des jeunes n'a sans doute pas été prononcé par hasard au Campus de Veolia Environnement à Jouy le Moutier (Val d'Oise). En effet, créé en 1994, le CFA de cet ensemble accueille environ 900 apprentis et les prépare à quinze diplômes de tous niveaux, du CAP au master. L'élément mobilisateur, pour la dynamique de ces formations, est que le stagiaire entreprenant une formation en alternance bénéficie in fine de l'engagement du groupe à l'embaucher en contrat à durée indéterminée et à temps complet en cas de succès. En outre, le campus contient un centre de formation professionnelle continue pour les salariés de Veolia : 15 000 stagiaires par an y sont accueillis. Sensible à la nécessité du « brassage social » qu'assurait autrefois, pour les garçons, le service militaire, et pour cette raison favorable par ailleurs au développement du service civique, la mission souligne que sur ce campus, quel que soit le niveau d'études ou le niveau hiérarchique dans l'entreprise, l'ensemble des utilisateurs partagent le même restaurant, les mêmes lieux de détente. Ils sont hébergés dans les mêmes conditions, sur place.

* 46 Rapport du Sénat n° 100 (2008-2009) sur le projet de loi de finances pour 2009.

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