CONCLUSION

La crise laitière est une crise européenne. Elle est vécue, de manière plus ou moins aigue par les différents états membres et s'avère être une crise de la demande et non une crise de l'offre c'est-à-dire de la surproduction puisque de nombreux pays, dont la France, n'ont même pas atteint leur propre quota...

La demande s'est effondrée, conséquence de la baisse du pouvoir d'achat liée à la crise économique et financière mondiale.

Parallèlement, la dernière réforme de l'OCM laitière de 2008 a, il est vrai, laissé le marché fixer les prix , avec un mécanisme de régulation moins lisible aujourd'hui politiquement, bien que réellement présent. Cette volatilité des prix va malheureusement devenir une réalité incontournable avec la disparition des quotas en 2015.

Il conviendra de réinventer d'autres mécanismes de régulation afin d'assurer une garantie de revenus aux agriculteurs engagés dans une production particulièrement contraignante. Cette garantie de revenus est explicitement annoncée dans le traité de Rome de 1957, à l'article 33  « assurer un niveau de vie équitable aux producteurs ». Les mécanismes de régulation que sont l'intervention et les restitutions ne doivent plus être appréhendés comme des mécanismes de gestion des excédents mais plutôt comme des mécanismes de lissage des prix. Ils doivent donc être correctement dimensionnés et les montants actuels nettement réévalués.

Il est illusoire d'imaginer qu'une majorité d'États membres reviendra sur l'abandon de la politique des quotas. Notre principale alliée, l'Allemagne, au travers d'une réunion des länder le 29 mai 2009 n'est pas revenue sur cette orientation. S'il n'y a plus de quotas, fixés par l'autorité publique, il reste malgré tout une autre forme de régulation, celle-ci privée, c'est la contractualisation entre une entreprise de transformation et les agriculteurs réunis en O.P. (Organisation de Producteurs). Cette contractualisation, tout en respectant les règles communautaires en matière de concurrence, devra être validée par l'État et assurer cette garantie de revenus aux producteurs. Ceux-ci seront liés avec l'entreprise par des volumes sur une durée. Mécanisme moins rigide que celui des quotas, ouvert vers une certaine flexibilité liée aux évolutions de la demande alimentaire mondiale. Un marché essentiellement européen, mais lui-même intégré dans un environnement mondial que l'on ne peut négliger sous peine de pénaliser à terme nos propres éleveurs.

Cette remise en cause des relations entre éleveurs et transformateurs ne peut faire abstraction de 2 autres paramètres :

- la restructuration de certaines entreprises laitières dans certains bassins de production pour orienter leur fabrication vers davantage de valeur ajoutée. La production de beurre et de poudre a moins que jamais d'avenir.

- le partage de la valeur ajoutée tout au long de la filière, problème récurrent mais de plus en plus conflictuel et incontournable.

La Loi de Modernisation de l'Économie du 4 Août 2008 devait répondre à ce dilemme. Il le faudra, quitte à réécrire la loi sans tomber dans une économie administrée d'un autre âge...

Si les circuits courts sont ici où là des réponses locales pertinentes, ils ne peuvent se décliner au niveau national. La grande distribution doit prendre conscience que la morale dans la répartition des marges est un paramètre qu'elle doit impérativement intégrer... et pourquoi pas imaginer être partie prenante dans cette contractualisation. Elle ne pourra de toute manière rester spectatrice et indifférente à cet article 33 du traité de Rome qui s'adresse et aux agriculteurs et aux consommateurs.

La crise est européenne. La réponse doit donc être européenne. C'est ainsi qu'il faut comprendre les conclusions du Conseil européen des 18 et 19 juin 2009 : « le Conseil européen a examiné la situation actuelle du marché des produits laitiers. Il a invité la Commission à présenter d'ici deux mois une analyse approfondie du marché, indiquant notamment les formules possibles pour stabiliser le marché des produits laitiers, tout en respectant les résultats du bilan de santé de la PAC » .

Mais le dossier laitier est aussi un dossier fondamental pour l'aménagement de notre territoire national. Les pouvoirs publics n'ont pas le droit de laisser les seules « forces du marché » le gérer...

L'État doit s'impliquer dans la mise en oeuvre de cette contractualisation et redonner ainsi espoir aux producteurs de lait Français.

Ils en ont besoin.

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