IV. LE PARAQUAT

A. L'AVIS DE L'AFSSA SUR LE RISQUE CONSTITUÉ PAR LE PARAQUAT

L'AFSSA a été saisie, le 10 septembre 2007, d'une demande d'avis sur l'impact potentiel de la présence du paraquat dans les sols et la chaîne alimentaire et des risques qu'il ferait encourir pour la santé en Guadeloupe et en Martinique.

Cet avis a été rendu le 2 juillet 2008.

Cet herbicide organophosphoré faisait partie des substances qui devraient être soumises à réévaluation conformément à la Directive 91/4/4 précitée.

L'évaluation a été effectuée par le Royaume-Uni et réexaminée par les autres agences européennes de sécurité alimentaire. Cet examen croisé a abouti à l'inscription, au 1 er décembre 2003, du paraquat sur la liste des substances autorisées.

C'est cette autorisation qui a été annulée par le tribunal de première instance des communautés européennes, le 11 juillet 2007 66 ( * ) .

Dans son avis, l'AFSSA reprend l'ensemble des études européennes d'analyses du risque potentiel représenté par le paraquat, en caractérisant les risques représentés par cette substance :

1. Les risques pour l'environnement

Ces risques ont été appréciés au regard du devenir de la substance :

Dans les sols :

La dissipation du paraquat est très lente au champ (demie-vie de 7 à 20 ans) ce qui est attribué à une très forte adsorption aux particules de sol et à une très faible biodisponibilité aux micro-organismes susceptibles de le dégrader.

Mais la substance est dégradée par des cultures microbiennes en milieu liquide ; elle produit peu de métabolites de dégradation.

Son transfert vers les nappes d'eau est négligeable.

Dans l'eau :

Le paraquat est stable à l'hydrolyse et à la photolyse et se dissipe dans la colonne d'eau par adsorption vers les sédiments dans lequel il devrait être stable.

Dans l'air :

La substance n'est pas volatile.

En conclusion, le suivi des effets du produit sur l'environnement fait apparaître :

- une rémanence importante dans les sols et vraisemblablement les sédiments, mais peu de risques pour les eaux souterraines ;

- des risques potentiels liés à la toxicité du produit pour les vertébrés, nécessitant de gérer les expositions (zones tampons, timing des applications) ;

Ces évaluations qui portent sur des données non spécifiques aux Antilles, sont considérées par l'AFSSA comme pouvant leur être extrapolées.

2. Les risques pour la santé humaine

Les risques ont été évalués en fonction des propriétés toxicologiques expérimentales (non génotoxique, non cancérogène, non neurotoxique, pas d'accumulation dans l'organisme, toxicité modérée par voie orale mais forte par inhalation).

L'évaluation a abouti à établir les valeurs toxicologiques de référence suivantes :

- le niveau d'exposition acceptable pour les applicateurs (NEAO) est de 0,0004 mg/kg de poids corporel/jour

- la dose journalière admissible (DJA) : 0,004 mg/kg poids corporel/jour.

De plus, les risques pour les applicateurs (avec véhicule tracté ou avec pulvérisateurs à dos) ont conduit le programme de suivi à faire modifier certaines caractéristiques du produit par les industriels (suivi des ventes, épaississement de la formulation, inclusion d'un agent émétique, restriction des usages aux professionnels avec formation des utilisateurs).

Le rapport publié en septembre 2007 par le comité de coordination et de toxicovigilance 67 ( * ) fait état de 116 incidents pour la période 2004-2006 dont :

- 12 projections oculaires

- 16 contaminations cutanées

- 21 expositions

- 8 ingestions accidentelles

- 45 ingestions volontaires

- 9 affections rapportées à l'exposition répétée

Pour ces cas, on relève 21 décès dont 20 consécutifs à des ingestions volontaires.

Par ailleurs, ce rapport observe sur 3 ans une diminution des cas observés mais également une stabilisation dans les DOM, probablement imputable à une plus grande accessibilité des préparations aux non professionnels (et peut-être à une plus grande médiatisation des cas mortels d'ingestion volontaire).

En conclusion, le comité recommandait d'assurer une surveillance exhaustive des cas d'intoxication (après le retrait du paraquat).

* 66 L'annulation repose sur un motif de forme et sur deux motifs de fond (santé des applicateurs et impact sur la faune sauvage).

* 67 Ce rapport porte sur l'examen de la période 2004-2006 (utilisateurs professionnels et grands publics, métropole et DOM-TOM)

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page